18. Le Grand Chef


« Ayayaya ! »

Une armée d'un cornichon fait irruption dans la pièce. Robert lance une coquille d'huître ; le cornichon s'effondre.

« Arg...

— Hum, ils ne devraient pas tarder à comprendre qu'attaquer à plusieurs est plus efficace, commente Medusa. Ne perdons pas de temps. »

Elle allume un écran. Une silhouette apparait, mais la mauvaise qualité de l'image empêche de la distinguer.

« L'inhibiteur est coupé, nous n'attendons plus que vous. »

Je m'approche, intrigué.

« C'est lui, le chef de l'Organisation ?

— Krouiii, skrouch, krak... »

L'image est mauvaise, mais le son aussi.

« Ayayayaya ! »

Nouveau cornichon, nouvelle coquille d'huître. Robert affiche une mine réjouie.

« Remarquez quand même que je viens de repousser deux vagues d'assaut à moi tout seul, s'enorgueillit-il. J'aurai bien mérité mon salaire. »

La communication avec le chef se coupe, Medusa fait apparaître des flammes vertes, au centre de la pièce. Je profite de l'occasion pour manger un dernier cookie.

Les flammes se dressent, tournoient, avant de prendre forme. Je souffle une question à Medusa.

« Heu, et c'est elle, le chef de l'OCM ?

— Hein ? Quoi ? Non, c'est moi, FeuFoLex. Et je rapporte même les tracts, avec moi.

— Heu, et le chef, c'est qui, alors ? »

Craquement, je me retourne.

« Moi, bien sûr. »

L'homme vient de se matérialiser dans la pièce, en même temps qu'une chenille verte armée d'un mégaphone.

« Elenasticot ? Qu'est-ce que tu fais ici ?

— Quelle question, je viens de me téléporter grâce à mes pouvoirs asticotins. Et d'ailleurs, JE. SUIS. UN. ASTICOT. Sinon, ça fait longtemps que je n'étais pas apparue dans ce bouquin. Je suis sûre qu'il manque des virgules ! Où est-ce qu'on spamme ? Quand est-ce qu'on mange ? Manifestation ! RAMPLAMPLAMPLAMPLAM...

— Heu, sans doute, et lui, c'est qui ? Et qu'est-ce que vous faites tous ici ? »

Je dévisage le nouvel arrivant. Des cheveux en pétard, une barbe anarchique, un air ahuri...

« Hum... cette tête me dit quelque chose...

— Je l'espère bien, c'est la vôtre, me fait remarquer Medusa.

— Hein ?

— Je porte un masque, bien sûr, pour dissimuler ma véritable identité. Après tout, je reste le chef, bien que légèrement contesté, d'une société secrète.

— Mais pourquoi un masque de moi ?

— Parce que nous sommes tous les deux des personnes remarquables, c'est bien connu.

— Finalement, vous m'avez l'air plutôt sympathique. »

Medusa se cogne le front avec la main.

« Et allez, c'est reparti. Les cornichons arrivent, alors tenez-vous prêts, plutôt.

— Et regardez donc, j'ai même réussi à rentrer en possession du bambou de légende. N'est-ce pas fantastique ? »

Il agite son arme et des cookies se mettent à pleuvoir. Je m'enthousiasme aussitôt.

« Mais c'est génial ! Je viens à peine de découvrir son existence grâce à un générateur d'improbabilité ! Comment l'avez-vous obtenu ?

— Un présent de la part du dieu des cadratins africains, disons que l'Organisation possède quelques sponsors. »

J'attrape des cookies et mange. Mais des cornichons interrompent cet instant de félicité absolue pour envahir la pièce.

Une déflagration verte de Medusa repousse une première rangée, Robert lance des coquilles d'huître, FeuFoLex, des boules de feu, Elenasticot joue du tambour, Grymm_ se transforme en rutabaga pour passer inaperçue, le chef de l'OCM fait pleuvoir des cookies, je continue de manger.

Malgré tous ces efforts, les cornichons parviennent à prendre du terrain et passer la porte d'entrée.

« Ayayaya

— Ayayayaya

— Ayayaya

— Ayayayaya. »

Etc.

« Ils sont trop nombreux, constate Medusa. Il va falloir appeler des renforts. »

Histoire que l'on ne me reproche pas de ne rien faire, je me décide finalement à tirer dans le tas avec mon lance-patates. Plusieurs cornichons sont projetés en arrière et poussent des cris de Wilhem.

« Hum, il s'agit d'un cas d'urgence, nous allons devoir appeler Alphonse, remarque le chef de l'OCM.

— Non, pas Alphonse ! »

Grymm_ s'enfuit pour se cacher sous une armoire. Je reste perplexe.

« Heu, vous connaissez Alphonse, aussi ? »

Des éclairs parcourent la pièce. Une chaussette multicolore apparaît face aux cornichons médusés.

« Je suis Alphonse, l'esprit de toutes les chaussettes ! Et j'espère que vous ne me dérangez pas pour rien dans ma réflexion méditative !

— Hein ? Mais où sont les chaussettes ? C'EST UN USURPATEUR ! »

Alphonse se tourne vers Elenasticot.

« Heu, quoi ?

— Il faut prononcer trois fois le mot "chaussettes" pour t'invoquer, normalement !

