Chapitre 15


— Evie ? m'interpelle Steph. Vous avez un bon niveau d'équitation d'après ce que nous en a dit votre ami ?

Je hoche la tête.

— J'ai un galop six.

— Je ne vais pas vous donner un cheval trop facile alors, sinon vous vous ennuieriez !

— Merci Steph ! réponds-je en souriant.

— Et vous Yael ? demande-t-elle en se tournant vers mon compagnon.

— Oh moi... Euh j'ai un galop zéro. Voire même peut-être moins un si c'est possible.

J'éclate de rire et dépose un baiser sur sa joue.

— Ne t'en fais pas, je t'expliquerai. Je suis sûre que tu vas te débrouiller.

— Mais oui ! Même pas peur !

Nous n'avons même pas remarqué que Steph est partie. Nous plaisantons, nous nous embrassons toujours avec autant d'ivresse que la première fois, jusqu'à ce que les deux femmes reviennent avec quatre très beaux chevaux. Nadège se rapproche de moi.

— Je vous présente Utopie.

Immédiatement, j'oublie totalement Yael et replonge dans cet univers qui m'a toujours été si familier et qui m'a toujours fait me sentir vivante. Je me rapproche de l'hongre baie et attrape les rênes qui ont été passées par-dessus la tête tout en lui flattant l'encolure. Puis je pose mon front sur le sien, comme si j'entrais en communion totale avec l'animal, entendant vaguement non loin de moi.

— Et voici Pipe ! J'espère que vous vous entendrez bien.

Mes yeux se tournent vers l'animal en question, qui est en fait un double poney et non un cheval, ces premiers étant souvent préférés pour les jeunes cavaliers, il était assez massif et d'une couleur grise pommelée. Je vois Steph aider Yael à grimper sur sa monture avant de se tourner vers moi.

— Vous avez besoin d'aide ?

— Absolument pas !

Je descends l'étrier sur le côté gauche d'Utopie et passe ma jambe droite par-dessus la bête. Je règle cette fois mes deux étriers jusqu'à ce qu'ils soient à la longueur parfaite pour mes jambes dans l'optique de la balade. Et nous nous mettons en route. Du moins, Steph et Nadège se mettent en route. Moi je vois Yael qui a du mal à faire avancer sa monture alors je lui souffle discètement.

— Pression du bassin et bascule ton bassin d'avant en arrière !

Il est un peu bancal sur Pipe. Mais finalement l'animal qui est habitué à suivre les autres se met à avancer de lui-même et cours même pour rattraper les chevaux en tête de file. J'entends Yael s'écrier d'étonnement et je ris avant de faire partir ma monture au trot également pour tous les rattraper. Nous avançons tranquillement au pas pendant un moment. Et, lorsque vient le moment de réellement trotter, je vois les yeux de mon compagnon, qui tourne son visage vers moi, s'écarquiller de frayeur. Ah il s'est moqué au Manoir ? C'est mon tour !

— Il faut que tu te lèves et que tu t'assoies en rythme avec la cadence de ton poney.

— Eh ! s'écrie-t-il. C'est pas un poney, c'est un cheval.

— Non en fait c'est un double poney, lui réponds-je avec un clin d'œil. Allez, hop hop !

— Je m'en souviendrai ! me menace-t-il avant de s'exécuter.

J'ai bien cru qu'il allait tomber à un moment donné. Mais c'est un gros sportif heureusement et il tient bon. Je trotte enlevé tout naturellement pour les suivre. La balade se prolonge : pas, trot, pas trot. Je dois avouer que pour une cavalière de mon niveau, ce n'est pas des plus palpitant. Heureusement que je peux m'amuser de Yael. Et puis, je m'entends bien avec Utopie. Il répond aisément à toutes mes commandes. J'avais l'habitude de chevaux bien plus compliqués que ça quand je montais encore dans mon centre équestre. Toutefois, la promenade est très agréable, le coin est très joli et je me sens apaisée du fait d'être au contact de ces animaux si chers à mon cœur.

Lorsque j'étais plus jeune et que ma mère m'en faisait baver, j'allais souvent m'isoler au centre équestre. Je rentrais dans les box des chevaux que je connaissais le mieux, ils venaient poser leur tête par-dessus mon épaule et j'entourais leur encolure de mes bras. Cela me consolait, me rassurait. Et, quand venait l'heure de rentrer, c'était toujours difficile de les quitter.

Nadège me surprend quand elle propose.

— On fait un peu de galop ?

Je sais que la question ne m'est pas réellement destinée, donc je me tourne vers Yael pour voir s'il se sent capable de le faire. En toute honnêteté, il n'a pas l'air enchanté par la proposition. Pourtant, à ma grande surprise, il répond.

— On est là pour ça !

Je me rapproche de lui et chuchote.

— Tu es sûr ?

— Oui, je vois bien que tu t'ennuies un peu. Je suis venu pour te faire plaisir, alors je veux aller jusqu'au bout. ça va aller ne t'en fais pas.

— Bon... Si tu es sûr...

