Chapitre 39: Décembre (11)
Les regards se braquèrent sur Eloïse dès son retour au refuge. Étonnés de la part des humains, acérés de la part des magiciens. Elle n'était pas supposée se trouver ici et ils le savaient.
Orage se leva brusquement pour venir dans sa direction, rapidement rejointe par Michaël, dont les sourcils étaient froncés.
- Eloïse, mais qu'est-ce que tu fais ici ? demanda Orage. Victorien est avec toi ?
- Je... Non, il n'est pas là.
- Tu es venue seule ?
- Oui, admit Eloïse. Je me suis sauvée quand lui et Miranda avaient le dos tourné.
Un silence suivit sa réponse. Le visage d'Orage se ferma, mais aucune colère n'était visible au travers.
- Pourquoi tu as fait ça ? demanda Michaël. Eloïse, tu n'aurais pas dû et tu le sais très bien !
- Je ne sais pas, dit-elle en secouant la tête. Je ne sais pas du tout. C'était très bizarre.
Orage posa une main sur son front.
- Lâchez-là, ordonna-t-elle aux chasseurs de magiciens. On s'en occupe.
Elle entraîna Eloïse, totalement déboussolée, jusqu'à une table déserte au centre de la pièce et la fit asseoir sur une chaise vacante.
- Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Explique-moi.
- Je ne sais pas, admit Eloïse. Je ne comprends pas ce qui m'a pris. Je sais très bien que c'était une mauvaise idée.
Orage l'observa avec attention avant de reposer sa main sur son front.
- Tu acceptes que je fouille ton esprit rapidement ?
Eloïse hocha mollement la tête. Elle avait de plus en plus mal au crâne et espérait juste que cela n'allait pas faire empirer les choses.
Orage ferma les yeux un instant, en pleine concentration, avant de les rouvrir d'un coup, comme si elle avait été frappée par un éclair. Elle délaissa Eloïse un instant et se retourna, la mine sombre.
- Magiciens et chasseurs, une attaque se prépare. Il va falloir être sur nos gardes.
- Comment vous pouvez affirmer ça juste en fouillant sa mémoire ? demanda Vincent, dubitatif.
- L'évidence s'est imposée. Croyez-moi, ce qui arrive ne sera pas une partie de plaisir.
- Qu'est-ce qui se passe ? l'interrogea Eloïse. Qu'est-ce qu'il y a avec mon esprit ?
Orage lui jeta un regard plein de tristesse et de compassion.
- Je vais prévenir Victorien de ta présence ici.
- Quoi ? Non !
Eloïse voulut se lever, mais la douleur dans son crâne l'obligea à se rasseoir. Pendant un instant, le monde autour d'elle se brouilla.
Orage l'observa, inquiète. Elle posa une main sur son épaule.
- Michaël, tu peux venir t'occuper d'elle un instant ? J'ai une communication urgente à faire.
La Madrigan hocha la tête et s'approcha. Il saisit une chaise et l'installa en face de celle d'Eloïse.
- Est-ce que ça va ? demanda-t-il. Tu n'as pas l'air dans ton état normal.
- Je ne sais pas, répondit-elle. J'ai mal à la tête.
- Tu veux que je te lance un sortilège pour calmer la douleur ?
- Tu peux essayer. Généralement ça ne fonctionne pas.
Michaël récita quelques mots en Madrigan à voix basse. Une fumée jaune s'échappa de ses doigts et il l'apposa sur le front d'Eloïse. Elle cligna plusieurs fois des yeux.
- Alors ? demanda-t-il.
- Ça ne change rien. Tu n'as pas plutôt des médicaments ?
- Non, je suis désolé.
Eloïse jeta un coup d'œil rapide dans la salle.
- Il faut demander à Eugénie, c'est une infirmerie ambulante.
Michaël acquiesça et s'éloigna un instant. Eloïse se pencha en avant et posa sa tête dans ses paumes. Le temps sembla s'écouler au ralentit jusqu'à ce que Michaël ne l'appelle.
