Chapitre 5 : Sentiment de perdition

Cela faisait trois mois que Matei ruminait des pensées sombres, bien noires, dans son esprit torturé...
Trois longs mois...

Trois mois qu'Ayden lui avait souri avec tant de sincérité en lui rendant ses lunettes...
Trois mois que Massimo avait voulu que Matei les rejoigne vers les canapés après le cours de sport et lui avait adressé un clin d'œil aguicheur avec un de ses magnifiques sourires en fin de journée...
Trois mois que Pierrick avait regardé Matei droit dans les yeux avec son air de chien, même de chiot, battu en demandant s'il le détestait...

Matei ne savait juste plus du tout quoi penser...
Pourquoi tous ces garçons, à savoir, le Triangle des Bermudes, avaient décidé de tous agir le même jour ou presque ? Ils s'étaient passé le mot, sans rire ?
C'était à la limite si le cœur de Matei ne s'emballait pas trop en recevant les signaux du cerveau du même corps qui se repassait en boucle toutes ces scènes...
Ngôi Sao essayait de lui apporter son aide et son soutien mais c'était un peu peine perdue...Son meilleur ami paraissait tout chamboulé depuis trois mois...Et il y avait de quoi, pour ce garçon ayant toujours été célibataire et cherchant l'amour avec une telle candeur.

La jeune fille avait aussi remarqué que depuis ce laps de temps, Noël et Pierrick se diputaient plus souvent mais ils n'en venaient jamais aux poings car Noël était aussi frêle que Matei et quant à Pierrick, il avait cette carrure caractérstique d'un sportif de combat. Il valait mieux ne pas se frotter à lui s'il s'agissait de mettre quelqu'un hors d'état de nuire...
Cependant, malgré toutes ses observations, elle n'avait rien dit à Matei, pour ne pas lui donner de faux espoirs ou même une déprime encore plus profonde...Lui n'avait rien vu tellement il était effondré ces temps avec cette vision des choses un peu troublée par le Triangle des Bermudes. En revanche, elle en avait discuté avec Helena et Mélissa, qui étaient complètement d'accord avec leur amie après avoir elles aussi observé le duo des jeunes garçons.
Elles se demandaient d'ailleurs ce qui avait bien pu se passer entre les deux amis pour qu'ils s'embrouillent toujours comme ça alors qu'a priori, rien ne les incitait à se disputer.

Ngôi Sao, pourtant très optimiste, ne voulait pas s'avancer et trop espérer pour son meilleur ami qui ne demandait qu'à trouver l'amour. Elle ne savait pas sur qui elle devait miser et si elle arrêtait son choix sur un seul, il y avait toujours quelque chose qui n'allait pas...
Des détails ridicules et insignifiants mais, qui n'allaient pas.

Un soir de week-end, Matei vint dormir chez Ngôi Sao pour se détendre et se rafraîchir les pensées...
Cela pouvait paraître complètement aberrant pour une fille et un garçon n'étant pas en couple mais pour eux se connaissant depuis longtemps, il ne leur était jamais venu à l'esprit des idées mal placées et surtout depuis que Matei s'assumait homosexuel à part entière, il n'y avait plus rien à craindre pour Ngôi Sao question agression sexuelle...
En fait, les deux meilleurs amis étaient tellement proches que leur habitude presque enfantine, d'aller dormir l'un chez l'autre, était restée telle quelle et tous deux appréciaient ces moments de complicité rien que tous les deux. Ils aimaient discuter, jouer, rire ensemble...
Et leurs parents, très ouverts et très sympathiques tous les quatre, ne voyaient rien contre le fait qu'ils se sentent bien.
Des fois, Ngôi Sao se sentait presque comme une sorte de petite amie quand même, tant elle était privilégiée dans le cœur de son meilleur ami, et elle avait de la chance que son petit ami à elle, Marveen, ne soit pas de nature jalouse...Sinon, il aurait déjà piqué plusieurs violentes crises de nerfs tellement Matei et elle étaient proches, tant sur le plan mental que physique.

