Chapitre 2 - Angus
J'ai longtemps rêvé de ce moment. Aussi niais que cela puisse paraître, mais j'ai longtemps rêvé de retrouver les bras de Parker. Un an nous a séparés et pourtant, on se retrouve comme si nous nous étions quittés hier. Je me rappelle encore de ce qu'il m'a dit pour m'obliger à mettre mon cul dans l'avion alors que l'embarquement allait se faire.
« Pour se retrouver, il faut savoir se quitter. »
Savoir se quitter. J'ai eu le temps de réfléchir à ce petit bout de phrase. Y'avait-il une façon, un art de se quitter convenablement ? Parker et moi avions nous alors respecté cela ? Un baiser échangé à la va-vite. Des larmes de crocodile s'écoulant sur mes joues déjà trempées. Un signe de la main tandis que je lâchais celle de Parker.
Partir a été difficile, mais je ne regrette en rien cette année passée loin de lui. Je pourrais regretter chaque moment où j'ai été seul. Chaque moment où je me suis langui de notre prochaine conversation sur Skype. Chaque moment où j'aurai voulu prendre un selfie d'amoureux devant un bâtiment avec lui.
« - Alors ? Tu as fait bon voyage ?
- Non. Je ne veux pas être médisant et faire l'enfant mal éduqué, mais j'ai été à côté d'un gros monsieur qui s'est à moitié vautré sur moi. Derrière j'avais un gosse que je mourrais d'envie de jeter par le hublot tant il donnait des coups dans mon siège et pour couronner le tout...La bouffe était dégueu. Bref. Voyage de rêve. »
Parker éclate de rire tandis qu'il se met à pousser les chariots contenant ma valise sur le parking.
« - Voyons, tu as été en Afrique, en Asie, partout dans le monde, tu as tout d'un mini explorateur et tu vas me dire que tu as vécu le pire moment dans un avion ?
- Au moins, en voyage j'avais plus souvent affaire à Mère Nature qui n'est pas si terrible...Plutôt qu'à l'être humain qui, lui, est horrible. Heureusement, certains hommes valent le détour de revenir parmi la civilisation.
- Je présume que je fais partie ce genre-là, non ? Tu reviens pour moi ?
- Et pour tes petites fesses rondes qui remplissent si bien les jeans.
- Je vois que tes yeux sont plus souvent sur mes fesses qu'en face...Je ne sais pas comment je dois le prendre.
- Comme un compliment ! Je n'ai pas souvent dit à un inconnu dans la rue « Hé ! Joli cul ! »
- Encore heureux Angus ! Tu n'es pas parti à l'étranger pour draguer !
- Ce n'est pas les occasions qui ont manqué pourtant...
- Angus !
- Quoi ? Tu es jaloux ?
- Si tu continues, promis, tu rentres en taxi.
- Oh ! C'est mignon ! Il est jaloux ! »
Je le vois alors lever les yeux en l'air, se sachant complètement démasqué. C'est que j'ai toujours aimé chez Parker, c'est que pour moi, il n'a aucun filtre.
On monte alors tous les deux en voiture et direction l'autoroute. Mon regard se perd directement vers la fenêtre tandis que Parker met le GPS en route.
« - On en a pour 1h de trajet approximativement. Si tu veux dormir...Je te réveillerais quand on arrivera.
- Quel genre de copain serais-je si je te laissais seul, dans le silence alors que l'on vient à peine de se retrouver.
- Tu serais un horrible copain.
- C'est bien ce que je disais. Tiens, t'as un câble pour brancher ? Je vais mettre de la musique.
- Cherche dans la boîte à gants et ne me mets pas de ta merde inaudible !
- Hé ! Mauvaise langue ! J'ai peaufiné mes goûts musicaux en voyage. Je vais te faire découvrir quelques trucs. »
S'il n'avait pas à regarder la route filant droit devant nous, je suis presque certain qu'il me dévisagerait avec cet air mi surpris, mi curieux qui le caractérise si bien.
Soudain, les premières notes de « Despacito » se mettent à siffler dans la voiture.
« - Angus !
- Oups ! Ahaha ! Désolé, ce n'était pas celle-là. Et puis t'as quoi contre Despacito ? Moi j'aime bien le rythme.
- Elle est définitivement sur la liste des chansons que je ne peux plus écouter.
- Tu mériterais que je la laisse pour la peine.
- Tu veux faire le chemin à pied ?
- J'appellerais un Uber. Qu'est-ce que tu crois ? J'ai appris à me débrouiller. »
Finalement, « We're going home » de Vance Joy venu balayer « Despacito » d'un seul glissement de doigt sur l'écran.
« - Ça, tu vois, j'aime bien.
- Ah !
- Ne t'avise pas de changer la musique.
- Pourquoi je changerais ? J'aime bien. »
Les lampadaires encadrant la route me semblent être une longue et lumineuse guirlande électrique m'indiquant le chemin de la maison.
J'ai encore du mal à me dire que bientôt, j'y serais. Un an passe certainement plus vite que ce que l'on veut bien croire. Douze mois dans une vie, ce n'est rien.
Juste un grain de sable, sur le long et pénible sentier de la vie.
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