Liaison dangereuse
Les terribles péripéties de leur fatal amour
Et les effets de la rage obstinée de ces familles,
Que peut seule apaiser la mort de leurs enfants,
Vont en deux heures être exposés sur notre scène.
William Shakespeare.
Paris.
Point de vue de Karl.
Je ne dormais qu'à moitié lorsque mon réveil sonna à six-heure du matin. Pourtant, la rentrée des classes était prévue pour huit-heure et demi, mais j'avais décidé que je devais me lever très tôt pour mon premier jour en terminal.
Cette année je n'avais qu'un seul objectif en tête : avoir mon bac avec une excellente mention et ainsi accéder aux grandes écoles de mon choix. J'étais déterminé à fournir un maximum de travaille et à m'acharner pour atteindre mon objectif. Toutes ces années de travail acharné et de labeur vont enfin donner leur fruit cette année.
Je m'étirai doucement puis ouvris lentement mes yeux, je scrutai les quatre recoins de ma chambre comme pour redécouvrir le décor. Une jeune blonde à moitié nue était allongée à mes côtés sur mon lit. Elle dormait paisiblement, ça me faisait presque mal de la réveiller. Et puis, il faut dire qu'après la soirée d'hier elle avait bien besoin d'un peu de repos.
Je la secouai un peu, elle m'adressa une petite grimace avant de rouspéter comme une enfant et de se rendormir. C'était perdu d'avance elle ne se réveillera pas de si tôt. Je décidai alors de me préparer et de la réveiller par la suite.
J'avais un rituel bien précis tout les matins : après m'être levé et après m'être bien étiré, je prenais une bonne douche froide (je trouve que l'eau froide a plus de vertus que l'eau chaude) et enfin je m'habillai avec grand soin et je descendais manger en compagnie de ma famille d'adoption.
Mon père adoptif, Claude, était ministre, c'était un homme très puissant et très respecté avec énormément de charisme, un réel modèle pour moi. Il avait les yeux rivés sur son journal et me fit un petit signe de la main pour me saluer quand il m'avait entendu descendre les marches.
Quant à ma mère adoptive, Isabelle, elle était femme au foyer. Elle m'avait apprit tant de choses comme le latin ou encore jouer de la Harpe. C'était une femme que j'admirais et pour qui j'exprimais beaucoup de respect.
Et enfin, il y'avait leur fille, Margaret, mais elle était partie finir ses études en Angleterre dans la prestigieuse université d'Oxford.
Bien évidemment, il est inutile de préciser qu'ils ne sont pas du tout au courant pour la jeune blonde qui finissait sa sieste dans mon lit.
«Je ne t'ais pas entendu rentrer hier. »
Me reprocha Isabelle en buvant une gorgée de son café dont une fumée s'échappait encore.
« Oui, excuse moi, je suis rentré un peu tard et je ne voulais pas vous déranger alors je me suis faufilé par la porte de la cuisine...pour être discret. Pardonnez-moi si je vous ais inquiété. »
« Enfin. Cette année je compte sur toi pour limiter le nombre de soirées et de sorties. Je te rappelle que tu es en Terminal. »
Ajouta Claude sans quitter son quotidien du regard.
« Oui papa je le sais. Ne vous inquiétez pas, j'ai prévu de me concentrer uniquement sur mes études et rien d'autre. Je suis déterminé à réussir et à intégrer une prestigieuse école. »
« C'est bien mon chéri, enfin Claude il ne faut pas oublier aussi qu'il a perdu son meilleur ami. Ce n'est pas une épreuve facile ça...il a besoin de sortir décompresser un peu. »
Fit remarquer ma mère adoptive en arborant une petite moue.
Aussitôt, je baissai le regard et je sentis toute ma motivation m'abandonner, le souvenir d'Arthur me faisait l'effet d'un coup de poignard dans le dos que je devais me trimballer en ce jour de rentrée. Vivre sa dernière rentrée sans son ami le plus cher était une expérience terrible que je ne souhaitais pas à mon pire ennemi. Oui, Arthur allait énormément me manquer, ainsi que toutes nos habitudes et nos coutumes de rentrée.
« Oui enfin Isabelle, chaque chose en son temps. Ce qui est arrivé à ce pauvre Arthur est vraiment tragique mais nous ne devons pas nous laisser emporter pas nos émotions. Je sais bien que c'est une épreuve terrible mais il va falloir se ressaisir, tu n'as pas le droit à l'erreur Karl. Pas cette année en tout cas.»
