08 - Magie

Hein ? Que... Qu'est-ce que tu veux dire par là ? »
— Je veux dire qu'il nous est arrivé un truc de dingue. Viens avec moi.
— Pardon ?!
— Viens !

Elle m'attrapa soudainement par le poignet et se mit à tirer de toutes ses forces. Mais que me voulait cette fille, bon sang ?!

Aïe ! Lâche-moi, tu me fais mal ! m'écriai-je, ne comprenant pas ce qu'elle me voulait.Mais lâche-moi, espèce de folle !
— Suzy, ne discute pas et suis-moi !
— Non, lâche mon poignet !
— Tu l'auras voulu...

Alors que j'étais toujours en train de me débattre, elle lâcha soudainement mon poignet. Les lois de la physique me giflèrent en pleine face quand toute l'énergie que j'avais investie à essayer de me libérer de l'emprise de l'autre Suzy me fit tomber dans la fontaine. Parfait. Il ne manquait plus que ça.

Regarde ce que tu as fait, espèce de malade ! Je suis toute trempée ! hurlai-je, hors de moi.

J'étais trempée de la tête aux pieds. Et j'allais devoir rentrer chez moi dans cet état... Je baissai les yeux sur mes vêtements flottants dans l'eau, remarquant pour la première fois depuis mon réveil que ce n'était pas ceux que je portais avant l'accident.

C'est quoi, ces fringues ?! Je ne me suis jamais habillée comme ça ! Jamais je ne serais capable de porter ce genre de vêtements !
— Et c'est justement pour ça qu'il faut absolument que tu viennes avec moi ! Allez, sors de là !

Alors que je venais tout juste de lever un pied, elle saisit de nouveau mon pauvre poignet et m'aida à sortir de la fontaine. Ne me laissant même pas le temps de la remercier, elle se mit à courir vers la sortie du parc comme si elle savait parfaitement où elle allait, même en pleine nuit. Le vent frisquet qui faisait voler nos cheveux dans notre course ne semblait pas la déranger mais j'étais sûre que moi, ça allait m'enrhumer. Trempée, malade, avec la voix cassée, des vêtements chelou, et trainée dans une course sans intérêt par son clone fou... cette situation pouvait-elle s'empirer ?

Brusquement, Suzy-bis s'arrêta dans une rue éclairée par quelques réverbères ci et là, juste en face d'un vieux café bizarre. Nine Tails. Je vivais à Woodbury depuis ma naissance, et je n'étais même pas au courant de son existence.

— Reste calme, s'il te plait, je ne suis pas en train de t'enlever, ni quoi que ce soit, lâcha l'inconnue alors qu'elle toquait à la porte d'entrée du café.

J'opinai du chef, la regardant cogner le poing de plus en plus fort tout en poussant des grognements d'impatience. Après quelques secondes, une voix masculine – ma foi, très charmante – lui cria qu'il arrivait, et donc, d'arrêter d'agresser cette pauvre porte. Cette dernière s'ouvrit sur un jeune homme – ma foi, très charmant – qui avait l'air de s'être tout juste levé. Eh bien, ça devait être le cas, je doute qu'il soit resté debout jusqu'à cette heure de la nuit, se disant qu'il pourrait peut-être aider une fille trempée et sa jumelle psychopathe.

Il inspecta la psychopathe en question avec un air de « mais t'es qui, toi ? » avant de poser son regard – ma foi, très, très charmant – sur moi.

— Oh, Yerim ! Mais qu'est-ce que tu fiches là à une heure du mat' ? Et tu es toute trempée !s'exclama-t-il.
— Quoi ? Mais je ne suis pas Ye-...

L'autre Suzy plaqua une main violente sur ma bouche, comme si j'avais dit quelque chose qu'il ne fallait pas, et fit un sourire angélique au jeune homme. Mais pourquoi est-ce qu'elle m'avait emmenée là, bon sang ?

