C'était comme voir une tempête au-dessus de sa tête. Gardant un œil sur Angus depuis le rétroviseur depuis que nous avions quitté l'hôtel pour rentrer au campus, il ne m'est pas difficile de savoir à quoi il pense.

Ni même ce qu'il ressent. C'est plutôt flagrant. Il n'a jamais été doué pour dissimuler ses émotions et sentiments.

Je me sentais désolé pour lui quelque part.

Pourtant, être ensemble durant l'été aurait été un plaisir bien trop grand. Le point positif c'est que nous serons « ensemble ». Nous travaillons au même endroit et donc, nous serons certainement amenés à nous croiser régulièrement.

Arrivant sur le campus, chacun retourne à ses occupations tandis que je rentre avec Angus dans ma chambre. Ce dernier n'a pratiquement pas décroché un mot sur le trajet sauf pour se battre avec Kenzo.

« - Ça va ? »

Je ne sais même pas pourquoi je lui pose la question.

Angus est quelqu'un qui parle. Tout le temps. Même trop. Quand il s'arrête ou qu'il se mue dans un silence de plomb, c'est là qu'il faut se méfier de quelque chose.

Il se jette sur mon lit, attrape l'oreiller et enfourne son visage à l'intérieur.

« - Angus ? »

La vérité est que je suis à court de mots. J'aimerais être le parfait petit-copain, trouver les mots pour le réconforter, mais une partie de moi s'y refuse. Non pas parce que je ne l'aime pas, bien au contraire, mais parce qu'il est temps qu'Angus arrête d'agir en enfant.

C'est comme ça. Il a voulu venir travailler avec nous, il en assume les conséquences. Ce n'est pas comme s'ils proposaient des postes en binôme. Angus, Mona, Kenzo, moi-même, nous allons tous avoir des tâches à faire, un travail à mener et l'erreur ne nous était pas permise.

Si je me concentre trop sur lui, je pourrais en oublier la surveillance sur la plage et mettre quelqu'un en danger.

Il faut que je fasse attention à ça. Déjà qu'il occupe une partie de mon cœur, je n'aimerais pas qu'il occupe une partie de ma tête.

La vie active, ce n'est pas la vie d'étudiant ou de lycéen que nous avons pour habitude de mener.

Je l'ai su avec Jo'. Elle me chassait du bar régulièrement quand j'étais plus jeune pour pouvoir s'occuper pleinement de ses clients. Au début, je lui en tenais rigueur et je pensais que ma sœur ne m'aimait pas. Mais en fait, c'est tout autre. J'étais pour elle une trop grande distraction.

Elle a donc eu un moment de répit. Puis Angus s'est ajouté et là, impossible de le chasser des tabourets.

« - Écoute, même si nous n'avons pas les mêmes emplois du temps, j'essayerais de venir te voir. On passera du temps ensemble !

- Tu dis ça, mais t'as pas à faire le standardiste jusqu'à minuit toi.

- Je viendrais t'aider ! Je me débrouille pas trop mal en anglais. De toute façon, à minuit, il n'y aura plus personne sur la plage. Plus aucune activité, plus rien à surveiller.

- Hmm...

- Allez, ne boude pas. En plus, tu ne seras pas totalement seul, il y aura Kenzo avec toi. »

La seule fois où il relève la tête, c'est pour me foudroyer du regard à la mention de Kenzo.

Pourtant, Angus devrait le sentir au fond de lui. Si ça coince autant avec Kenzo, c'est parce qu'ils sont exactement pareils. La même personnalité. Je dirais que c'est même pour ça que lui et moi, nous nous sommes rapprochés. Parce que j'ai vu en lui, un bout de Angus qui me manquait tellement à ce moment-là. C'est sûrement pour ça aussi que lui et moi avons failli faire des bêtises ensemble.

Mais rien. Il ne s'est rien passé.

D'une parce que Kenzo est joueur plus qu'autre chose, mais aussi parce que j'ai su me retenir malgré cette envie dévorante au fond de moi.

Mon cœur.

Mon corps.

Tout appartient à Angus.

Je l'ai décidé le soir où je l'ai embrassé chez Mona.

Ce baiser, c'était plus qu'un baiser. C'était ma façon de lui communiquer toutes mes pensées les plus intimes. Tous mes sentiments à son égard. Mais c'était aussi une façon, ma façon, de sceller cette promesse que je lui ai faite de l'aimer, et ce, malgré toutes les difficultés que nous aurions alors à surmonter.

C'était ma promesse pour lui dire que je l'aimais.