Chapitre 5

L’atmosphère glaciale qui régnait sur le terrain, était bien plus frappante, que le vent froid de l’hiver. Des murmures indignés se propageaient autour de moi, tel une traînée de poudre parmi les uniformes blancs. Je restai à l’arrière de notre Section, aux côtés de Gabriel, qui serrait les poings. Je ne savais pas ce qui m’inquiétait le plus entre le fait : que les démons participeraient à tous nos cours d’entraînement, ou d’avoir Gérald comme instructeur. Les captifs, se tenaient silencieusement alignés au centre, dans leurs vêtements semblables aux notre, à l’exception de leurs couleurs noirs.

— Bien, nous allons commencer, dix tours de terrains pour vous messieurs, le dernier affrontera le premier et pour mesdemoiselles, seulement huit tours suffiront. Vous avez cinq minutes pour vous préparer, déclara Gérald sur un ton ferme, en nous balayant du regard.

— Mais ce n’est pas équitable, les troisièmes et deuxièmes années sont beaucoup plus entraînées que nous ! protesta Célia avec un air dramatique.

— Oui tu as raison, tu feras donc en sorte de ne pas arriver dernière, rétorqua Gérald en se tournant vers la princesse des cieux. Il vous reste quatre minutes, les dames débuteront, pour cette remarque impertinente, ajouta-t-il de sa voix tranchante

 Au moins nous n’avions pas à aller nager, dans l’eau froide de l’étang. Les regards des filles de ma section, se portèrent tous sur Célia, qui était devenue rouge comme un diablotin. Je commençais à m’échauffer, en effectuant des flexions puis j’étirais le reste de mon corps. Dans un mouvement collectif, nous effectuâmes des étirements dans une ambiance militaire. Les captifs firent de même de leur côté, sous le regard des gardes qui les surveillaient.

Parmi les captifs une fille attira mon attention, ses longs cheveux rouge écarlate semblaient flamboyer sous le soleil hivernal. Son visage, était délicat et presque inoffensif, au premier abord avec ses yeux ambrés tirés en amandes. Je n’aurais jamais pensé qu’une démone pouvait être aussi belle. Une croix en argent, était visible sous son badge presque identique au notre, à la différence il représentait une plume enchaînée.

— Mesdemoiselles, si vous voulez bien vous mettre toutes en ligne, s’exclama notre superviseur, en pointant du doigt un coin du terrain.

Je me dirigeais avec Alize et Célia, ainsi que les trois autres filles de notre section, près de la bordure, qui délimitait l’espace d’entraînement. Quatre captives se joignirent à nous, dont celle aux cheveux vermillon. Nous formions toutes une seule et même ligne, sur les dalles blanches du terrain rectangulaire. Au départ de Gérald, nous nous élancions toutes ensembles, encouragées par les garçons.

Je courais au même rythme qu’Alize, à la différence, elle déployait ses longues jambes de manière gracieuse. Nous étions au milieu du groupe, l’unique troisième année était en tête, suivi de près par la fille à la chevelure rouge vif et les deux deuxièmes années. Juste derrière nous, trois uniformes noirs étaient à nos talons et Célia à la traine fermait la marche. Durant les cinq tours qui suivirent, chacune gardait sa place avec précaution.

C’est au sixième tour que tout bascula. Mon attention fut perturbée lorsque ma mère apparue au côté de Gérald, accompagné d’un captif. A cet instant, je me trouvais à l’opposé du point de départ, près de l’étang, que j’avais traversé la veille à la nage. Ma respiration, qui jusqu’à présent était régulière devint laborieuse. Quand je franchis le septième tour, j’eu presque le souffle coupé. Mes yeux se portèrent instantanément sur le nouveau venu.

Son regard sombre, d’une intensité hypnotisante, semblait sonder mon âme. Des mèches de cheveux ébène, tombaient légèrement sur son front lisse, encadrant son visage sans défaut, souligné par une mâchoire carrée. Sa posture droite, laissait deviner une musculature parfaite sous son uniforme. Jamais je n’avais vu un être aussi fascinant. Gabriel qui représentait selon moi l’idéal masculin et même Eden avec son allure captivante, semblait presque fade en comparaison de cet être d’une beauté surnaturelle.

Troublé par cette apparition, je manquais de trébucher. Revenant difficilement à la réalité et tentais de me reconcentrer sur ma course. Alize était à présent loin devant moi, les deux démones m’avaient dépassées, sans que je m’en rende compte. Je ne parvenais même plus à apercevoir qui était en tête, mais Célia juste à côté de moi, me rappela que si elle me doublait, je finirai dernière. Il restait un seul tour pour me reprendre. Chaque effort pour maintenir le rythme me semblait en vain, comme si mon corps me trahissait peu à peu.

