-S'il te plaît, Helena ! Arrête un peu !
La jeune fille parlait encore de ses fantasmes divers non seulement pour elle mais aussi pour Matei. Elle adorait le savoir homosexuel et finissait toujours par lui faire des sous-entendus douteux ou bien encore de l'embêter en lui citant des beaux garçons.
-Tiens, regarde, il y a le Triangle des Bermudes qui arrive !
Ngôi Sao sourit, main devant la bouche pour qu'on ne la voie pas. Leur amie faisait référence aux trois plus beaux garçons de leur classe. Elle avait renommé ce trio ainsi car cela leur correspondait bien. Déjà premièrement car ils étaient trois quand ils arrivaient le matin en classe parce qu'ils habitaient le même coin et deuxièmement, car on pouvait facilement se noyer ou sombrer en voyant leur resplendissante beauté. Enfin, pas vraiment on, mais plutôt Matei...Le stade juste au-dessous était les Cinq Doigts de la Main, et contenait donc les cinq beaux gosses de leur classe au total.

-Je ne comprends jamais qui est qui ! se plaignit alors Stefano, à la mémoire plutôt courte concernant ce genre d'informations.
Ngôi Sao lui expliqua alors pour la énième fois, avec un sourire sous-entendu adressé à Helena :
-Le Triangle des Bermudes, c'est, du plus parfait au plus beau, car on ne peut pas dire au moins beau ou au plus moche les concernant, Pierrick, Massimo et Ayden. Avec une préférence pour Pierrick et Massimo !
Matei rougit comme une rose en pleine floraison.
-Puis, pour les Cinq Doigts de la Main, tu rajoutes au classement, sous le Triangle des Bermudes, Dmitri et Yann.
-Merci. Je comprends mieux. Mais attends-toi à devoir me redonner cette explication une prochaine fois, l'avertit Stefano en riant.
-Je ne m'en lasse pas ! lui sourit Ngôi Sao tout en rigolant elle aussi.
Helena ajouta avec un ton amusé :
-On devrait rajouter encore Stefano dans la liste ! Regarde comme ses yeux bleus sont magnifiques ! Et sa peau parfaite !
En secret, Matei jalousait un peu l'italien pour ça, il s'était confié à Ngôi Sao à ce propos. Il n'avait presque pas de boutons d'acné contrairement à lui et avait un faciès très jovial et rieur. Et ses yeux bleus fascinaient ! Stefano démentit cela en secouant une main devant lui :
-Mais non ! J'ai plein de boutons ! Mais dans le dos ou sous ma frange, donc ils ne se voient pas...
En effet, le jeune garçon avait une épaisse frange de cheveux bruns devant le front qui se retrouvait donc caché.
-Et tu les appelerais comment, ces six ? demanda Mélissa à sa meilleure amie.
-Les Six Démons ? proposa cette dernière.
-Classique, commenta Xiù, tout sourire. Mais j'aime bien.
-Vous oubliez que c'est un classement pour Matei, leur rappela Ngôi Sao avec un sourire mais sincère. Je ne pense pas que Stefano soit du style de Matei...
Les deux garçons se regardèrent et le plus âgé, Matei, lâcha :
-Désolé, le prend pas mal...
-Mais non, fit son ami en riant. Ça me ferait plus peur si un jour, tu me sautais dessus ! Je sais bien que je ne suis pas dans tes goûts, mais ça n'empêche pas notre amitié !
-En effet, dit timidement Matei.

Ce dernier et sa meilleure amie, Ngôi Sao, avaient souvent parlé de l'apparence de Stefano. Il était plutôt mignon, et comme tout le monde le relevait en le voyant d'un peu plus près, ses yeux vifs et d'un bleu électrique fascinaient ceux des autres, ne réussissant plus à les détacher des siens.
Amenant par la même cas de figure des situations occasionnellement gênants ou troublants.
Mais le jeune garçon restait plutôt nonchalant quant au fait d'avoir une copine, ce que Helena et Mélissa tentaient de faire avec tous les moyens possibles et imaginables. Mais Stefano n'en avait rien à carrer s'il avait une partenaire, ça viendrait quand ça viendrait, ou non, et puis il n'était pas pressé. Comme Helena le lui disait si bien :
-En fait, tu t'en bats royalement les nouilles de savoir qu'on veut te caser !
-Je suis le plus jeune du groupe mais ça ne veut pas forcément dire le plus idiot, se défendit l'italien qui avait presque un an d'écart, à trois mois près, avec la plus âgée du groupe, Ngôi Sao, mais pas de la classe.

