un portrait sur la plage
La journée du lendemain était passée vraiment trop lentement selon la blonde. Aussi lent qu'un escargot qui fait la course avec une torture. Inconsciemment, ces deux fois où ils avaient vraiment pu se parler avait fait découvrir une sensation qu'elle n'avait encore jamais ressentie, en tout cas pas comme ça.
Cette sensation de se sentir libre, soi-même, totalement à l'aise avec une autre personne. Andromeda ne mentait jamais aux autres, où que par soucis de grande nécessité, mais elle cachait beaucoup de choses aux gens. De nature très secrète, la moitié de sa vie était un grand mystère pour la plupart des gens qu'elle connaissait. Avec Sam, elle n'avait pas cette peur d'être jugée, alors dire et montrer ce qu'elle cachait à tous les autres étaient devenu un simple fait que l'on peut expliquer. Parfois c'était des trucs qui pouvaient sembler bête, mais sa non-confiance en l'être humain la poussait à le cacher.
Aider les autres, elle adorait ça. Mais elle, demander de l'aide, jamais de la vie. Elle détestait s'ouvrir aux autres, alors leur demander de l'aide, c'était mission impossible selon la jeune fille. Mais avec lui, cette peur n'existait plus.
« C'était donc ça de s'ouvrir à un humain ? » pensa la jeune fille.
C'était pour ça aussi qu'elle voulait revoir le garçon au plus vite, même s'il n'était que midi et qu'ils ne se verraient pas avant plus de cinq heures, elle avait déjà préparé ses crayons et son seul bloc de papier à dessin. Malheureusement elle ne put pas voir le garçon aujourd'hui car ce dernier avait choisi l'excursion comme activité du jour et en ce moment même il était à plus de cinquante kilomètres d'elle.
Cinquante kilomètres de trop.
Comment se sera quand il sera à l'autre bout de la France ?
A quoi pensait-il, là en ce moment même ?
Pensait-il à la jeune fille ?
Se posait-il ces questions-là ?
Et que serait la réaction d'Andromeda si elle savait qu'il se posait les mêmes questions qu'elle ?
Mystère et boule de gomme.
***
- Andro, on va promener dans le village pour prendre des cadeaux pour nos proches, tu viens ?
- Euh, oui j'arrive !
Elle avait totalement oublié qu'elle devait acheter un cadeau pour sa sœur, ses parents attendront l'année prochaine pour peut-être daigner en recevoir un. Mais Sasha, sa petite sœur, bien qu'elle pouvait être très chiante quand elle s'y mettait, était la meilleure des petites sœurs. Un mot pour la définir ? Attachiante. Un beau mélange qui en disait beaucoup sur ce petit démon tombé du paradis.
Sa sœur et elle étaient souvent mise sous pression par leurs parents. La plus grande à toujours faire mieux, la plus petite à « essayer d'égaler le talent de sa sœur. » Sauf qu'avec cette pression sur le dos et son jeune âge, Sasha pétait souvent les plombs et faisait beaucoup de crise d'angoisse.
Andromeda a toujours été là pour elle, lui expliquant qu'elle avait le droit de faire ce qu'elle voulait dans la vie, qu'elle était libre de choisir et de penser, que ce n'était pas ces notes qui définissaient qui elle était. Toujours à ses côtés quand ces nerfs lâchaient, quand elle faisait ces crises de panique en plein milieu de la nuit à la bercer et à la calmer. C'était leur seule manière de ne pas se détester.
Andromeda admirait beaucoup se cadette et sa capacité à pouvoir extérioriser tout. Oui, elle se mettait dans des états faramineux pour pas grand-chose, mais elle pouvait tout sortir sans devoir forcer.
En comparaison, Andromeda avait du mal de pleurer, elle pouvait garder tant de choses en elle sans que cela ne l'atteigne, jusqu'au jour où la goutte de trop fasse tout exploser, intérieurement. Dans ces moment-là, la blondinette avait envie de crier contre tout le monde, de leur expliquer l'ouragan qui est en train de se déchaîner dans sa tête.
Mais jamais elle n'a réussi à exploser. Quand elle a de la chance, quelques larmes amères coulent sur ces joues, soulageant son cœur.
Elle aime pleurer, tellement c'est rare que des larmes arrivent à sortir de ses yeux, la jeune fille chérit ces moments comme si c'était le jour où elle trouvait de l'or.
Elle était un de ces esprits complexes très introverti qui cherchait le moyen d'extérioriser. Voilà pourquoi elle peignait et dessinait.