« Oui papa. »
Répondis-je en me levant de table un peu accablé.
Je remontai dans ma chambre. La jeune blonde venait de se réveiller, elle était encore un peu somnolente et étourdie, elle cherchait ses chaussures. La voir tituber ainsi me redonna le sourire. Je rentrai dans ma salle de bain me brosser les dents, en sortant, la jeune fille avait déjà trouvé ses escarpins et était presque entièrement habillée.
« Tu pourrais sortir par la cuisine s'il te plaît. Mes parents ne savent pas que t'es là. »
« Rassure moi t'es bien majeur ? »
S'inquiéta la jeune fille en enfilant son manteau en fourrure.
« Oui. Ne t'inquiète pas j'ai bien dix-huit ans. »
« D'accord. Tu veux bien me raccompagner. Je ne sais pas trop ou c'est la porte de la cuisine. »
Je lui pris la main et l'accompagna jusqu'au rez-de-chaussée ou elle était sorti discrètement comme je lui avais demandé.
« En faite, dit-elle en se tenant sur le seuil de la porte, je n'ais pas trouvé mon string. Si tu le vois, fais-moi signe. »
Et c'est sur ces mots qu'elle s'en alla après m'avoir adressé un clin d'œil.
Mon père adoptif m'attendait devant les grilles de notre villa dans sa voiture. C'était bien évidemment un chauffeur qui se chargeait de nous conduire. Le chauffeur était d'origine irakienne, de temps en temps nous avions des conversations en irakien quand il allait fumer ces cigarettes en attendant mon père devant la maison.
« Passe une bonne journée Papa. »
Dis-je en sortant de la grande voiture qui s'était garé devant le lycée.
Il me répondit avec un simple signe de la main comme il en avait coutume.
Une fois avoir franchi le seuil du lycée, j'étais de nouveau très déterminé à réussir et à réaliser mes rêves. Les couloirs grouillaient d'élèves, de temps en temps, certains venaient me saluer et me dire qu'ils étaient désolés pour Arthur et que si j'avais besoin de me confier je pourrais leur parler à eux. Comme si j'allais me confier à des gens que je ne connaissais pas. Arthur était un peu une légende au lycée. Il faut dire qu'il était apprécié et assez populaire. Ca me faisait bien mal au cœur de ne pas le voir débarquer par la porte principale avec Cassandra à ses bras et avec sa démarche de héro de films d'actions.
Les élèves du lycée avaient jugé bon de mettre en place un mémorial avec des photos du défunt et des bougies. Chaque élève viendrait poser une fleur. Le geste partait d'une bonne intention mais la plupart des gens venaient poser des fleurs pour pouvoir dire qu'ils étaient « proches » d'Arthur.
La photo qu'il avait choisit pour ce fameux mémorial a été prise il y'a deux ans de ça, Arthur avait obtenu le rôle de Dom Juan alors qu'il n'était qu'en seconde, il était vêtu de très langues bottes, une chemise blanche légèrement entrouverte et d'une épée. Arthur était tellement classe et imposant sur cette photo...
« On est dans la même classe. »
La voix enjouée et pleine d'enthousiasme de Vénus me sortit de ma petite rêverie.
« Quoi ? Comment tu sais ça toi ? »
Vénus était une amie d'enfance. C'était l'une des rares personnes à m'avoir connu quand je m'appelais « Karim ». Comme tous les meilleurs amis d'enfance nous avons fais d'énormes efforts pour sauvegarder notre amitié malgré nos centres d'intérêts différents. Malheureusement, en arrivant au lycée je me suis rapproché d'Arthur et en conséquence je me suis éloigné de Vénus. Pourtant, nous avons continué à être amis mais nos rencontres devenaient occasionnelles et nos discutions dans les couloirs étaient devenus de très courte durée. Malgré tout, j'aimais beaucoup Vénus.
« Tu n'es pas allé voir les listes ? »
« Heu...pas vraiment. Quelle classe ? »
Demandai-je un peu pensif toujours en fixant le fameux mémorial.
« Terminal S2. »
« Bien alors...allons-y. »
Elle esquissa un large sourire qui laissa entrevoir une belle lignée de dents blanches et me prit la main pour m'emmener jusqu'à la salle comme lorsqu'on était enfant et qu'elle m'emmenait n' importe où avec elle comme un petit toutou parce que j'étais perdu et que je ne parlais pas français.
