IX. Les bons choix
J'ouvre les yeux brutalement et grommelle.
— Sale con, je peste.
A mon réveil, je sentais que cette journée était ma dernière. Je savais à présent tout. Spencer et Hugo m'avait coincé. Et pourtant, Hugo jouait un double jeu, puisqu'il avait assassiné Wesley, donc, il était bien amoureux de Spencer pour pouvoir l'aider autant. Il était pile sept heures vingt quand j'ai tourné la tête au moment même où le réveil s'était mis à sonner. Je l'avais arrêté puis je m'étais assise sur mon lit, motivée. Je devais maintenant faire avouer Hugo. Mais pas que... Un sourire se dessine sur mes lèvres. C'était ma journée et j'allais faire tout ce qu'il faut pour réaliser les choses bien.
Je sors de mon lit et m'habille rapidement : jean et débardeur. Je me coiffe en faisant une demi-queue de cheval puis je descends les escaliers avec mon portable et mon sac prêt.
— Bonjour ! je dis joyeusement.
Ma mère se tourne en fronçant les sourcils. Mon père pose lentement sa tasse sur la table. Il était surpris. Je viens les embrasser tous les deux sur la joue. J'attrape une pomme et la croque. Je me dirige vers un placard et attrape la trousse de secours.
— Bonne journée !
Je leur envoie des baisers avec mes mains puis sort de la maison. Je fais le tour pour me rendre dans le jardin et coupe une rose rouge. J'espère que maman ne m'en voudra pas. Je me rends ensuite dans la rue, marchant tranquillement. J'avais un peu d'avance. Je souris en sentant la rose puis aperçoit ma première mission. Je cours très vite et pose ma main sur son épaule avant qu'il ne monte sur son skate, il se retourne surpris.
— Hey, salut ! Je voulais te dire de faire attention, tu devras mettre des genouillères et des coudières.
Je sors de mon sac la trousse de secours et lui tend.
— On ne s'amuse pas sans protection.
Je fais les gros yeux, me rendant compte de ma phrase. Elle était à double sens. Je lui coince alors la trousse entre son aisselle puis je lui frotte les cheveux.
— De rien voisin, t'es mignon.
J'effleure sa joue avec la rose puis je m'éloigne en sautillant joyeusement. J'arrive à l'arrêt de bus et je l'attends en chantonnant. Il arrive et se gare sur le côté. Je monte souriante.
— Bonjour monsieur, un ticket s'il vous plaît.
Je paie puis je m'éloigne en disant.
— Merci et bonne chance pour cette journée.
J'aperçois Spencer au fond du bus et je la salue avec un faux grand sourire. Je me cale ensuite contre un siège. Le jeune garçon allait se lever pour me céder sa place mais je me tourne et pose ma main sur son bras.
— Oh non, ne t'inquiète pas, ça ne me dérange pas.
Arrivée au lycée, je descends du bus après tous les secondes. Je vois Hugo s'approcher de moi mais je lui lance un vieux « Salut » avant de regarder derrière moi. Jesse et Juliette arrivaient d'un autre bus. Je les rejoins tout sourire et me mets entre elle pour attraper chacun de leur bras.
— Samedi, on se fait une journée comme on faisait quand on était plus jeune... Vous ne pouvez pas refuser, je sais que vous en mourrez d'envie !
Hugo restait en retrait, perplexe. Elles sourient lentement toutes les deux, elles avaient l'air un peu perdues mais heureuses.
— D'accord...Mais euh... C'est pas pour casser l'ambiance mais vous êtes au courant ? Tout le monde en parle, dit Jesse.
Je fais une moue compatissante.
— Oui c'est horrible, je déclare.
— Mes parents ne voulaient même pas que je revienne au lycée, enrichit Juliette.
On entre dans le lycée et je me dirige instantanément vers le casier de Wesley pour y déposer ma rose. Mes amies restaient sans voix. Je me tourne vers elles en souriant.
