Chapitre 13 - Angus
Je présume que j'aurai dû me sentir mal. Coupable. Avoir le cœur brisé et toutes les conneries de ce genre-là, mais ce ne fut pas le cas. Je suis sorti de ma chambre, l'esprit en paix. En paix avec moi-même. Sur le moment, j'ai estimé avoir pris la bonne décision. Je ne regrette pas mon choix, non.
Je n'ai plus le temps pour les regrets.
Longtemps, trop longtemps, j'ai regretté de ne pas dire à Parker ô combien je l'aimais. Chaque jour je le côtoyais et chaque jour était une douleur sans nom. Devoir faire semblant. Sourire à tout. Ne pas le voir réaliser, comprendre. Saisir toute l'importance qu'il avait pour moi.
Mais je crois qu'à trop lui avoir accordé d'importance, je me suis oublié. Je me suis noyé dans l'ombre de Parker parce que je trouvais cette situation satisfaisante. Je n'étais rien de moins qu'Angus, le petit gars homo du lycée. Tout le monde le savait, sauf Parker. Il se complaisait à rester dans son silence sans rien me dire.
J'ai trouvé ça horrible.
J'ai vu en lui un héros. Un sauveur. Une bouée de sauvetage tandis que je me noyais en pleine mer nommée « société » en oubliant complètement que je savais nager par moi-même. C'est ça, je me suis oublié. J'ai oublié que je suis aussi un être vivant et que j'ai mes propres droits.
« - Tu ne vas pas tenir trois jours Angus, ne déconnes pas. »
Mona, fidèle à elle-même, me fait cette moue peu convaincue tandis que je lui ai annoncé que Parker et moi, nous avons décidé de faire une pause. Du moins, je lui ai imposé cette séparation.
« - Tu as toujours tout fait pour ses beaux yeux et là, tu vas me dire que ton monde ne tourne plus autour de lui ? Tu vas péter un câble dès que tu vas le voir avec Kenzo. Tu ne tiendras pas.
- La question ce n'est pas de « tenir ou pas », tu n'y connais vraiment rien. La question est de voir si Parker, lui, est capable de tenir ou pas.
- Attends...Tout ça...C'est un test en fait ?
- Un test, une épreuve, une bouffée d'air frais, appelle ça comme tu veux.
- Et toi ? En attendant, tu vas faire quoi ?
- Faire ce pour quoi je suis venu ici. Je vais me faire de l'argent de poche. »
Et je vais me le prouver. Je vais me prouver que je peux tenir sans Parker. Je vais me prouver que je sais marcher sans avoir cette constante béquille avec moi. Me supportant et me soutenant. Je vais me prouver que tout compte fait, je suis peut-être celui, qui, depuis le début, n'a cessé de porter l'autre.
Sauf que je suis à bout de bras.
Remontant dans ma chambre pour finir de ranger mes quelques affaires, j'arrive à hauteur de Parker se trouvant juste-là dans le couloir.
Il a une mine affreuse. Comme quelqu'un qui n'a pas dormi de la nuit, portant son regard de chiot battu.
« - Salut. »
Il faudrait être né de la dernière pluie pour ne pas sentir cette tension entre nous, mais ça ne me gêne pas. Il ne faut pas que ça me gêne, car si c'est le cas, j'aurai un pincement au cœur chaque fois que je croiserais son regard.
Il ne m'aura pas comme ça. Je suis bien trop fier pour m'abaisser à ça.
« - Tu as bien dormi ?
- Comme un bébé !
- Tu as été prendre ton petit-déjeuner avec Mona, je vous ai vu tous les deux.
- Hmm...Et moi je t'ai aperçu du coin de l'œil. Magnifique journée ! Dire que demain on commence à travailler ! Je vais sûrement en profiter pour me détendre. Tu devrais dormir un peu, tu as une tête affreuse. »
Je ne craquerais pas. Je serais plus fort que tout ça. Crois-moi.
« - Sérieusement, Angus ?
- Quoi ?
- Tu veux vraiment la jouer comme ça ?
- Comme quoi ? Comme le mec qui t'ignore complètement ? Ouais, je vais la jouer comme ça, parce que tu sais quoi ? Tu comptes tellement pour moi que ça me ferait un mal de chien de savoir que tu vas mal. Donc je ne veux pas le savoir. En fait, je m'en fou. Parce que longtemps, ce fut moi celui qui avait mal au cœur Parker. Chacun son tour.
- Attends, tu te venges là ?
- Appelle ça comme tu veux. Vois ça comme tu veux. Je ne vais pas débattre.
- Tu sais, si vraiment t'étais pas aussi gamin, on pourrait discuter de tout ça.
- Moi ? Gamin ? C'est la meilleure ! Mais bon, écoute, la bave du crapaud n'atteint pas la blanche colombe hein !
- Ça te tuerait que l'on prenne cinq minutes pour parler toi et moi ?
- Tu veux parler de quoi ? Hein ? Dis-moi ? Tu vas me dire ô combien tu t'es sacrifié pour moi ? Je l'ai bien saisi ton message, crois-moi ! Reçu cinq sur cinq. Je suis un égoïste qui refuse de te partager. Je ne peux pas faire de toi mon centre du monde, alors en attendant...ouais...J'apprends à faire sans toi. Je fais comme si t'existais pas.
- Et ça va te prendre combien de temps ?
- Peut-être tout l'été, va savoir ? Je ne suis pas d'humeur pour avoir un copain là tout de suite.
- T'es vraiment pas croyable. T'as surréagit à ce que je t'ai dit hier et tu as tout déformé pour tout prendre à ta sauce. Tu te fais passer pour la victime, encore une fois.
- Ouais, c'est ça. Je suis la victime de mon propre amour. C'est triste, non ? Moi je trouve que ça a même un petit côté tragique.
- Tu ne viendras pas pleurer quand les dégâts que tu auras causés seront irréversibles.
- Dit-il ! T'es le premier à avoir pleuré toute la nuit. »
Je me précipite dans ma chambre en prenant plaisir à lui claquer la porte au nez.
C'est vrai, je voulais faire le mec qui s'en fou. Qui s'en bats les couilles parce qu'il n'y a que ça qui marche, mais je n'ai même pas réussi à lui faire face sans m'emporter et sans en faire des tonnes.
Parce que je voulais lui montrer ô combien j'étais soudainement heureux sans lui.
J'ai essayé de mon convaincre moi-même, mais le résultat est dès plus pitoyable.
Je n'y arrive pas.
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