Finalement, leurs cours du matin passèrent. Quand Matei, Ngôi Sao, Mélissa et Xiù allaient en philosophie ou psychologie, Stefano et Helena allaient suivre leur cours sur la bourse, dans la branche économie.
À midi, ce fut encore, comme toujours, un brouhaha et un bronx sans nom pour aller chercher des sandwichs à la cafétéria. Ngôi Sao et Stefano, les deux seuls du groupe à amener leur propre repas de la maison, souvent des restes, devaient bien évidemment se battre ausssi, mais pour les micro-ondes. Heureusement, Stefano, plûtot grand, arrivait à se frayer un chemin en hauteur et Ngôi Sao, petite d'un mètre soixante comme dans le cliché concernant les asiatiques tous petits, y arrivait par le bas.
En réalité, elle était la plus petite de son groupe. Puis venait Mélissa, pas bien plus grande, et peu après, Xiù et Helena, plus ou moins égales dans leur taille mais cette dernière portant souvent des talons paraissait plus grande, puis après, entre les deux garçons, Stefano et Matei, on ne voyait pas vraiment de différence.

Une fois rassemblés à la même table, les six amis soufflèrent. Ils mangèrent tout en discutant et en riant et quelques amis d'autres classes les rejoignirent, comme Driss, le meilleur ami de Stefano, mais aussi Fabienne et Taniya, des filles assez proches de Ngôi Sao et Xiù mais dans une autre classe.
Toutes les deux, Fabienne comme Taniya, s'entendait bien avec Helena pour leurs blagues douteuses et ça faisait toujours rire les autres.

-Voilà le Triangle des Bermudes ! fit soudainement Mélissa en souriant et en pointant du doigt une direction.
-Moins un membre, constata alors Xiù.
-Mais plus un autre, rit alors Helena. Et pas celui attendu !
En effet, on voyait Pierrick et Massimo, les deux membres du Triangle des Bermudes, et encore Noël, un ami de Pierrick. Ils étaient souvent tous les trois fourrés ensemble et ils s'entendaient bien. Mais cela horripilait un peu Matei de voir Noël autour de Pierrick car on aurait dit qu'il voulait le faire tomber à petit feu, mais vraiment minuscule, sous son charme. Il ne faisait pas grand-chose mais Matei avait cette impression-ci.
Il ne l'aimait pas non plus. Avec ses oreilles décollées et ses lunettes, il avait plus l'air d'un premier de la classe que le charmeur d'une armoire à glace sportive tel que Pierrick qui cumulait ou avait cumulé plusieurs sports de combat. Ce qui lui avait forgé un corps magnifique et aux muscles bien visibles.
Bien que Matei se dise que Noël et Pierrick iraient bien ensemble, il ne pouvait se résoudre à se dire dans sa tête, de son point de vue d'homosexuel absolu, qu'il l'enviait quand même et qu'il ne voulait surtout pas qu'il finissent ensemble.
Ça, c'était probablement plus de la jalousie que de l'homosexualité exclusive...Mais Matei n'en avait strictement rien à faire, il n'avait pas envie de les voir en couple, c'est tout.
Selon des sources sûres, c'est-à-dire lui-même, Ngôi Sao et Mélissa que Noël aurait eu plusieurs fois des remarques homophobes et des propos déplacés. Matei espérait presque qu'il le soit pour ne pas les voir ensemble.

-Ils viennent, signala Stefano quand le trio approchait de leur table.
Quand ils leur passèrent devant, Noël les toisa presque à travers ses épais verres de lunettes, alors que Massimo leur adressa un sourire radieux, rayonnant, dont lui seul avait le secret. Ces sourires qui en secret faisaient fondre Matei tant il avait des dents parfaites et une forme de sourire sublime. Pierrick, lui, se contenta de leur adresser un petit signe de la main discret, mais qui fit plaisir à la table des amis.
Pierrick n'en avait pas l'air comme ça, avec ses un mètre huitante et sa septantaine de kilos de muscles, mais il était plutôt gentil et parfois même un peu timide. Ça n'empêchait pas qu'il soit sociable en temps normal avec tout le monde.
Quand après avoir acheté leurs sandwichs, le Triangle des Bermudes moins un et Noël vinrent s'asseoir à côté du groupe de Matei, ce dernier vira au rouge pivoine. Et comme sa peau de base était plutôt blanche, ça se voyait à des kilomètres à la ronde...Ngôi Sao, en tant que meilleure amie, se mit à rire mais évita de tout gâcher avec une remarque déplacée, tandis que Mélissa et Helena riaient en douce, le visage tourné dans la direction opposée aux trois garçons pour qu'ils ne les voient pas glousser. Stefano leva les yeux au ciel en se disant que les filles étaient parfois bizarres mais amusantes.

