Chapitre 7


Je traversai le hall lumineux, au plafond ondulant de couleurs irisés. Alize et Sun s'étaient gentiment proposés de m'accompagner, pour emprunter un livre à la bibliothèque. Leur compagnie était agréable et apaisante, après cette journée éprouvante. Mon corps était encore endolori par l'entrainement matinal. Mes jambes étaient lourdes, chaque pas resonnaient lentement sur le sol. Les uniformes blancs se dispersaient, en formant plusieurs groupes. Alors que les dix-huit élèves de la Sections Captif restaient uni, escorter par six gardes. Ils se dirigeaient dans la même direction que nous. La plupart des anges s'écartèrent sur leur passage, en affichant des visages méprisants ou pour certains craintifs.

Nous traversâmes les longs couloirs ouverts, qui longeaient la cour intérieure recouverte de neiges. Quelques flocons se mêlaient aux étoiles de la nuit, le cadran de la tour Est affiché déjà presque huit heures. La bibliothèque se trouvait dans l'aile Sud, au même endroit que la Section Captif. Je ressentis une certaine appréhension à l'idée de me retrouver seule avec Hadès. Mais c'était une occasion unique de tentais de percer le mystère qui l'entourait. Sun fini par briser le silence, en se tournant vers moi.

— Tu n'es pas trop déçu ? J'imagine que tu aurais préféré être en retenue avec Eden plutôt que le captif, demanda Sun avec un air faussement innocent.

— Non, pas du tout, répondis-je à la fois surprise et embarrassé par sa question.

— Humm... je dirai que c'est plutôt lui, qui avait l'air déçu de ne pas pouvoir venir avec toi, ajouta Alize, un sourire espiègle étirant ses lèvres.

— Arrête de raconter des bêtises ! C'est l'ami de mon frère rien de plus, soufflai-je en levant les yeux au ciel.

— Oh vraiment ? La façon dont il te regardait au dîner ? Crois-moi il ne te voit pas comme une simple amie, répliqua Sun amusé. Je suis même prêt à parier qu'il te demandera en fiançailles avant la fin de l'année.

— Je crois que tu lis trop de romance à l'eau de rose, lançai-je d'un ton narquois, tout en reprenant ma marche.

— Et toi, visiblement pas assez, répondit-il du tac au tac, un éclat de rire dans sa voix bientôt rejoint par celui de sa sœur.

Même si j'avais remarqué son intérêt à mon égard, je ne le prenais pas au sérieux. Après tout il était l'élève le plus convoité de l'établissement, pourquoi s'intéresserait-il à une princesse illégitime comme moi ? Nous franchîmes la porte massive de l'aile Sud. Les captifs disparaissaient dans les escaliers qui grimper sur la gauche. La bibliothèque n'était plus très loin, il ne rester plus que deux couloirs à traverser sur la droite. Quand nous passâmes la dernière allée, une porte s'ouvrit au centre dans un grincement inquiétant. Mes yeux fixaient aussitôt l'origine du son, le visage excédé de Gabriel apparut suivi par Joran et Gérald. Je croisai le regard de mon frère en arrivant à son niveau, son expression changeant en me voyant.

— Tu vas bien ? susurrai-je en m'arrêtant juste devant lui.

— Oui, je vais bien et t..., répondit-il avant d'être interrompu.

— Ne perdons pas de temps inutilement, vous aurez l'occasion de converser plus tard. La punition que vous avez reçue hier, n'est rien en comparaison à ce qui vous attend, lança le garde royal d'une voix glaciale, en fixant mon frère.

Gabriel baissa la tête, en me jetant un dernier regard presque désespéré. Tandis que la figure tuméfiée de Joran me lança un sourire mauvais, avant de disparaître avec Gérald et mon frère derrière moi. Je ne voulais même pas imaginer, ce que ce bourreau avait bien pu inventer pour les torturer. Je jetais un coup d'œil, vers l'endroit d'où ils étaient sortis, une inscription sur le mur désignait : Infirmerie. Nous continuâmes jusqu'au fond de la galerie, décorés d'armures en diamants de chaque côté. Une immense porte en bois dorée et aux moulures en formes de plumes nous accueillit.

— Je pense que tu as beaucoup de chance, de ne pas retourner avec ce psychopathe ! s'exclama Sun d'un air espiègle.

— Je ne sais pas, si se retrouver enfermer avec le démon le plus effrayant de la Section Captif, s'appelle de la chance, ajouta Alize d'une voix pensive, en approchant sa main de la poignée.

