Chapitre 8

Assise sur l'estrade du terrain de foot, j'écrivais tranquillement dans un cahier. Ce n'était pas mon journal intime. C'était juste un de ces moments où je n'avais personne à qui parler et donc j'écrivais. C'était comme si je parlais au cahier.

"Cher cahier, aujourd'hui nous sommes le 15 août. C'est le jour qu'ils m'ont donnée pour mon anniversaire. Donc techniquement, aujourd'hui je rentre dans ma dix-septième année. À chaque anniversaire, je prie pour que je fête le prochain avec mes parents, mes véritables parents, mes géniteurs. Actuellement, je n'ai aucune véritable famille à part Zoé que je considère comme ma sœur..."

Pendant ce temps, quelqu'un m'observait. C'était un jeune homme. Cheveux bruns, bien soignés, des yeux marrons, il était torse nu. Allez savoir pourquoi. Il fit un bruit qui me fit sursauter. Je le reconnus. C'était le capitaine de l'équipe de football du lycée. Il s'approcha et s'assis à côté de moi. Il regardait le ciel pendant que je regardais son torse bien musclé avec des abdos en béton. Cela se voyait qu'il faisait beaucoup de sport. Un instant après, il me regarda droit dans les yeux et me dit :

- Ce sont les gamines qui écrivent des journaux intimes. T'en est une ?

- Non.

- Alors qu'est-ce que c'est ? (En montrant des yeux mon cahier)

- C'est ce qui me permet de moins me sentir seule.

- Je vois.

Il regarda à nouveau le ciel qui d'ailleurs commençait à s'assombrir. Il venait d'être seize heures.

- Dis, pourquoi es-tu torse nu ?

- Ils m'ont arrosé. Du coup, j'ai dû faire sécher mon maillot. Je pensais qu'il n'y aurait personne.

- Pourquoi t'ont ils arrosé ?

- Parce que c'est mon anniversaire aujourd'hui.

- Joyeux anniversaire alors.

- Merci. À toi aussi.

- Merci. Quel âge as-tu ?

- Dix-huit ans. Et toi ?

- Dix-sept.

- Au fait, moi c'est Henry

- Annita.

- Orpheline ?

Je le regardai avec un air interrogateur.

- Tu parlais en écrivant. Je n'ai pas pu m'empêcher de t'entendre.

Je ne dis rien.

- Un sujet sensible. Je n'insiste pas.

Nous restons silencieux. Je continuai à écrire, en silence cette fois-ci, jusqu'à ce que le son du tonnerre ne me coupe.

- Ton maillot risque de se remouiller.

- Et toi tu risques d'attraper froid.

- Peu importe. Je ne tiens pas particulièrement à ma vie.

- Tu sais quoi ?

- Quoi ?

- Tu te comporte en gamine. Change ça. Et reste cool. (En se levant)

Il s'en alla. Seize heures quarante et la pluie commença. Je n'ai pas bougé de là où j'étais. Je recevais des milliers de gouttes sans rien faire. Mon cahier était complètement mouillé. Alors je le déchirai en mille morceaux avant de le jeter sur le terrain déjà boueux. Puis je me mis à dire en haussant la voix, pensant que personne ne m'observait :

- Je plonge mes douleurs dans cette boue. Personne ne les déterreront. Personne.

Mes larmes coulaient mais comme il pleuvait, cela ne se remarquait pas. Puis Henry vint vers moi. Il avait déjà enfilé son maillot.

- Espèce de gamine entêtée. Vient te mettre à l'abris.

Je ne l'écoutais pas.

- Je noie mon chagrin à travers cette pluie pour que personne ne le remarque. Personne.

Il me regarda. Je ne savais pas s'il était ému ou s'il avait pitié. Il vint me prendre dans ses bras et me serra très très fort contre lui. Il s'en fichait que la pluie le frappe. Ensuite, il me donna un doux et tendre baiser sur mes lèvres. Je me suis laissée emportée. Pendant un instant, j'oubliais tout ce qui était autour de moi et tout ce qui m'était arrivée. Ce fut à ce moment précis que je découvris pour la première fois ce qu'on appelle l'amour.

Allongée sur une planche, je repensais à ce moment là. Actuellement, quand j'y pense, j'ai mal. Pourquoi ? Parce qu'il s'est avéré être un coureur de jupons, un homme à femmes, un idiot qui joue avec les sentiments d'autrui, un abruti qui aime faire tomber toutes les filles à ses pieds. Et le pire, c'est que je suis tombée dans son piège. Jusqu'aujourd'hui je ne sais pas si ce jour-là, c'était réel ou si c'était juste une histoire de pari comme il avait l'habitude de le faire. Oui, de pari.

