1. L'Entre-deux


Le Soleil venait de se coucher derrière l'horizon, laissant derrière son sillage quelques lueurs pâles dans l'obscurité. L'ombre s'étendait partout alors que la Lune amorçait un règne de terreur. La nuit s'installait dans les rouages du monde en péril !

Quelque part, le temps semblait s'être arrêté. Figé dans cette froideur macabre où le silence n'a aucune limite. Le calme s'abattait sur le monde pas encore tout à fait endormi, mais dont l'absence ne pouvait qu'inquiéter. Le poids écrasait toute vie trouvée là, étouffant les vestiges de cette existence volée.

Le temps reprenait son cours mais les secondes et les minutes se confondaient, sans que quiconque puisse les distinguer vraiment. Les flashs de couleurs vives traversaient l'obscurité, la détruisant instantanément. Le bruit sourd des sirènes déchirait le silence et les tympans sans le moindre remord. Ici comme ailleurs tout semblait sans vie, dénué de sentiments. Le monde sans émotion où la nuit hurlait à la mort son désespoir. La terre paralysée de détresse sans même en connaître la raison.

La route sinueuse et sans fin se coupait finalement, de la plus terrible des manières. Des traces plus noires que la nuit elle-même striaient la surface irrégulière et rocailleuse. Plus loin, un petit nuage de fumée s'était formé. En contrebas du talus, un cadavre gisait tristement. Celui d'une voiture de couleur sombre à l'avant complètement éventrée. Le face à face avait été violent, tout portait à en témoigner. Le grand chêne qui bordait la route en avait presque été déraciné. A l'intérieur du véhicule, un jeune homme était assis, calme, étrangement serein.

Le bruit strident des sirènes s'approchait et l'ombre se dématérialisait doucement. L'apaisement du blessé contrastait avec la panique des médecins appelés en urgence. Si ceux-ci avaient été plus attentifs, plus regardant et moins aveuglés par un besoin primitif, ils auraient peut-être remarqué tout cela. Le temps lourd et cette atmosphère particulière cette nuit-là. L'air de quiétude du jeune adulte et le silence morbide. Tout cela était bien étrange, bien inhabituel pour ces simples mortels !

Aucun d'eux n'était en mesure d'imaginer l'enjeu de ces quelques instants de répit. De ce temps qui coulait entre leurs doigts ouverts, à la manière du dernier souffle s'étirant jusqu'à la rupture. Ce qui se passait ne les concernait en rien, et dépassait ces êtres grossiers aux objectifs médiocres. L'étrangeté qui se tramait n'était pas pour ce monde, ni pour le commun des mortels !

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Park Jimin était incapable de prononcer la moindre syllabe. Les diverses émotions se déchainaient sur son esprit déjà mal en point. La peur. La surprise. Le désespoir. L'abandon. La tristesse. Le chaos au creux de son être ne lui laissait aucun répit.

L'être venu d'ailleurs n'esquissait pas le moindre mouvement, figé dans cette froideur et cette beauté digne d'une statue ancienne. Il détaillait longuement le plus petit, le regard insondable. L'autre en fit donc de même, à défaut de pouvoir faire mieux. Un visage fin et des traits harmonieux. Une peau légèrement hâlée et une longue silhouette effilée que le vêtement noir ne pouvait masquer. Qui qu'il soit, il était d'une très grande beauté !

Jimin avait oublié tout le reste. Le vent qui caressait sa peau ne suffisait plus à attirer son attention sur autre chose que sur l'ombre qui lui faisait face. Le décor magnifique n'avait pas disparu portant, mais il était devenu étrangement secondaire. L'humain ne parvenait pas à s'accorder la moindre pensée correcte, la moindre réflexion développée. Comme rattrapé par la précarité de son état, une stupidité caractéristique de son espèce. Il était dans l'incapacité de comprendre et de traduire ces émotions à l'état brut.

Une voix grave et profonde s'éleva, comme venue des confins de la terre :

-Ca faisait longtemps que j'attendais ta venue, Park Jimin.

Un frisson ébranla le concerné, dont le cœur rata un battement. L'incompréhension se lisait à nouveau dans ses prunelles sombres, au beau milieu de la surprise. La peur s'insinua dans ses cellules sans qu'il ne puisse l'ignorer.

-Malgré ça, j'aurais voulu que ce moment arrive plus tard.

Jimin déglutit avec difficulté. Les mots se frayaient un chemin dans son esprit, difficilement. Il aurait souhaité mal comprendre, se tromper. Mais son intuition le poussait inexorablement vers la vérité, aussi douloureuse soit-elle ! Il balbutia finalement :

-J-Je ne comprends pas.

