01 - L'histoire d'un baiser
Bae Suzy ; Woodbury, Minnesota, États-Unis ; Le 22 Mai 2011.
C'était un beau matin de mai, un dimanche, pour être précise. Je m'étais réveillée avec un énorme sourire scotché au visage, me rappelant ma joyeuse fête d'anniversaire de la veille. La fête de mes seize ans, le jour de ma majorité américaine, était grandiose comparée à celle d'hier mais, je ne sais pourquoi, elle n'était pas aussi signifiante. Je venais d'avoir dix-huit ans ; je me sentais fraîche, adulte et libre.
Je sautai de mon lit, me précipitai dans mon petit dressing et après avoir jeté mon pyjama par terre, m'habillai d'une jolie chemise imprimée de fleurs que je rentrai dans une jupe noire. Je courus ensuite vers ma commode pour prendre mon téléphone et allai dans ma salle de bains, puis me rappelai que hier soir, trop fatiguée, j'étais allée me coucher sans prendre de douche. Quelle patate, je m'étais déjà habillée, en plus... ! Je me déshabillai rapidement pour aller sous la douche, en sortir dix minutes plus tard et me rhabillai. Je me coiffai, brossant mes longs cheveux bruns pendant des siècles pour qu'ils soient impeccablement lisses, puis mis un peu de crème sur mon visage. Après avoir pris mon petit sac de cuir noir, je sortis de ma chambre et me précipitai dans la cuisine, manquant de me casser la figure dans les escaliers. La pièce était encore assez bordélique, après la fête d'hier... Je regardai vite-fait autour de moi pour voir s'il n'y avait personne dans les alentours... Parfait, j'étais seule. Sur la pointe des pieds, j'allai prendre un croissant au chocolat dans l'armoire où notre domestique range les pâtisseries qu'elle cuisine. Ça devait faire au moins un mois que je n'en avais plus mangé, et il avait l'air si délicieux... J'avais envie de le savourer à mon aise, mais, entendant le claquement des talons de ma mère se rapprocher, je finis par l'engloutir en trois bouchées et allai vite chercher un verre pour me verser du jus d'orange. Elle jeta un coup d'œil à mon verre sans faire de commentaires avant d'aller fouiller le frigo à la recherche du bacon de mon père. Elle poussa un cri de victoire quand elle le trouva et... le jeta à la poubelle.
— Ça l'apprendra à dire à Bertha de lui acheter des crasses alors que je l'ai mis au régime !
Je roulai les yeux en buvant tout mon jus d'une seule gorgée et lui dis que je sortais.
— Hop hop hop, tu vas où, comme ça ?
— J'ai un rendez-vous avec Taecyeon.
— Ah ! Viens là !
Bien sûr, je ne pouvais en aucun cas aller à un rendez-vous avec Taecyeon sans passer par le radar-beauté de ma mère... Donc, je m'avançai vers elle, et elle me reluqua de la tête aux pieds. Elle réfléchit alors pendant de très longues secondes, alors que je commençais déjà à m'impatienter.
— Tu devrais te maquiller un peu, finit-elle par dire.
— Non, maman, Taec' aime les filles naturelles, répondis-je en forçant un sourire. Tu devrais le savoir, après trois ans, poursuivis-je tout bas.
— Bon... D'accord. T'es bien, tu peux sortir comme ça.
— Merci maman, je reviens avant midi.
— Prends ton temps, et comporte-toi bien, d'accord ?
— T'inquiètes, je vais gérer comme d'habitude et t'auras toute sa famille en poche dans moins d'un mois, ajoutai-je avec un sourire crispé, le pouce en l'air.
Ma mère me jeta un regard glacial et j'effaçai tout de suite mon sourire, avant de m'incliner légèrement et me dépêcher de quitter la cuisine, sans pouvoir retenir un petit soupir en chemin. Je me chaussai, puis sortis, et pris une grande bouchée d'air avant de me mettre à marcher. Après une centaine de mètres seulement, j'arrivai au point où mon petit-ami m'avait donné rendez-vous. Un bar à la fois chic et décontracté, du genre : « je bois mon petit cocktail à cinquante balles en rigolant avec mes amis et en écoutant des remix des derniers tubes vomitifs de l'été faits par un DJ pas connu ». C'était justement ce qu'il était en train de faire, Taecyeon, tout en accrochant ses lunettes de soleil sur le col en « V » de son T-Shirt orange. Assis à la même table, Nickhun et Fei étaient en train de rire tellement fort que mes oreilles commençaient déjà à siffler. Et tout de même, je me forçai à faire un beau sourire tout en marchant dans leur direction et priant pour le bon déroulement de cette journée, puisque ça arrivait rarement quand cette très chère Fei était dans les parages. Non, ne vous méprenez pas : je n'avais rien contre Fei, c'était elle qui me détestait. Elle ne pouvait pas supporter sa cousine Jia, et par conséquent, offrait toute sa haine aux deux meilleures amies de celle-ci. Ces deux amies étions Min et moi-même. Elle avait pourtant l'air cool et j'aimais bien sa coiffure de l'époque. Les frisettes ne lui allaient absolument pas, mais la coiffure, elle, était pas mal.
— Salut ! dis-je aussitôt que je fus arrivée à leur table.
— Hey ! me saluèrent Taecyeon et Nickhun.
