II. Prémonitions ou déjà-vu ?

Je me réveille en sursaut et en poussant un hurlement à faire peur. J'étais toute collante et mon cœur battait très vite. Un cauchemar... C'était un cauchemar. Dans mon élan, je n'avais pas entendu mon réveil sonner : sept heures vingt. Je réussis à me calmer et respire un bon coup. Je me frotte les yeux et passe une main sur mon front. Instinctivement, je pose une main contre ma poitrine. Mon dieu... Ce rêve semblait si réel. Heureusement, on était Vendredi 22 Juin et tous les Vendredi, les Baker faisaient leur petit déjeuner copieux. Je m'apprête alors mais je remarque que mes vêtements de la vieille étaient dans mon placard. Maman les avait déjà lavés ? Je les prends entre mes mains, au cas où et les sens. Effectivement. Ils étaient propres. Je hausse les épaules, prends ma douche et les remet. Si Juliette ou Jesse me faisaient une quelconque remarque, je leur expliquerai qu'une machine à lever, ça existe. Je descends ensuite en trombe dans les escaliers.

— Maman, tu as déjà lavé mes vêtements ? Je ne les ai mis qu'hier, j'explique.

Ils étaient dans la cuisine, parce que j'entendais des bruits. Je les rejoins. Je me stoppe net. Mais... ? Pourquoi il n'y avait pas de pancakes, de crêpes ou encore de jus de fruit. Je fronce les sourcils.

— Maman, le petit déjeuner traditionnel n'est pas prêt ?

Ma mère se tourne en fronçant les sourcils aussi, comme si je venais de dire quelque chose de pas normal.

— Bonjour Nesee comment tu vas ? Moi très bien. Premièrement, impossible que tes vêtements soient « déjà lavés » comme tu dis, parce que c'est la première fois que tu mets cette tenue et deuxièmement, chérie, on est Jeudi.

Mon père pousse un soupire tout en buvant son café. Je secoue négativement la tête.

— Non, on est Vendredi. Vendredi 22 Juin.

Ils se mettent à rire tous les deux.

— Ma chérie, tu viens de te réveiller, c'est normal que tu sois dans le brouillard, indique mon père.

J'allais ouvrir la bouche mais un flash spécial nous avait intéressé tous les trois. Je venais de remarquer que la télévision était allumée. Je croise les bras contre ma poitrine. Soudain, la photo de Wesley Washington s'affiche à l'écran. Le présentateur expliquait qu'il avait été retrouvé mort la vieille.

— Oh putain de merde, je lâche.

Ma mère allait protester mais je la coupe d'un signe de main. Je prends la télécommande et augmente le volume.

« Le corps a été retrouvé hier soir. Nous ignorons encore les causes du décès mais un individu a été arrêté dans la nuit. » déclare le présentateur.

Mais non... Pas possible... Alors... ? J'avais rêvé ou... ? Cette journée était trop bizarre. Est-ce que j'avais rêvé de l'avenir ? J'étais sous le choc. Aucun mot ne pouvait sortir de ma bouche. Je regarde mes parents. Ma mère avait lâché un « Seigneur tout puissant » qui m'étais familier et mon père secouait la tête.

— C'est malheureux de voir ça, dit-il.

— Je pense surtout à ses parents, quelle affreuse histoire... Je pense aller leur présenter mes condoléances ce soir. Il me semble que Madame Washington travaille à la bibliothèque.

Je me rapproche de la table où ils déjeunaient. Mais qu'est-ce que...Ma mère pose son regard sur moi.

— Ma puce, tu devrais manger, après ce genre de nouvelle... dit-elle en me caressant les cheveux.

Machinalement, j'ai sorti un :

— Maman, je vais être en retard au lycée.

Sans même avoir regardé l'heure et ça me paraissait bizarre. Je baisse la tête, perplexe. Ma mère secoue la tête.

— Non désolé, je ne peux pas ce matin.

— Tu vas devoir prendre le bus scolaire, ajoute mon père.