Ce soir-là, alors que Ngôi Sao lui faisait un massage du dos et des épaules, Matei lui demanda avec un ton assez nonchalant qui trahissait sa somnolence naissante :
-Est-ce que tu peux m'expliquer...Pourquoi je me gêne devant les gens de me montrer torse nu, comme à la piscine par exemple...Mais pas devant toi ?
-Je ne sais pas, Matei, murmura la jeune fille en continuant son massage de ses petites mains pour détendre son meilleur ami.
En effet, elle était en train de le masser, lui, le ventre contre le matelas, à côté de son propre lit, sur lequel il dormait à chaque fois qu'il venait ici pour une nuit, torse nu. Matei se gênait facilement de tout et de rien, et surtout avec sa nudité, même extrêmement partielle et réduite, mais devant Ngôi Sao, bizarrement, il s'en fichait.

-Quoique...fit la jeune fille en feignant de réfléchir. Depuis ce jour-là...
Probablement depuis la fois où elle était entrée par mégarde dans la salle de bains chez son oncle, qui avait une piscine, et dont la porte n'avait pas été fermée à clé par Matei...Ngôi Sao l'avait vu tout nu, et il avait fini tellement rouge, comme une pivoine voire comme un homard bien cuit, que l'eau de la piscine chauffait presque quand il était dedans...
La jeune fille s'était longuement excusée envers Matei, qui finalement s'était dit que cette situation gênante s'était heureusement passée avec sa meilleure amie et non pas sa cousine de cinq ans.
Maintenant, il ne se gênait plus de montrer son torse nu à sa meilleure amie alors que le regard des autres sur ce dernier le gênait atrochement.
Depuis ce jour funeste pour l'intimité totale du jeune garçon, l'oncle taquin de ce dernier l'avait toujours embêté avec ça en disant qu'il avait fait exprès de ne pas fermer la porte à clé puis d'attendre trop longtemps en prétextant se changer, au point que naisse dans l'esprit de Ngôi Sao qu'il était déjà sorti et que la salle de bains était libre.
La jeune asiatique avait longtemps ri de cette situation, Matei aussi avec elle, et c'était depuis devenu leur sercret. Personne ne devait savoir, pas même dans leur groupe, voire surtout pas dans leur groupe, que Ngôi Sao avait vu Matei nu. En train de se changer.

Après la séance de massage, ils discutèrent un peu de beaux garçons pris en photo discrètement par Ngôi Sao, une espionne quasiment professionnelle à son niveau, et Matei orienta la discussion vers les Cinq Doigts de la Main alors qu'il remettait un t-shirt, son haut de pyjama, pour quand même couvrir un peu son torse.
-C'est tellement dommage que Yann soit homophobe, lui qui est plutôt beau...lâcha Matei avec un soupir.
-Ma foi, fit Ngôi Sao avec une expression peinée. C'est dans sa religion, on ne retire pas des convictions gravées depuis la naissance ou presque par ses parents si facilement...
-Malheureusement, termina Matei avec un second soupir.
-Sinon, Dmitri est beau aussi, non ? le nargua la jeune fille.
-Aussi...Mais il a un visage trop rond pour faire vraiment...Pour être dans mon style de garçons...
-On dirait vraiment deux commères...rit Ngôi Sao sincèrement.
-Complètement ! confirma son meilleur ami sans aucune pitié pour leur réputation.
Après un silence, Matei reprit avec un sourire un peu tristounet :
-Après, il y a le Triangle des Bermudes...Massimo, il a un sourire tellement beau...Je ne le dirai jamais assez, mais avec ses dents blanches derrière ses lèvres fines...À chaque fois qu'il me sourit, j'ai l'impression que je vais tomber dans les pommes...
-Dans les pommes et la banane, oui, lui fit Ngôi Sao, la voix et le sourire tendancieux.
-Arrête ça ! Les blagues d'Helena ne te vont pas du tout ! protesta Matei en riant tout en lui balançant un coussin dans la figure.
Son amie rit elle aussi.
-Ayden aussi est beau...reprit Matei, nageant en plein fantasme. Il est grand et passablement musclé, c'est beau...
-Je sais que tu aimes les muscles, dit Ngôi Sao.
Elle tâta le bras mou de son ami et lui dit, espiègle :
-Tu devrais te muscler aussi un peu, toi ! Tu attirerais peut-être plus de garçons !
-C'est ça ! Je suis partisan de la loi du moindre effort, je te rappelle ! rit Matei.
-Mais je sais ! Reste Pierrick.
-Lui, on n'en parle même pas, déclara Matei, ferme. Il est tellement parfait que c'en est irréel ! Comment un garçon comme lui pourrait être homosexuel et qui plus est, attiré par moi ?