La fin de journée décida enfin à pointer le bout de son nez. Alors que les filles revenaient, des cadeaux sous les bras, rigolant joyeusement ou se moquant gentiment de la face rêveuse d'Andromeda, qui vérifiait sa montre toutes les cinq minutes comme si elle avait le pouvoir à un moment d'accélérer le tempo du temps.
Plus que deux heures.
Au repas, elle le vit de loin, en train de rire, ses yeux pleuraient de joie même. Il se tenait à son ami à côté de lui tout en pointant la personne en face de lui. Il croisa son regard, le temps d'un instant, il lui adressa un grand sourire, qu'elle lui rendit. Milo, son ami assit à côté de lui, regarda dans la direction de Sam, pour voir à qui il souriait bêtement et remarquant que c'était Andromeda, il lui fit un signe de la main, avant de frapper l'arrière du crâne de son ami pour le faire revenir à lui. Ce dernier commença à riposter en essayant de le frapper à l'arrière de sa tête mais sans grande réussite, faisant pouffer Andromeda. Sam lui adressa un dernier regard en lui faisant un clin d'œil et elle se retourna vers les filles qui observait les garçons en pouffant, elles aussi.
- Des vrais gamins, déclara Jenny en souriant. Bon, parlons d'un sujet sérieux à présent. Tu vas mettre quoi ce soir ?
- Mais je m'en fou de ce que je porte, je reste comme ça aujourd'hui.
- Mais-, commença Tatiana.
- Laissez-là un peu tranquille, déclara Emily.
- Merci Emi'.
- Par contre, continua Emily tout en finissant sa glace, il faut que tu lui parles de Harry Potter, s'il n'aime pas, je ne l'aime pas. S'il aime, alors tu as mon feu vert.
- Feu vert de quoi ? demanda quelqu'un derrière elles, les faisant sursauter.
C'était Sam. Il relevait son sourcil droit tout en regardant Emily, se demandant bien de quoi elle pouvait parler.
- Oh rien on parlait d'un livre que j'ai lu, rien d'important.
les filles la regardèrent d'un air étonné, depuis quand Harry Potter était un livre peu important pour elle ?
- Ah d'accord.
- Qu'est-ce que tu viens faire ici ? demanda Andromeda en se tournant vers le jeune garçon.
- J'ai gagné mon combat de hautes voltiges contre Milo, alors vu que j'étais libéré-délivré de cet imbécile qui me sert d'ami, j'allais te rendre visite vu que tu semblais avoir fini de manger et que tu avais l'air de t'ennuyer.
- Eh elle ne s'ennuyait pas ! s'exclama Jenny, vexée de penser que quelqu'un pouvait s'ennuyer en sa compagnie.
Sam adressa un clin d'œil à Andromeda.
- Ça te dis qu'on sorte déjà ? demanda la blondinette.
- Avec grand plaisir.
- Ça ne te dérange juste pas qu'on passe dans ma chambre avant pour que je puisse aller chercher mon matériel ?
- On dirait que tu vas chercher des instruments de torture.
- Je vais chercher mes claquettes, c'est pour ça.
- Si t'arrives peindre avec des claquettes, franchement chapeau bas.
Andromeda prit les clefs qui étaient sur la table et se leva pour se diriger vers les escaliers. Sam derrière elle.
- On a de la chance, déclara Sam, le coucher du soleil est magnifique ce soir !
- Comme tous les autres soirs, enfin, je trouve.
- C'est peut-être parce que celui-ci a un goût particulier. Ça ne t'arrive jamais de voir quelque chose tous les jours et puis, un jour en particulier il va se passer quelque chose de spécial dans cet endroit et il aura un goût particulier à présent, on ne le verra jamais plus indifféremment.
- Si, je comprends ce que tu veux dire...
- Et je trouve que c'est ça qui est génial, c'est que quand une simple pièce ou un simple coucher de soleil peut devenir une chose extraordinaire grâce à la magie d'un moment.
- Eh bien, faisons-en sorte que ce moment soit magique, déclara Andromeda en ouvrant la porte de sa chambre.
Ils ne s'attardèrent pas, elle prit son matériel avant de sortir directement. Sam gambadait devant elle dans les couloirs, tel un enfant qui sautillait joyeusement, faisant rire la jeune fille.
- Viens ! s'exclama-t-il en lui tendant la main, comme pour lui dire de venir gambader avec lui, et son œil pétillant la fit céder à la tentation, au diable les gens qui disaient que les ados de dix-sept ans devaient arrêter d'agir comme des enfants.
- Faisons de chaque instants un moment inoubliable ! chantonna-t-elle.
Une vielle dame qui passait justement dans le couloir les regarda de la tête aux pieds, étonnée avant de sourire quand elle vit Sam faire une révérence devant elle comme pour la saluer. Andromeda, rentrant dans son jeu, en fit une aussi. Puis ils continuèrent leurs routes jusqu'à la digue.