D'accord...Je hoche lentement la tête. Je remonte dans ma chambre pour prendre mon sac et mon portable puis redescend pour mettre mes chaussures. Je sors un « A plus » à mes parents avant de sortir de ma maison et de marcher lentement vers l'arrêt de bus. Au loin, je voyais un garçon sortir de sa maison avec son skate. Il roule sur le trottoir, en ma direction. Il perd l'équilibre et tombe au sol. Je m'arrête net. Mais... Je m'avance alors lentement vers lui tandis qu'il se frotte la jambe. Il lève son regard vers moi.

— Tu veux ma photo, salope ?

Je m'arrête à nouveau. Pour qui il se prenait celui-là ? J'ouvre la bouche mais la referme aussitôt, remarquant l'heure sur sa montre.

— Le bus ! je crie.

Je cours. J'avais pris du retard. Je le savais au fond de moi. Je m'arrête à l'arrêt de bus et deux secondes après, je le vois tourner dans ma rue. Le bus arrive et s'arrête en face de moi. L'odeur du moteur me fait tousser. Je monte dans le bus et demande un ticket.

— Alors, Papa et Maman n'ont pas pu t'emmener en voiture à l'école ? me lance le conducteur.

Je prends le ticket lentement.

— Euh...Oui.

Il ne s'attendait pas à ce que je réponde. Moi non plus d'ailleurs. Je me tourne. Tout le monde me regardait. Je m'avance lentement, cherchant une place. Au loin, j'aperçois Spencer. Je me fige. Si j'ai rêvé du 21 Juin, alors c'est aussi en partie à cause d'elle que j'ai fait un cauchemar. Je secoue la tête, d'un air saoulé. Un jeune garçon me file immédiatement sa place. Je faisais si peur que ça ? Je m'assois attendant d'arriver au lycée. Quelques minutes après, le lycée indiquait son terminus. Je voulais me lever mais tous les petits jeunes se bousculaient. Je préférais attendre. Je finis par descendre et Hugo était déjà là. Il me lance :

— Miss princesse qui descend d'un bus rempli de gens du peuple. J'espère que ça ne t'as pas trop dépaysé.

Je m'arrête devant lui sans sourire, d'un air perturbé. Il perd son sourire moqueur et se rapproche de moi.

— Hey, c'est une blague, t'en fais une tête...

Il passe un bras autour de mes épaules tout en marchant vers l'entrée du bâtiment. Juliette et Jesse nous rejoignent.

— Tu vois, Juliette, je te l'avais dit qu'elle le savait ! T'as vu sa tête ?!

Je m'arrête et les regarde une à une. Juliette s'avance mais je la devance.

— Tes parents ne voulaient pas que tu reviennes au lycée ?

Elle se fige.

— Bah merde... Comment tu sais ?

Je baisse la tête et me remet à marcher, sans répondre. Juliette se tourne vers Hugo et Jesse d'un air perplexe.

— Vous parlez de quoi les filles ? demande mon copain tout en prenant ma main.

Jesse le regarde comme s'il venait de dire un gros mot.

— De Wesley Washington.

En entrant dans le bâtiment scolaire, on pouvait voir de nombreux bouquets et photos au pied du casier de Wesley Washington. Hugo lâche ma main sous le choc.

— Bordel de merde, lâche-t-il.

— Personne ne sait ce qu'il s'est passé, pas même les journalistes, je devance.

Jesse me regarde comme si je venais de la gifler. Elle semblait aussi perdue que moi. Elle en avait perdu la parole puisqu'elle n'avait pas demandé si Juliette sortait avec.

— Euh. Et sinon on va toujours à la fête de la musique ? Il y a un groupe de jazz et je veux le voir, demande-t-elle en me regardant.

Oui je sais. Je hoche lentement la tête tout en passant devant le casier de ce malheureux Wes. On s'arrête à nos casiers. Je sens le regard de Juliette sur moi. Je l'interroge du regard mais elle lance :

— Tu nous écoutais Miss Je-sais-tout ?

