Chapitre 31: Octobre (2)
Eloïse avait décidé de faire son grand retour en cours, aujourd'hui. Certes, ses nombreuses absences des deux dernières semaines n'étaient pas toutes justifiées, mais avec ce qui lui était tombé dessus, elle avait pris des libertés. Puis son lycée devait être ravi de ne pas l'avoir vue pendant un temps, après l'incident que les laboratoires y avaient causé.
Avec le AMI qui assurait la surveillance pendant la journée, tout le monde devait être plus serein.
Eugénie et Rory furent sincèrement surpris de la voir débarquer devant leur salle de cours, tout juste à l'heure. Leur professeur de mathématiques n'était pas encore là. Eloïse posa son sac sur le sol, entre ses pieds.
- J'ai cru que j'allais arriver en retard, souffla-t-elle.
- Tu es en vie, répliqua Eugénie. Eh ben.
- Ça va, j'ai pas disparu si longtemps que ça.
- Quand même. J'ai failli allumer un cierge sur ta table.
Après, Eloïse reconnaissait qu'elle avait oublié de répondre aux messages d'Eugénie, ces derniers jours. Elle se tourna vers Rory.
- Ça va, toi ? demanda-t-elle.
Il hocha la tête en lui souriant, mais sans rien ajouter de plus. Il devait avoir compris qu'elle faisait référence au décès d'Elena. Au moins, venir ici devait lui changer les idées.
- Et moi, on ne me demande pas si ça va ? plaisanta Eugénie. Le favoritisme est flagrant.
- Tu vas bien ? répliqua Eloïse.
- Très bien, je te remercie.
Leur professeur de mathématiques fit son arrivée à ce moment précis, suivi par une femme qu'Eloïse ne reconnaissait pas. Eugénie se pencha vers elle.
- Ah, oui, c'est vrai, t'as pas suivi. Ce matin le cours est remplacé par une présentation. Sur les fillières de première.
Ils étaient au début d'année, mais Eloïse supposait que l'établissement s'y prenait tôt pour que les élèves aient le temps de se décider sur leur orientation. Elle rentra dans la salle en même temps que le reste de sa classe et partit s'asseoir à sa table, qui se trouvait dans le fond. Rory, qui était d'habitude assis à côté d'elle, l'informa d'un air désolé qu'il avait été changé de place quelques jours plus tôt – désormais, il était assis à côté d'Eugénie. Bon, eh bien Eloïse devrait faire sans voisin. Cela lui laissait plus de place pour s'étaler.
- Bonjour à tous, leur dit M. Manent quand tout le monde fut installé. Comme prévu, ce matin pas de maths, je vais laisser Mme. Sylvain vous parler.
Après ça, le professeur s'effaça pour s'asseoir au fond de la salle, sur la table vide derrière celle d'Eloïse. Mme Sylvain, une dame de la cinquantaine avec des cheveux grisonnants et un chemisier fleuri, posa son sac à côté du bureau qui se trouvait à l'avant de la salle et en sortit des fascicules, attachés ensemble par un élastique en caoutchouc.
- Bonjour, leur dit-elle avec un semblant de sourire. Pour ceux qui ne me connaissent pas, et je pense qu'ils sont nombreux, je suis Marina Sylvain, la conseillère d'orientation du lycée. Tous les ans, je fais un tour des classes de seconde pour faire un point sur les différents fillières que vous pourrez emprunter l'année prochaine, et les débouchées possibles. La première chose que je vais faire, c'est vous distribuer ceci.
Elle retira l'élastique et saisit un fascicule pour le hisser au niveau de son visage, à la vue de tous.
- Ça regroupe les informations importantes que je vais vous donner, mais bien sûr, ça ne vous dispense pas d'écouter.
Après ça, elle passa dans les rangs pour en donner un à chaque élève. Eloïse feuilleta vaguement le sien avant de le poser sur sa table vide, à l'exception de sa trousse. Elle savait déjà qu'elle voulait partir en filière scientifique et faire médecine, alors la plupart des informations n'allaient ni la concerner, ni l'intéresser. Elle pourrait faire comme lors des rassemblements ennuyeux à l'époque du AMI et dormir les yeux ouverts.