Dehors, la chaleur nocturne du petit village italien leur tapa au visage. Il y avait un petit peu plus de vent aujourd'hui et donc plus de vagues. On entendait cette dernière recracher ces écumes d'eau sur la plage de sable fin, éclairée par le soleil couchant qui reflétait des reflets dorés sur les murs colorés des petites maisons. Quelques personnes se promenaient sur la digue, main dans la main, prenant en photo le coucher de soleil, se dirigeant vers la mer pour profiter de cette étendue d'eau encore un peu chaude.
- Alors... à nous, déclara Andromeda, rompant le silence.
- À nous, continua Sam. On se met où ?
Ils mirent du temps à s'installer, car Andromeda n'avait pas l'habitude de peindre et de dessiner des gens en direct, la plupart du temps, elle dessinait des gens tout droit sorti de son imagination ou elle prenait des photos de coucher de soleil. Mais là, elle devait pour la première fois de sa vie dessiner en temps réel et assez rapidement car le soleil ne tarderait pas à se coucher. Bien sûr, elle pourrait toujours imaginer et terminer ça par elle-même sans vraiment respecter les nuances du ciel.
Puis elle commença enfin à le peindre, il était assis dans le sable et elle sur le petit mur de pierre encore chaud. Ses premiers coups de crayons étaient tremblant, elle avait peur de ne pas être à la hauteur ; elle savait pourtant qu'elle était capable et elle allait réussir, jamais elle n'avait été si déterminée à y arriver.
Puis son poignet se délia et elle put enfin commencer à dessiner son portrait. Sam, avait un grand sourire figé, qui ne lui allait pas tant que ça, en vrai.
- Détend tes pommettes, lui déclara-t-elle pour qu'il arrête de crisper ses joues. Souris comme tu souriais, hier. Sois naturel.
- Ça me stresse, je suis désolé.
- Je sais, ne t'inquiètes pas ça me stresse aussi.
- On aura dû faire une séance de yoga avant de venir ici, je pense que piquer un sprint n'était pas la meilleure des solutions.
Sa réflexion la fit sourire et le sourire de Sam devint plus naturel, lui aussi.
Le projet de base était qu'elle dessine Sam puis qu'elle fasse le coucher de soleil derrière lui, mais pour finir elle se concentra sur le portrait du garçon châtain en face d'elle. Des personnes âgées s'arrêtèrent près d'eux un instant, et ils observèrent le coup de crayon d'Andromeda avant de poser une main bienveillante sur son épaule et de repartir, sans un mot.
- Je suis sûre que quand tu ouvriras ta galerie d'art, ce seront tes premiers fans, glissa le jeune homme avec un sourire.
- Tais-toi à la place de raconter des bêtises.
- Qui te dis que je n'ai pas raison ?
- Je n'arriverai jamais à remplir une galerie d'art.
- Juste, tu as quel âge ?
- Bah, dix-sept ans, tu le sais bien !
- Et on meurt vers quel âge ? Disons quatre-vingt ans, donc en soixante-trois ans, tu penses que tu n'arriveras pas à ouvrir une seule galerie d'art ?
- ...
- Et puis, tu es la première à dire qu'il faut réaliser ces rêves et rien qu'à l'évocation de « galerie d'art », tes yeux se sont remplis de petites étoiles, alors ne me dis pas que tu ne veux pas en ouvrir une.
- Le fait de savoir que d'autres ne réaliseront peut-être jamais leurs rêves, ça me rend malade. Mais pour moi, c'est différent.
- Pourquoi c'est différent ?
- Parce que je n'ai pas envie que l'on me soutienne, j'ai l'impression d'être faible à ce moment-là. Je veux avancer toute seule pour y arriver, mais le problème c'est que j'ai beaucoup plus de bâtons dans les roues que de coups de bol. Et j'ai énormément de mal à remonter le courant.
- Ce sont tes parents, je suppose.
- Oui, ce sont mes très chers parents. Je n'ai jamais compris pourquoi ils agissaient comme ça avec ma sœur et moi.
- Parfois, même des gens que l'on connait très bien resteront des mystères pour nous. Tu as déjà essayé de leur en parler ?
- Très peu, à chaque fois que je commence à leur parler de ça, ils me parlent de façon tellement... dure que mes arguments restent coincés dans le fond de ma gorge et que rien ne sort, c'est très frustrant.