— Il ne méritait pas ça, j'annonce en fixant Hugo longuement.
Intriguées, Juliette et Jesse se tournent vers lui. Hugo avait haussé les épaules aussi interdit qu'elles. Je me dirige ensuite directement dans la salle de cours. Les autres me rejoignent. Je pose une main sur l'épaule de Juliette.
— En fait, je ne savais pas que tu étais sorti avec lui... Ça te fait pas bizarre ?
Elle hausse lentement les épaules.
— Si un peu, mais on s'est vu une ou deux fois... Il m'a dit que je n'étais finalement pas son genre et que j'étais méchante. Ça m'a foutu les boules.
— J'imagine...
Jesse me tapote l'épaule avec son doigt. Je me tourne vers elle, tout sourire.
— Oui, on ira ensemble à la fête de la musique.
— Oh...Bien ! lâche-t-elle avec un grand sourire.
Je ne vous l'avais jamais dis, mais on attendait quand même plus d'une heure dans la salle de classe. On commençait à neuf heures, comparé aux autres élèves. Madame Lip arrivait un peu après la sonnerie, parce qu'elle avait sans doute un autre cours avant. Après quelques instants, elle était arrivée et avait commencé son cours. Le train était passé et le sol avait tremblé. Quelques secondes avant que la cloche sonne, je m'étais levée et j'étais allée juste devant la porte, la fermant avec le verrou. La prof et les autres élèves m'avaient regardé bizarrement avant que la sonnerie retentisse. Certains s'étaient levés, j'avais haussé la voix.
— Hors de question bande d'attardés. J'en ai marre qu'on se lève et qu'on manque de respect à notre prof. Maintenant, tout le monde s'assoit et on écoute le cours ! Vous avez toute la vie devant vous bande de nazes.
Silence dans la salle. J'avais levé le menton et j'étais retournée m'asseoir à ma place sous les regards choqués de Juliette, Jesse et Hugo.
— C'est moi où j'ai l'impression que la journée va être suuuuuuper longue ? lâche Hugo.
Je me tourne vers lui et lui jette un regard noir.
— Tu devrais peut-être écouter le cours, tu auras l'air plus intelligent.
Et comme je le pensais, le cours avait été passionnant. Lorenz n'était pas le seul à avoir fait des travaux sur l'effet papillon, il y avait aussi Laplace, Poincaré avec le problème des trois corps, Von Neumann contre Wiener... L'effet papillon mentionnait aussi la théorie du chaos et tant de choses intéressantes. Blaise Pascal avait dit « Le nez de Cléopâtre, s'il eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé. » J'avais noté beaucoup de choses, le sourire aux lèvres. Promis, désormais j'écouterai les cours de Madame Lip. La cloche avait sonné 10h et la prof m'avait arrêté avant que je sorte de la salle.
— Merci Nesee.
Je lui avais souris puis je m'étais rendue à mes autres cours de la matinée. Installée à la cafétéria, j'avais prétexté encore une envie pressante. Je n'étais pas tout de suite partie. J'étais restée cachée derrière la porte, à espionner Hugo par le hublot. Il avait sorti son portable et avait envoyé un message...Directement à Spencer. C'est pour ça qu'elle avait son portable dans les mains les autres fois... J'avais ensuite vite couru aux toilettes et je m'étais cachée dans la même cabine, enfin...Cachée était un grand mot. Puis, la même histoire, Spencer meurt pour de faux. J'attends que Hugo soit parti pour enfin ouvrir la porte. Spencer était allongée au sol. J'avais envie de dire. Je pose une main contre ma poitrine.
— Oh. Mon. Dieu... Elle est morte ! je souffle.
Je saute par-dessus le corps pour rejoindre la porte.
— Je dois prévenir quelqu'un, quel malheur !
J'ouvre la porte, m'avance un peu et tombe nez à nez avec Hugo. Mes larmes de comédiennes coulaient déjà. Je l'avais tout de suite coupé.