Je me retourne et je reconnais Spencer. Elle semblait si faible...Avait-elle toujours été comme ça ? Celle-ci se fige nette et me regarde puis pose son regard sur Juliette.

Non... Non... Pas du tout.

Elle pose à nouveau son regard sur moi.

— Nesee, tu as une drôle de mine.

C'est tout naturellement que je lui ai dit :

— Oui, c'est d'ailleurs à cause de toi, j'ai fait un cauchemar.

Juliette et Jesse se mettent à rire mais je ne trouvais pas cela drôle du tout. Spencer baisse son regard et s'éloigne de manière soumise, ça voulait dire, tête baissée vers les pieds et dos voûté. Juliette referme son casier et ça me fait sursauter. Je me dirige vers notre salle de cours. On avait littérature. Je m'assois à ma table habituelle, c'est à dire à celle du fond. J'avais la fenêtre à côté de moi. Je sors lentement mes affaires. Pendant tout le début du cours, j'avais les yeux fixés sur ma table. Je n'écrivais pas. J'étais trop perdue. J'entendais la voix lointaine de Madame Lip.

...Exprimée par Ewdard Lorenz.

Je fronce les sourcils. Lorenz me disait quelque chose mais pas Edward. Les meubles se mettent à trembler et je regarde autour de moi. Je n'entendais plus la professeure. Le train repassait. Encore. Après ce brouhaha, les gens se mettaient à parler.

— Foutu train, avait lâché la prof.

J'avais perdu totalement mon sourire. Les élèves riaient. Moi, je me perdais. Mon regard se pose sur la fenêtre et le train s'éloignait. J'aurais tout donné pour... Non ? Non. Pas moi, s'il vous plaît... La sonnerie du lycée m'avait fait sursauter. Le cours n'était pas terminé et pourtant, tout le monde sortait. Un bug. Je range lentement mes affaires et suis mes amis.

— C'est moi où j'ai l'impression que la journée va être suuuuuuper longue ? lance Hugo.

J'en ai bien peur. Le reste de la matinée, je les avais suivis en cours, sans rien dire, sans rien ajouter. Je connaissais déjà les cours. Je les avais déjà eus. J'en étais persuadée. L'heure du déjeuner avait finalement sonné.

Je pourrais manger un bœuf entier, de la part de Juliette suivis des contestations silencieuses de Jesse.

On a rejoint la cafétéria et on a très vite eu notre repas. Mais je n'avais pas faim.

— Nesee, t'as l'air d'avoir un balai dans le cul, dit Hugo.

Je lui lance un regard noir.

Je ne me sens pas bien...

Je lui lance un regard plus doux et pose ma main sur la sienne.

— T'as pas une impression de déjà-vu ?

Il secoue la tête. Je soupire et me lève. J'étais seule dans cette merde alors ?

— J'ai besoin d'aller aux toilettes.

Hugo soupire. Je sors de la cafétéria et me dirige aux toilettes avec la boule au ventre. En rentrant dans la cabine, j'ai vomi. Enfin, je n'ai rien vomi mais c'était de la bile. Mon intestin me faisait mal et ma gorge me brûlait. Je tire la chasse et au même moment la porte s'ouvre. Une fille pleurait. Non. Spencer. Je secoue la tête lentement. Non. Non... Ce n'est pas possible. La porte s'ouvre une seconde fois. Bordel de merde. Je me colle au mur à côté des WC. C'était très étroit mais s'ils se parlaient entre eux, ils ne pouvaient pas me voir. Une conversation a unique sens s'était suivis puis le moment que je redoutais le plus : ma terrible prémonition. Je colle ma main contre mes lèvres pour étouffer mon cri. Le sang s'était projeté sur mon collant. La porte s'ouvre d'une volée et quelqu'un court. J'ouvre à mon tour ma porte de cabine. Des larmes coulaient déjà de mes joues. Elle était morte. Une nouvelle fois. Il fallait que... Il fallait que je le dise à quelqu'un. Je passe à côté du corps, ouvre la porte des toilettes puis m'enfuie. Je me cogne contre Hugo et lui attrape son portable qui se trouvait dans la poche. Je commence à composer le numéro de la police.