- Et si c'était moi qui leur en parlait ? Je suis extérieur à vous, je peux même me faire passer pour un étudiant en art ou je ne sais pas quoi, pour leur dire qu'il faut que tu exploites ton talent et je ne sais pas quoi ! Tu m'as convaincue de réaliser mon rêve, plutôt mon plus grand projet. Sache que je le réaliserai pas si tu ne leur en parles pas ou si tu ne réalises pas ton rêve car tu as donné trop de courage aux autres mais pas assez à toi.
- Il ne vaut mieux pas leur en parler, ils ne comprendront pas, ça ne sert à rien. Mais toi réalise ton rêve, ne t'arrêtes pas pour moi. S'il te plait.
- Eh, Andromeda, je suis sérieux.
Elle releva la tête du portrait qu'elle terminait doucement, il faudra qu'elle peigne le coucher de soleil aussi après... Sam la regardait droit dans les yeux, sans ciller alors que son regard à elle était fuyant. Elle détestait recevoir autant d'attention, ses parents lui avaient fait perdre le peu de confiance en elle qu'elle avait. Elle posa le portrait quasiment achevé à côté d'elle.
- Pourquoi tu t'obstines comme ça pour moi ? demanda la jeune fille sans oser le regarder alors que lui se relevait.
Ce dernier prit le portrait en main, et ne lui répondit pas directement.
- Eh, regarde-moi.
Il lui releva le menton grâce à son index, pour que la jeune fille le regarde dans les yeux.
Ses yeux n'étaient plus comme avant. Quand il l'avait vue dans la file du marchand de glace ou même il y a une heure, son regard avec cette étincelle de joie de vivre et de bonté. Là, en la regardant dans les yeux, il ne vit que de l'incertitude. Ses pupilles verts d'eau partaient dans tous les sens mais évitaient de regarder les yeux du garçon en face d'elle.
- Je m'en fou de ce que pense les autres, moi je sais que tu peux être capable de plein de choses, regarde ! Tu as vu le portrait que tu as fait ? Il est magnifique, réellement. Alors arrête de te retenir parce que des gens sont jaloux de ton talent ou je ne sais pas quoi. Tu peux le faire Andro, tout le monde peut le faire s'il a la hargne d'arriver au bout. Et moi je sais que tu l'as, cette folie qui te permettra d'y arriver, ok ?
Elle hocha de la tête pour toute réponse.
- Tu n'as pas répondu à ma première question, murmura-t-elle. Pourquoi tu fais ça pour moi ?
- Parce que tu le fais toujours pour les autres, il est temps que les rôles s'inversent.
C'était à son tour d'avoir le regard fuyant.
- Il y a aussi une deuxième raison, continua-t-il en murmurant, lui aussi.
Elle releva la tête et le regarda droit dans les yeux, comme si elle avait enfin retrouvé le courage de l'observer. On entendait la mer qui recrachait ses vagues et son écume, derrière eux. Le vent se leva à nouveau, s'engouffrant dans les cheveux blonds de la jeune fille et lui obstruant la vue. Et comme hier, Sam lui remit sa mèche derrière l'oreille.
- Je ne sais pas à quoi tout cela va nous mener, mais pour une fois, j'en ai marre de penser au futur. J'ai envie de vivre le moment présent, pour que plus tard je ne regrette pas le passé.
- Et c'est quoi ton envie, maintenant ? questionna la jeune fille.
- J'ai clairement envie de t'embrasser.
Ils étaient proches, tous les deux, assis sur ce petit muret de pierre encore chaud.
Puis, leurs lèvres se rencontrèrent dans une caresse tendre et douce comme du coton. Sam avait fermé ses yeux. Au début, Andromeda n'avait pas envie de les fermer, elle avait envie de voir ce moment pour s'en souvenir toute sa vie. Mais après quelques secondes, elle ferma les yeux pour ne plus que voir des étoiles, de celles-ci aussi elle s'en souviendrait jusqu'à la fin des temps.
Puis ils décolèrent leurs lèvres mais laissèrent leurs fronts posés l'un contre l'autre. Andromeda esquissa un sourire, vite suivie par le châtain.
Dans ces moment-là, on s'en fichait bien futur de de l'incertitude qu'il en émanait. Tanpis si tout ne sera pas simple, après. Pour l'instant, ils profitaient.
- Tu me promets que tu vas réaliser ce rêve ? chuchota Sam.
- Je te le promets.
Ce rêve sera rempli d'incertitudes, de doutes, de moments où l'on a envie de tout plaquer. Mais ce qui lui restera en mémoire, dans quelques années, ce sont surtout tous les beaux moments qu'elle a passée.
Ça, il y en aura des beaux moments, le tout est de savoir les cueillir dans les moments les plus simples du quotidien avec des gens qu'elle aime.
Les filles, sa sœur... et Sam.
Mais pour l'instant, elle ne sait pas encore ce qu'il l'attend.
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