Toutes les filles avaient déjà franchi la ligne d’arrivée. A quelques centaines de mètres de la fin, j’étais toujours au coude à coude avec Célia. Mon rythme cardiaque battait si fort, qu’il semblait résonner dans l’air. Je fulminais intérieurement, si seulement je ne m’étais pas bêtement laissé distraire, je ne serais pas dans cette position. Le vent glacé me fouettait le visage, une goutte de sueur glissa le long de ma tempe. L’arrivée n’était plus très loin, j’essayai dans un ultime effort, de rassembler mes dernières forces. Mais, dans mon empressement mes pieds finirent par s’emmêler. Je finis par chuter lamentablement, tête la première, juste à quelques mètres de la fin.

— Formidable, nous avons une gagnante et une perdante, du moins ce qu’il en reste, soupira Gérald avec lassitude, en se caressant sa barbe blanche.

Alize m’aida à me relever et je me redressais avec difficulté, le corps endolori. D’un geste machinal, je portais la main à mon menton, qui avait durement heurté le sol. Quelques gouttes de sang, s’étaient déposés sur mes doigts écorchés par ma chute. En baissant les yeux, je remarquais l’état de mes genoux, deux énormes bleus commençaient sûrement à se former. Je fis une grimace en réalisant, que j’étais à une dizaine de mètres de l’arrivée.

Je cherchais ma mère parmi la foule, mais elle semblait avoir disparu. Quant à Gabriel, il était déjà en position, prêt pour son départ. Gérald avait probablement donner l’ordre aux garçons de se préparer, avant même que nous ayons terminé notre course.

— Qui est arrivée la première ? tentais-je d’articuler, le souffle court, en m’adressant à Alize.

— C’est une captive, celle aux cheveux rouges, elle est arrivée avec au moins une minute d’avance, me répondit-elle presque désolé pour moi.

— Partez ! s’exclama notre instructeur, à gorge déployé, depuis le bord du terrain.

Nous rejoignîmes les autres filles de notre section, qui étaient à présent assises sur un long banc en pierre, les yeux rivés sur la course.

— Je parie que c’est Malone qui va gagner, affirma la brune de troisièmes années, les joues encore rouges de l’effort que nous venions d’accomplir.

— Ce n’est pas parce que c’est ton fiancé, qu’il va forcément gagner Neva, lui répondit une deuxième année, au visage d’une ressemblance frappante avec celle-ci.

— Gabriel va gagner, lança Célia avec conviction.

— En tous cas, une chose est sûre, ça ne sera certainement pas mon frère, plaisanta Alize en se prêtant au jeu.

Un éclat de rire partager suivi sa confession, contrairement aux quatre filles de la Section Captif. Elles restèrent en retrait, en effectuant silencieusement des étirements au centre. Du coin de l’œil, j’observais la démone à la chevelure flamboyante, qui donnait des coups de poings avec agilité dans le vide. Sa posture droite soulignait par sa détermination. Lorsque son regard croisa le mien, je sentis un frisson parcourir mon corps, j’en déglutis ma salive.

— Vous avez vu ce démon ? Il n’a pas l’air très rapide, si c’est Malone qui gagne, il n’en fera qu’une bouchée, lança Neva en pointant le dernier de la course.

Mes yeux suivirent instinctivement la direction qu’elle indiquait. C’était le captif qui était arrivée avec ma mère. Il semblait courir au ralentit, sans conviction, loin derrière les autres. Les garçons bien plus nombreux que nous, formaient un groupe dense, où il était difficile de distinguer chaque concurrent. Je plissais les yeux pour repérer mon frère. Il se disputait la première place avec Eden et un brun athlétique, que je supposais être Malone. A mon plus grand étonnement, Alec était juste derrière eux, suivi par les jumeaux. Un nuage d’uniformes noirs entouré, Sun qui peinait à avancer.

Quand le dernier démon passa devant nous à la fin du premier tour, j’eus le temps de distinguer sous son badge trois petites croix en argent. Ce qui voulait sûrement dire, qu’il serait dans la classe de Gabriel. Mais je me demandais encore, pourquoi était-il arrivé après les autres. Avait-il déjà causé des problèmes ? Je me contentais de l’observer discrètement. Même en fin de liste, il dégageait une certaine prestance. Sa démarche lente et son visage énigmatique, ne montraient aucune trace de fatigue, il effectuait des petites foulées sans se forcer. Je jetai un coup d’œil vers le démon juste devant lui, dont le visage était rouge et semblait souffrir de l’effort. Cette comparaison était pour le moins déconcertante. Je finis presque par en déduire qu’il le faisait exprès.