- Elle m'a donné ça, indiqua-t-il en lui tendant un petit comprimé blanc.
- Merci.
Elle l'avala en espérant que cela fasse effet, contrairement au sortilège. Au loin, Eugénie esquissa des gestes de la main pour lui demander des explications. Eloïse l'ignora en secouant la tête.
- Depuis quand est-ce que tu as ce genre de douleurs ? demanda Michaël.
- J'en ai eu beaucoup après qu'Isidorh soit entré dans mon esprit il y a trois mois. Ça s'était calmé, mais on dirait que ça revient.
- Victorien en avait trouvé la raison ?
Eloïse grimaça légèrement. Pourquoi toutes les conversations devaient toujours dériver vers Victorien ?
- Quand bien même il l'aurait fait, il ne m'en aurait pas parlé, répondit-elle sèchement.
Michaël fronça légèrement les sourcils.
- Je peux comprendre qu'il soit très secret, mais pas au point de garder pour lui des informations qui concernent ta santé.
- Oh, mais il l'a déjà fait, indiqua Eloïse.
Michaël s'apprêta à répondre, mais Orage revint vers eux à ce moment précis. Elle semblait particulièrement inquiète.
- Michaël, dit-elle, tu peux nous laisser, s'il te plaît ? J'ai quelques mots à échanger avec Eloïse.
Le Madrigan hocha la tête, puis se leva avant de s'éloigner. Orage prit sa place en face d'Eloïse et lui saisit les mains.
- J'ai discuté avec Victorien et Miranda, ils vont arriver d'ici peu.
- Génial, marmonna Eloïse. L'occasion de me prendre des reproches bien amers.
- Je ferais en sorte qu'ils ne soient pas trop durs avec toi, mais je ne garantis rien. Il faut aussi que tu comprennes que ta fuite a de quoi les agacer particulièrement.
- Je me doute, oui.
Orage lui sourit chaleureusement avant que son visage ne prenne une expression plus grave.
- Les maux de tête t'ont repris récemment, n'est-ce pas ? Et ils sont de pire en pire ?
Eloïse acquiesça.
- Qu'est-ce que ça signifie ? Ce n'est pas en rapport avec la pierre dans mon crâne, j'espère ?
- Non, c'est autre chose, indiqua Orage. Je préfère que ce soit Victorien qui t'en parle.
- Pourquoi ça ?
- Parce qu'il est mieux placé que moi pour le faire.
Eloïse ferma les yeux, à la fois d'agacement et de douleur. Sa tête commençait à lui tourner et elle avait besoin de se concentrer sur quelque chose.
- Ne sois pas trop dure avec Victorien, s'il te plaît, lui dit Orage.
- Sous prétexte que c'est votre fils ? Désolée, mais c'est non.
- Évite de nous rattacher quelconque lien familial, ils sont considérés comme nuls. Je te dis ça simplement parce qu'il a d'autres choses à gérer que vos désaccords et non-dits.
- Oh, mais dans ce cas il suffit qu'on s'ignore et tout sera pour le mieux.
Elle laissa une pause avant que sa curiosité de reprenne le dessus.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé entre vous, si ce n'est pas indiscret ?
Orage hésita fortement à répondre, avant de capituler.
- J'ai fait des erreurs, dit-elle. Des erreurs qui ne sont pas pardonnables.
- Comment ça ?
- C'est un mage rouge, Eloïse.
- J'ai du mal à saisir le problème.
Orage pressa doucement ses mains.
- Il faut que tu te reposes, dit-elle pour changer de sujet. Tu peux t'installer à la table des magiciens. Je te donnerai une couverture pour que tu sois plus à l'aise.
Eloïse acquiesça. Orage lui lâcha les mains et elles se levèrent pour rejoindre l'espace des magiciens. Elles esquissèrent quelques pas, puis des points blancs envahirent la vision d'Eloïse et elle se sentit défaillir. Orage la rattrapa avant qu'elle ne chute et Eloïse se redressa brusquement, alerte.
