CHAPITRE 43 : Le prix de la vérité
Un immense mal de crâne m'empêche d'avoir les idées claires. En essayant de me relever dans un mouvement de panique, je renverse le verre vide situé à ma gauche qui tombe violemment par terre. Le fracas du verre sur le sol, probablement gelé, me fait frissonner. En cassant ce verre, j'ai probablement détruit un tiers du mobilier de cette chambre d'hôtel.
Je passe enfin les quelques secondes désagréables pendant lesquelles la lumière du jour agresse mes yeux, et je balaye d'un regard la pièce. Jessica n'est plus à côté de moi comme hier soir, ça je l'avais déjà bien compris, mais je ne distingue pas ses affaires non plus. Je remarque mon T-shirt et le reste de mes habits au pied du lit que je m'empresse d'enfiler, en veillant à ne pas marcher sur les débris de verre.
J'ouvre grandement les rideaux, laissant pénétrer une forte lumière à l'intérieur de cette petite pièce dénuée de tout charme. Est-ce que je me souviens de ce qu'il s'est passé ? Bien sûr que je m'en rappelle. Chaque instant, chaque geste, chaque mot reste gravé dans ma mémoire avec un petit cadenas qui m'empêche de tout effacer.
- Elle s'est barrée.
Je me surprends à marmonner tout haut ces quelques mots. Évidemment qu'elle est partie, peut-être parce qu'elle aussi a réalisé que c'était une énorme connerie. Elle est sûrement en train de se questionner sur nous, sur ce qu'on va faire maintenant. Parce que c'est vrai ça, qu'est-ce qu'on va faire maintenant ?
Tandis que mon cerveau surchauffe à la suite de toutes ces idées qui se bousculent, je baisse mes yeux et vois que mes mains serrent très fort mes pauvres chaussettes qui n'ont rien demandé. En relâchant cette pression, une légère tache de sang apparaît sur ces deux bouts de tissu blanc. Mes ongles avaient traversé les fibres des chaussettes pour se loger dans la chair de ma main. Je n'avais même pas senti que je me faisais mal. Je n'avais pas vraiment mal. Il faut dire que ça fait un moment que j'aurais dû les couper ces ongles.
Sans même observer la mine atroce que je devais avoir, je me précipite vers la porte d'entrée de la chambre dans l'idée d'aller retrouver mon amie. Enfin, si c'est toujours mon amie. Après tout est-ce que la situation change si l'on a couché avec sa meilleure amie ? Et que l'on regrette, mais qu'on ne peux en parler à personne pour avoir des conseils, car je suis en fuite dans l'idée de comprendre pourquoi je n'ai pas de pouvoirs magiques ? Ça parait compliqué de répondre à cette question pour le moment.
La porte n'est pas verrouillée, elle s'ouvre très facilement laissant échapper un léger grincement. Je me retrouve dehors à décrypter l'environnement, en plein jour cette fois-ci. Je suis sur le perron, face à moi une route peu animée, et aucune trace de Jessica à première vue. Le ciel est très clair, il ne fait même pas froid, une belle journée agitée pour probablement la majorité des New-yorkais à quelques kilomètres d'ici. Je longe les autres chambres pour arriver à la réception de l'hôtel où nous nous sommes présentés hier. Impossible d'entrer, la porte est verrouillée. L'accueil d'un motel fermé ce n'est jamais très bon signe.
Et s'il était arrivé quelque chose à Jess ? Je ne me pardonnerais jamais de l'avoir embarquée dans cette aventure. Peut-elle qu'elle a fuit, ou bien qu'elle est en danger, elle me recherche sinon en ce moment même, car elle est paumée au beau milieu d'une forêt avec un psychopathe ?
Je contourne la seule voiture garée contre ce gros bâtiment rectangulaire pour me diriger vers la petite colline où se trouve la maison des propriétaires, du moins c'est ce que je suppose. Je monte les premières marches qui mènent à la dépendance, convaincu que l'on m'informera si quelqu'un avait vu Jessica partir. Je n'ai même pas le temps d'arriver au milieu du parcours qu'une voix étrangère m'interpelle :
- Je peux vous aider ?
Je me retourne rapidement, un homme d'une trentaine d'années se tient à côté de l'entrée de la réception.