C'était incroyablement réducteur et pourtant, c'était là ce qui résumait le mieux sa pensée. Le jeune homme était perdu ! Comme si tout ce en quoi il avait pu croire durant toutes ces années se révélait faux. Se détruisant tout un mythe, tout un idéal d'illusions amères et de croyances stupides. Sa vie entière s'écroulait devant lui avant même qu'il n'entende la vérité.

-Si, tu as déjà compris, Jimin. Tu n'as d'ailleurs pas eu besoin de moi pour ça. Tu refuses simplement de l'admettre.

Les larmes montèrent aux yeux de l'humain alors qu'une douleur aiguë le terrassa. C'était vrai ! Comment le nier en toute impunité ? Rester aveugle n'avançait à rien et il était coincé. Il n'y avait pas de retour possible désormais. Les souvenirs l'assaillaient, lui ôtant provisoirement la vue. Les derniers moments de sa vie et l'accident. Le choc immense après une chute de plusieurs mètres. Comment l'oublier ? Oui, Jimin savait sans oser y croire.

-Je suis mort, c'est ça ?

La voix faiblarde se brisa subitement. La gorge nouée ne pouvait laisser s'échapper aucun son, alors qu'il y avait encore tant à dire. Une part de lui refusait d'entendre la moindre réponse, une manière bien misérable de se protéger. L'être qui lui faisait face sourit légèrement, sans la moindre moquerie, peut-être à peine une once de pitié. Il répondit, sans doute un peu trop doucement :

-En vérité, tu ne l'es pas encore. A présent, tout dépend de toi. Le choix t'appartient !

Jimin tiqua sur ce dernier mot, difficile à admettre à ses yeux. Il était en prise avec des émotions contradictoires affolantes. Il en devenait fébrile et la moindre réflexion lui était comme interdite.

-Quel choix ? Vivre ou mourir ? C'est réellement aussi simple que ça ?

La créature encaissa le coup, durement. Son regard suivit celui de l'humain, cherchant une réponse dans ce spectacle grandiose. La tension montait doucement alors que le temps semblait être compté, même ici. L'imagination créait ses propres chimères et Jimin en souffrait. Tout s'accélérait subitement, alors que la vie lui glissa entre les doigts. Il voulait des réponses et vite ! L'attente n'était plus envisageable pour cet être faible et pourtant innocent.

-Tu as raison, ce n'est pas aussi simple. Tu as la possibilité de regagner ton corps et ta vie, mais ça ne se fera pas sans douleur, tu dois aussi le savoir. Tu ne pourras pas oublier ce que tu as vécu et c'est aussi un fardeau à porter, crois-moi. Mais tu peux aussi et simplement me suivre, nous quitterions cet endroit tous les deux pour un autre, bien meilleur. Tu n'en souffriras pas, tu as ma parole.

Jimin frémit. Evidemment, rien n'était jamais simple ! Alors que son retour ne faisait aucun doute si l'occasion s'offrait à lui, tout semblait plus incertain maintenant. Il ne saurait l'expliquer, cela encore. Il épousait du regard ce petit bout de Paradis, avec une envie née de l'orgueil humaine. Il n'avait jamais semblé si vulnérable, si empreint des faiblesses de son espèce.

-Où sommes-nous ?

Gagner du temps et ce, d'une manière bien pathétique mais la curiosité faisait son œuvre. Jimin était le patin de ces émotions-là, la marionnette d'une palette de couleurs qui se mélangeaient sans harmonie.

Les lèvres fines de l'ombre s'étirèrent en un sourire alors qu'il avança de quelques pas sur le côté. Dans les prunelles sombres se reflétaient un lieu rêvé, magnifique en tout point et vierge de l'influence néfaste de l'Homme. L'astre du jour dessinait des reflets flamboyants sur la peau sans défaut de l'inconnu. Sa contemplation dura encore quelques minutes, un silence s'installa sans en être particulièrement désagréable. Le paysage instaurait un apaisement immédiat, et calma sans attendre la hâte de Jimin. Les cœurs et les âmes s'unissaient au sein de cette atmosphère superbe.

-Dans l'Entre-deux. Le lieu qui relit votre monde à celui que vous vous plaisez tant à imaginer depuis des millénaires. C'est le passage forcé de toutes les âmes, ils se sont tous tenus ici, où tu te tiens, Jimin.

Des questions se bousculaient aux lèvres du jeune homme sans qu'il ne les laisse s'échapper. Il y avait sans doute plus important, mais les choix n'avaient jamais été chose aisée pour lui. Les yeux de la créature s'était à nouveau posé sur Jimin, qu'il couvait d'un regard étrange. De la compassion et un semblant de tendresse, c'était incompréhensible.

-Seule ton âme est indemne, mais tu peux rejoindre ton corps si tu le souhaites. Ce que tu vois là n'est que la représentation que tu te fais de ton enveloppe charnelle. Ton esprit le recrée par automatisme mais ici, tu n'es qu'énergie. Tu peux matérialiser une chair, sans que tu le remarques.