Ils n'avaient pas tout à fait tort, même si Hadès était un démon, je le trouvai dangereusement fascinant.

— Je crois que je vais donner une chance au captif, de me prouver qu'il est moins effrayant que Gérald, lançai-je avec une pointe d'humour.

La porte s'ouvrit, dévoilant une vaste salle éclairée par un lustre en forme de soleil, qui dominait la pièce dans un halo lumineux. L'odeur de cuirs et d'anciens parchemins emplissait l'espace. Une grande allée tapissé d'un velours bleu fleuris, traversait le centre de la bibliothèque. De chaque côté, de nombreuses rangés d'étagères en verre grimpaient à une hauteur vertigineuse. Quelques anges étaient déjà installés dans un coin, autour de plusieurs tables rondes.

— On peut t'attendre si tu veux ? me proposa Alize d'un ton chaleureux en donnant un coup de coude à son frère.

— Merci, c'est gentil, mais je ne sais pas combien de temps ça va durer. Si c'est trop long ne m'attendez pas, répondis-je avec reconnaissance.

— D'accord, passer minuit je compte sur toi pour aider Alize à me porter jusqu'à notre section, conclu Sun narquoisement, avant de se dirigeait vers les milliers de livres qui s'offraient à lui.

J'avançai vers le fond de la salle, sous les murmures silencieux des vieux grimoires. J'appréciais le calme qui régnait dans ce genre d'endroit, entouré de fabuleuse histoire à lire. La bibliothèque du palais était mon endroit favori, je me sentais ici presque comme à la maison. Je continuais d'avancer tout en observant les étagères ornementées de cristaux. Une vielle femme se trouver dans un coin, derrière un grand bureau en chêne. Son visage semblait froisser par les siècles d'existence. Je n'avais jamais vu un ange commun aussi âgé. Sous ses courtes mèches blanches, elle affichait un sourire radieux en me voyant approcher timidement.

— Bonsoir, je dois me rendre dans la réserve pour... ma punition, m'exprimai-je en formant une légère grimace à la fin de ma phrase.

— Bonsoir, Princesse Nora ? Je m'appelle Miranda, mais vous pouvez m'appeler Mimi comme tout le monde, suivez-moi, c'est par ici, dit-elle gentiment en plissant les yeux derrière ses lunettes rondes, avant de se lever.

Je la suivie de l'autre côté de son bureau, où une petite porte se dessinait sur le mur du fond.

— Votre camarade est déjà en bas, il vous expliquera ce que vous devez faire. Ne vous inquiétez pas, je ne dirai pas à la directrice que vous êtes arrivée en retard, m'annonça-t-elle avec un sourire en désignant l'entrée de la réserve.

Je rougis légèrement en me mordant la lèvre supérieure avant d'ouvrir la porte. Un escalier plongeait dans l'obscurité, ses marches faiblement éclairées par des demi-lunes murales projetant une lumière tamisée. Arrivée en bas, une longue table trônait au milieu de la pièce, recouverte d'une montagne de livres en désordre. Hadès était installé silencieusement à l'extrémité, ses yeux parcourant un vieux manuel à la relieur abîmé. Un garde impassible se tenait le long du mur derrière lui, surveillant ses moindres faits et gestes.

Je pris place à l'autre bout de la table, en face d'Hadès. Plusieurs piles, formaient une barrière entre nous, dissimulant une partie de son visage.

— Nous devons trier tous ces... résidus, qui proviennent du Royaume Oublié, s'exprima Hadès d'une voix froide sans même lever les yeux.

Je fus à la fois fasciné et légèrement choquée par ses mots. Ces livres n'étaient pas de simples « résidus ». Ils étaient probablement les derniers vestiges d'un royaume autrefois florissant. Malheureusement, il fut rayé de la carte lors de la Grande Guerre. Toute la famille royale, ainsi que des milliers d'habitants, avaient péri dans une explosion dévastatrice. Un immense cratère témoignait encore des horreurs qui avait anéanti ce territoire, autre fois appeler : Le Royaume de Gemmes.

Mes doigts effleurèrent délicatement la couverture calcinée d'un ouvrage. Quand je l'ouvris, les pages se désintégrèrent instantanément, tombant en une fine cascade de poussières. Je ressentis un léger pincement au cœur, à la vue du petit tas de cendres. Tandis qu'Hadès se lever, pour déposer son volume sur un chariot à ma gauche, sans me prêter la moindre attention. Pendant près d'une vingtaine de minutes, nous restâmes à travailler en silence. L'atmosphère était lourde et oppressante, chaque bruissement de page résonnant dans la pièce dans un écho infini. Finalement, incapable de contenir ma curiosité, je finis par briser la glace.