La conseillère d'orientation commença son long discours, et comme prévu, Eloïse décrocha au bout de cinq minutes. Pourtant, ce n'était pas faute d'avoir essayé, cette fois-ci. Tant qu'à se déplacer jusqu'ici, elle aimait autant faire les choses bien.
Après dix minutes, ce fut un mal de crâne désagréable qui pointa le bout de son nez. Au départ, Eloïse l'ignora, mais elle finit par en être incapable tant il prit de l'ampleur. Elle avait l'impression que son cerveau vibrait à l'intérieur de son crâne. Elle fouilla son sac à la recherche d'un comprimé efficace contre la douleur, l'avala, puis attendit qu'il fasse effet. Cependant, ce moment n'arriva pas. Le cours avait commencé depuis une demi-heure seulement et Eloïse ne savait pas si elle parviendrait à tenir jusqu'au bout.
Elle se retourna vers son professeur, occupé à corriger des copies.
- Excusez-moi, chuchota-t-elle. Je peux sortir cinq minutes ?
Il releva la tête, les sourcils froncés.
- Ça ne va pas ?
- J'ai très mal au crâne. J'ai besoin de prendre l'air.
- Tu dois aller à l'infirmerie ?
- Non non, je vais juste rester devant la salle.
Après une hésitation, il finit par donner son accord. Eloïse se leva le plus discrètement possible – la moitié de la classe se retourna, mais difficile de faire mieux – et partit dans le couloir. Dès que la porte fut fermée, elle se massa les tempes en espérant que cela ait quelconque effet, mais tout comme avec le médicament, la douleur resta constante.
Eloïse s'assit contre le mur de la salle et se concentra sur sa respiration. Elle ressentait le même type de douleur qu'avant de s'évanouir au AMI. Heureusement, elle n'avait ni la nausée, ni les vertiges, ni les saignements de nez qui s'étaient manifestés la dernière fois.
Elle sentit son téléphone vibrer dans sa poche et vit qu'Eugénie lui avait envoyé un message pour prendre de ses nouvelles. Elle était habile, pour ne pas se faire prendre en flagrant délit par M. Manent ou la conseillère d'orientation. Afin de ne pas risquer que son amie finisse collée à utiliser son téléphone en classe, Eloïse ne lui répondit pas.
Le couloir était silencieux, ce qui lui fit du bien. Il lui sembla qu'enfin, la douleur s'estompa un peu. Eloïse resta là de longues minutes, bien plus que les cinq qu'elle avait indiquées à son professeur.
Pour cette raison, la porte de la salle finit par s'ouvrir. M. Manent la referma doucement derrière lui.
- J'avais peur que tu te sois évanouie dans le couloir, dit-il. Ça ne va pas mieux ?
- Si, ça va. C'est en train de passer.
- Tu es sûre que tu ne veux pas aller à l'infirmerie ?
Eloïse hocha la tête. Ça ne servirait à rien, et elle n'avait pas envie de partir en n'ayant même pas terminé sa première heure de cours.
- Tu as souvent des migraines, comme ça ? demanda le professeur.
- Ça fait quelques jours seulement.
- Et tu sais à quoi c'est dû ? Tu es allée voir un médecin ?
Eloïse pinça les lèvres. Si Ilyann ne comprenait pas ce qu'il lui arrivait, elle doutait que quelqu'un d'autre en soit capable. Tout cela était lié à ce qu'Isidorh lui avait fait. Si elle découvrait de quel type de sortilège il s'agissait, elle aurait les réponses.
- J'ai vu un médecin, finit-elle par dire. Il ne sait pas à quoi ça correspond.
À sa grande surprise, le professeur alla s'asseoir contre le mur, à environ un mètre d'elle.
- Je pouvais me lever, dit prestement Eloïse.
- Ne t'embête pas, surtout si tu te sens mal. Ces migraines, est-ce que ça peut avoir un lien avec les moments d'absence que tu as parfois ?
Bonne question. Techniquement, cela remontait à avant Isidorh, donc elle n'en était pas certaine.
- Je ne pense pas. Enfin, j'en sais rien. Les migraines ont une origine, pas les moments d'absence.
- ... Tu viens de me dire que tu ne savais pas pourquoi tu avais des migraines.
- Je n'ai pas dit que je ne savais pas d'où elles venaient, j'ai dit que je ne savais pas à quoi elles correspondaient.