Hahaha, rit-elle de manière on ne peut plus fausse. Mark, c'est ça ?
— Euh... oui, approuva le garçon. Et vous...?
— Oh, je suis Bae Suzy, une élève de Mademoiselle Kim ! La pauvre avait oublié son sac à main au bord de la fontaine au parc, et en allant le chercher, elle est tombée dans l'eau ! J'étais là et...
— Yerim était au parc de Woodbury en pleine nuit ? Et vous aussi ?
— Oui... Elle était saoule, et...
— Mais je ne suis pas saoule, enfin ! rétorquai-je.
— Mais bien sûr, madame, bien sûr, se moqua Suzy en caressant mon dos. Enfin bref, c'est une longue histoire ! reprit-elle en s'adressant au prénommé Mark. Je me demandais juste si on pouvait utiliser la salle de bain du café, s'il vous plait ?
— Oui, euh, bien sûr, c'est au fond du couloir à gauche, indiqua-t-il. Et euh... Tu veux que je te passe un essuie, Yerim ?

Ce mec continuait de m'appeler Yerim ! Mais qu'est-ce qu'il avait, à nous comparer comme ça ? Prof Lim et moi n'avions aucune ressemblance, aucun point commun ! Bon, à part le fait que nous étions toutes les deux envieuses de la vie de l'autre, chose pour laquelle nous nous sommes engueulées la veille. Mais ça, ça ne changeait rien. Ou si ?

J'en prendrai un en passant par le comptoir, merci ! répondit l'autre à ma place.

Elle attrapa mon poignet et me tira à l'intérieur du café, jusqu'à l'arrière du comptoir où elle attrapa un essuie rouge. Elle se dirigea vers le couloir des toilettes, et à mi-chemin, se retourna vers ce Mark qui nous regardait toujours, souriant maladroitement.

Au fait...Désolée de te déranger à une heure si tardive. Je te revaudrai ça à coup sûr !
— Oh...

Il se contenta de hocher la tête tout en se grattant la nuque. J'avais l'impression qu'il allait s'écrouler de fatigue, mais je ne pus m'empêcher de le trouver mignon... et un peu sexy... juste un peu. Ohlala, mais pourquoi est-ce que je pensais à ça dans une situation pareille ?

En un quart de secondes, je me retrouvai enfermée dans les toilettes du café avec cette femme qui me rendait dingue depuis que j'avais ouvert les yeux. Elle ferma la porte en prenant une grande inspiration avant de laisser tomber ses mains sur mes épaules.

Suzy, commença-t-elle d'un air sérieux.
— Oui, c'est bien comme ça que je m'appelle. Et toi aussi, non ? Je veux dire, tu as exactement la même apparence que moi, et tu... Tu viens du futur ?
— Suzy, tais-toi et écoute, je t'en supplie !
— D'accord. Je me tais, mais t'as intérêt à me donner des explications qui tiennent la route, insistai-je en croisant les bras sur ma poitrine, en partie pour cacher le soutien beige qui transparait à travers le débardeur blanc mouillé que je portais sous un gilet ouvert.
— Bon... C'est que... Il nous est arrivé un truc de dingue. Genre, de ces trucs que tu ne vois que dans les films. Et je suis certaine que je ne rêve pas, je me suis giflée plusieurs fois.
— Oui, tu m'as giflée aussi, lui rappelai-je.
— Oui... Bon... Je te demande de ne pas être trop surprise quand tu auras compris ce qu'il nous est arrivé. Non... Je te demande juste de ne pas gueuler.
— D'accord, je ne crierai pas ! Dis-moi juste ce qu'il s'est passé, je crois que je vais mourir de curiosité.
— Eh bien, il suffit de regarder dans le miroir, Suzy.

Quand elle me dit ça, la pensée que ce miroir pouvait être un portail vers une autre dimension me traversa l'esprit. Ça n'aurait été qu'une suite logique à tous les événements que je venais juste de vivre.

Et puis, j'eus vite fait de me retourner vers le miroir et enfin comprendre ce qu'il nous était réellement arrivé. À ce moment-là, aucun – absolument aucun – son ne s'était permis de sortir de ma bouche. Je restais juste devant ce miroir, à nous contempler Prof Lim et moi, moi et Prof Lim. J'étais elle, Kim Yerim. Elle était moi, Bae Suzy.

— Tu comprends, maintenant ?


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