— C'est affreux, ses vêtements sont tâchés de sang !
Il fait style de ne pas comprendre et entre dans les toilettes. Je le suis, le pousse dans les toilettes et referme la porte derrière moi.
— Merde, Nesee, tu fous quoi ?!
Mon regard est attiré par un détail dans la poubelle. Pourquoi je ne l'avais pas vu avant ? Parce que j'étais toujours terrifiée et attristée. Il y avait une poche de sang vide. Je croise les bras contre ma poitrine et plante mon regard sur Spencer au sol.
— Lève-toi sale garce, je sais que c'est un plan foireux. Lève-toi où je te jure que ce ne sera pas devant des faux policiers que tu devras t'expliquer mais devant le directeur.
Il n'y avait eu rien pendant un moment. Hugo semblait choqué mais s'était tu. J'entends quelqu'un d'autre soupirer : Spencer. Elle se lève et me fait face. Je secoue la tête avec un petit rire. Elle avait une grosse trace rouge du coup jusqu'à son bassin.
— Regarde-toi ma pauvre.
Spencer n'avait encore rien dis. Elle s'était tournée vers Hugo qui secouait la tête.
— Comment t'as su ? demande-t-elle en se tournant vers moi, elle était tout de même en colère.
Je hausse les épaules. Elle semblait pétrifiée.
— Je sais beaucoup de choses, sauf une : pourquoi ?
Spencer inspire lentement puis expire. Jamais je n'avais vu autant de rage dans des yeux aussi petits.
— Pourquoi... ? POURQUOI ? Tu sais au moins ce que ça fait d'avoir constamment peur d'aller en cours ? D'avoir cette boule au ventre tous les jours à chaque réveil ? D'avoir la sensation que si tu essaies de vivre ta vie, quelqu'un la piétinera quand même ? C'est à cause de toi Nesee ! Je vis un Enfer, chaque jour depuis le début du lycée. Tu te moques de moi, tu me harcèles. Comment tu pensais que je le vivais ? Comme un cadeau du ciel hein ? Tu n'as aucune idée de ce que je traverse à cause de toi.
Elle marque une pause, essayant de contrôler sa colère. Je la vois serrer les points et fermer les yeux. Je pense même avoir vu une larme couler le long de sa joue.
— Alors... A mon tour, je voulais te faire vivre cette peur que je ressentais.
J'étais peinée et désolée intérieurement. Alors... La seule raison de cette histoire c'était moi ? Avant, je ne m'étais pas rendue compte à quel point j'avais été une garce avec elle. Mais au fil des jours, j'avais décidé de changer, pour elle et de ne plus jamais la harceler... Je restais muette. Je me sentais terriblement mal. Elle en était venue à ce point parce qu'elle n'avait pas eu d'autres choix. C'était extrême et ça montrait à quel point j'ai été horrible avec elle. On se fixait toutes les deux, sans rien ajouter. Hugo sort son portable, je le regarde.
— Bonne idée Hugo, annonce aux faux agents Dece et Tful que le plan est tombé à l'eau.
Il lève brutalement les yeux vers moi.
— Comment tu comptais t'en sortir Spencer hein ? Oh ne dis rien, tu serais allée chez Tantine Edith et tu serais revenu quelques jours après ?
Je ne pouvais pas m'empêcher d'être méchante. Je devais être autant blessée qu'elle et c'était probablement ce que Spencer voulait. Elle se tourne vers Hugo, choquée.
— Et je sais pourquoi tu pleurais en arrivant ici... C'était à cause de Wes, c'est ça ? Tu sortais avec et tu l'as perdu, j'explique calmement, ou alors c'était aussi de fausses larmes ?
Hugo me pointe du doigt.
— C'est une sorcière !
Spencer lui frappe le bras.
— Mais non abruti !
Elle se tourne vers moi.
— Comment tu sais tout ça Nesee ?
Je m'avance vers elle, la regardant dans les yeux.
