Chapitre 8.5 - Parker
Je sais que ce n'est pas par gaieté de cœur qu'Angus invite Kenzo à la soirée. Il a dû, à sa façon, voir ma déception quand ce dernier a déclaré ne pas vouloir venir.
Angus, héros de ma vie.
Retournant dans ma chambre, je dévie à la dernière minute dans celle d'Angus tandis que ce dernier était déjà occupé à ranger ses affaires dans la petite penderie.
« - Tu sais, tout ça me rappelle cette colo qu'on avait faite lors de nos 14 ans.
- Cette horrible colo où il y avait plus de moustiques que de personnes dans une toile de tente ?
- Arrête c'était cool !
- Parle pour toi, tu étais l'adulé du peuple. Comme d'habitude.
- Ouais, mais on a passé de bons moments toi et moi. On a bien rigolé.
- C'est vrai... »
Angus me paraît éteint. Moins joyeux. Moins fous. Moins exubérant.
Angus a changé. Grandi.
Il est plus calme. Plus posé.
Je le regarde ranger tandis qu'il garde un œil sur moi, sans rien dire.
« - Tu ne vas pas ranger tes affaires ?
- Je le ferais après. Ça ne me prendra pas longtemps. Je peux te poser une question ?
- Depuis quand tu me demandes la permission ? »
C'est vrai.
« - Dis-moi Angus, tu es sûr que ça va ? »
Il range sa chemise sur un cintre avant de se retourner vers moi, interloqué.
« - Pourquoi tu me demandes ça ?
- Je ne sais pas. Depuis ton retour, tu me parais moins...
- Moins « Angus » ? »
Un sourire triste apparaît alors sur son visage.
« - Je te rassure, je suis toujours moi. Je n'ai pas changé, mais j'ai bien compris que si je restais ce garçonnet centré sur sa petite vie. Vivant dans sa petite bulle, ça ne me mènerait nulle part. Je veux dire...Toi...Moi...On a eu une année pour réfléchir sur notre avenir, n'est-ce pas ? En bon Parker, tu as certainement déjà une idée de métier, une idée bien fixe de ce que tu veux faire. Moi, je n'ai pas la moindre idée de l'homme que je souhaite devenir. C'est comme si, chaque jour, je tentais un nouveau truc. Je me cherche. Je me découvre. Et honnêtement, ça fout la trouille.
- C'est qu'une impression...
- Quoi ?
- Tout ça. Moi. Avoir une vie fixée, etc. Ce n'est qu'une impression. Je me dis que c'est tellement compliqué d'évoluer dans ce monde que je tente un faux-semblant uniquement pour ne pas avoir la société sur le dos. Déjà quand on apprend que j'aime un homme, il y a toujours soit ce moment de blanc, soit ce regard étrange que l'on porte sur moi. Pourtant, je ne suis pas malade, ni fou, ni un descendant de satan. J'aime un homme. Je t'aime toi. Pour moi c'est la seule chose simple, claire et limpide. La seule chose dont je suis certain. Pour le reste...Je cherche.
- Dans ce cas, je présume que nous nous cherchons tous les deux. »
Suite à ça, il y eut un long silence entre nous. Moi assis sur le lit, Angus près de sa penderie.
Nous ne savons pas quoi faire de nos vies et nous ne pouvons décidément pas vivre d'amour et d'eau fraîche.
« - Donnons-nous cet été. »
Sans réfléchir, cette phrase m'a échappé.
« - Pourquoi ?
- Pour savoir ce que l'on va devenir toi et moi. Pour savoir quel genre d'homme nous sommes appelés à devenir et tout ça. Je veux dire, il y a un an, on apprenait qu'on s'aimait et...
- Ah non ! Tu apprenais que tu m'aimais. Moi, j'ai toujours été sûr de ça depuis que je te connais.
- Comment ?
- J'sais pas. C'est tout con. Je n'ai connu que toi donc c'était pour moi, une évidence. Mon monde gravitait autour de toi.
- Et là ? Comment ça sera ? Je veux dire, il y a plein d'autres jeunes gens.
- Halalala ! Tentation quand tu nous tiens !
- Angus...Je suis sérieux.
- Je présume que c'est le moment de tester ce que le commun des mortels appelle « la confiance », non ? On a passé un an séparé, on a à peine le temps de se retrouver que nous voilà déjà ailleurs, mélangé à d'autres.
- Est-ce que tu m'en veux pour ça ? D'une quelconque façon que ce soit ? Et sois honnête !
- C'est vrai que j'ai été vexé. Je veux dire, je rentre et toi tu m'annonces que tu pars en job d'été avec tes potes. J'avoue, je l'ai mal pris. Ou plutôt, j'ai mal réagi. On a plus 15 ans. On est presque des adultes et on se doit de réagir en adultes.
- C'est ma faute, j'aurai dû te prévenir...
- Non, non...C'est de la mienne.
- Non, la mienne.
- Bon, on ne va pas passer la journée à se rejeter la faute.
- D'accord...C'est de ta faute. Si tu y tiens, je te la laisse.
- Trop gentil. Tout ça pour te dire que voilà, je vais mettre un certain temps, mais je vais m'en remettre. Je suis Angus ! Je sais faire front à beaucoup de choses.
- Ça, je n'en doute pas. J'aime ce côté-là de chez toi.
- De quoi ?
- Cette détermination sans failles. Comme un mur se dressant contre tout et n'importe quoi.
- Un mur c'est grand et carré, ok ? Je suis petit et rachitique. Tu vois un seul muscle sur moi peut-être ? Regarde-moi ça, aucun abdos, que du flan dans les bras...
- Attends...Remontre-moi tes abdos.
- Quoi ? »
Il soulève une nouvelle fois son tee-shirt tandis que je me lève pour l'attirer à moi et l'embrasser au niveau du torse.
« - Moi j'aime bien ce petit côté-là.
- Parker...
- Quoi ? On a du temps avant la soirée.
- Et ta valise ?
- Tant pis ! »
On a le temps pour faire des bêtises encore.
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