— Bordel Nesee !

Il reprend le téléphone de manière brute. Je tremblais.

— Non..Je.. J'en ai besoin !

Je reprends son téléphone mais il me le reprend aussitôt.

— Que se passe-t-il ?

Il me criait dessus. C'était la meilleure. Je fixe alors la porte des toilettes avant d'attraper encore son téléphone. Il regarde à son tour la porte et me lance un regard interrogateur.

— Tu caches quoi là-dedans ?

Il s'avance vers la porte. Je secoue la tête.

— Rentres pas !

Il s'avance encore et ouvre la porte. Il étouffe à son tour un cri puis revient vers moi, reprenant son portable une bonne fois pour toute.

— Tu l'as tué ?!

Incroyable. On appelle ça un copain ?

Il y avait quelqu'un d'autre ! je crie à mon tour.

Il se rapproche de moi et pose une main sur mon épaule.

— J'appelle la police. Attends-moi là, ne bouges pas, ne parles à personne d'accord ? 

Puis le même cinéma et je m'en doutais fortement. Je l'ai attendu. Il est revenu. L'alarme incendie a sonné. On s'est caché avec le corps de cette pauvre Spencer. Les deux flics beaux gosses sont arrivés. Ils m'ont interrogé. Le brun avait posé une caméra et un dictaphone en face de moi et il les avait allumés.

— Nous sommes le 21 Juin 2018, il est 12h40. Je suis avec Hugo Davis et Nesee Baker. Nous sommes ici parce que Spencer Marsh a été assassiné dans les toilettes des filles au lycée et je vais à présent interroger la seule témoin de la scène de crime. Je suis l'agent Dece et l'agent Tful m'accompagne sur le terrain.

J'ai ensuite raconté les faits. Ils semblaient penser que j'étais coupable. Je leur ai dit que non.

— Alors pourquoi vous ne l'avez pas aidé ? avait finalement demandé l'agent Dece.

Je me le demandais aussi. Pourquoi je n'avais rien fais alors que j'avais prédit ce qui allait arriver ? Je regrettais. J'aurais pu sauver Spencer. Elle aurait sans doute eu un meilleur métier que moi. On sait tous que les victimes au lycée deviennent des gens extraordinaires. Ils sont plus forts que nous. Jamais elle n'aura de mari ou d'enfants et tout ça, à cause de qui ? De moi.

— Je regrette sincèrement. Si j'avais su, je serais intervenue mais mettez-vous à ma place... Je serais peut-être morte aussi à l'heure qu'il est.

Un long silence s'installe. Je fais une moue puis baisse la tête. Au bout d'un certain temps, je relève la tête. Perplexe.

— Attendez...D'habitude, ce genre d'interrogatoire se fait dans une salle spéciale non ? Pas dans une petite salle, dans un lycée, sans adulte qui plus est. C'est légal ?

Les deux policiers se regardent. Hugo me donne un coup de coude.

— Merci de votre honnêteté mademoiselle Baker. Mais ne vous en faites pas. On va apporter tout ça à notre boss, dit-il en éteignant la caméra et le dictaphone.

Ils se lèvent et se dirigent vers la sortie. Je me tourne vers Hugo en soupirant. Je commence à me lever mais les deux policiers nous interpellent.

— N'ébruitez pas ce drame. Vous imaginez la panique chez les élèves ? Ou chez les parents ? « Un tueur en série se balade dans le lycée. » Tout le monde aurait peur.

Le roux lui donne un coup de coude. Je plisse des yeux et sort machinalement :

— Vous voulez dire que le gars qui a tué Wesley Washington est le même que Spencer Marsh ? Mais c'est... C'est pas possible. Celui de Wes a été arrêté ce matin.

L'agent Dece se rapproche de moi avec un sourire rassurant.

— Cette histoire est entre nos mains maintenant...