— Crois le ou non, Spencer mais je revis la même journée encore et encore. Sinon, comment j'aurais fait pour savoir tout ça, hein ?
Spencer se contentait de me regarder. Est-ce qu'elle me croyait ? Aucune idée mais j'avais l'impression de voir une sorte de... Clarté dans ses yeux. Hugo se met à rire.
— Elle est folle !
Il s'avance alors vers la porte mais je le bloque, posant une main contre le mur. Certes, Spencer ne mourrait pas dans les toilettes mais elle ne faisait pas semblant quand on se faisait tuer à la fête de la musique.
— Bouges pas trou du cul.
Je lève mes yeux vers Spencer. Il... Il y avait quelque chose de pas normal dans cette histoire. Je devais lui dire.
— C'est pas tout Spencer... Quelque chose se passe. On est morte plusieurs fois à la fête de la musique. Quelqu'un nous tue et cette personne, c'est Hugo.
Il se recule, le visage dégoûté.
— Pour qui tu me prends ?
Spencer s'avance vers nous.
— Attends... T'es sérieuse Nesee ?
Je pousse Hugo et me rapproche de Spencer. J'avais envie de la gifler mais notre vie était en jeu alors... Je me contrôle.
— Oui, à l'arme blanche mais je n'ai jamais pu voir son visage... Tout simplement parce que c'est Hugo car il a aussi tué Wesley, j'annonce en le fixant à nouveau.
Spencer semblait perdue dans ses pensées. Hugo commençait à s'énerver.
— Qu...Quoi ?
Je pose mon doigt sur son torse.
— T'as très bien entendu abruti.
— T'es tarée, je n'ai jamais touché Wes de ma vie !
— Ooooh arrêtes, ça va j'ai compris ! T'es tombée amoureux de Spencer et tu étais jaloux de Wes. C'est pour ça que tu l'as tué et c'est pour ça que t'as voulu l'aider à se venger, c'est bon, on avait tous compris.
J'ouvre la porte.
— Je vous laisse, je dois aller voir quelqu'un. Oh et Hugo, nous deux ? c'est terminé si t'avais pas compris et j'espère que t'auras une belle vie en prison.
— Je t'ai dit que c'était pas moi !
Je soupire et sors des toilettes, m'éloignant vers les couloirs. Spencer avait sans doute retrouvé ses esprits car je l'entends m'appeler. Je me retourne. Je voyais Hugo la suivre.
— Attends Nesee !
Elle se rapproche de moi. On se détestait toutes les deux et pourtant, on avait l'air d'avoir besoin de l'une et de l'autre. Spencer se pince les lèvres.
— Concernant ton délire de boucle temporelle... C'est fort possible. T'es plus la même qu'hier Nesee, ça ne se voit rien qu'à tes vêtements et ta manière de réagir avec les gens. Alors ouais, t'as l'air d'une dingue mais c'est crédible.
— La crois pas Spencer, c'est une pauvre tarée, elle a dû lire des formules magiques dans un livre d'ésotérisme, déclare Hugo.
On le regarde toutes les deux, surprises.
— C'est dingue, je pensais pas que le mot « ésotérisme » était dans ton vocabulaire, remarque Spencer.
— Ouais et ferme ta gueule, j'ajoute.
Je soupire. Spencer se tourne vers moi.
— Tu proposes quoi alors ? je questionne.
Elle semblait vouloir quelque chose en particulier.
— Résoudre notre propre meurtre. T'as l'air de savoir plus de choses que moi et je pense qu'on pourrait s'entre aider pour ne pas mourir ce soir...Ou que je meurs.
Je soupire à nouveau. Quelle histoire de dingue. Je ris nerveusement.
— On se déteste, toi et moi.
Elle hausse les épaules.
— Tu préfères mourir et te réveiller encore le même jour... Si c'est ça qu'il se passe, si j'ai bien compris ?
Elle avait touché une corde sensible.