Soudain, Ngôi Sao entama une discussion avec Massimo, à côté d'elle et du coup, en face de Matei. Le beau jeune homme riait de son rire masculin quand elle lui racontait ses histoires sans importance mais toujours là, prêtes à être racontées, à des amis. Matei qui voyait Massimo sourire ainsi face à lui était plus rouge qu'une tomate mûre. Il essayait de se rafraîchir le visage avec sa bouteille d'eau qu'il collait à sa peau, mais cela n'avait pas vraiment d'effet...
-J'ai vu dans ton fil d'actualité que tu t'étais mis à faire du fitness ! s'exclama Ngôi Sao avec enthousiasme.
-Oui, répondit le jeune homme en gratouillant sa barbe châtain. Avec Pierrick. Il a réussi à me motiver à me bouger.
-Tu es déjà bien comme ça sans rien faire, lui fit remarquer la jeune fille.
-Non ! Je suis une grosse loque ! fit Massimo en soulevant son haut en pleine cafétéria pour montrer son ventre à son amie. Regarde-moi ça, ce reste de graisse, là ! C'est moche, j'aime pas !
Matei faillit cracher son verre d'eau sur sa meilleure amie en face de lui. Il...Il avait vu le ventre de Massimo ! Ce dernier, sans aucune pudeur, avait remonté le tissu ! Il n'en croyait pas ses yeux. Son ventre avait la peau lisse et le peu de gras qui était resté allait rapidement faire place aux abdominaux naissants qu'il se forgeait apparemment en ce moment avec l'aide et la motivation de Pierrick. Si Massimo ressemblait à Pierrick niveau gabarit dans quelques mois, Matei ne saurait plus où donner de la tête...
-Mais tu n'as pas de graisse, arrête ! protesta Xiù, s'incrustant à la conversation. Regarde-moi !
-Toi ? Tu es très mince ! lui rétorqua Massimo.
-J'ai quand même un petit bidon ! fit-elle, tête dure.

Pierrick discutait encore avec Noël alors que Mélissa s'incrusta elle aussi à la discussion entre Ngôi Sao et le jeune homme :
-Massimo ! C'est vrai que tu as posté plusieurs photos de toi nu sur tes réseaux sociaux ?
-Plusieurs, le mot est grand, soupira le jeune homme en frottant ses cheveux courts et clairs, presque blonds par endroits, avec une belle main bronzée. Il doit y en avoir trois. Mais on ne voit rien.
Matei songea alors :
-Tu m'étonnes, qu'il ne soit pas pudique du ventre, s'il a publié des nus...Il faudra que je le recherche, tiens...
-Rien ? s'exclama Helena avec un sourire de fourberie ultime. Mais c'est nul ! Il faut te montrer un peu, Massimo, tu me déçois !
-Laisse mes parties tranquilles ! fit le jeune homme en reculant sa chaise face à cette fille complètement folle. Elles ne t'ont rien fait !
-Pense à la sensibilité des plus jeunes, lui rappela Stefano en riant.
-Ce n'est pas dans mon vocabulaire, dit-elle en souriant toujours de la même manière.
-Espèce de...commença Stefano, sourire aux lèvres.
-Je m'accepte tel que je suis, c'est tout ! se justifia le beau garçon digne d'être un mannequin. Pas la peine d'en faire tout un plat pour trois photos de moi nu...
-Je ne sais pas comment tu fais pour t'assumer à tel point que tu arrives à mettre ce genre de choses en ligne...pensa Matei au plus profond de son être, dans sa déprime habituelle. Mais d'un côté, ça ne me dérange pas que des garçons comme toi existent pour pouvoir me rincer un peu l'œil...

Quand le jeune garçon se détourna de cette discussion, il dirigea son regard vers Pierrick et Noël qui discutaient. Noël riait à pleins poumons aux paroles de son ami et touchait constamment ses épaules en gesticulant de rire.
Matei aurait bien voulu lui aussi pouvoir toucher les épaules musclées de Pierrick, sportif et un peu lutteur aussi, mais il ne pouvait pas. Il ne le connaissait pas outre mesure et Noël faisait partie de des amis proches, contrairement à lui.
Alors que Matei était complètement perdu dans ses pensées, il crut alors sentir sur lui un regard. Un regard dur et noir.

Est-ce que Noël venait bien de le foudroyer du regard ?