Une odeur de Monoï

Elle est allongée. Par terre, sur l'herbe. Ça fait presqu'une semaine qu'elle vient, tous les soirs. Elle gravit la petite colline au fond du parc et s'installe, toujours au même endroit. Le premier jour, elle était juste assise. Les écouteurs dans les oreilles, elle y est resté une petite demi-heure, à fixer le vide. Le lendemain, elle avait changé de veste, et s'est allongée. Elle semble tellement paisible. Tout le monde l'a remarquée depuis le temps, mais personne ne sait qui elle est. Quand elle s'allonge comme aujourd'hui, on a l'impression qu'elle dort, entourée de rayons de soleil. Ses cheveux noirs et bouclés reposent sur son sac, sur sa veste qu'elle ne met jamais. La tête inclinée vers le reste du monde, elle nous observe les yeux fermés. Comme si elle ne faisait pas partie de notre monde.

Il fait chaud mais elle est toujours en jean. Jean et basket. Je me suis approché une fois. Les garçons jouaient au basket, je m'apprêtais à rentrer quand j'ai décidé de faire un détour et de passer devant elle. Plus personne n'allait sur la colline, c'était son territoire. Elle ne parlait pas, souriait seulement aux petits enfants qui s'approchaient de trop près. J'étais au pied de la colline, devant la face qui avait été aménagée en gradin de trois étages. Tout en haut, elle était couchée. J'ai gravis les gradins fait de terres et d'herbe. J'avais l'impression de m'élever vers un autre monde, je sentais le poids de la pesanteur m'attirer vers le sol et m'éloigner d'elle. Je montais la troisième marche et posais mes yeux sur elle.

Elle me regardait. Elle ne semblait pas surprise, elle n'affichait en vérité aucune émotion. Elle avait les yeux profondément noirs. Je n'en avais jamais vu de tels. Je m'approchais encore, mes jambes agissant de leur propre volonté. Je finis par me retrouver à ses côtés, me tenant debout tandis qu'elle me dévisageait sans rien dire. La brise souffla dans mon dos, j'hésitais à dire quoi que ce soit. Mon sac tomba à côté du sien et mes genoux se dérobèrent. Je tombais à genoux à côté d'elle. Elle tendit la main et je me raidis. Ses doigts avancèrent jusqu'à mon visage qu'ils effleurèrent doucement avant de se perdre dans mes cheveux. Je me détendais à son contact et fermais les yeux. Quand je les rouvris, j'étais allongé sur l'herbe, la tête sur son ventre.

Elle jouait dans mes cheveux et je sentais le rythme de sa respiration me bercer. Je fermais les yeux encore une fois, apaisé.

Je ne connais pas son nom, je ne lui ai jamais demandé. Mais depuis ce jour, je la rejoins sur la colline tous les soirs après l'entraînement. Elle joue dans mes cheveux et je l'écoute respirer.
Je ne sais pas qui elle est, d'où elle vient. Je sais juste qu'elle sera au parc demain et que j'irai la rejoindre jusqu'à la tombée de la nuit, comme d'habitude depuis maintenant quelques semaines. À regarder la nuit venir.

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