— Je voulais savoir, pourquoi es-tu intervenu ce midi ? lançai-je abruptement.

Je tentai d'observer sa réaction, à travers la muraille d'ouvrages qui nous séparer, mais il resta indifférent.

— Je pourrais vous poser la même question, lança-t-il sans lever les yeux de l'encyclopédie noircie qu'il feuilletait.

— J'ai simplement voulus empêcher un conflit, répondis-je pour me justifier, bien que son manque de considération commençât sérieusement à m'irrité.

— Intéressant. Parce que de là où je me tenais, on aurait dit que vous cherchiez à mettre de l'huile sur le feu avec cette carafe d'eau, rétorqua-t-il visiblement amusé en continuant de tourner les pages de son ouvrage.

Mon visage s'empourpra légèrement, face à son ton commentaire, mais je m'efforçai de garder mon visage impassible.

— J'aurai dû l'assommer peut-être ? ripostai-je sur un ton volontairement provoquant.

Il releva enfin les yeux, son regard noir et perçant rencontra le mien avec une intensité presque déstabilisante.

— A l'évidence, je doute que vous en auriez été capable, Princesse, déclara-t-il son ton chargé d'une arrogance tranquille.

Je serrai les dents face à cette insolence. Son regard d'une neutralité désarmante, me laissa momentanément sans voix. Refusant de lui accorder le dernier mot, je décidai de changer de sujet.

— Pourquoi avoir perdu la course ce matin ? demandai-je, le scrutant attentivement. Tu aurais pu gagner. Mais tu es arrivé dernier, ce n'est pas logique.

Il resta silencieux un moment, arquant légèrement un sourcil, comme si ma remarque l'avait pris au dépourvu.

— J'ai intentionnellement perdu la course, finit-il par avouer, son ton sérieux contrastant avec son air détacher. C'était pour éviter qu'un captif plus faible ne subisse de mauvais traitements lors de la confrontation.

Je le regardai, partagée entre admiration et perplexité. Les battements de mon cœur devenaient plus violents, plus rapides à chaque seconde.

— Donc c'est aussi par altruisme, que tu n'as pas hésité à battre Eden lors de votre duel ? insinuai-je un soupçon d'ironie dans la voix.

— Perdre une course c'est une chose. Mais perdre un combat c'en est une autre, répliqua-t-il calmement, son regard empreint de confiance. Je devais prouver que je ne suis pas vulnérable.

Une étrange lueur dansait dans ses yeux sombre et magnétique. Peu à peu masque invisible semblait s'être estompé, dévoilant une autre facette encore plus troublante. Nous restâmes ainsi à nous observaient en silence, jusqu'à ce que le bruit sourd de livres s'écroulant dans chaque recoin de la pièce, nous fasse sursauter. Je détournai le regard, alerté par une odeur nauséabonde qui s'insinuait lentement dans l'air, rendant l'atmosphère presque irrespirable. Lorsqu'un rugissement sourd déchira le silence nous interrompant brutalement. Un craquement sinistre, suivit d'un bruit de roulement de pierres sur le sol, résonna dans la pièce attenante du fond.

Le garde déjà sur le qui-vive, sa main fermement posée sur son épée, avança prudemment vers l'origine du bruit. Hadès et moi échangèrent un regard furtif, sans perdre un instant nous levâmes précipitamment pour nous diriger vers la sortie. C'est à cet instant qu'une paire d'yeux rouges apparut dans l'encadrement sombre. Mon corps se figea chaque muscle tétaniser par la peur. Soudain un tentacule gigantesque surgit, projetant violement le garde contre les marches en pierres. Le choc les fit s'écrouler dans un fracas assourdissant, scellant l'unique issu.

Une créature se dévoila peu à peu dans la lumière tamisée, un cauchemar reptilien d'une envergure monstrueuse. Son corps massif était recouvert d'une carapace luisante et hérissé, de plusieurs appendices semblables à des serpents ondulant. Sa gueule béante, révéla des dents aiguisées menaçantes. Le souffle court, je reculai instinctivement. Mais dans ma panique, mon talon heurta maladroitement une pile de livre. Je trébuchai en arrière, percutant Hadès de tout mon poids.

— Princesse, ce n'est pas le moment de nous faire une démonstration de maladresse ! s'exclama-t-il, tout en me rattrapant.