Il hocha lentement la tête.
- Tu as été absente presque deux semaines, reprit-il. Et il y a eu un incident, à ta dernière visite.
- Ah, oui.
- C'est souvent comme ça, dans ta vie ?
Eloïse poussa un long soupir.
- Oui. Désolée que ça déborde ici.
Le professeur secoua la tête.
- C'était... Stressant, reconnut-il. Surtout quand on a compris que tu ne te réveillais pas.
Le cerveau d'Eloïse lui renvoya des impressions qu'elle avait reléguées au fond de sa mémoire. Dans son état de semi-conscience, après ce qu'Isidorh lui avait fait, elle se rappelait avoir entendu les voix de Michaël et Victorien. Or, elle s'était évanouie sur le toit et Michaël se trouvait dans l'établissement. Un sentiment de gêne s'empara d'elle.
- Je ne pensais pas que vous aviez assisté à tout, admit-elle. Enfin, surtout pas à ça.
- Nous n'étions pas nombreux, la rassura-t-il. Et tu vas mieux, c'est l'essentiel.
- Mieux, je ne sais pas. Les maux de tête ont commencé à ce moment là.
- Oh.
Eloïse vit M. Manent hésiter, sans doute pour ne pas l'accabler de questions. Techniquement, tout ceci ne le regardait pas, même s'il cherchait à décrypter la situation. Il avait été impliqué involontairement, alors Eloïse ne pouvait pas lui reprocher sa curiosité.
- Que se passe-t-il, gobalement ? demanda-t-il.
- C'est un peu vague, comme question, répliqua Eloïse.
- Je crois comprendre qu'il y a des choses qui gravitent autour de toi. J'aimerais comprendre, au moins pour savoir à quoi m'attendre si jamais un autre incident devait se produire.
Répondre à cette question revenait à parler du projet Alpha dans son entièreté. Était-ce vraiment une bonne idée de tout lui expliquer ? Eloïse considéra l'idée. Que quelqu'un d'autre que Michaël soit de son côté dans l'établissement pourrait lui rendre service, et M. Manent avait l'air de bonne volonté. Et cela pourrait aussi aider Michaël de ne pas être seul.
Pourquoi pas, après tout ? Il n'était qu'un humain. Ça ne changerait pas grand chose à sa vie.
- Je vais avoir du mal à faire ça à l'oral, admit Eloïse, c'est un peu long. Mais je peux l'écrire.
- D'accord.
Le professeur de mathématiques se releva.
- Tu restes ici ?
- Non, je vais revenir, ça va mieux.
Une grande partie de la douleur avait reflué pendant leur échange. Eloïse n'avait plus la désagréable impression que sa tête allait exploser.
M. Manent retourna dans la salle, Eloïse sur les talons. La conseillère d'orientation lui adressa un regard comme pour lui demander si tout allait bien et il confirma d'un geste de la main. Eloïse, elle, articula silencieusement à Rory et Eugénie, qui l'observaient avec inquiétude, que ce n'était rien. Ensuite, elle sortit plusieurs feuilles de son sac et profita des quinze dernières minutes de cours pour commencer sa rédaction.
Tout expliquer à un humain était plus complexe qu'à un magicien, parce que les références historiques de Thélis, ils ne les comprenaient pas. Tout comme ce qui se rapportait à la magie et à son fonctionnement. Eloïse dut faire plusieurs annexes pour qu'il puisse s'y retrouver, ainsi qu'un code couleur numéroté pour relier tous les éléments ensemble.
La rédaction lui prit la matinée entière, principalement parce qu'elle ne put y consacrer tout son temps – elle devait quand même travailler un minimum pendant les heures de cours. Elle ne parla pas de tout ça à Rory et Eugénie, même s'ils posèrent des questions. À la place, elle raconta qu'elle avançait sur un travail en retard à rendre à M. Manent.
- Tu sors parce que tu as un giga mal de crâne et il vient te voir pour te rappeler que tu n'as pas rendu ton dernier devoir ? s'étonna Eugénie. Eh ben. La compassion, tout ça.
- Ça ne s'est pas exactement passé comme ça, se défendit Eloïse.
- Mouais. Le résultat, c'est quand même ça.
