Aparté
Disclaimer : Bien entendu, les personnages ne m'appartiennent pas !
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« Aparté »
Des pieds qui martèlent le sol, des pas qui s'envolent et le portent dieu sait où. Fuir. Courir. Le plus loin possible et ne plus y penser. Des flashs, toujours des flashs qui apparaissent dans sa tête et un cri de désespoir et de rage mêlé qu'il ne peut plus contenir.
« Merde !! Merde !! »
Dans la rue, les passants le regardent comme une bête curieuse, s'écartant sur son passage, comme s'il risquait de les attaquer, comme s'il était dangereux. Finalement, arrivé dans un square, il s'assied contre un tronc d'arbre, le souffle court, les joues rougies par le manque d'air, la sueur perlant le long de sa tempe, le cœur battant la chamade et les poings serrés, faisant entrer ses ongles dans sa peau fragile.
« Merde...merde... »
Sa voix n'est plus qu'un murmure. Doucement, il relève la tête, observant ce ciel étoilé qu'il apprécie tant habituellement. Une première larme roule, suivie d'une seconde. Frustration. Rage. Désespoir.
« C'est pas vrai... »
Un sanglot qui lui pique de plus en plus la gorge et finit par s'emparer entièrement de lui. Ses épaules tressautent, son buste s'affaisse et ses poings s'encastrent dans le sol égratignant ces mains dont il a toujours pris soin, éraflant jusqu'au sang ses doigts tout à l'heure immaculés et maintenant couverts de sang, son sang.
* * *
L'entraînement s'était terminé quelques minutes plus tôt, mais le coach avait tenu à garder le passeur un peu plus longtemps pour lui parler. Certains joueurs étaient déjà rentrés chez eux. Il n'était pas rare qu'Oikawa reste un peu pour discuter. Il fallait encore prévoir quelques petites choses avant les prochains matchs et tout devait être parfait. Or, l'obsession de la perfection, c'était son dada.
Après avoir remercié le Coach, le capitaine d'Aoba Jôsai se dirigea vers les vestiaires afin d'y prendre une douche bien méritée. Il n'était que dix-huit heures, sa mère ne devrait pas trop s'inquiéter. Inutile de lui envoyer un message tout de suite.
Avant même de pousser la porte, il savait. Cela lui arrivait parfois sur le terrain, cette impression de savoir, quelques secondes avant tout le monde, ce qui allait se passer. En général, c'était à son avantage et cela lui permettait de marquer des points qui laissaient ses adversaires désemparés. Or, aujourd'hui, ça s'accompagnait d'un drôle de pressentiment. Et les pressentiments, comme Obi-Wan Kenobi dans Star Wars, Oikawa n'aimait pas ça. Parce que, la plupart du temps, il avait raison.
Avec appréhension, il entra dans les vestiaires, la gorge sèche, son cœur battant un peu plus vite qu'à l'ordinaire. Iwaizumi se tenait face à lui, la tête dans sa serviette, séchant vigoureusement ses cheveux courts. Était-ce les muscles saillants de ses bras ? Ses pectoraux musclés ou encore son pantalon, un peu trop descendu sur ses hanches ? Ou encore peut-être ces quelques gouttes d'eau qui roulaient le long de son torse athlétique et finement dessiné ?
Le passeur eut bien du mal à déglutir, le rouge lui montant immédiatement aux joues et un creux s'installant dans son estomac. Ce n'était pas la première fois qu'il voyait Iwaizumi aussi dévêtu, bien entendu. Mais, avec la lumière tamisée de la pièce, avec la fatigue qui n'aidait sans doute pas, le passeur sentit que cette vision qu'il avait devant les yeux, le hanterait jusqu'à la fin de ses jours. Car ce qu'il voyait quand il contemplait son attaquant, ce n'était plus la simple amitié mais un désir profond, vorace qu'il ressentait comme une vague déferlante qui anéantit tout sur son passage. Et, pour la première fois depuis longtemps, son sourire de façade avait disparu.
Reculant d'un pas pour essayer de quitter la pièce sans être remarqué, il heurta un objet au sol. Hajime leva les yeux, les sourcils arqués par la surprise.
« Qu'est-ce que tu fais dans l'entrée ? Tu devrais aller prendre une douche Shittykawa, tu vas attraper froid. »
Sa voix habituelle, un peu rauque, dure, presque froide. Rien n'avait changé pour lui. Alors que pour le passeur, tout un monde qu'il avait cherché à laisser de côté jusqu'à présent venait de lui apparaître, comme une révélation, comme si un miroir venait de se briser pour laisser entrapercevoir la réalité.