Après une vingtaine de minutes, la course arriva à son dernier tour. Les filles s’étaient levées du banc avec enthousiasme, attendant que le premier participant franchisse l’arrivée. Eden termina en premier, avec une allure remarquable, suivi de très près par Gabriel, qui semblait bouder sa deuxième place. Malone atteignit la troisième position, Alec arriva seulement quelques secondes après lui. Sam ou Chen, il m’était impossible de dire lequel était arrivé avant l’autre. Cinq captifs précédèrent Sun et neuf finir derrière lui, bien que le dernier fût encore à une centaine de mètres de la fin.  

— Très bien, nous allons passer au premier affrontement, princesse Nora, et Ruby, en place sur le cercle du milieu je vous prie, s’exclama Gérald sans prêté la moindre attention au dernier qui n’était toujours pas arrivé.

Je me mordis la lèvre inférieure, en me rendant vers le centre du terrain, l’impression de me rendre à la potence. Les démons étaient tous réputés pour leur force hors norme, ainsi que leur capacité à se téléporter. Et ils n’avaient besoin, que de quelques heures de sommeil, ce qui leur donnaient un large avantage et les rendaient très difficile à battre. Ruby prit position dans le cercle délimité par un tracé noir. Un bracelet d’améthyste était verrouillé à son poignet gauche, ce qui m’indiquait, qu’elle ne pourrait pas utiliser la téléportation. Ces précieux cristaux, leur avait sûrement été imposé par ma mère. Je sentis les regards braqués sur moi, ce qui me rendit encore plus nerveuse. Mais je tentais de ne rien laissé paraître, pour ne pas encourager mon adversaire.

— Le combat se termine, dès que l’un de vous tombe à terre, ou dépasse de la ligne, un conseil ne perdait pas, sinon vous effectuerez cinquante pompes, expliqua notre bourreau, avec son habituel absence d’empathie pour les perdants.

Ruby se tenait prête face à moi, les genoux légèrement fléchis et les poings serrés. Je tentai de copier sa posture, en la fixant avec détermination, sans montrer le moindre signe de faiblesse. Les deux sections formaient un mur, tout autour du cercle et nous observaient comme des curiosités. Les anges étaient derrière moi, tandis que les démons étaient de l’autre côté, derrière la captive. Son visage qui me parut doux, au premier abord, se durcit lentement. Quand elle se rua sur moi à toute vitesse. Je levais les bras pour tenter de la contrer, mais son coup de poing percuta ma joue. La douleur me fit reculais d’un pas, tout-en gardant ma posture, je n’avais pas l’intention, de m’avouer vaincu aussi facilement.

Prenant confiance, je réussis à contrer ses attaques suivantes avec plus d’assurance, ne laissant plus aucune ouverture vers mon visage. Voyant ses efforts vains, Ruby recula pour prendre son élan, avant de me frapper avec sa jambe, d’un geste précis dans les côtes. Je failli perdre l’équilibre, mais, j’attendis qu’elle repose son pied à terre, pour riposter. Mes phalanges se cognèrent sur son arcade et une éclaboussure de sang, gicla sur ma manche. L’impact me surpris autant qu’elle. Ruby redressa la tête, ses lèvres se relevèrent en un demi sourire, laissant apparaître ses canines pointues. Le silence qui nous entourait était pesant. Je fis de mon mieux pour ignorer les battements frénétiques de mon cœur et garder ma concentration.

Après une série de coups, sans parvenir à l’atteindre, elle réussit à me prendre de court. Mon poignet se retrouva subitement immobilisé entre ses mains, et d’un geste brusque, elle m’attira vers elle. Se retournant rapidement dos à moi, elle remonta sa prise sur mon bras et me fit basculer en avant par-dessus son épaule. Dans un mouvement spectaculaire, je heurtais le sol de plein fouet, pour la deuxième fois de la journée. La Section Captif l’applaudissait, tandis que je restais un instant assise sur le sol. Elle me tendit la main pour m’aider à me relever, un sourire triomphant dessinait sur les lèvres. Je n’eus d’autre choix que de m’inclinais devant cette lourde défaite.