- Ça va ? s'inquiéta Orage. Tu es vraiment pâle.
- Ça va, confirma Eloïse. Juste un malaise passager.
Ça n'avait duré qu'une seconde. Désormais, elle se sentait juste désorientée.
Rory s'avança jusqu'à elle quand elle arriva dans l'espace des magiciens et Orage lui apporta une couverture. Eloïse s'enroula dedans, épuisée par ses maux de tête qui refusaient de s'estomper.
- Qu'est-ce que tu fais ici ? demanda Rory. Orage nous a dit que tu étais partie pour le Chao Ming.
Eloïse haussa les épaules et s'assit à une petite table libre. Rory s'installa à ses côtés.
- Il s'est passé quelque chose ? insista-t-il. C'est le Seigneur des Ombres qui est plus désagréable que jamais ?
Eloïse ne répondit pas et saisit son bras pour s'en servir comme d'un coussin. Rory passa son bras libre sur ses épaules.
- Ce serait bien qu'il arrête de te mettre à l'écart, dit-elle.
- Il me déteste, je n'en attends pas moins de sa part. Je suppose qu'il m'a assez vu après le voyage sur Ifraya.
- D'ailleurs, tu ne m'as toujours pas dit la traduction exacte de ses paroles quand on était chez le Madrigan, là-bas.
Rory hésita.
- Ce n'est pas à moi de le faire, je te l'ai dit. Puis je ne suis pas sûr que ce soit encore d'actualité.
- Pourquoi ça ?
- Je ne sais pas, sa façon d'agir.
Eloïse n'insista pas et ferma les yeux.
- Tu as besoin de quelque chose ? s'enquit Rory.
- Ton bras suffit, merci.
Il esquissa un sourire amusé.
◊
Vincent intercepta Orage dès qu'elle passa à proximité, la saisissant par la bras de façon plus ou moins naturelle. Il ne prononça pas un mot et garda le regard rivé devant lui jusqu'à ce qu'il l'ait guidée dans les cuisines du réfectoire, là où étaient entreposées les réserves.
- C'est la gamine qui a le sceptre capable de retirer la magie du ciel, c'est bien ça ? demanda-t-il.
Orage soupira.
- Oui. Mais je préfère vous prévenir, elle n'est pas en état de s'en occuper pour le moment.
Vincent plissa les yeux, une lueur d'agacement sagement tapie au fond de ses pupilles.
- Dans ce cas, il va falloir qu'elle se remette vite. La division londonienne pourrait se mettre en route d'un jour à l'autre. Voire d'une minute à l'autre.
- Elle n'était pas en état, répéta plus sèchement Orage.
- La situation la dépasse. Elle suffit qu'elle se force un peu. Elle aura ensuite tout le temps qu'elle souhaite pour se reposer.
Vincent quitta la pièce avant qu'elle n'ait l'occasion de répondre. Orage se passa une main sur le visage. Voilà qui n'arrangeait pas ses affaires.
Elle se rendit voir Lysandre dans l'espoir qu'il ait enfin réussi à réveiller l'âme de Lysandre Anaxagoras, et le trouva à se morfondre dans un coin en compagnie de Vénérios.
- Toujours aucun changement ? demanda-t-elle doucement.
- Non, répondit Vénérios.
Il s'excusa auprès de Lysandre et se leva pour se rapprocher d'Orage.
- Il a trop de pression sur lui, expliqua-t-il. Ce n'est pas bon pour un mage rouge.
- Je sais bien, s'excusa presque Orage, mais comprend que nous n'avons pas d'autre solution pour le moment. Tu peux le surveiller et faire en sorte que la magie rouge ne le submerge pas ?
Vénérios remonta ses lunettes rondes en haut de l'arrête de son nez, un sourcil arqué.
- J'essaye, mais il ne m'aime pas beaucoup, alors c'est compliqué. Il n'y a pas possibilité de demander à Eloïse de s'en charger, maintenant qu'elle est là ? Même si elle a l'air d'un cadavre.
- Pas pour l'instant.