Ngôi Sao haussa les épaules. Elle ne savait guère quoi dire. Elle ne pouvait rien affirmer non plus. Quoi qu'il en soit, elle dit à son meilleur ami avec un ton taquin :
-Tu ne sais pas si ces cinq-là sont homosexuels comme toi...Mais dans ce cas, sors avec Bastien ! Il l'est, il s'assume et il le clame haut et fort !
-Oui, c'est bien, mais...fit Matei, hésitant. Il n'est pas du tout dans mon style...
-Mais tu es pire qu'une mijaurée qui cherche chaussure à son pied alors qu'elle chausse du cinquante-six ! protesta Ngôi Sao en riant, connaissant mieux que persomne les hauts standards de beauté que le jeune homme avait concernant ses potentiels petits amis futurs.
Les deux meilleurs amis partirent dans un grand éclat de rire collectif alors que lui s'appuyait sur l'épaule de la fille, tordu de rire.

Ces deux-là étaient comme un frère et une sœur, pas du tout comme de simples meilleurs amis ou un couple naissant. Ç'aurait probablement été possible entre eux si Matei n'était pas homosexuel...Leurs actions étaient tellement taquines et proches, aussi bien sur le plan physique que sur le plan mental, qu'on pourrait facilement croire à un couple on ne peut plus mignon, mais ça n'était pas le cas.
C'étaient juste des meilleurs amis presque fraternels dans leur relation si proche !
Ngôi Sao aimait beaucoup cette relation qu'ils partageaient, et Matei aussi. Ils bénéficiaient tous deux d'une place privilégiée dans le cœur de l'autre et ça, ils n'auraient pas pu changer ça et ne voulaient pour rien au monde la perdre. C'était à la limite du fait qu'ils ne pourraient pas vivre sans. Ils exagéraient peut-être un peu, mais cela dit, leur relation était vraiment sérieuse, depuis toutes ces années qu'ils se connaissaient.

Plus tard encore, ils jouaient tous les deux à un jeu vidéo en un contre un. C'était un jeu de combat que tous deux connaissaient et appréciaient. Ngôi Sao y jouait sur une autre console normalement, mais elle se fit rapidement aux touches nouvelles et les associa dans son esprit à celles qu'elle connaissait déjà. C'est Matei qui avait ramené le jeu et elle utilisait la console plus ou moins familiale pour jouer avec lui. Finalement, ce fut elle qui gagna la majorité des combats et Matei finit par lâcher sa manettes, de rage. Il avait un tempérement assez colérique et bouillonnant malgré son apparence frêle.
-Encore ! Mais tu m'énerves ! maugréa-t-il dans sa barbe, inexistante pour le coup, contre son amie.
Il la regarda de biais et lui dit, les yeux plissés :
-Tu caches bien ton jeu, en fait ! Tu es vraiment une joueuse complètement malade ! En plus, tu joues jusqu'à terminer les jeux en entier, à cent pourcents, ce qui comprend les quêtes secondaires ! C'est complètement fou ! En plus, tu n'as pas du tout la tête d'une joueuse de jeux vidéos !
-L'habit ne fait pas le moine, sourit la jeune fille en posant sa manette elle aussi devant elle mais un peu plus délicatement que son ami. Et puis, je joue peu. Regarde Stefano, à quel point il est bon dans beaucoup de jeux ! Ceux auxquels je joue, je les maîtrise plus ou moins, mais je joue à peu de choses.
-Parle pour toi...grommela Matei de mauvaise foi. C'est mon jeu et tu gagnes tout le temps !
-Mais j'ai aussi l'avantage de le connaître un peu...sourit la jeune fille, toujours modeste.
-Sur ta console, tu me défoncerais quatre fois plus vite...fit Matei en fronçant les sourcils. Je perdrais avant même d'avoir compris que le match avait débuté !
-Possible, ricana Ngôi Sao, une lueur maléfique dans le regard. Mais ce n'est pas pour ton aptitude aux jeux vidéos que je t'apprécie autant !
Matei la regarda alors en face pour la première fois en cinq minutes et finit par lâcher en souriant :
-Encore heureux !

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