• XXIV • Les yeux d'un enfant

• Perdu sur une autre planète. Dans une galaxie lointaine. Entre les étoiles de la voie lactée et des constellations inconnues. Mon âme dérive.

Errant au sein de l'appartement de Shouta, j'ai passé la semaine à imaginer comment aménager notre nouveau chez nous. Et de tout ce que nous aurons besoin, surtout pour le bébé chaton.

Officiellement en congé maternité, j'avoue éprouver une petit pointe de nostalgie lorsque mon corps réclame quelque pas sur le rythme des notes résonnant dans l'écho de mon esprit. J'ai tellement trimé pour réaliser ce rêve de gosse. Pour finalement, faire déjà une pause longue durée au bout d'à peine six mois.

Les imprévus de la vie des grands. Tout ne se passe pas forcément comme tu l'avais écrit sur la trame de ton parcours d'ado. Par chance, cette aventure-ci s'annonce tout à fait heureuse et remplie de bonheur. Un petit bout de soleil placé là par inadvertance.

L'emménagement est prévu dans deux semaines, on a réservé notre week-end pour cela. Quémandant des bras dans tous les coins, tous répondirent présents.

Enfin, c'est surtout parce qu'on est entourés de poivreaux qui veulent juste faire la fête. Les cons, ils ont pas compris qu'ils vont juste en chier à ma place. Pour la crémaillère, ils attendront qu'un certain garnement sorte de son cocon douillet.

Je vais donc passer les semaines suivantes à faire les cartons, jonglant entre l'appart et la maison familiale pour récupérer mon bordel entassé là bas. Au plus grand bonheur de tous, cela va m'occuper l'esprit suite à cet arrêt d'activité qui m'aurait sûrement fait exploser plus tôt que prévu.

En ce samedi midi automnal, je m'active derrière les fourneaux dans le but de préparer un repas digne de la tradition familiale. Je vais enfin rencontrer cette femme si spéciale qui as permis à mon chat de prendre son envol loin de son nid nocif.

J'en serai presque intimidé. C'est l'unique personne de sa famille que je rencontrerai. N'ayant de tout manière, pas vraiment l'envie de connaître les autres.

Je me rappellerai toujours le soir où Shouta a rencontré mes parents. En tant que petit ami officiel j'entends. La pression qu'il s'est mis, c'était drôle. Je me suis bien foutu de sa gueule. J'avoue, c'était pas sympa, à sa place j'aurais sûrement fait une syncope. Mais il était tellement mal à l'aise que ça en été mignon. Et puis, quand tu n'es pas habitué à ma mère, y'a de quoi flipper. Le pauvre.

Je sens des mains venir se balader sur mon torse, m'enlaçant tendrement.

- Ça sent tellement bon. Que nous prépares-tu ?

- Un curry

- Parfait ! Tu le fais tellement bien

Je souris, gêné. J'aime bien quand il me fait des compliments sur mes plats.

La porte sonne. Je me mets à paniquer comme un abruti parce que j'ai pas fini mes gyosas. Du coup, je me crame avec la poêle et je fous de l'huile partout. Le con.

- Arrête de stresser, idiot de petit chat

Je l'entends se marrer en allant ouvrir la porte. Méchant, j'ai mal.

Mes conneries rattrapées, je sors de la cuisine au moment où ils pénètrent dans le salon. Je découvre une très belle femme. De longs cheveux gris entourant un visage illuminé d'un sourire bienveillant. Je balance un "bonjour" tout timide. La honte.

- Heureuse de te rencontrer enfin, Katsuki. Shouta m'a tellement parlé de toi que j'ai déjà l'impression de te connaître par coeur

- A ce point là ?

- Nan, elle exagère toujours, intervient Shouta, le rouge aux joues. Je te présente donc Airi, ma marraine

Elle se met à rire gentiment. Ils se dirigent vers le canapé et moi dans la cuisine pour aller chercher mes grignotterries et de quoi trinquer.

Prenant place à leurs côtés autour de la table basse, je sers le cocktail sans alcool que j'ai préparé, écoutant d'une oreille leur conversation. Mal à l'aise le mec. Mon humeur maussade fut interrompue par leur nouveau sujet de discussion. Moi et mon gros ventre.

- Alors mon petit Katsuki, comment se passe tout ça ? Shouta est gentil avec toi ? La grossesse se passe bien ? Pas trop difficile pour toi ? Es-tu déjà en congé maternité ? Content de déménager ?

- Doucement ! La coupe Shouta. Laisse-le répondre au moins !

- Oui pardon, j'ai tendance à m'emporter

- Je dirais oui à tout ça

Elle se mit à rire de nouveau. C'est drôle, cette femme, c'est l'inverse de Shouta. Elle s'entendrait bien avec Deku je crois.

- Pas de regret ?

- Nan aucun

- J'en suis ravie !

Se rapprochant de moi, elle me murmure à l'oreille.

- Tu sais, il est très très amoureux de toi. Je ne l'avais jamais vu aussi attaché à quelqu'un

- Je t'entends, dit Shouta les joues aussi colorées qu'un Ibis rouge.