J'attends néanmoins qu'il s'élance pour partir derrière lui et m'assurer qu'il ne tombe pas. Son poney s'élance à toute vitesse. Je le vois s'accrocher à sa selle alors qu'il est brinqueballé dans tous les sens. Le pauvre... En plus, je me suis toujours demandé comment les cavaliers hommes parvenaient à monter sans être gêné par leur anatomie. De ce côté là, je ne peux malheureusement lui promulguer aucun conseil.

Je tends ma jambe droite derrière pour donner un léger appui sur l'arrière-train de ma monture qui s'élance sans problème au triple galop pour rattraper le peloton. L'adrénaline remonte immédiatement dans mes veines, un large sourire s'étend sur mon visage et je savoure ce sentiment de liberté que je chérie tant. J'inspire à plein poumons, profitant de cette sensation qui me permet de tout oublier. Ce soir je pleurerai de douleur, mais cette journée en vaut très largement la peine.

Une fois de retour au pré, nous mettons tous pieds à terre. Je m'approche de Yael avec Utopie.

— ça va ? demandé-je avec une petite grimace de sollicitude.

Il se tourne vers moi avec un large sourire.

— Oui ! C'était vraiment génial !

Je lui envoie un baiser de loin, puis rejoins les femmes pour leur proposer d'aider à desseller, ce qu'elles acceptent immédiatement. Je prends tout mon temps pour brosser les poils de mon fier destrier, retire la terre sous ses sabots, lui embrasse le front, puis le ramène dans le pré. Du coin de l'œil, j'aperçois que Yael a imité mes gestes et s'est très bien débrouillé. Nous remercions chaleureusement nos accompagnatrices qui ont été très gentilles tout au long du parcours. Elles nous proposent de boire un verre ensemble, mais Yael explique qu'il souhaite se promener un petit peu avec moi avant de rentrer.

Nous nous rendons en ville. Yael achète un pack de bière, puis me prend par la main et m'entraîne dans un champ où il n'y a nul animal ni plantation. Il dépose sa veste sur le sol pour que nous puissions nous installer, puis il m'ouvre une petite bouteille et me la tend.

— Nous n'avons presque pas bu aujourd'hui ! remarque-t-il. Il faut que je rattrape ça parce que sinon tu vas rentrer et te demander ce que tu pouvais bien me trouver !

— Tu rigoles ? questionné-je. Franchement je suis surtout étonnée qu'un type comme toi soit encore célibataire. Sérieusement, comment ta femme a-t-elle pu te laisser partir ?

Il hausse les épaules en ouvrant une bouteille pour lui et la tend pour trinquer avec moi avant de répondre.

— Franchement, je ne sais pas trop comment on en est finalement arrivé au divorce. Enfin, si. Je sais...

— Alors, comment ? demandé-je avec une curiosité croissante.

— Les premières années de notre relation étaient... sympa...

— Sympa ? l'interromps-je. Rien que ça ?

Il grimace.

— Ouais, j'étais un peu idiot à l'époque..., répond-il avant de poursuivre. Mais après assez peu de temps, elle est tombée en dépression et ne faisait absolument rien pour s'en sortir. Notre relation s'étiolait... jusqu'à ce que je finisse par la tromper...

— Quoi ? m'écrié-je avec étonnement.

Honnêtement, je ne m'étais pas attendue à ça de lui et je dois dire que cela me déçoit grandement. Ne dit-on pas qu'un homme qui trompe ne s'arrête jamais ? (Ou quelque chose comme ça.) Je sens alors le peu de confiance qu'il avait réussi à gagner de ma part reculer soudainement. Comment puis-je avoir confiance dans un homme qui a trompé sa femme alors qu'il était marié ?

Je le vois qui m'observe. Il a dû remarquer que je suis devenue soudainement pensive. J'oublie toujours à quel point il peut être observateur.

— On aurait pas dû discuter de ça, ajouté-je. C'est privé.

— Pas pour toi, assure-t-il. Dis-moi à quoi tu penses.

Je me mordille la lèvre nerveusement, je prends une grande inspiration et me rappelle qu'on s'est toujours promis d'être honnête l'un envers l'autre.

— Alors comment puis-je être sûre qu'il ne m'arrivera pas la même chose ? finis-je par murmurer en baissant les yeux.

Il pose alors une main sous mon menton et me force à lever le visage vers lui. Il attend que mon regard soit ancré dans le sien avant de me répondre.

— Je ne suis pas un homme comme cela malgré les apparences. Ça a été une énorme erreur de ma part que j'ai énormément regretté. Le peu de filles que j'ai connu après ça ? Jamais je n'ai recommencé. Et la situation était particulière, notre amour avait disparu depuis bien longtemps. Je t'en prie, ne t'inquiète pas de cela.

— D'accord...

Mais il est impossible que je ne m'inquiète pas. C'est pourquoi nous finissons nos bières dans un silence religieux, jusqu'à ce que je finisse par le rompre.

— On peut rentrer ?

***********************************************************************************************Note à bonnet : je tiens à m'excuser de ma petite semaine d'absence mes loulous, mais ce que je peux vous promettre c'est que cette histoire ne sera pas une histoire abandonnée.

Bisou, bisou

Selina au Pays des Merveilles

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