Soirée famille
Ce soir, on a fait une soirée famille. Je ne souhaite ces soirées à personnes, on s'ennuie à mourir.
Le seul truc cool, ce sont les pizzas.
Je ne sais pas trop pourquoi, quand papa est rentré du travail, il a hurlé dans la maison :
« Ce soir, soirée famille ! »
J'ai regardé ma sœur. Il suffisait de voir nos têtes pour comprendre la situation. Grave, grave problème. Alerte rouge. Pas une soirée famille !
Seulement, quand papa est décidé, on peut danser la Macarena sur la table, repeindre la maison, acheter un requin, invoquer un dragon, rien ne le fera changer d'avis. C'est donc ainsi qu'on s'est tous retrouvés serrés dans le canapé à regarder Les Minions, parce qu'il fallait que ce soit adapté à Zéphyr.
Note aux curieux (oui, je sais que vous lisez ce carnet (vous perdez votre temps, si vous voulez mon avis)) : on a tous des noms bizarres, dans cette famille. Nos parents voulaient rendre hommage à notre chère Mère Nature. Moi, je crois qu'elle s'en fiche, de nos prénoms, Mère Nature.
Zéphyr a sept ans. C'est une espèce rare de petit frère pot de colle. Je le vends à quelques centaines d'euros, pour les intéressés. Il faudra venir le chercher car la livraison n'est pas disponible. Il sera aussi accompagné de tout son matériel (prévoyez de la place).
Pendant tout le film, Ondine n'a pas cessé de se plaindre. Elle est faite pour ça, je crois. On devrait vraiment lui offrir une médaille pour être la grande sœur la plus râleuse au monde. Et puis, elle a vraiment des insultes pourries.
Au moment où les petits bonhommes jaunes décidaient de partir trouver un méchant et que l'ennui devenait insupportable, le chien a commencé à aboyer. Avec Ondine, on n'a pas hésité et en quelques secondes, on avait déjà nos manteaux.
« On va balader le chien ! »
Papa n'a pas réagi et Zéphyr non plus. On a décidé de prendre cette réponse pour un « d'accord ».
Le soleil se couchait. Il faisait froid et, serrée dans mon manteau, je grelottais.
Nous avons l'habitude de ce genre d'escapade, avec Ondine. Quand il faut éviter les soirées famille, on se comprend.
Atchoum, le chien, a couru partout. Je n'ai même pas essayé de le suivre : personne ne peut battre notre berger australien à la course !
« T'as vu Fragrance, aujourd'hui ? »
J'ai acquiescé vivement, l'air indigné. Je n'allais pas abandonner ma ponette préférée !
Je monte à cheval depuis si longtemps que je suis incapable de dire quand j'ai commencé. Fragrance est ma meilleure amie et on se voit tous les jours. Depuis maintenant trois ans, je l'ai en demi pension.
Je ne peux rien demander de plus beau que de pouvoir rendre visite et monter ma plus grande compagne chaque jour.
« Si tu veux, il reste des carottes dans le frigo. Je suis certaine que papa va les oublier. »
Ondine aime beaucoup parler, de tout comme de rien. Moi, au contraire, je préfère le silence.
Encore une fois, je me suis contentée d'acquiescer, le regard perdu à l'horizon, vers le soleil couchant.
J'aurais aimé rester là toute ma vie.
• • •
Églantine soupira quand trois énergumènes débarquèrent dans sa chambre. Ondine, avec ses cheveux en bataille, guidait le groupe. Atchoum dérapa sur le parquet et, entraîné par son élan, Zéphyr manqua de tomber sur lui.
— Églantine !
Ondine s'assit sur le lit et, immédiatement, Zéphyr et Atchoum l'imitèrent.
— Ah non ! Je refuse, je refuse, je refuse !
Églantine ferma son carnet et se tourna vers les envahisseurs. Ils allaient encore lui proposer un plan bizarre et il était hors de question qu'elle participe.
— Laisse-nous t'expliquer ! Julie vient à la maison aujourd'hui.
— Pour le goûter !
— Le but, c'est qu'elle puisse passer du temps avec papa.
— Ils vont devenir amoureux !
Atchoum aboya joyeusement et Zéphyr applaudit sans aucune raison apparente. Peut-être pour se féliciter de l'élaboration d'un plan encore plus nul que les précédents.
— À mon avis, papa est capable de se débrouiller seul. S'il en pince pour Julie, il suffit qu'il lui dise.
Ondine, grande romantique dans l'âme, leva les mains dans un geste théâtral de désespoir.
— Tu crois vraiment qu'il va faire ça ?
— Il a besoin de notre aide ! s'écria Zéphyr.
— Tu sais très bien que si on n'agit pas, il laissera l'occasion passer. Et papa aime vraiment beaucoup Julie. Ils seraient super heureux ensemble !
— Comme il l'était avec maman avant leur divorce ?
Les paroles brutales d'Églantine assombrirent les visages. Elle se leva et regarda sa sœur.
— Sérieusement, vous voulez vraiment la remplacer ? Voilà qu'elle est partie, vite, allons en trouver une autre ! On ne la retrouvera pas, elle ne veut plus nous revoir.
À son tour, la plus grande de la famille se leva.
— À quoi ça sert de rester dans le passé ? L'important, c'est que nous soyons heureux.
— Et bien, tant mieux si vous l'êtes.
Zéphyr roula sur le lit et observa longuement le plafond. Atchoum lui lécha joyeusement le visage. Son rire cristallin résonna dans la chambre colorée. Il repoussa le chien et regarda ses sœurs.
— Mais Églantine, est-ce que tu es heureuse, toi ?
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