Je le coupe et secoue la tête. Je me tourne vers Hugo.

— Je me sens mal, je veux rentrer chez moi. Je compte sur toi pour prendre mes cours.

Trop de déjà-vu tuait le déjà-vu. J'appelle mon père et le préviens que je suis malade, que j'ai vomi et que j'ai besoin de rentrer au plus vite à la maison car j'ai peut-être choppé la gastro. J'embrasse rapidement Hugo et je sors du bâtiment. Je reconnais la voiture de mon père rien qu'au son. Je me tourne et m'avance vers la voiture qui arrive. J'ouvre la portière et m'installe sur le siège avant.

— Et bah mince. T'es toute blanche. J'ai eu raison de venir.

— J'ai rien mangé ce matin Papa, je me sentais déjà mal.

En rentrant à la maison, j'ai décidé de ne répondre à personne. J'étais trop mal pour ça et j'ai dormis pour être honnête. Mais, le mal que je ressentais en moi ne partait pas. Il s'accrochait à moi comme un parasite. C'est ma mère qui m'a réveillé, en caressant mes cheveux. Je ne l'ai pas entendu rentrer.

— Chérie, ça va ? Ton père m'a prévenu.

Elle pose sa main sur mon front pour jauger ma température.

— Tu n'as pas beaucoup mangé ce matin et je paris que tu n'as rien mangé non plus ce midi...Tu devrais aller à la fête de la musique ce soir. Tu te sentiras mieux. Tu as toujours aimé la musique.

Elle me caresse la joue. Je me redresse et pose mon regard sur elle.

— D'accord, dis-je.

Elle me sourit lentement. Je me lève quand Maman sort de ma chambre pour fermer la porte. J'attrape mon portable et téléphone à Jesse. Elle décroche à la dernière sonnerie.

Wooh une revenante, t'as enfin daigné à regarder ton portable ? Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Hugo nous a dit que tu étais malade.

Je lâche un soupire frustré.

— Oui, désolé mais je me sens mieux. On se rejoint où pour la fête de la musique ?

J'étais persuadée que Jesse faisait un signe de victoire à ce moment même.

Dans un bar, je vais t'envoyer l'adresse d'accord ?

— D'accord, à tout à l'heure. 

Après mon petit sommeil, j'avais complètement oublié le fait que j'allais probablement mourir ce soir. Si j'avais su... Je serais resté chez moi devant une bonne comédie musicale. Je m'étais préparée. J'avais changé de tenue. Je ne voulais pas avoir le sang de Spencer sur moi. Ma mère m'avait proposé elle-même de me conduire. Je lui dicte l'adresse. Quelques minutes après, on arrive au centre-ville, je descends de la voiture et avant de fermer la portière, j'entends Maman me dire :

— Amuse-toi et fais attention.

Je referme la portière et la salue de la main. J'observe ensuite la voiture s'éloigner puis disparaître. Il y avait déjà beaucoup de monde. Je me faufile entre les gens pour rejoindre le bar. Il était vide, pour le moment. Je m'installe au comptoir et commande une Coca. Je paie puis le sirote tout en regardant la télévision. Je scrutais ma montre toutes les dix minutes. Le bar se remplissait.

Je n'avais pas vu l'heure passée mais mon instinct me disait de sortir d'ici pour les rejoindre. Alors, je m'étais levée. Sans regarder derrière moi, je m'étais tournée et j'avais bousculé un garçon. Le garçon en fait. Son gros instrument de musique était tombé au sol.

— Euh, désolé...

Je me baisse pour lui redonner mais bordel, qu'est-ce que c'était lourd. Il se baisse à son tour et le reprend. Il pose son instrument sur un tabouret puis me sourit. Un sourire très mignon.

— Je m'appelle... commence-t-il.

Mais dans un élan – de geste de drague sans doute – sa main vient bousculer un verre qui se trouvait sur le comptoir. Le verre tombe et se casse au sol. Le garçon se baisse. Un fin sourire se dessine sur mes lèvres.

Cory ? je dis.