- Et pourquoi pas Anthropa Holloway, alors ?
Orage fronça les sourcils.
- Anthropa Holloway ?
- Le groupe au Chao Ming est avec elle, selon le message que Synabella a envoyé à Jefferson. Elle a forcément une baguette de sa conception avec elle.
- Je n'y avais pas pensé, avoua Orage. Je vais voir si je peux contacter Synabella.
Vénérios hocha la tête et retourna s'asseoir en compagnie de Lysandre, qui broyait du noir. Il hésita à poser une main sur son épaule, puis se ravisa.
A ce moment là, Miranda et Victorien entrèrent en trombe dans le réfectoire.
Victorien esquissa un signe de main en direction de Rory pour l'inciter à déguerpir, le tout accompagné d'un regard noir. Le Madrigan laissa Eloïse, en train de dormir, et s'éclipsa rejoindre Miranda.
- Alors, tu abandonnes ta copine à son triste sort ? se moqua-t-elle.
- Je ne vais pas interférer dans leurs affaires, se justifia Rory.
- Ou alors tu as simplement peur de te faire traîner de force par une ombre pour dégager le passage.
Rory croisa les bras et la foudroya du regard. Miranda ricana et reporta son attention sur Victorien.
Le mage noir frappa du plat de la main sur la table, réveillant Eloïse d'un seul coup. Elle cligna des paupières, confuse, avant de lever les yeux vers lui. Il paraissait furieux.
- Il faut qu'on parle, dit-il platement.
Eloïse enfonça les ongles dans ses paumes de main. Voilà précisément une chose dont elle n'avait pas du tout envie à ce moment précis.
- Je n'ai rien à te dire, répondit-elle calmement.
Victorien la dévisagea. Eloïse s'attendit à ce qu'il lui hurle dessus ou au moins qu'il réagisse, mais il se contenta de partir sans un mot. Elle expira lentement et serra encore plus ses mains, crispée.
Le silence était sans doute bien pire que n'importe quels mots.
◊
Rachelle ne comprenait pas trop la querelle qui se déroulait sous ses yeux. Il lui semblait simplement qu'ici, personne n'avait la volonté de se mettre d'accord. Cela la fatiguait alors même qu'elle ne prenait part au débat.
- Renvoie-le, martela Hayden à l'intention d'Anthéon. Je me fiche bien qu'il soit ton fils, il n'a rien à faire ici.
Phrixos se pinça les lèvres. Hayden se sentait bien évidemment obligée de parler de lui comme s'il n'était pas présent.
- Tu n'as pas à décider pour lui, répliqua Anthéon. Il est plus que majeur et capable de faire ses propres choix.
- Laisse-moi rire ! s'exclama Hayden. C'est toi et Kaladria qui avez fait tous les choix pour lui depuis qu'il est enfant, il n'est juste plus capable de penser par lui-même à cause de ça !
- Hayden, calme toi, lui intima Haven en posant une main sur son épaule.
Rachelle se pencha en direction de Phrixos. Tous deux ne comprenaient pas pourquoi ils avaient été conviés si c'était pour rester ainsi à l'écart.
- Je crois qu'elle ne t'aime pas beaucoup, chuchota-t-elle.
Phrixos l'ignora.
Le retour d'Haven Redland aux laboratoires avait obligé un rassemblement des supérieurs, puisqu'ils étaient désormais au complet. Cependant, la direction que prenait la rencontre ne plaisait à personne, hormis à Hayden.
- Est-ce que je suis obligé de rester ici ? demanda calmement Phrixos.
- Oui, martela Hayden. Il est temps que tu voles vers de nouveaux horizons, et c'est maintenant que tu vas t'en rendre compte.
- Laisse-le faire ce qu'il veut, intervint Anthéon.
Hayden se tourna vers Haven et Isidorh.
- Et vous, qu'en pensez-vous ? Phrixos est légitime ?
- Hayden, qu'est-ce que tu cherches à faire ? l'interrogea Haven, suspicieux.
La supérieure soupira et l'attira un moment à l'écart.