«Soit maudit Henry Kingston !»

C'est ce que je me répétais jusqu'à ce que mon père ne vienne me couper.

- Suchis ?

- Non merci. Je n'ai pas faim.

- Il faut que tu reprennes des forces.

- Mais je n'en ai pas perdu.

- Annita !

- Bon d'accord.

PDV Zoé

«Surveillez Zoé ou elle finira elle aussi une balle dans la tête.»

Je me remémorais cette phrase en allant voir Maëlle dans sa chambre.

- Zoé, je suis occupée. Que veux-tu ?

Je fermai la porte à clé avant de répondre :

- Je trouve notre père bizarre depuis la venue de Monsieur Oumar.

- Il l'est toujours quand monsieur Oumar lui rend visite.

- Ah bon ? Comment ?

- Stress, angoisse. Comme si monsieur Oumar ne venait que pour le menacer ou lui annoncer une mauvaise nouvelle.

- C'est toi la sociologue.

Maëlle était déjà une jeune femme. Âgée de vingt-quatre ans, elle avait une silhouette bien dessinée. Très intelligente, elle a fait ses études en sociologie et en psychologie. Elle disait que son rêve, c'était de faire du profilage, de pouvoir se mettre dans la tête d'une personne. Et elle était sur le chemin de la réussite.

- Papa traîne dans des affaires louches et cela ne date pas d'hier. (Dit Maëlle)

- Nous devons réagir.

- Entre l'arbre et l'écosse, on ne met pas le doigt.

- Et s'ils menacent le doigt ?

- Pardon !?

- Écoute ça.

J'eus la bonne idée d'enregistrer la conversation :

-Que fait-on ? (Demande l'invité)

- Monsieur Oumar, faîtes ce que vous voulez mais laissez moi en dehors de tout ça.

- Vous étiez notre fournisseur. Pourquoi avoir renoncé ? Nos affaires chutent.

- Tant pis.

- Isabelle m'envoie vous dire que soit vous reprenez votre poste, soit elle tue un de vos enfants. À vous le choix.

- Il n'y a plus de stock.

- Ça c'est votre problème. Réapprovisionnez vous. Les plus demandés sont le cœur, les reins et le foie.

- Je vais voir ce que je peux faire.

- Très bien monsieur O'Brian. C'est très bien. Autre chose.

- Quoi encore ?

- Surveillez Zoé ou elle finira elle aussi une balle dans la tête.

- Du trafic d'organes !!! (Dit Maëlle)

- Du trafic d'organes.

- Mais dis moi, te surveiller par rapport à quoi ?

- À Anny.

- Encore elle ? Je savais qu'elle finirait par nous apporter des problèmes celle-là.

- Anny n'est pas une cause mais une victime. C'est notre famille la cause.

- Apparemment il y a beaucoup de choses que j'ignore.

- D'ailleurs je doute que tu sois encore en vie après avoir su.

PDV Anny

Sur le chantier abandonné, je venais de finir mes sushis. Mon père également.

- Chérie.

- Oui.

- Après maintes réflexions, je pense que tu devrais aller à la police. Pour ne pas que tu deviennes une fugitive.

- Mais qu'est-ce que je vais leur dire ?

- Que tu ne sais pas ce qui est arrivé. Persuade les afin qu'ils pensent que ce n'est qu'une coïncidence.

- Et je fais ça comment ?

- Invente quelque chose. Quand tu auras terminé, tu retourneras au lycée, finir ton année tout en te faisant discrète.

- D'accord. Que fait-on pour Henry ?

- Kingston ? On le laisse tel qu'il est.

- Il finira par savoir...

- De lui même et il mourra. Sa curiosité le tuera un beau jour. Et ce ne sera pas de notre faute.

- Quel insensibilité !

- Tu as peur pour lui on dirait. Amoureuse ?

- Je ne veux pas en parler.

PDV Henry

- Je te regarde Henry et j'ai peur. Mais tu n'auras plus rien à craindre.

- Ils vont enquêter...

- Et mourir. Ils découvriront la vérité et ils mourront.

- J'ai compris. Tu peux t'en aller.

Cette fille cache quelque chose, j'en suis certain. Quand je la vois, je me rappelle de ce jour. Je sentais que pendant que nos lèvres étaient en contact, elle se libérait. D'ailleurs jusqu'aujourd'hui, je me demande ce qui m'avait poussé à le faire. Ma mère m'a toujours dit que rien n'arrivait par hasard. Ce baiser avait eu un rôle dans sa vie. Et dans la mienne alors ? J'avais toujours pensé que les filles devenaient de vraies idiotes quand elles tombaient amoureuse d'un beau jeune homme. Mais ce jour là, j'ai senti qu'elle n'avait pas besoin d'un homme mais d'un soutien, peu importe le sexe.