Nous nous installâmes au premier rang. Mon amie avait un décolleté plongeant, je faisais des efforts presque inhumains pour éviter de le fixer. J'ai tout de suite remarqué qu'elle avait deux énormes bleus sur son cou. J'hésitai à demander ce que c'était. Je m'en doutais un peu.
Finalement, après une quelque minutes à fixer son cou blessé, je n'ai osé demander.
Lorsque je vis le professeur rentrer et poser tranquillement ses affaires sur son bureau, je détachai complètement mon regard de Vénus qui semblait chercher un objet au fond de son sac et je décidai de rassembler toute ma concentration et mon attention afin de ne rater aucun mot ou même aucune lettre de ce que l'enseignant s'apprêtait à raconter.
Il était très grand de taille, il venait d'avoir la cinquantaine et il avait une voix rauque. La voix d'un fumeur. Il enseignait les maths. Pendant presque deux heures il nous a rabâché le même discours que tous les professeurs sortent chaque année sur l'importance de sa matière, l'importance de la régularité, de la rigueur, du travail... sauf que, exclusivement, cette année il ajoutait des « n'oubliez pas que c'est le bac cette année » pour compléter chacune de ses phrases et leur donner plus grand impacte. J'avais beau avoir entendu ce même discours encore et encore mais ça ne m'empêchait pas de boire ses paroles et de le regarder avec une grande intention, comme s'il était sur le point de me révéler le secret de l'univers.
Quand il nous autorisa à quitter la salle de classe, je sortis rapidement, presque à pas de course afin d'éviter les « toutes mes condoléances » des élèves qui commencèrent à se rapprocher de moi. En réalité nos classes étaient presque composées des mêmes élèves que l'an dernier. Tout le monde appréciait Arthur, il faut dire que chaque année il était élu délégué. Et en général, il faisait bien son travail de délégué.
Une fois à l'extérieur du lycée, je vis Cassandra et tout notre groupe habituel assis devant les grilles du lycée comme ils en avaient coutume. Je m'apprêtais à les rejoindre, soulagé de les voir, quand soudain, je vis Vénus dans les bras d'un homme à la sortie du lycée. Malgré mes efforts pour me faire discret elle remarqua tout de suite que je les regardais. Alors, elle me fit signe de venir. Je ne pouvais le refuser.
« Kari...heu...Karl, je te présente mon petit ami, Harry. »
Je lui serrai la main. C'était un homme gigantesque, robuste et barbu avec les bras couverts de tatouages colorés qui devait avoir la vingtaine.
« Ravi de te connaître. »
Dit-il en me regardant droit dans les yeux. Et c'est au moment de croiser son regard que je me suis rendu compte qu'en faite...je le connaissais ! Mais oui ! Je l'avais déjà vu quelque part mais je n'arrivais pas à me remémorer les circonstances exactes dans lesquelles on s'était déjà croisé.
« Ca va aller Karl ? »
Demanda Vénus inquiète.
« Oui ça va. »
Répliquai-je avec une voix tremblotante et un peu hésitant.
Et sur ces mots ils s'en allèrent me laissant toujours aussi perturbé. Je les vis disparaître de loin, Harry donna une claque sur les fesses de sa copine en public. Charmant ! Et elle ne ripostait même pas.
Et c'est à ce moment que je me suis rappelé l'endroit ou nos chemins s'étaient déjà croisés. C'était il y'a un an. L'été dernier. Nous étions sortis avec Arthur pour fêter les excellentes notes que nous avions obtenus à l'anticipé de français.
Nous nous étions aventurés dans un club privé après avoir déposé un billet de cent euros au videur. J'avais passé toute la soirée avec un groupe d'étudiante, Arthur avait disparu. Je ne l'avais plus revu de la soirée. Dans les environs de trois heures du matin je voulus rentrer, en cherchant Arthur je l'ais retrouvé à l'arrière du club, dans une ruelle un peu sombre et aux allures sordides. Il n'était pas seul. Il était entrain d'embrasser langoureusement et passionnément un homme. Cet homme c'était Harry ! Le petit ami de Vénus.
Plus tard, il ne voulu pas en reparler, il m'avoua juste avoir eu une petite liaison avec cet homme. Je n'ais pas cherché à en savoir plus.
Le fait est qu'Harry, le petit ami de Vénus avait eu une liaison avec Arthur un peu avant sa mort. Je devais prévenir Vénus !
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