— Très beau combat Ruby, félicita Gérald avec une pointe d’admiration, avant de se tourner vers moi. Princesse Nora, vous ferez vos pompes avec le prochain perdant.

Je l’avais rarement entendu complimenter quelqu’un, d’ailleurs je l’en croyais même incapable. Alize et Sun m’attendaient au bord du cercle, pendant que mon frère discutait avec Eden et Malone.

— Je trouve que tu t’es bien débrouillé, me réconforta Alize avec sa voix chaleureuse.

— Je n’aurais pas fait mieux, rétorqua Sun avec son regard malicieux.

— J’aurais bien voulu voir ça, répliqua sa sœur en le taquinant.  

— Prince Eden et Hadès, mettez-vous en place, ne perdons pas de temps, s’impatienta le bourreau, en regardant sa montre à gousset.

Eden s’avança avec un sourire confiant, le torse bombé, débordant d’assurance en prenant place au centre du cercle. Il tourna brièvement la tête dans ma direction, comme pour s’assurait que je l’observais bien. En face le captif s’avança dans une démarche nonchalante calculée. Ses mouvements dégageant une puissance silencieuse. Son regard sombre et intense, semblait absorber toute la lumière. Le prince adopta une position de combat impeccable, prêt à en découdre et lança sans attendre une première attaque rapide. Dans un mouvement fluide, Hadès esquiva avec une agilité surprenante, en penchant son corps dans la direction opposé. Avant même que le prince n’ait le temps de réagir, le captif riposta d’un coup de poing précis, en plein dans la mâchoire. Eden essuya d’un geste sec, un filet de sang coulant de ses lèvres, son regard s’assombrit avant de repartir à la charge. Cette fois encore son poing fendit l’air sans toucher sa cible, mais le suivant s’écrasa avec puissance, contre le torse de son adversaire. Hadès ne broncha pas, son expression resta imperturbable. Il répondit d’un violent coup de pied, contre la jambe d’appui du prince, faisant légèrement plier son genou. Eden se redressa instantanément, avant de reprendre un autre coup brutal dans les abdominaux.

Malgré la souffrance qui pouvait se lire sur ses traits, Eden resta debout sans laisser paraître le moindre tremblement. Les deux adversaires échangèrent plusieurs attaques, chacun cherchant une faille dans la défense de l’autre. Mais, aucune ouverture décisive ne se présentait. Leur affrontement, d’une agressivité stupéfiante, évoquait celui de deux lions enragés, se disputant leur territoire. Le public retenait son souffle. Dans un silence presque religieux, les regards étaient rivés sur les deux combattants, attendant l’issu de ce duel titanesque. Le prince tenta un coup de pied audacieux, qui atteignit le flanc d’Hadès. Mais ce dernier, d’un geste vif et précis, saisit la cheville du prince, avant de balayer la jambe, qui le maintenait à la verticale. Eden s’effondra lourdement, mais la victoire du captif fût de courte durée. Le prince se redressa furieux et dans un élan de rage, il attrapa le vainqueur par le col. Hadès loin d’être impressionné, se laissa faire et lui répondit d’un sourire insolant et chargé de provocation.

— Prince Eden ! Vous avez perdu, acceptez votre défaite convenablement, s’est indigne de vous ! s’exclama Gerald d’une voix grave, avant de s’interposer entre les combattants. Vous effectuerez cent pompes, au lieu de cinquante, pour votre manque de discernement. Le cours est terminé, ce qui n’ont rien à faire ici, aller vous laver, vous avez quartier libre jusqu’à l’heure du déjeuner, ajouta-t-il en tirant le prince par le bras, l’empêchant de frapper le démon.  

Tout le monde quitta rapidement le terrain, sans la moindre protestation, il ne resta plus que moi, Eden et Gérald. J’observais les uniformes blancs mêlé aux noirs, s’éloignaient vers l’établissement aux couleurs chatoyantes. Un garde revint chuchoter quelques mots, à l’oreille de notre superviseur. Je me demandais ce qu’il pouvait bien lui dire. Je me préparer mentalement à la série de pompes qui m’attendait, avec probablement une mine épouvantable.

— Je vais devoir m’absenter, mais, ne vous inquiétez pas, le garde Melvin me remplacera, afin de veiller à ce que vous effectuez correctement vos exercices, lâcha le bourreau avant de s’envoler vers l’académie.

[N'hésitez pas à me donner vos avis. J'espère qu'il vous a plus, autant que j'ai aimé l'écrire. Et n'oubliez pas de liker c'est gratuit] -------- <3

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