29. Retour dans le passé
Je fais irruption dans la salle, un lance-patate dans la main. Les yeux de Rosolphe-Bébert s'agrandissent, avant de passer de moi à moi.
« Heiiin ? Ils sont... deux ? »
Le chef de l'OCM fait apparaître un nouveau cookie.
« Moui, depuis le tout début, je me faisais passer pour moi.
— Vous êtes aussi... des frères jumeaux ?
— Pas exactement ; je suis lui, ou devrais-je plutôt dire moi, mais en plus vieux.
— Et moi, je suis moi, mais en soleillé. »
Rosolphe-Bébert marque un temps d'arrêt, tandis que Gruk se cogne la tête contre un mur. Insensible à mon trait d'humour, Otton dégaine son arme ; quant à Médusa, je crois qu'elle fait mine de ne rien avoir entendu.
L'heure est probablement à la baston, de toute façon.
Rodolphe-Albert esquisse un sourire.
« Et c'est... tout ? Vous espériez triompher de moi à vous quatre ?
— Pas exactement. »
Un mur explose pour révéler un dragon rouge éclatant, Zogothar, chevauché par Gudule en personne.
« Salut ! »
Derrière un topinambour, une ombre se matérialise pour abattre le légume du tranchant d'une huître.
Enfin, une porte s'ouvre.
« Je suis l'un des doubles de ChristopheNolim, je crois. Et je brille même dans le noir, même s'il faudrait éteindre l'éclairage électrique pour que ce soit plus spectaculaire. Imaginez qu'il fait noir et que je brille. »
Il arme son lance-patate ; je m'élance.
« Nous sommes légions, Rodolphe-Albert, aucun de tes légumes ne pourra nous arrêter. Aujourd'hui marque ta fin définitive.
— Tortils au citron et au safran... »
Des tirs s'échangent, une nuée de chauves-souris traverse la pièce avant de se muer en silhouette vêtue de noir. Les lames du vampire-garou sifflent aussitôt et coupent net, au sens propre comme au sens figuré, la vaillante contre-attaque d'une poignée de fenouils.
« Gorzül... » grogne Rosolphe-Bébert.
Le navet s'empare à son tour d'un sabre.
« Géronimooooo. »
Un poulet-garou percute aussitôt le légume pour le propulser dans un recoin de la pièce.
« Ces pâtes sont exclusivement colorées et parfumées par des épices et des huiles essentielles. Elles apportent une touche colorée et gustative à vos assiettes. »
Je me dissimule derrière une table renversée. Les explosions parcourent la pièce, les tirs s'échangent de toutes parts, dans la plus grande confusion. Même des Wattpadiens affluent pour se joindre aux combats, à moins qu'il ne s'agisse de fangirls et fanboys hystériques à la poursuite du vénéré Gudule. Ou sans doute les deux, vu que ledit Gudule comme cette Antibiographie restent des exclusivités Wattpad...
On publie vraiment n'importe quoi sur ce site, en fait.
« Salut, moi. »
Je redresse la tête.
« Euh, salut.
— J'ai quelque chose, pour moi. »
Je me tends une carte. Derrière nous, des potimarrons arment une catapulte pour atteindre une soucoupe volante ; l'appareil s'écrase, mais plusieurs yaourts en sortent, suivis par une cohorte d'une fan.
« Alcibiade ! Je suis votre plus grande fan ! Gloire à la SPYE ! »
Ignorant le tumulte, je poursuis mes explications.
« J'ai indiqué l'emplacement exact où je trouverai – ai trouvé – le bambou magique. Je vais bientôt en avoir besoin.
— Bientôt ? Je vais être projeté dans le passé ?
— Je savais tous les deux que ce jour arriverait. En échange, je suis cependant censé me remettre le fragment de Clé que je possède. »
J'effectue l'échange.
« Bon courage pour la suite, maintenant.
— À moi aussi.
— FR Ingrédients : semoule supérieure de blé dur*, huile essentielle de citron*, curcuma*, safran*, poudre d'œuf*
*issus de l'agriculture biologique.
Fabriqué en France dans nos ateliers. »
Une tornade de paquets de pâtes balaie la pièce principale, les légumes sont repoussés par rangées entières. Seul le dénommé dieu carotte échappe en partie à l'attaque, parvient à repousser le flot pastafariste et, irisé d'étincelles, vole jusqu'à moi.
« ! Où crois-tu donc aller ainsi, comme ça ? Tu ne m'échapperas pas ! »
Je me réfugie dans l'embrasure d'une porte pour éviter une salve d'éclairs vindicatifs. Des tables se soulèvent, plusieurs tapis prennent feu.
« Tu causeras peut-être la perte des légumes, mais je causerai la tienne. » reprend la carotte.
Un personnage tertiaire essaie de s'interposer, mais, aussitôt projeté contre un mur, ne parvient qu'à renforcer l'effet dramatique.
Je profite de la diversion pour faire feu. La trajectoire des patates s'incurve pour éclater contre un mur.
« Tu ne peux plus m'échapper ! »
J'évite des éclairs et quelques boules de feu ardentes. Maintenant constituerait un excellent moment pour avoir une bonne idée. Je m'arrête.
« Euh... légume, quels que soient tes efforts, tu ne pourras me vaincre, car je suis mon moi du présent, et mon moi du futur, ou du moins du futur de mon passé, enfin mon passé à venir, futur, donc, bref, mon moi futur est vivant, donc, en clair...
— Tes prétendus paradoxes temporels ne m'intéressent guère. Ce bouquin n'en est plus à ça près.
— Alors, oui, euh, mais non. Enfin...
— Mouhahaha ! »
Craquement. Une silhouette sombre se matérialise juste entre nous deux. J'écarquille les yeux.
« Tu es... revenu ?
— Hein quoi, bien sûr que je suis revenu ! C'est moi, Z..., je suis ici pour recevoir mon nom ! »
Son regard ahuri parcourt le couloir dévasté avant de s'arrêter sur nos regards tout aussi ahuris.
« Euh, qu'est-ce qu'il se passe, ici ? »
Je tente une explication.
« Alors, pour faire simple, tu es à la bonne date, mais pas tout à fait à la bonne heure, tu as au moins une demi-heure de retard.
— Hein ? Quoi ? Mince, je repars dans le passé, alors. J'ai hâte de connaître mon véritable nom, mouhahaha ! »
Alors que de nouveaux éclairs parcourent le dieu carotte, je me jette sur Z... au dernier instant. Nous disparaissons tous les deux, juste avant la déflagration.
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