v.

Le spectacle était terrible.

Un immense lion se tenait derrière de ridicules barreaux métalliques, humilié, les pattes posées sur un tabouret de bois. Il était accompagné de quelques tigres rugissants qui tournaient autour de lui. Devant les fauves, se tenait un gros monsieur chauve, habillé d'un costume noir pailleté, maniant un immense fouet.

Des lumières aveuglantes clignotaient à travers toute l'arène et le numéro débuta : le premier tigre blanc vint sauter par-dessus les autres félins. Le public, fasciné, applaudissait aveuglement, ébahi devant une rareté pareille.

Madeleine, choquée, ne s'attendait pas du tout à une telle monstruosité. Pourquoi était-elle la seule à verser quelques larmes pour ces animaux sauvages, humiliés en public, montrés tels des objets de décoration ?

La petite fille fixait le lion en se mordant les doigts. Puis il se passa quelque chose d'incroyable, si invraisemblable même que Madeleine se demanda si c'était bien vrai : le lion tourna la tête vers le public et croisa les yeux de la jeune blonde.

Dans le regard du fauve, elle perçut une lueur de désespoir, ce quelque chose si étrange et si rare qui vous attire irrésistiblement, impossible à toucher du doigt avec un mot ; mais ne put en découvrir davantage car le lion reçut un violent coup de fouet.

Il s'écroula au sol, impuissant. Le monsieur en noir cria des paroles incompréhensibles, en tentant vainement de remuer le félin.

C'en était trop.

— Stop ! Arrêtez ! Je vous en prie ! hurla la petite fille de toutes ses forces, en se levant brusquement sur le banc.

— Madeleine ! Veux-tu bien te taire ! sermonna sa mère.

— Non, non ! Arrêtez ! continuait-elle.

Sa mère prit sa fille par le bras et la tira vers la sortie, pendant que le dompteur poursuivait ses tortures.

Madeleine pleurait jusqu'à n'en plus finir. L'image du public émerveillé devant la persécution des fauves flottait encore dans sa tête.

— Maman, maman... sanglotait la petite fille.

— Tais-toi, idiote ! J'essaie de te faire plaisir en t'emmenant au cirque, et toi tu en profites pour te faire remarquer ! Je ne veux plus t'entendre ! coupa-t-elle.

De retour à la maison, la mère s'empressa d'enfermer Madeleine dans sa chambre. La jeune blonde hurlait, s'époumonait, suppliait sa mère de la laisser sortir.

Au bout de vingt minutes, quand elle n'eut plus aucune force pour continuer de crier, elle se laissa glisser contre la porte et s'endormit, épuisée, essoufflée, les yeux brouillés de larmes.

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