Antithèse

Je regardais la falaise en dessous de moi. Les vagues s'heurtaient à la paroi rocheuse dans une douce mélodie et la lune affichait un reflet tourmenté sur celles-ci. L'air salin avait, depuis longtemps, prit possession de mes narines tandis que l'humidité de ce soir d'été me collait à la peau. Des gouttes de sueur coulaient le long de mon corps nu seulement couvert d'un léger caleçon, ma combine orange et noire étant posée quelques mètres deçà. Je ne me souciais pas que quelqu'un me surprit, car alors, je ne serais probablement plus de ce monde. Je souris doucement en ayant cette pensée. Oui, tout serait fini ce soir. Plus rien n'existerait et je pourrais peut-être commencer à vivre. Quelle antithèse. Je souris de plus belle en posant un pied dans le vide. Mon fragile équilibre bascula. Je n'agitai pas les bras comme je l'aurais fait habituellement parce que, cette fois, je ne luttais pas. J'étais trop fatigué de me battre contre un univers qui ne voulait pas de moi. Ces réflexions pouvaient sembler égoïstes ou hypocrites, mais je n'en avais vraiment plus rien à faire. J'avais fini de jouer dans cette cour où je me souciais de l'avis des autres. Tandis que j'achevais cette pensée, mon corps bascula vers les eaux tumultueuses. Je détaillai avec fascination les mouvements répétitifs et pourtant, dans un certain sens, imprévisibles des vagues, seules témoins de ma lente chute aux enfers. Sous les forts vents, la transpiration ornant mon enveloppe charnelle se laissa glisser dans l'air. J'inspirai ma dernière bouffée, peu avant qu'une saillie ne m'entailla la joue. Le chaud liquide serpenta sur pommette avant de ne s'écouler avec paresse dans l'immensité de la mer. La petite caresse de la douleur réveilla mon esprit de survie qui installa un effroi contrastant drastiquement avec la joie m'emplissant à la seule idée de ne plus souffrir. J'ignorai les signaux d'alarme qui s'allumèrent dans mon cerveau pour me concentrer sur les sensations qu'éprouvaient mon être. J'appréciai, une ultime fois, le contact de la brise sur mes tissus biologiques, la symphonie de la nature et l'enlace des rayons de l'astre blanc avant que mon corps ne soit plongé dans un liquide frais. Je sentis ma chaleur corporelle baisser tandis que mon être se perdit dans le courant. Ma tête s'heurta à de nombreux rochers, mais je gardai conscience. Par une autre poussée, je me retrouvai sur le dos et je fixai avec difficulté la voûte céleste brouillée par les torrents. Mon esprit de conservation hurlait, mais mon âme n'en avait que faire. Cette dernière ne voulait que partir en observant une des seules choses en valant la peine. Un sentiment de plénitude me saisit. Je me sentais infiniment mieux ici, balloté dans tous les sens et ayant pour vision la plus belle des beautés de ce monde. Je ne ressentis jamais le manque d'oxygène, captivé par la magnificence de ces derniers instants. Je perdis, finalement, la notion du temps et ne sus que ma fin était arrivée quand le ciel s'obscurcit plus qu'il n'était supposé l'être. J'offris mon sourire final à la spectatrice de ma déchéance et accompagné d'une sérénité, je fermai, définitivement, mes prunelles céruléennes. 

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top