— D'accord, d'accord. Hugo et moi, on va faire semblant d'être un couple vraiment parfait. Je n'ai pas envie de mêler Juliette et Jesse à ça... On s'attend à la fin des cours et on ira chez toi – je sais que tes parents ne sont pas là – et on rejoindra Jesse, Juliette et Hugo à la fête de la musique.
Elle hoche lentement la tête. Elle semblait perdue mais d'accord à la fois. Je n'avais toujours pas confiance en Hugo. Et si c'était vraiment lui le tueur mais qu'il jouait encore la comédie ? Si c'était le cas, alors il méritait vraiment de jouer dans un film tiré des histoires de Stephen King. Je le voyais bien dans le rôle de Jack Torrance. J'avais ensuite quitté Spencer et Hugo pour essayer de trouver Cory. Je n'osais pas le déranger pendant sa pause déjeuner tout compte fait. J'allais plutôt l'attendre à la sortie. Et mon plan avait marché. Je le vois sortir avec ses amis, le gars blond de la dernière fois et l'autre qui était resté muet devant la scène honteuse dont j'étais la principale actrice. Cory me regarde. J'avais pu lire de la surprise dans ses yeux, comme d'habitude. Il regarde derrière lui. Non, non, Cory, je te regarde toi. Je m'avance alors, tout sourire. Il s'arrête souriant aussi. Il était trop mignon, vraiment.
— Salut.
— Salut, me répond-t-il.
Je joue machinalement avec mes mains.
— On peut se parler ?
Ses amis lui lancent un regard interrogateur. Cory hausse les épaules avec un petit rire nerveux.
— Euh...Oui ?
Je l'emmène dans un couloir isolé. J'étais nerveuse, mon dieu. Il semblait assez confus. Je parle avant qu'il n'ouvre la bouche.
— Est-ce que tu crois en l'impossible, Cory Ziegler ?
Il me sourit lentement.
— Ça dépend. Qu'est-ce que tu entends par impossible ?
Je souris lentement à mon tour.
— Il m'arrive un truc complètement dingue en ce moment et je voulais te remercier pour tout le soutient que tu m'avais apporté. Je te promets de tout t'expliquer demain mais saches que je te trouve génial et super mignon.
Il était à la fois content et perplexe. Mon cœur battait super vite.
— Euh, d'accord mais... Je... J'ai du mal à tout saisir... Mais... Euh... Et ton copain ?
Je secoue la tête.
— On est plus ensemble. Depuis longtemps.
Je viens l'embrasser timidement sur la joue puis pose une main sur son épaule.
— Pas d'imprudence sur la route surtout. On se voit demain.
Je lui fais un clin d'œil tout en rentrant dans la cafétéria pour rejoindre Juliette et Jesse. Le reste de la journée au lycée avait été très très longue. Plus que d'habitude, je veux dire. C'était peut-être le stresse ou l'appréhension de ce soir. Je ne voulais pas me réveiller à nouveau le 21 Juin. Pas encore. Cette journée serait la bonne. Spencer avait eu raison de me proposer de résoudre ce mystère. A deux, on pourrait trouver une solution vite. Je la connaissais bien, c'était une fille intelligente et je devais bien avouer que son plan était incroyable... Tordu mais incroyable. Se faire passer pour morte, c'était la solution à tout apparemment.
A la fin de la journée au lycée, comme convenu, Spencer et moi on s'était rejointe. J'avais prévenu les filles que notre cher Spencer faisait partie de notre petit groupe ce soir. Elles avaient eu du mal à comprendre le pourquoi du comment mais je ne m'étais pas attardée sur leurs questions. On était allé chez Spencer. On n'avait pas fait grand-chose à vrai dire. On restait distante l'une de l'autre. Je crois surtout qu'on avait peur d'aborder le sujet fatidique. Je lui avais juste expliqué l'histoire de la fameuse ruelle. On avait pris le bus à la même heure environ où j'avais rencontré Cory dans le bar puis quand j'étais partie chercher les filles dans la folle. On était restée silencieuse pendant tout le trajet. Quand nous sommes descendus du bus, Jesse et Juliette nous attendaient. Ce n'était pas normal. D'habitude, j'avais du mal à les retrouver dans toute cette foule.