Avant même que je n'aie le temps de répliquer, un tentacule s'abattit sur nous avec une rapidité fulgurante. Sans réfléchir, je pivotai brusquement et me jetai sur Hadès pour esquivai l'attaque.

Le coup balaya l'air dans un sifflement, avant de heurter le mur derrière nous. La moitié des lumières vacillante s'éteignirent, nous plongeant dans une obscurité presque totale. Mon souffle s'accéléra en réalisant, que je me trouvai allonger contre Hadès, avec son bras enroulé autour de ma taille, nous maintenant au milieu de la salle.

— Je ne pensais pas que vous étiez aussi entreprenante Princesse ? murmura-t-il sa voix teintée de moquerie.

A ces mots je sentis mes joues s'enflammer. Même dans la pénombre ses yeux brillaient comme s'ils avaient absorbé toute la lumière.

— Si on survit tu pourras me remercier de t'avoir sauvé la vie, soufflai-je feintant l'exaspération, le cœur battant la chamade.

Un rugissement plus puissant résonna dans la pièce brisant cet instant incongru. Ma panique monta en flèche et je tentai de me redresser, mais Hadès toujours alerte me retint d'un geste sec. Dans un mouvement fluide il roula sur le côté, m'entrainant avec lui sous la table, juste avant que l'énorme masse de l'appendice ne s'écrase sur le sol. L'impact fit trembler la pièce, laissant une toile de fissures profondes, à l'endroit exact où nous étions quelques secondes plus tôt.

— C'est vous qui ne m'avez toujours pas remercié, de vous avoir sortie d'une situation embarrassante ce midi. Et si mes calculs sont bons cela fait deux à un pour moi maintenant, fit-il remarquer d'un ton bas et railleur tout près de mon oreille.

Je levai les yeux au ciel, cette fois-ci, c'était lui qui se retrouver allonger sur moi. La chaleur de son corps semblait se répandre à travers le mien. Son expression emplit de satisfaction était déroutante.

— Si tu as fini de faire tes comptes, on peut peut-être réfléchir à trouver un moyen de sortir d'ici en vie ? rétorquai-je en détournant son regard, feignant l'exaspération.

Mes yeux scrutaient la pénombre, cherchant désespérément le monstre tentaculaire. Une brève accalmie laissait supposer, qu'elle préparer une nouvelle attaque, l'aura menaçante qui emplissait la pièce me glaçait le sang. Une violente secousse ébranla la table juste au-dessus de nous, balayant de la surface d'un coup puissant tous les livres qui s'y trouver. Les ouvrages s'éparpillèrent sur le sol dans une avalanche de poussières, mais un éclat particulier attira mon attention. Une lumière douce et verdoyante, émanait d'une couverture sertie d'une émeraude étincelante.

— Je ne vois qu'un seul moyen pour sortir d'ici, il faudrait que vous m'enleviez ce bracelet ! déclara Hadès en basculant d'appuie sur ses mains, pour ne pas m'écraser entièrement.

Je tournais la tête vers lui, observant les pierres d'améthystes qui brillaient faiblement autour de son poignet gauche. Ces gemmes entravaient son pouvoir de téléportation, je le savais bien, mais malgré l'urgence de la situation, une hésitation me saisit.

— Et qu'est ce qui me garantit que tu ne profiteras pas de ta liberté pour t'enfuir et me laisser ici ? lançai-je avec méfiance.

— Je croyais pourtant que vous étiez perspicace, soupira-t-il profondément. Ne tarder pas trop à vous décider, ce n'est pas comme si nos vies étaient en jeu, ajouta-t-il avec sarcasme.

Le grognement de la créature se rapprocha, accompagné d'un souffle fétide qui me retourna l'estomac. Je n'avais plus le luxe d'hésiter. Je posai mes doigts autour du poignet d'Hadès, un léger frisson me parcourant au contact de sa peau chaude. D'une main tremblante mais rapide je parvins à ouvrir le fermoir et ôter le bracelet. Au même moment la table finie par se soulever, avant de voler à travers la pièce. Nous nous retrouvâmes à découvert, face à l'hideuse bête titanesque. Son regard écarlate injecté de sang, me laissa échapper un cri malgré moi. Par reflexe je serrai mes mains autour de la taille d'Hadès.

— Ça risque d'être légèrement douloureux, m'avertit-il en me serrant dans ses bras.

Avant que je ne puisse répondre, une sensation étrange m'envahit. Ma tête tourna violement, des picotements se répandirent dans tout mon corps. Alors que la pièce disparaissaient dans un éclat de lumière aveuglante.  

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