Et les rires
Je croule sous le travail. Aujourd'hui, Eliss et Samuel viennent à la maison. Sam(uel) est dans notre classe d'espagnol et on a truc à faire tous les trois.
J'appréhende un peu, quand même.
• • •
Églantine poussa la porte de chez elle, les lèvres pincées. Comme d'habitude, tout était en désordre.
— Faites pas attention au bazar...
— Toi, ça se voit que t'es jamais allée chez Eliss, pouffa Samuel en entrant.
— Tu rigoles, Églantine ? C'est super bien rangé !
Atchoum déboula vers eux, ravi de voir des invités. Il agitait follement la queue en se frottant contre les deux lycéens. Eliss eut d'abord un mouvement de recul, surprise, puis rit.
— Il est TROP MIGNON ! Comment il s'appelle ? Oh, je l'adore, il est tout doux ! Regardez, je crois qu'il m'aime bien aussi...
Samuel retira ses chaussures en soufflant à Églantine :
— Là, elle va plus le lâcher, ton chien. Y'a pas plus grande fan des animaux qu'Eliss.
Églantine gloussa et guida ses amis jusqu'à la cuisine. Ondine y faisait la vaisselle, accompagnée par une musique connue d'elle seule. Elle s'apprêtait à réprimander sa sœur quand elle vit qu'elle était accompagnée.
— Oh, t'as ramené des gens ! Vous arrivez juste à temps pour le fondant, c'est parfait.
Samuel resta silencieux, soudain timide. Eliss s'était assise par terre, le chien couché sur ses genoux.
— Ça sent super bon !
— On revient quand ce sera cuit, Ondine.
— Yes, je vous appellerai.
— Fais goûter à Zéphyr avant !
Églantine grimpa les escaliers, suivie par ses deux camarades et Atchoum qui, en effet, semblait s'être attaché à Eliss. Là, ils tombèrent nez à nez avec le dernier énergumène de la maison, qui les menaçait avec son sabre laser de Star Wars.
— Des intrus dans la maison ! L'alien a ramené du renfort !
Il abaissa son arme quelques instants, mettant ainsi son jeu en pause.
— Vous êtes qui ?
— Zéphyr, voici Eliss et Samuel. Eliss, Sam... c'est mon frère.
— J'adore ton sabre laser ! s'enthousiasma Eliss.
— Ok, vous pouvez passer.
Zéphyr se décala, fixant le petit groupe d'un air méfiant. Trois aliens, surtout si le chien les accompagnait, mieux valait éviter les embrouilles...
Églantine arriva enfin jusqu'à sa chambre. Elle s'assit sur son lit et fut très vite rejointe par Atchoum.
— Vous avez de la chance, Zéphyr laisse pas passer tout le monde.
— J'adore ta maison, j'adore ta famille, j'adore ton chien, j'adore, j'adore, j'adore !
Une des caractéristiques d'Eliss, c'était qu'il n'y avait jamais d'entre-deux. Soit elle adorait, soit elle détestait. Heureusement, elle avait tendance à adorer beaucoup plus de choses qu'elle n'en détestait. Églantine sourit, rassurée et touchée.
— C'est... coloré, remarqua Samuel.
Il devait penser à chez lui. Même s'il s'en plaignait rarement, Églantine savait à quel point il détestait tout ce qui le reliait à sa famille. Et, dans sa grande maison, tous les murs étaient d'un blanc à vous aveugler en quelques secondes. Oui, cette chambre devenait un autre monde, comparée à celle de Samuel.
Églantine passa en revue son bureau en bazar, les quelques livres sur son étagère, les photos de chevaux, mais aussi de famille ou de souvenirs, la chaise ensevelie sous une tonne de vêtements, le lit défait sur lequel elle était assise...
Une chambre d'adolescente, se dit-elle.
Eliss brandit soudain son téléphone.
— Vous préférez vivre avec un bras en moins ou une seule jambe ?
Les deux autres répondirent en même temps, Atchoum exprima son avis en aboyant :
— Un bras, plus simple de monter à cheval avec deux jambes.
— Impossible de monter à cheval avec une seule jambe, donc un bras.
— Wouaf !
— Oh, ça suffit les cavaliers, hein !
Samuel et Églantine échangèrent un regard complice. C'était sûrement ce qui les rapprochait le plus : leur passion commune pour les chevaux.
— Bref, on est là pour travailler l'español, chers amigos !
— Quel accent, señor Sam, se moqua Eliss.
— On a du temps, l'espagnol peut bien attendre, remarqua Églantine en se levant.
Elle revint avec un casque, souriante, et le tendit à Eliss.
— Musique à fond, tu dois plus pouvoir nous entendre. On va choisir une phrase, faut que tu devines.
— Oh, yes, j'adore ce jeu !
Elle brancha le casque à son téléphone et, quelques minutes plus tard, elle se déhanchait dans la pièce. Églantine la trouva belle, comme ça, à sauter et secouer la tête au rythme de la musique.
Ils passèrent ainsi plusieurs heures à rire, crier, s'amuser.
C'est en pleine bataille d'oreillers que la mère de Sam appela. Tous se turent.
— Allô ? Oui, je suis chez Églantine. Oui, ça va. Oui, je rentre bientôt.
Silence.
— Bien sûr qu'on a travaillé l'espagnol. On a vachement avancé, même !
Les deux filles gloussèrent. Églantine abattit mollement un coussin sur la tête d'Eliss, ce qui ne fit que renforcer son rire.
— Ouais... oui, je rentre bientôt. À plus.
Samuel se tourna vers ses amies, l'air plus triste que jamais. Les deux adolescentes se mordirent les lèvres, anxieuses. Elles ne virent que trop tard la couverture voler vers elles.
— Tous sur Églantine ! Elle craint les chatouilles !
— Non, pas moi !
Églantine n'eut pas le temps de se défendre plus, elle se tordait déjà en riant aux éclats jusqu'à ne plus respirer.
— Eliiiiiss ! Aide-moi !
— Ah, le chien m'attaque !
— J'ai gagné !
Et les rires, et les cris, et l'amitié, et le bonheur.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top