Le regard de l'humain dévia sur ses mains, sur ses bras, sur tout l'être qui n'était pourtant qu'illusions. Il sentait pourtant distinctement le vent rafraichir son épiderme et cette étoile le réchauffer. Les choses n'étaient donc jamais telles qu'elles semblaient l'être. Etait-ce le sens caché de ces paroles ? Le corps n'avait peut-être d'importance, ce n'était que de la matière, rien de plus. Et l'inconnu souriait de ce sourire minuscule mais d'une redoutable simplicité.

-J-Je vais y retourner, je ne veux pas tout quitter aussi brusquement. C'est trop tôt.

-Tu as raison, Jimin. Mais n'oublie pas que la Mort survient toujours trop tôt.

Quitter cet endroit merveilleux lui coutait. Cette sensation de liberté, de légèreté et surtout, cette pureté véritable au goût si particulier. C'était dire au revoir à la perfection puisqu'elle existait vraiment.

-Approche, dit l'autre, doucement.

Jimin le dévisagea longuement. Les ailes noires semblaient toujours immenses, et leur puissance devait l'être tout autant. Tout en cet être était envoutant, c'en devenait presque dangereux. Il était magnétique, le centre de cet univers s'il venait à exister. Pourtant, la ressemblance avec une créature démoniaque était plus frappante. Les vêtements couleur de nuit et abimés par endroit inspiraient la peur sans qu'elle en soit maladive. Un sentiment à son stade le plus primitif, à l'état brut. Une légère angoisse se teintait de curiosité et de fascination.

-Approche, je ne te ferais aucun mal, je te le promets Jimin, insista encore le bel inconnu, rassurant autant que l'on pouvait l'être.

Et Jimin avança, à pas compté et mu d'une certaine angoisse. Le silhouette longiligne était encore plus impressionnante de près, et les ailes l'étaient encore davantage. Ils étaient maintenant face à face, séparés par à peine quelques petits centimètres. Ils s'observèrent encore et encore, dans cet instant inexplicable et électrisé par l'air saturé d'émotions diverses. Il n'y avait rien à savoir, rien à comprendre. Un mot les séparait et bientôt, ce serait tout un monde. Une rencontre pour tout changer, un destin et même la mort d'un être pur.

-Nous aurons peut-être l'occasion de nous revoir, Park Jimin. Maintenant, je vais te libérer de cet endroit.

Les mots semblaient de trop et remuaient une blessure au fond de son être. Souhaitait-il déjà le revoir ? Qui pour le dire, qui pour le savoir ? L'humain se perdait dans la profondeur d'un regard rengorgeant de secrets. Il ne devait pas avoir peur, la brise lui soufflait tout cela là où personne ne pouvait l'entendre. Un sourire se dessinait sur ses lèvres charnues, un merci muet puisqu'il était bien incapable de le traduire.

La créature fit mourir l'espace entre leurs deux corps, dans un soupir inaudible. Leurs souffles se mélangeaient et cette proximité en devenait presque douloureuse. Le plus grand se pencha sur son homologue, profitant d'un moment qui n'appartenait qu'à eux. Les lèvres frôlèrent le front de l'humain, comme pour clore tout ce qui les avait rapprochés par ce simple contact. Un effleurement volé, à peine rêvé.

-Bonne chance, Jimin.

Un éclat de lumière pure déchira l'atmosphère. Et puis plus rien. Tout disparu aux yeux du jeune garçon. Le néant engloutit tout comme les volutes de fumée noires qui détruisaient la vue et étouffaient les êtres impuissants. Il ne restait plus rien de ce Paradis et de son gardien !

Et le chapitre un est bouclé !!

Longueur moyenne, avec pas mal de choses quand même. La première vraie rencontre avec nos protagonistes. Tae est un peu changé quand même. Son caractère sera volontairement différent. Il comptabilise plus d'un siècle d'existence et a énormément souffert. Il ne sourit pas, il représente plus la figure froide de mon résumé. C'est juste histoire de vous prévenir, que vous ne soyez pas perturbés :3

Jimin retourne sur Terre bien que pas mal amoché. Au moins, il est en vie. Mais dans quel état ? Pas de spoil, promis mais ça va être chaud. Je vous préviens tout de suite x3 Pour le prochain chapitre, il se nommera "Retour au monde" et signera l'apparition d'un nouveau personnage. Un des BTS, je vous laisse deviner lequel ;3

Vos avis sur cette rencontre assez ... atypique ? étrange ? Votre avis sur le rôle de Tae ? Sur Jimin ? Sur le chapitre en lui-même ? Je veux TOUT savoir. N'oubliez pas, au passage de voter, avant de poursuivre votre chemin. 

Bisous les fanous, 

Jade. 

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