- On ne peut pas lui faire confiance, chuchota-t-elle. Il a beau dire ce qu'il veut, il n'est pas ici par choix. C'est Anthéon qui lui met la pression pour rester.
- Alors quoi, répondit Haven, tu comptes le pousser à partir en le harcelant ? Désolé, mon cœur, mais il y a plus simple. Comme lui exposer calmement les faits.
- Ça ne marchera pas. Je t'ai dit qu'Anthéon lui mettait la pression, alors il va falloir le pousser un peu pour qu'il prenne enfin son indépendance et quitte les lieux.
- Si c'est en lui hurlant dessus que tu comptes y parvenir, laisse-moi te dire que cela va créer l'effet inverse. Tu veux que j'aille lui parler ?
- Si ça t'amuses, mais ce n'est pas comme s'il allait t'écouter.
Haven lui adressa un regard lourd de reproche.
- Je ne suis pas sûr que cet éloignement aussi long entre nous ait été une bonne idée.
- C'est toi qui a changé, Haven. Je ne fais que suivre notre objectif principal. Celui de HR.
- Dans ce cas, je dois être celui a avoir enfin compris le fond des choses, puisque je m'en détourne.
Il retourna en compagnie des autres employés sans lui accorder un regard supplémentaire. Hayden le suivit, les lèvres pincées.
- Je suis d'accord avec Hayden, déclara Haven. Mais uniquement sur le fait que toi, Anthéon, tu mets la pression sur ton fils pour qu'il reste.
- Je ne fais strictement rien à ce sujet, se défendit Anthéon.
- Tu le fais indirectement, parce qu'il travaille ici depuis son enfance, mais que tu ne lui as jamais dit en face qu'il avait le droit de partir.
- Mais je ne lui ai jamais dit qu'il avait l'obligation de rester non plus.
- Non, concéda Haven. C'était Kaladria qui s'en chargeait.
Anthéon serra les dents, visiblement contrarié. Alors seulement, Isidorh sortit de son mutisme.
- Je suis d'accord avec Haven, indiqua-t-il.
- Bien, dit Hayden. Au moins, vous deux arrivez à vous mettre d'accord.
Aussi loin qu'elle se souvienne, ils avaient toujours plus ou moins partagé le même point de vue. Au moins une chose qui n'avait pas changée.
- Phrixos, reprit Haven, est-ce que tu souhaites rester au sein des laboratoires ?
Il hocha la tête, agacé.
- Maintenant que les choses ont été clarifiées, je peux vous laisser ?
- Tu peux, approuva Haven, défiant Hayden d'ajouter quoi que ce soit.
Phrixos ne perdit pas une seconde et quitta la salle de réunion d'un air parfaitement neutre.
- Ravi d'avoir pu revenir parmi vous en ce jour, déclara abruptement Haven. Je ne suis pas certain de reproduire cet exploit à l'avenir.
- Qu'est-ce que ça sous-entend ? demanda Hayden.
- Je laisse cela libre à l'interprétation de chacun. J'ai des choses à faire ailleurs, ainsi je vous souhaite une bonne journée.
Haven s'inclina légèrement, esquissa un signe de tête en direction d'Isidorh, qui le lui rendit, puis s'en alla à son tour. Hayden fronça les sourcils et Rachelle se moqua ouvertement de la situation.
- Il semble que ton fiancé t'ai finalement quittée, fit remarquer Anthéon, absolument pas désolé.
- Mon fiancé ? rit amèrement Hayden. Il n'a jamais été question de ça et tu le sais. A quoi tu joues ?
- Je te retourne la question.
Hayden jeta un regard vers Isidorh dans l'espoir de voir en lui un soutient quelconque, mais il prenait rarement parti et cette fois-ci ne fit pas exception. Elle partit en claquant la porte à son tour.
◊
Phrixos était étonné d'avoir vu les autres supérieurs prendre sa défense. Ou au moins s'opposer à Hayden et à la haine qu'elle lui vouait. Haven, qui partageait le rôle de HR avec elle, l'avait remise à sa place, et Isidorh, qui exprimait très peu son avis, avait changé ses habitude pour aller dans son sens.