— Heu, non, pas du tout. Comme je l'ai déjà dit, il faut que trois personnes prononcent mon nom dans trois répliques qui se suivent. Or, comme je suis l'esprit de toutes les chaussettes, vous pouvez aussi bien dire "Alphonse" que "chaussette" ; les deux sont équivalents. »

Son regard s'attarde sur Grymm_, dissimulée sous le meuble.

« Certains en savent quelque chose, d'ailleurs...

— Heu, j'ai manqué quelque chose ? demande FeuFoLex.

— Je crois que Grymm_ s'est amusée plusieurs fois à l'invoquer dans des commentaires Wattpad et qu'il n'a pas trop apprécié, à la longue.

— Il m'a transformée en chaussette !

— En même temps, ça reste un esprit multimillénaire. Avec un mauvais carac... »

Alphonse se tourne vers moi.

« Heu... ce que je voulais dire, c'est que... »

L'arme d'un cornichon se déclenche et une patate rebondit sur la chaussette. Alphonse se retourne aussitôt, furibond.

« Vils margoulins ! Comment osez-vous ? »

Des éclairs crépitent, les cornichons battent en retraite. Plusieurs légumes s'effondrent au sol, transformés en chaussettes, d'autres continuent de courir en tous sens.

« Ah, et avant de partir, prévient Alphonse, les chaussettes ne sont pas comestibles. Si, d'aventure, je croise un margoulin en train d'essayer d'en manger une, je le transforme à son tour en chaussette. C'était ma parole du jour. »

Puis il disparait dans une pluie de paillettes et de chaussettes colorées.

« Ouais, on a gagné ! »

Medusa tourne la tête dans ma direction.

« Mais tu n'as rien fait, en plus...

— Si, j'ai lancé une patate, ça compte. Ma contribution à ce dénouement victorieux est donc non nulle.

— Ayayayaya !

— Ayayayaya !

— Ayayayaya !

— Ayayayaya !

— Heu... »

Un groupe de quatre cornichons tente une vaillante contre-offensive.

« Ils sont au courant d'être en infériorité numérique, maintenant ? »

La gorgone hausse les épaules.

« Que voulez-vous ? Ce sont des cornichons... »

Elle étend ses doigts verts, une nouvelle déflagration projette les légumes en arrière.

« Ouais, on a gagné ! »

Pour fêter l'événement, je mange un cookie.

Puis la vitre explose, Gorzül rentre dans la pièce et se matérialise sous sa forme de vampire-garou. Il se redresse et se précipite vers moi.

« JB ! Je suis venu te sauver ! »

Il balaie la pièce dévastée du regard.

« Euh, j'ai manqué quelque chose ? »

Je hausse les épaules.

« Un affrontement contre des cornichons malaisiens et de sombres histoires de complots de sociétés secrètes. Par contre, il reste des cookies.

— Ah, euh, chouette. »

Je lui tends un gâteau et Gorzül m'accompagne dans ma dégustation. FeuFoLex, quant à elle, s'approche du chef de l'Organisation.

« Tu vas pouvoir reprendre la tête de l'OCM, remarque-t-elle. Plus qu'à distribuer les tracts, maintenant, et continuer de réunir de nouveaux Wattpadiens. »

Je hausse un sourcil interrogateur.

« Je ne sais toujours pas qui vous êtes, d'ailleurs. Ni ce que vous cherchez à faire, ni ce que des Wattpadiens de ma connaissance font avec vous, d'ailleurs.

— Ah, c'est vrai ça. »

Il retire son masque, je le dévisage. Des cheveux en pétard, une barbe anarchique, un air ahuri...

« Hum... cette tête me dit quelque chose...

— Bien sûr, c'est toujours la vôtre, commente Medusa.

— Nous sommes la même personne, remarque le chef, du coup, on peut se jejoyer.

— Ah, heu, d'accord. »

Je me serre la main.

« Enchanté de faire ma connaissance, JB. Je sais que je suis mon plus grand fan.

— Mais tout l'honneur est pour moi, j'adore ce que je fais, aussi.

— Oh merci beaucoup, je dois dire que je suis quelqu'un d'exceptionnel. »

Gorzül échange un regard consterné avec Medusa, mais je suis sûr que tous deux masquent leur joie face à ma rencontre avec moi-même.

« Et... comment est-ce seulement possible ? » tente le vampire-garou.

Je – enfin, l'autre je, le chef de l'Organisation – se tourne vers lui pour répondre aussitôt.

« Hum... quelques péripéties concernant le nom de Z..., disons, voyage dans le temps, tout ça... Enfin, je ne vais pas spoiler ma propre histoire, non plus.

— Une superbe histoire, d'ailleurs. »

Gorzül soupire face à mon intervention. J'en profite pour admirer l'un des tracts rapportés par FeuFoLex. Des tracts réalisés par le chef de l'Organisation en personne, autrement dit, moi, donc à ma gloire, donc forcément superbes. Un appel au sauvetage du monde contre la tyrannie légumineuse de Rodolphe-Albert ; il me semble effectivement que ce point doit faire partie de ma to-do list, enfin, après penser à faire des courses pour remplir mon réfrigérateur quelque peu délaissé...

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