- C'est pas trop tôt, dis-je tout bas.
Je redescends les quelques marches pour me retrouver presque face à lui. Il n'est guère plus grand que moi, ses cheveux sont d'un brun intense et son attitude traduit un grand malaise.
- Rentrez, rentez, dit-il en m'indiquant la porte ouverte de la réception dont il venait de sortir.
Me voici de nouveau dans cette pièce au style très ancien, et j'ai l'impression que l'odeur est encore plus forte que la veille. Tandis que je sens que l'homme referme la porte derrière lui, je vais droit au but :
- Je viens vous voir car je suis arrivé hier soir avec une.. une amie, et elle n'était plus là ce matin. Elle ne m'a laissé aucun mot, je ne peux pas la contacter et je commence à légèrement m'inquiéter, dis-je mentant délibérément : j'étais mort de peur.
Alors qu'il s'installe derrière son comptoir, je remarque que le réceptionniste n'est pas du tout à l'aise à l'idée que je sois ici. Il ne parait pas dérangé comme si je l'avais tiré trop tôt de son lit, il avait l'air stressé et son regard était fuyant. Malgré tout, il réussit à m'articuler très clairement quelques mots :
- Je suis vraiment désolé, mais je n'ai pas vu votre amie quitter mon Motel, je ne peux pas vous aider.
Derrière cet homme se dresse l'encadrement de deux portes fermées. A peine a-t-il finit sa phrase qu'un bruit étrange et étouffé provenant d'une de ces deux pièces se fait entendre. Comme pour les couvrir, il se met à parler fort :
- Sinon votre séjour se passe bien ?
Avant que je ne puisse répondre, et car de petits cris se faisaient désormais entendre, il continue :
- Je sais que nous ne sommes pas le meilleur des motels, et que nos chambres mériteraient quelques rénovations, mais je suis ici depuis des années et je m'efforce que tous mes clients passent un agréable moment ici.
Plus aucun bruit. Le réceptionniste est tellement soulagé que je vois presque une goutte de sueur se former sur son front.
- Super, je vais reprendre mes recherches de mon côté, dis-je précipitamment pour couper court à cette discussion.
Je sors rapidement de cet endroit qui ressemble tout à fait à un décor de film d'horreur. Evidemment que je ne peux pas ignorer ces bruits, ils n'ont sûrement rien à voir avec Jessica, mais je ne peux pas rester sur une simple hypothèse. Je contourne la maison discrètement, comme un espion à la recherche de la meilleure des cachettes. Le bâtiment est légèrement surélevé, et de grandes grilles rouillées sont fixées sur le sol à proximité du mur. J'arrête tous mes mouvements et je perçois de nouveau des bruits similaires à ceux que j'ai entendu il y a quelques instants. Je m'allonge presque totalement par terre sur une des grilles, et je colle mon oreille contre cette dernière. Heureusement je suis vacciné. J'entends toujours des bruits de plus en plus clairs, mais ils sont cachés par ce qui ressemble à des évacuations d'eau qui m'empêchent de les assimiler à quelque chose de concret.
En me relevant mon pied s'accroche dans une grille. Celle-ci s'enlève complètement, elle n'était pas du tout fixée. J'hésite un instant, puis je glisse dans l'espace dont l'entrée s'est libérée. Je me retrouve sous le plancher de la réception, à même la terre, et il y a plus de place que ce que je ne pensais. Je sens mes habits coller à la terre humide.
J'entends désormais les bruits de plus en plus forts. Je ne fais plus aucun bruit. Mon cœur bat déjà bien trop fort, mais il manque de complètement s'arrêter quand je reconnais la voix de Jess qui discute avec une autre qui m'est inconnue :
- ...évidemment que non, comment pourrait-il s'en douter ? dit-elle.
- Nous ne sommes jamais assez prudents. Tu te rends compte qu'il dort juste au-dessus du principal passage pour se rendre à Andore ? lui répond une voix grave.
Une troisième voix se fait entendre.
- Laissez-moi partir, lance d'une voix faible Camila, ma sœur.
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Bon, bon, bon... désolé de nouveau pour ces +6 mois d'attente... La fin d'Andore Tome 1 est pourtant proche, il ne reste plus que 5 chapitres et un épilogue... Espérons que tout sera publié en janvier et février 2020 !
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