Il ne savait pas trop comment il devait prendre la situation.
- Je sais ce que tu as fait.
Phrixos se retourna vivement. En haut de l'escalier qu'il descendait, Hayden braquait deux yeux rouges de colère sur lui.
- Tu as prévenu le AMI que Rachelle était ici, poursuivit-elle.
- Tu ne devrais pas porter pareilles accusations...
- Ne mens pas, j'ai mes sources, le coupa-t-elle.
Phrixos cacha au mieux son appréhension. Nier ne lui servirait à rien, à part à s'enfoncer un peu plus.
- Comment peux-tu être courant ? demanda-t-il.
- Je te l'ai dit, j'ai mes sources.
- Très peu de personnes le savent, et elles sont toutes de l'Ombre.
Hayden esquissa un sourire glacial.
- C'est dommage pour eux, tu ne trouves pas ?
Elle s'approcha de lui, menaçante.
- Je te surveille, Phrixos. Ne recommence pas à jouer les traîtres, tu n'auras pas toujours mes collègues pour te servir de bouclier.
Elle le laissa planté sur les marches, en pleine réflexion.
Phrixos se fichait bien de ses menaces, à ce stade. Elle lui en avait proféré suffisamment pour qu'il comprenne qu'elle ferait de sa vie enfer. C'était autre chose qui avait retenu son attention. Le sous-entendu qu'Hayden avait laissé échapper.
L'Ombre comptait un employé des laboratoires dissimulé dans ses rangs.
◊
Synetelle ne cessait de tourner en rond à l'intérieur de la salle des Alphas. Framboise, Alicia et Lana l'observaient distraitement, affalées sur les deux canapés moelleux que comptaient la pièce. Du moins, dès que leurs yeux se décollaient de leurs tablettes. Elles regardaient depuis des heures les enregistrements vidéos de l'hôpital le jour où Julia avait accouché.
- Arrête de marcher et viens nous aider, maugréa Framboise. J'ai les yeux qui fatiguent.
- J'y ai passé des heures aussi, répliqua Synetelle. J'ai bien le droit à une pause.
- Ça doit bien faire quinze minutes que tu marches en rond, j'appelle pas ça une pause. Tu te fatigues pour rien.
- Je gère mon temps et mon corps comme je le souhaite, que je sache.
Framboise soupira de dépit. Synetelle possédait l'incroyable faculté de prendre la moindre parole qui lui était adressée comme un reproche.
- Ta mauvaise foi atteint la stratosphère, Synetelle. C'est fatiguant.
- J'aurais plutôt dit l'exosphère, ajouta Alicia. La stratosphère est 600 kilomètres trop basse.
Synetelle laissa échapper une poignée de jurons qui manqua de faire s'étrangler Lana avec sa salive. Elle retourna s'asseoir et saisit rageusement sa tablette pour démarrer un nouvel extrait de vidéosurveillance.
- Pourquoi est-ce que les humains mettent des caméras partout ? se plaignit-elle. C'est une plaie.
- Sans cela on ne pourrait pas trouver le coupable, argua Lana. C'est un mal pour un bien.
- C'est Alicia qui joue les vieux sages, d'habitude, marmonna Framboise.
Synetelle les ignora et se plongea dans le visionnage de la vidéo. Après une éternité de silence uniquement entrecoupé par des bâillements d'ennuis, elle se redressa d'un bond.
- Là, indiqua-t-elle. Cet extrait. Il y a quelque chose.
Ses trois coéquipières bondirent dans sa direction pour jeter un œil à son écran, trop heureuses d'enfin pouvoir décoller les yeux des leurs.
Sur la tablette apparaissait le hall d'entrée de l'hôpital, presque désert. Une femme vêtue d'une blouse le traversait calmement, les yeux rivés devant elle. Même si la vidéo était en noir et blanc, il était possible de voir la fumée qui sortait de ses mains pour venir heurter les quelques personnes présentes, qui se figeaient quelques instants avant de reprendre leurs activités.
