𝑀𝐸𝑁𝑇𝐴𝐿𝑂 ➶

C'était ce jour-là, dans cette arcade à l'abandon, qu'elle l'avait rencontré, lui.

Lui qui pensait toujours à elle, même à des milliers de kilomètres au-dessus de sa tête.

À elle et à ses longs cheveux pistache tombant par mèches sur ses épaules. À elle et à ses yeux encadrés d'encre de Chine. À elle, à ses mains en sang et à son air perdu.

Wezen avait rencontré Mirage ce soir-là dans l'arcade. Alors qu'il tentait de faire un somme sur un des fauteuils de la salle de jeu noyée de silence, elle était entrée en tempête, ce qui l'avait fait se relever et se mettre sur ses gardes. 


𝑘𝑎𝑔𝑒
une ombre

Au tout début, ça n'avait été pour lui qu'une silhouette sombre avec une capuche noire et un porte-feuille entre les bras. Puis l'ombre s'était adossée contre le mur, comme si les briques grises se trouvaient être le seul appui l'empêchant de s'écrouler au sol. Elle avait ensuite délivré sa tignasse vert pâle, levé sa main au niveau de ses yeux et était restée pensive durant de longues secondes.

Le garçon, intrigué, s'était alors approché. De l'angle d'où il la voyait, la jeune fille semblait être une fée des bois perdue au milieu d'un enfer de béton armé. Il avait remarqué l'hémoglobine qui décorait ses doigts comme de la peinture recouvrirait une œuvre d'art.

 Eh... ça va pas ? Avait-il demandé.

Et elle avait levé la tête vers lui. Leurs yeux avaient échangé en silence, leurs âmes partagées entre la crainte et la fascination.

"Mirage... Qu'est-ce que tu deviens, en bas ?"

Le garçon passa une main mécanique dans ses cheveux, bleus aux reflets opalins, et soupira. Il regrettait un peu d'être parti, mais après tout, il le lui avait promis.

"— Promets moi que le moment venu, tu partiras avec tes parents.

 Mmh...

Ce n'est pas bien de couper les liens quand tu peux les renforcer... Moi je donnerais tout pour que mes vieux soient encore là, tu sais ?

Wezen l'avait regardé avec compassion, ce dont la jeune fille n'avait pas tardé à se rendre compte. Elle lui avait alors frappé le bras de son poing. Le bruit de ferraille qui avait résulté du coup s'était aligné à la fréquence de leurs battements de cœur.

 Promets le au lieu de me chier de la pitié à la gueule.

— D'accord, d'accord, avait-il ri. Je te le promets. Mais tu ne vas pas regretter de m'avoir dit de partir ?"

Ce à quoi elle avait répondu par un sourire. Un sourire complexe, un curieux mélange entre de la tristesse, de la fatalité et de la malice. Ce mélange la représentait bien, en y repensant.

分離
𝑏𝑢𝑛𝑟𝑖
séparation

Qu'est-ce qu'elle lui manquait, cette fille. Tout comme la surface de la Terre lui manquait. Il n'avait pas le mal du pays, non, il avait le mal du monde. En sortant de la salle de bain, une serviette humide sur la tête, Wezen saisit son téléphone et appuya sur un contact.

Plusieurs secondes d'attente, plusieurs sonneries hululant dans l'atmosphère. Il n'y avait pas de hiboux sur la Lune, comme il n'y avait pas de forêts, ni de vent, ni de vie sauvage...

— Salut tête de moche.

— Salut p'tite sœur.

— Eh ! Je suis encore plus âgée que toi, à ce que je sache.

 Même les petites filles projettent de grandes ombres, tu le sais ça ? Alors quoi de neuf  ?

— Tss... pas grand chose. Ah si ! J'ai un tournoi dans une heure et demie.

— Tu continues les tournois ?

— Ouais, simple précaution. Je sais pas quand est-ce que papa me coupera les vivres.

— Alors tu ne comptes vraiment pas venir ici...

Question stupide. Vega soupira au bout de la ligne.

— On en a déjà parlé des dizaines de fois, Wezen. Je suis pas prête de venir péter chez les richousses, ne compte pas sur moi.

反乱
𝘩𝑎𝑛𝑟𝑎𝑛
rébellion

Il la comprenait tellement, et à vrai dire il l'enviait. Si seulement... si seulement lui aussi avait eu le cran de se dresser contre leur père... 

La porte de la chambre s'ouvrant à la volée interrompit la conversation. Wezen leva la tête vers la personne qui venait de s'introduire impoliment dans son espace personnel.

— Tu parles avec Vega ? Passe-la moi.

Le jeune homme n'eut pas le temps de riposter qu'on lui avait déjà subtilisé l'appareil.

"Oh non. Ça va mal finir tout ça..."

Les étoiles brillaient, des milliers de petites lucioles remplaçant les lampadaires électriques. Et dans le ciel noir de cette nuit interminable, on ne pouvait vraiment voir qu'en fermant les paupières.

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