« Je... »
Iwaizumi, semblant remarquer qu'Oikawa n'était pas dans son assiette, avait déposé sa serviette sur un banc et s'était approché de lui, quelques centimètres les séparant à peine.
« Quelque chose ne va pas ? Tu n'as pas l'air bien. »
Du bout des doigts, il approcha sa main du visage du châtain, comme s'il s'apprêtait à prendre sa température. Lorsque ses doigts le touchèrent, le passeur ferma les yeux, essayant de lutter comme il le pouvait contre cette vague de désir qui se brisait contre le peu de détermination qui lui restait.
Sans comprendre lui-même ce qu'il faisait, le capitaine de l'équipe repoussa les mains de son attaquant et, l'attrapant brutalement par la taille, il l'attira à lui pour l'embrasser. Ses lèvres étaient fraîches et sucrées et son envie ne fit que redoubler. Iwaizumi demeura un moment figé, complètement crispé, mais il finit par répondre à son baiser avec la même avidité. Ses mains étaient passées entre temps sous le t-shirt trempé de son capitaine et caressait ses abdominaux. Un gémissement échappa au passeur qui, réalisant enfin ce qu'il faisait, le repoussa sans ménagement, l'horreur se lisant de son regard.
« Je... Je n'aurai pas dû... Je », furent ses derniers mots avant qu'il ne quitte la pièce en courant, sans même penser à prendre ses affaires.
* * *
La lune était déjà bien haute dans le ciel. Le sang avait commencé à coaguler sur les jointures de ses mains. Les larmes, quant à elles, s'étaient taries depuis un moment. Il n'avait pas envie de rentrer. Car, en passant le pas de sa porte, la réalité lui reviendrait en plein visage et toutes les pièces du puzzle coïncideraient les unes avec les autres. Il avait embrassé son meilleur ami ; celui qu'il connaissait depuis qu'il était tout petit. Et Hajime avait répondu à son baiser.
Dehors, le fond de l'air commençait à se rafraîchir. Il ne portait en tout et pour tout que son short et son t-shirt. Un long frisson parcourut son échine. Bien sûr qu'il ne pouvait pas rester ici toute la nuit. Il fallait rentrer et espérer seulement qu'on ne lui poserait pas de questions.
S'appuyant légèrement sur ses bras, il se releva et marcha, tel un fantôme dans la nuit sombre, ses pas l'amenant jusqu'au perron de sa maison. Il rentra, lançant un « tadaima » un peu étranglé auquel il n'eut aucune réponse car la maisonnée était visiblement vide. Tant mieux. Il monta dans sa chambre, s'allongea sur son lit et sentit un objet sous son dos. Son téléphone. En regardant autour de lui, il s'aperçut que son sac de sport était aussi là. Iwa chan. Il avait dû les lui ramener.
Son portable vibra dans sa main. Iwa chan. Il décrocha, la gorge sèche, la main endolorie, écoutant seulement :
« Shittykawa ? Tu es rentré ? Je sais que tu es là. Tu n'aurais pas décroché sinon. J'arrive. Il faut qu'on parle. »
Une tonalité. Il venait de raccrocher. Ses vêtements moites collaient à sa peau encore humide, ses mains lui faisaient un mal de chien, et son visage avait perdu toutes ses couleurs.
Seul son cœur semblait battre à un rythme régulier, bien qu'un peu fort. Boum boum boum. C'était apaisant de voir que le corps humain était capable de faire quelque chose d'aussi précis, d'aussi constant, comme une horloge. Ses pensées vagabondaient, incapables de se fixer sur un élément précis.
Seuls des coups à la porte de sa chambre le firent réagir. Oikawa et Iwaizumi se connaissaient depuis suffisamment longtemps pour savoir où la clé de secours était cachée dans chacune des deux maisons. Il ne s'étonna donc pas de voir son meilleur ami, sur le pas de la porte de sa chambre. Meilleur ami ? Pouvait-il décemment l'appeler encore ainsi avec ce qu'il venait de se passer ? Un frisson parcourut sa nuque et ses cheveux se hérissèrent doucement, la chair de poule s'installant sur l'ensemble de son corps.
Le passeur n'avait pas ouvert les yeux. Qu'essayait-il de faire croire ? Qu'il dormait ? Un corps qui s'assied à côté du sien, une main qui attrape la sienne sans ménagement et un soupir.