— Vous attendez depuis longtemps ? je demande.
Jesse hausse lentement les épaules.
— On est arrivée, il y a trentes minutes. On a fait un petit tour et puis, Hugo nous a dit qu'il devait aller voir quelqu'un. Je me suis dit que ce serait con qu'on se perde tous, alors, on est venue ici, dit-elle.
Juliette nous propose silencieusement des popcorns. Spencer secoue la tête. Alors... C'était pour ça quand Jesse me parlait de Hugo au téléphone quand je la cherchais.
— Mais il n'est pas revenu ? interroge Spencer.
— Non, il doit se perdre dans la foule ce con, déclare Juliette tout en croquant ses popcorns.
On se jette un regard avec Spencer. Si Hugo voulait nous tuer en douce, c'était raté.
— On va le chercher, je propose.
Plan complètement débile ? C'était possible. Spencer hoche lentement la tête. On se faufile dans la foule. Juliette et Jesse voulaient nous attendre aux arrêts du bus. Pas de problème et tant mieux, j'ai envie de dire. Spencer me tire le bras à un moment.
— Il est sûrement planqué dans ta fameuse ruelle ? m'indique-t-elle.
Fort probable oui. Je jette un coup d'œil à la fameuse ruelle où j'avais croisé les deux dealers... Peut-être qu'ils pourraient gentiment nous dire s'ils ont vu Hugo ? Je commence à marcher mais Spencer m'arrête.
— Hey, il t'arrive quoi ? Tu ne m'as pas dit qu'un gars avec un flingue t'avais poursuivis là-dedans ?
— Ouais mais, ils l'ont peut-être vu.
Je lui souris lentement.
— Tout va bien, on est toutes les deux, j'imite.
— Phrase de débiles.
— Pourtant, elle est de toi, je souligne.
J'avance alors dans la ruelle. Je n'étais pas sûre de moi. Pas sûre du tout. Spencer n'arrêtait pas de répéter « Très très mauvaise idée ». Je m'avance vers le coin où je les avais vu mais rien. Je recule alors et tourne dans la petite ruelle où je m'étais cachée la première fois. Au loin, il y avait deux hommes qui étaient penchés sur quelque chose.
— Hey !
On s'avance. Le gars, qui avait son flingue quelque part dans sa poche, semblait apeuré tandis que le plus gentil secouait la tête.
— Ce n'est pas nous, il était déjà comme ça !
L'autre lui donne un coup de coude.
— Ferme là abruti !
Spencer et moi, on s'avance. Tandis que les deux autres s'écartent. C'est avec horreur qu'on découvre Hugo, mort, égorgé. On pousse un cri toutes les deux. Les deux dealers partent en courant.
— C'est votre problème maintenant !
On était tétanisée et je me sentais très mal. Très très mal. Ce n'était pas Hugo notre meurtrier. Spencer pousse soudainement un autre cri. Quelqu'un l'avait attrapé et balancé contre le mur. Je m'étais retournée tandis que le tueur enfonçait sa lame de la mort. La personne se tourne vers moi.
— Elle m'appartenait, souffle la personne avant de me donner le coup fatal.
Comment vous expliquer ? C'est comme une déchirure. Vous vous sentez encore plus trahi et vous vous rendez soudainement compte que vous n'avez jamais été en sécurité. Nul part. Comment j'aurais pu m'en douter une seconde. Ce visage d'une innocence pure, ce visage qui me donnait confiance, ce visage qui m'a souri tant de fois. Ce visage qui m'a tant réconforté. Ce visage qui, de ces yeux, m'a vu naître. Le visage de mon père.
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