- De la magie, dit Synetelle. Ça ou j'ai de sérieux problèmes de vue.
- Non, c'est bien de la magie, confirma Lana. Et puisque c'est une femme...
- Ce n'est pas Phrixos.
Synetelle plissa les yeux. Était-ce Hayden Rivière, ou une toute autre personne ?
Elle soupira. Peu importait la réponse, il leur faudrait découvrir quel intérêt il y avait à transformer Rachelle en réincarnation.
◊
Anthropa fixait le vide, allongée dans l'herbe des jardins du palais, au Chao Ming. Ses yeux orangés clignaient à peine, trop absorbés par le néant sur lequel ils étaient posés.
- Qu'est-ce que tu crois qu'il lui passe par la tête ? demanda Eden.
Lucas haussa les épaules.
- Pourquoi tu ne lui poses pas directement la question ? C'est bien ton genre d'être aussi indiscrète.
- Je ne suis pas indiscrète, se vexa-t-elle.
- Arrête de te mentir à toi-même. Si tu pouvais, tu fouillerais la moindre pensée qui traverse son esprit.
- Je ne sais pas si c'est très judicieux comme idée, vu tout ce qu'elle a dans le crâne. On va se contenter de lui poser la question.
Lucas secoua la tête de dépit et regarda son amie rejoindre Anthropa et s'allonger sur l'herbe à ses côtés.
- Anthropa ? l'appela-t-elle.
- Qu'y a-t-il, petit oiseau ?
- Qu'est-ce qui te passe par la tête ? Enfin, si ce n'est pas indiscret, puisque selon Lucas, ça l'est.
Anthropa fronça les sourcils, ses yeux fatigués plissés à l'extrême.
- C'est drôle, on me pose rarement la question. J'analyse les différentes façons possibles de transformer un humain en magicien.
Eden écarquilla les yeux.
- Parce qu'il y a plusieurs façons d'y parvenir ?
- Il y a toujours plusieurs solutions pour résoudre une équation. Donc oui.
- Donc si je comprends bien, il peut aussi y avoir différentes manières de créer une Pierre Élémentaire.
- Oh, oui. Mais j'ai toujours utilisé la plus simple.
- Et pour Sigma ?
Anthropa lâcha le vide du regard et tourna la tête vers Eden. Ses cheveux cuivrés étaient emmêlés sur son front et ses joues creuses créaient des ombres sur son visage.
- Je n'ai pas choisi la plus simple, indiqua-t-elle.
Eden se redressa brusquement. Anthropa l'imita sans vraiment comprendre la raison de cette agitation.
- Tu as déjà créé Sigma ? s'exclama Eden.
- Une fois, oui, mais Sigma n'est plus là.
- Et tu pourrais nous aider à le créer une nouvelle fois ?
Les yeux d'Anthropa s'illuminèrent. Pendant une seconde, les cernes en dessous de ses yeux parurent s'effacer pour ne plus laisser qu'une peau uniforme.
- Petit oiseau a besoin de graines pour y parvenir, dit-elle en souriant.
Puis elle bondit sur ses pieds et traversa les jardins en courant. Eden se leva à son tour, confuse.
- Alors ? lui demanda Lucas, moqueur. Qu'est-ce qu'elle a en tête ?
Eden ramena sa mèche rose derrière son oreille. Des graines ? Elle se mit à rire.
- Je n'en ai absolument aucune idée.
Bonjour bonjour ^^
Juste pour prévenir que je rentre à l'université dans quelques jours, ainsi je ne sais pas du tout si la fréquence de publication des chapitres va être modifiée. Pendant les vacances j'ai fait 1 par semaine environ, mais comme je ne sais pas la dose de travail que j'aurais, il se peut que le délai soit plus long.
Le prochain chapitre sera un flashback, et comme je ne sais pas quand il sortira, je vous laisse deviner sur quel personnage il se concentre pour combler le temps d'attente ^^
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top