« Tooru, regarde l'état de tes mains... »
C'était rare qu'il l'appelle ainsi. En général, il le faisait lorsqu'il était inquiet et qu'il cherchait à le faire réagir. Fermement, le châtain retira sa main et se recula, faisant enfin face à Iwaizumi.
Son vis-à-vis ne réagit pas et sortit de la pièce pour aller chercher la trousse à pharmacie, toujours au même endroit, dans la salle de bain, dans le tiroir de gauche, au-dessus des serviettes. Il avait passé tellement de temps ici qu'il connaissait l'emplacement de chaque chose.
Cette fois-ci, ce fut avec plus de fermeté qu'il lui attrapa la main et commença à la panser avec une douceur infinie. Le passeur qui d'habitude était un puit de parole ne disait pas un mot.
« Qu'est-ce qu'il t'a pris ? Tu as vu l'état de tes mains ? Et tu ne t'es même pas changé... Tooru, parle-moi. Je déteste quand tu agis comme ça.
- Que veux-tu que je te dise ? »
Deux regards qui se croisent et ne semblent plus se comprendre. Une détresse infinie face à une détermination sans borne. Les masques étaient tombés. Des deux côtés. Inutile de se cacher, pourquoi le faire après tout. Était-ce bien utile ?
« Je ne regrette pas. » finit par lâcher Iwaizumi alors qu'il prenait sa seconde main pour la désinfecter et y enrouler délicatement un bandage.
Un silence. Très long. Trop long.
« Ce qu'il s'est passé tout à l'heure, je ne regrette pas. Le chemin, je l'avais fait depuis un moment moi. Je me demandais juste...quand tu te déciderais à le faire. Ces mains ShittyKawa, sont faites pour frapper des ballons, pas pour s'encastrer dans dieu sait quoi. D'accord ? »
Un hochement de tête.
« Retire tes vêtements, ils sont trempés. »
Le brun s'était déjà levé et dirigé vers l'armoire du passeur pour y récupérer un t-shirt propre et un jean qu'il lui tendit sans le regarder afin de ne pas le mettre mal à l'aise. Son ami s'exécuta et s'assit sur le lit après s'être changé.
« C'était comme si... Comme si je te voyais vraiment.
- Comme quand on a enfin des lunettes adaptées à sa vue ? Ça m'a fait ça, à moi aussi.
- Quand ?
- Il y a quelques années maintenant. Mais j'ai attendu car je ne voulais pas tout détruire. »
Ils étaient assis l'un à côté de l'autre, épaule contre épaule. Oikawa ferma alors les yeux et laissa sa tête rouler dans le cou de son meilleur ami. Iwaizumi attira son passeur un peu plus contre lui et le serra dans ses bras, ayant repris son attitude habituelle ; calme et presque froide. Il y décela toutefois plus de douceur qu'à l'ordinaire.
Ce qu'Oikawa avait toujours apprécié avec son meilleur ami, c'était cette force sans faille contre laquelle il pouvait s'appuyer. Iwa chan était son roc, celui qui ne s'écroulait pas malgré les fortes tempêtes, malgré les vagues qui engloutissaient tout sur leurs passages.
« Je suis bien avec toi Iwa-chan.
- Alors ne pense pas à autre chose. C'est tout ce qui compte. »
Relevant légèrement le visage du châtain, Iwaizumi déposa un baiser sur ses lèvres, s'accordant ce qu'il avait refusé de s'accorder depuis trop longtemps : céder à ses désirs. Oikawa y répondit, doucement d'abord, puis avec plus d'assurance, la boule présente dans sa gorge se déliant au fil des secondes.
Bien sûr, Iwaizumi savait que cette soirée était un aparté, que son passeur reprendrait ses grands sourires et ses grands airs dès le lendemain, un masque bien lisse présent de nouveau sur ses traits. Mais une chose était certaine, il serait encore une fois le seul à voir le vrai Oikawa, celui qui l'embrassait maintenant à pleine bouche en passant ses mains sous son t-shirt comme si sa vie en dépendait. Ce Oikawa-là, il était le seul à le connaître et il se rendait bien compte de la chance qu'il avait.
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Ça m'est venu d'un coup comme ça en écoutant Allo Lola de Superbus ce matin XD !
Cela fait du bien de réécrire sur Haikyûu, c'est comme retrouver un ami perdu de vue depuis longtemps xD !
N'hésitez pas à me donner votre avis !
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