Ayant reçu les bonjours des deux garçons, j'orientai mon regard vers Fei, attendant qu'elle dise quelque chose, n'importe quoi, mais elle ne semblait toujours pas d'humeur à m'adresser la parole. Elle posa son verre sur la table d'un mouvement sec, puis chuchota à Nickhun qu'elle allait aux toilettes. D'un pas empressé, elle entra dans le bar, se frayant un chemin vers les toilettes dans la foule. Mon regard se posa, pour un millième de seconde, sur l'arrière de sa jambe gauche. On pouvait toujours apercevoir, le long de sa cuisse, une cicatrice de l'énorme griffe qu'elle s'était faite ce soir-là.
C'était en 2009, le soir de la fête de mes seize ans. À l'époque, mon groupe d'amis s'entendait plutôt bien avec la cousine de Jia. J'avais donc invité Fei à ma fête d'anniversaire, ainsi que plus de la moitié du lycée. Quelques heures après le début de la soirée, Min et moi attendions, devant la porte des toilettes du premier étage, que Jia ait terminé de se remaquiller. Cela faisait quatre mois que Nickhun et elle avaient rompu et elle s'était mis en tête qu'elle allait le récupérer ce soir-là. Elle avait pourtant raconté dans tout le bahut qu'elle l'avait plaqué parce qu'il était chiant et que « ça ne lui ferait même pas l'effet d'un pincement au cœur si la plus moche des filles sur Terre sortait avec ce déchet ». Eh bien, elle semblait vraiment avoir changé d'avis !
Après un assez long moment, Jia était enfin sortie des toilettes et nous avait fait un grand sourire accompagné d'un clin d'œil. Nous étions descendues ensemble au rez-de-chaussée où la fête avait lieu, et j'étais directement allée chez Taecyeon qui se dandinait avec JaeBum à côté de la coupe de punch.
—Hey, avais-je presque crié pour être sûre qu'il m'entende.
— Hey, m'avait-il alors répondu avec son petit sourire charmeur habituel.
— Tu sais où est Nickhun ?
— Je l'ai vu sortir dans le jardin, pourquoi ?
— Non, rien. Merci !
Je fis donc signe à mes amies de me suivre vers le fond du salon d'où il fallait passer pour se rendre dans l'immense jardin de notre villa. Jia était sublime, plus souriante que jamais. Maintenant que je me rappelle la scène, je me rends compte qu'elle avait adopté une démarche extrêmement assurée, ce qui était, d'habitude, la marque de fabrique de Min. D'où venait toute cette assurance ? Avait-elle concocté un plan totalement démoniaque ? Elle ne nous avait rien dit, alors j'avais hâte de la voir passer à l'action, et je ne doutais pas que Min aussi. Juste devant la porte-fenêtre qui menait à l'extérieur, Jia nous demanda de l'attendre et regarder discrètement pour éviter que Nickhun découvre qu'elle avait amené toute sa clique, mais aussi d' « apprendre de la plus grande pro de l'histoire de la récupération d'ex ».
Du coup, Min et moi étions restées à l'intérieur tandis que Jia allait dans le jardin, disparaissant complètement de notre champ de vision au fur et à mesure qu'elle avançait vers notre gauche.
— Tu penses qu'on devrait passer de l'autre côté du salon pour mieux la voir ? avait demandé mon amie.
— Mh, peut-être qu'on ne devrait pas... Laissons-leur un petit moment d'intimité, elle va de toute façon tout nous raconter plus tard.
— Ouais, tu as raison. Bon, allons danser !
Min m'attrapa la main, me tirant vers la foule, mais un bruit étrange parvint à mes oreilles, et je m'arrêtai pour mieux écouter. J'avais à peine réussi à l'entendre, avec toute cette musique, mais j'avais le mauvais sentiment que c'était un cri... et sûrement pas un cri d'excitation. Ayant remarqué mon attitude étrange, Min m'avait demandé ce qui n'allait pas. Je lui avais alors dit que j'avais entendu quelqu'un hurler, les sourcils froncés. Pour un laps de deux secondes, elle fit de même, et puis, cria un prénom que je n'avais franchement pas envie d'entendre dans une situation aussi louche.
— Jia ! Putain, peut-être qu'il lui est arrivé un truc, on doit vite aller voir !
La seconde qui suivait, nous étions déjà en train de courir les cinq mètres qui nous séparaient du jardin. Nous nous étions ruées à l'extérieur, et une fois arrivées près de notre amie, quelque chose de pas très agréable nous avait sauté aux yeux : Fei, par terre, la cuisse gauche recouverte de sang. Juste à côté, Nickhun était assis sur le banc, les yeux écarquillés, pendant que Jia, plantée devant lui, se vidait les poumons à l'engueuler.
— Mais qu'est-ce que tu fous, appelle les urgences !
En quelques minutes seulement, Min avait réussi à ramener trois rouleaux de sopalin pour aider Fei, Jia avait crié tellement fort sur Nickhun qu'elle avait réussi à le faire pleurer, l'ambulance était arrivée pour emporter la blessée, et je n'avais toujours rien pigé à cette situation.
Plus tard, finalement calmée, Jia m'avait expliqué que quand elle était allée chercher Nickhun, elle l'avait trouvé assis sur un banc, en train de rouler un patin à Fei. Elle n'avait pas pu se contrôler, et avait poussé sa cousine, la faisant tomber sur le gazon. Par malheur, un clou mal planté avait méchamment écorché sa jambe gauche, la marquant à jamais.
C'est depuis ce jour que les deux se détestent.
C'est depuis ce jour que je n'ai jamais eu droit à une seule parole de la part de Wang Fei.
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