Jorgio, mon cousin, fit éruption dans la pièce.

- Comment vas-tu mon pote ?

- À ton avis ?

- Les mauvaises herbes ne meurent jamais.

- Ça tu l'as dit mon frère.

Et nous nous sommes mis à rire.

- Connais-tu le responsable de cela ? (Me demande t-il)

- Non. Mais Donnovan si.

- Donnovan ? Annita Donnovan ? Quel est le rapport avec cette fille ?

- C'est ce que j'aimerais bien savoir. Mais elle m'a clairement fait comprendre que je mourrai lorsque je découvrirai la vérité.

- Et je constate avec amertume que tu as envie de mourir.

- Ton père voudra connaître le responsable. Autant prendre les devants.

- Mon père est un agent du FBI. Toi tu n'es qu'un ado musclé qui aime se taper des filles. D'ailleurs que fais-tu avec Sanchez ?

- Je me la tape.

On se mit à rire de nouveau. Mais cette fois-ci, j'eus mal au ventre.

- Trop rire n'est pas bon pour moi.

- Je vois ça. Mais sérieusement, que fais-tu avec elle ? Je te signale qu'elle a vécu quelque chose de grave.

- Elle me plaisait. Mais elle est trop impulsive. Par contre, avec Annita, j'ai l'impression qu'il y a autre chose.

- T'es amoureux mec.

- Si tu le dis.

- Hypocrite !

- L'hypocrisie c'est pour les femmes.

- Tu préfère menteur ?

- Bref, tu dois m'aider.

- À ?

- Trouver ce qui cloche chez Annita.

- J'écrirai sur ta tombe : on t'avait prévenu.

- Sauf si tu meurs avant moi. (En riant)

Que de taquineries n'est-ce pas ? Nous sommes comme ça, Jorgio et moi.

- Bon, par quoi on commence ? (Entame Jorgio)

- Par recueillir des informations. Je veux tout savoir sur elle.

- Très bien.

- Je compte sur toi.

- Au fait, Amélia te passe le bonjour. Elle te souhaite un bon rétablissement.

- Pourquoi n'est-elle pas avec toi ?

- T'es sérieux là ?

- Ah oui j'avais oublié (en soupirant). Passe lui mon bonjour en retour.

- Je n'y manquerai pas. Bon, j'ai une mission à accomplir.

- Mets ton père sur le coup au cas où.

- Okay. Bon rétablissement mon pote.

- Merci frérot.

PDV Anny

- Prête ?

- Oui.

- Alors vas-y. Bonne chance chérie.

- Merci papa.

Nous étions devant le commissariat. Je descendis de la moto puis allai directement voir l'agent qui était là.

- Bonjour monsieur. Je suis Annita Donnovan. Je viens faire ma déposition par rapport à... à la mort du commandant.

- Oui bien sûr. L'agent en charge de l'affaire viendra vous interroger dans quelques minutes.

Plus tard, je me retrouvais dans une petite pièce, derrière une grande vitrine pour l'interrogatoire. L'agent en charge de l'affaire vint s'asseoir en face de moi.

- Bonjour mademoiselle Annita. Je suis Charles Mallory, FBI.

- Enchantée.

- Je sais que vous devez être bouleversée vu les conditions de la mort de Gaspard. Mais il va falloir tout me dire.

- Il avait découvert que l'un des motards m'avait lancé un torchon.

- Les motards qui ont tiré sur Henry ?

- Oui.

- Et quel est le rapport avec le torchon ?

- Il n'y en a aucun.

- L'avez-vous ?

- Oui. Le voilà.

Le torchon était tout blanc. Plus d'écriture en rouge. Le rouge était en fait du sang. J'ai lavé le torchon pour éviter de parler du sujet Hugo.

- Savez-vous pourquoi ils vous l'ont donné ?

- Non, je n'en sais rien.

- Vous allez devoir nous laisser ce torchon pour qu'on l'analyse

- D'accord.

- J'ai encore d'autres questions.

- D'accord.

- Avez-vous des ennuis avec quelqu'un ?

- Moi ! Non. Pourquoi ?

- Par simple curiosité. En êtes-vous sûre ?

- Oui.

- Très bien. Nous vous recontacterons.

- Bonne journée.

- Merci.

Une fois partie :

- Agent Mallory.

- Tony. Comment allez-vous ?

- Très bien merci. Alors ?

- Il faut enquêter à fond sur elle.

- Parce que ?

- Parce qu'elle ment.

(À suivre)

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