Son rire résonne de plus belle, teintant mes pommettes d'un rose barbe à papa. Qui ne s'atténue pas au fur et à mesure du repas. S'accentuant plutôt, sous ces compliments face au curry et à mes mocchi au matcha.

- Vous verrez, un enfant, ça change votre regard sur le monde

Elle nous quitte sur ces paroles en milieu d'après-midi, après une embrassade affectueuse, promettant de passer le jour de l'emménagement.

Les mains occupées à la vaisselle, mon amoureux vient se glisser près de moi.

- Alors ?

- Je l'aime bien

- Vraiment ? Tu ne dis pas ça pour ne pas me vexer ?

- Nan, sérieux. Elle est très gentille et ne  dégage qu'affection et amour

- J'en suis heureux alors

Il m'embrasse la tempe avant de retourner à son bureau, croulant sous les préparatifs administratifs de notre nouvelle vie pour le reste de la journée.

Je l'abandonne à son sort pour aller prendre l'air sous le soleil descendant.

Assis sur un banc dans le parc en face de l'appart, je me perds dans l'observation des formes se dessinant dans les nuages.

Plus jeunes, avec Deku, on s'amusait à passer nos après-midis allongés dans l'herbe pour regarder le ciel rempli de toute sortes d'histoires fantastiques.

Ma contemplation fut interrompue par une bouille de petit monstre apparaissant dans mon champs de vison.

- Dis, pourquoi t'as un gros ventre comme quand maman avait ma petite sœur dedans ?

Je rigole. Fallait bien que ça m'arrive un jour, ce genre de situation malaisante.

- Parce que moi aussi je vais avoir un bébé

- Mais t'es un garçon

- C'est pas parce que je suis un garçon que je ne peux pas avoir de bébé

- Mais papa il a dit que je pourrai pas avoir de bébé parcque je suis un garçon. Y'a que les mamans qui peuvent

- Et bien ton papa s'est trompé. Des fois, il arrive que certains garçons puissent avoir un enfant

- Comment t'as fait pour que la maman mette le bébé dans ton ventre ?

Je ne peux m'empêcher de rire franchement. La naïveté des gosses, c'est magique.

- C'est mon amoureux qui l'a mis dedans, comme les papas. Même si je suis un garçon, mon corps est fait comme celui de la maman. Il y a une petite place dedans pour le bébé

- Ton amoureux c'est un garçon ?

- Oui

- Le bébé, il va avoir deux papas alors ?

- C'est ça oui

- Il aura pas de maman ?

- Il aura un papa et un papa-maman

Il ouvre de gros yeux scintillants, sa petite bouche formant un O.

- Trop de chance !

- Tu trouves ?

- Oui, c'est trop génial !

- Pourquoi ça ?

- J'aime bien ma maman parce qu'elle me fait pleins de câlins. Mais avec mon papa, on fait toujours des trucs trop cools. Du coup ton bébé, il aura un papa trop cool et un autre papa trop cool qui fait pleins de câlins. C'est super trop bien

- Tu as raison, il a trop de chance

Sautillant sur place, il fait volte-face et part en courant, gigotant sa petite main en l'air.

- Au revoir monsieur maman

Un sourire aux lèvres, je le regarde retourner jouer dans le bac à sable, passant déjà à autre chose après avoir obtenu une réponse qui le satisfait.

Pourquoi en grandissant, on doit perdre cette petit étincelle qui rend le monde si beau. Voir la vie comme un gosse, c'est tellement plus joli et ça éviterait tant de tristesse. J'aimerai que mon bébé ne perde jamais cette innocence.

- Déjà si impatient que ça ?

Je sursaute comme un débile. Tellement perdu dans mes pensées, je n'avais pas vu mon chat s'assoir près de moi.

- De quoi tu parles ?

- Tu es assis devant un parc pour enfants

- C'est ça, fous-toi de moi

- Je ne me moque pas, je te trouve adorable

- T'es con

- Je t'aime

- Hum.. moi aussi

Reprenant contenance, je lui raconte ma petit discussion surprise. Sa voix se veut rassurante.

- Tu vois, tous les enfants ne sont pas horribles entre eux

- C'est pas forcément les gosses qui me font peur. C'est surtout les parents

- Oui je comprends

- C'est tellement des éponges à cet âge là. Le mimétisme étant la base de leur apprentissage, suffit que les parents soient des gros connards homophobes pour que notre enfant se fasse harceler

- Ne part pas défaitiste. Il ne sera pas forcément victime de harcèlement

- Y'a toujours un petit con dans une classe. Je le sais, dans la mienne, c'était moi

- Arrête de ressasser ça idiot de petit chat. Aller, rentrons, il commence à faire frais. Omurice ce soir ?

- Carrément

Sur le chemin du retour, le bras de mon amour autour de mes épaules et mon haut laissant peu d'imagination à ce qu'il se cache en dessous, de nombreux regards se sont perdus sur nous. Aucunement remplis de dégoût ou de haine. Seulement quelques éclats de tendresse.

Merde, peut être suis je trop pessimiste. Pourquoi ne pas essayer de voir le monde à travers les yeux d'un enfant pour une fois •

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