Il se lève brutalement, comme s'il venait de se couper (c'était peut-être le cas d'ailleurs). Il me sourit tout en fronçant les sourcils.

Comment tu sais ?

Que répondre à ça ? Mon instinct me l'avait soufflé. Je tourne rapidement la tête sur le côté et à ce moment-là, je vous jure avoir vu Jesse et Juliette. Je me tourne à nouveau vers Cory.

— Oh, j'ai vu mes amis, je dois filer ! je lance.

Je pars et me lance à leur recherche. Je les avais vu ! Elles ne devaient pas être loin. Je me perds dans la foule, pousse des gens. Je devais aller sur le trottoir, j'aurais une meilleure vue d'ensemble. Je trottine alors en regardant partout. Je sautille et finis par monter sur une voiture garée. Je scrute la foule et... Oh ! Les voilà. Elles allaient de l'autre côté. Si je coupe par cette ruelle, ça ira. Je descends de la voiture et prends la ruelle. Dans quelques secondes, je serais de l'autre côté de la rue. D'un pas rapide, je trace sans me poser de questions. Je m'arrête soudain puis marche lentement. Il y avait deux gars très louches qui se parlaient en chuchotant. L'un d'eux me lançait un regard noir tandis que l'autre semblait plus gentil. Je passe tout en les regardant.

Tu veux ma photo ? crache le premier.

Je secoue la tête mais continuer de les regarder. Je finis par abandonner. Ils me disaient quelque chose. D'un coup, j'entends le plus gentil dire :

— Non s'il te plait !

Je me retourne et je vois l'autre gars, pointant un flingue sur lui. Paniquée, je pars en courant tandis que l'autre m'appelle en m'insultant. Je l'entends lâcher sa proie et me poursuivre. Je tourne dans l'autre ruelle à gauche puis me cache derrière une poubelle. Je l'entends s'arrêter, jurer puis repartir de l'autre sens. Je sors de ma cachette et m'éloigne. Décidément... Ce n'était pas mon jour. Je continue en reprenant le chemin que je voulais prendre. Je voyais la grande rue bondée de personnes qui défilaient. J'entends des pas derrières moi. Je me retourne. Merde c'était lui. Il me pointe du doigt. Je me remets à courir et me faufile dans la foule. Je me cogne dans quelqu'un. Je reconnais aussitôt Cory.

— Et, ça va ? me demande-t-il inquiet.

Je secoue la tête. J'étais en sueur. Il pose se main sur mon épaule avec un sourire rassurant. Il était bien plus grand que moi.

— En fait c'est quoi ton prénom ?

Je pousse un soupire. Pas du genre exaspéré, mais plutôt positif.

— Nesee, je réponds.

Il me sourit à son tour. Il était vraiment craquant.

— Très bien, t'as besoin d'aide Nesee ? 

Un autre gars arrive derrière lui et me demande de dégager. Je passe par-dessus une sorte de barrière. Bizarrement, cette scène m'était familière. Je pense soudainement à Sarah Michelle Gellar et un étrange sentiment m'envahit : la peur. Mon téléphone se met à sonner. Je sursaute puis je décroche.

— Ah, enfin ! Je vous ai cherché partout ! je dis.

Désolé, on était dans...

Je distinguais à peine sa voix avec tout ce bruit.

— Et Hugo est...

Je soupire. Je n'entendais vraiment rien.

— ... M'enfin bref, où es-tu ? avais-je réussi à entendre à la fin.

— Je suis entre le bâtiment rouge et jaunâtre là, dans la ruelle.

Il y avait beaucoup de personnes. Je vois une petite fille s'arrêter pour me regarder puis repartir aussitôt. D'un coup, je sens quelque chose me traverser. Je baisse le regarde et j'aperçois une lame sortant de ma poitrine. Je sens immédiatement le goût du fer dans la bouche. Je me sentais faiblir, devenir toute chose. Je me sentais faible. Je sentais un picotement. Mon portable tombe au sol. Je ferme les yeux et le rejoint.

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