À la pause du midi, Eloïse, après avoir glissé son paquet de feuilles couvertes d'écritures dans une copie double pour les maintenir ensemble, retourna à la salle qu'occupait son professeur de mathématiques. Elle avait été rapide, alors elle l'y trouva en train de rassembler ses affaires après le départ de sa classe.
Elle toqua contre la porte ouverte pour signifier sa présence, puis s'avança jusqu'à lui et lui tendit les feuilles. Il s'en saisit.
- C'est le résumé de la situation, c'est ça ? vérifia-t-il.
- C'est ça.
- Ça m'a l'air long.
- Il y a des annexes. Tout est numéroté pour s'y retrouver.
Il ouvrit la copie double et parcourut brièvement les pages pour le constater.
- Je ne pensais pas que ce serait aussi compliqué, reconnut-il, sincèrement surpris.
- Normalement, j'ai bien détaillé, mais s'il vous manque des informations, demandez à M. Zepleski.
- D'accord.
Il referma la copie double et fourra les feuilles dans son sac, au milieu des copies qu'il avait corrigées pendant la première heure.
- Je lirais ça. Discrètement.
- Oui, s'il vous plaît.
Après ça, Eloïse s'éclipsa en vitesse pour rejoindre Eugénie et Rory, qui l'attendaient en bas des escaliers du rez-de-chaussée pour aller au réfectoire. Quand elle les retrouva, ils étaient accompagnés de Lysandre et Mila.
- Oh, salut, leur lança Eloïse.
- Vous voyez, j'avais dit qu'elle était de retour, déclara Eugénie.
- Tout va bien ? l'interrogea Lysandre. On était inquiets et tu ne répondais presque qu'à Rory.
Eloïse remit son sac en place sur son épaule, un peu gênée.
- Oui, désolée. Je suis mauvaise en messages. J'oublie de répondre à la moitié que je reçois.
- Et si on en discutait sur le chemin ? proposa Eugénie. J'ai faim et on va devoir faire la queue.
Elle n'attendit pas que ses amis approuvent et prit le chemin du réfectoire. Les autres s'empressèrent de la suivre. Lysandre se glissa aux côtés d'Eloïse.
- Tu reçois tant de messages que ça ? demanda-t-il.
- Beaucoup de nouvelles de l'Ombre, acquiesça Eloïse. Surtout qu'il s'est passé un gros truc il y a quelques jours. J'ai vite perdu le fil des conversations.
- À part pour Rory.
Son ami avait l'air un peu vexé.
- Je suis vraiment désolée, lui dit-elle. Il y a eu des... Circonstances avec Rory.
- Attends, vous...
- Non non, le coupa prestement Eloïse. C'est pas ça. Un de ses proches s'est fait tuer. Je voulais voir si ça allait.
- Oh.
Ce fut au tour de Lysandre de bredouiller des excuses. Eloïse lui assura que ce n'était pas grave et qu'elle comprenait sa réaction. Elle promit de faire des efforts pour répondre aux messages à l'avenir, même si ce n'était qu'un peu.
- Et toi ? demanda-t-elle. Ça va, depuis l'incident ?
- J'ai été convoqué par le directeur avec mon père, quelques jours après, répondit Lysandre. Il m'a posé plein de questions. C'était super intimidant.
- Quoi ? Non mais franchement...
- Je les comprend, tu sais. Ça fait peur, tout ces trucs liés aux magiciens. Les humains ne peuvent pas faire grand chose contre.
Ils arrivèrent au niveau du réfectoire et se greffèrent à la queue, Eugénie en tête. Derrière, Mila expliquait à Rory ce qu'était une ratatouille, le plat du jour.
Eloïse avait toujours du mal à s'habituer au fait que désormais, Lysandre faisait référence aux humains comme un groupe auquel il n'appartenait pas. Et qu'il était davantage un magicien qu'elle ne l'était elle.
- Ça s'est propagé au reste du lycée, le fait que j'étais un magicien, poursuivit Lysandre. Maintenant les gens me regardent un peu comme toi. Ça fait bizarre.
Et encore, il avait de la chance, la plupart des élèves s'étaient habitués à la présence de magiciens dans l'établissement parce que Rory et Eloïse étaient là. À une époque, Lysandre aurait vécu bien pire.
- Tu vas t'y habituer, promit Eloïse.
- J'espère. J'ai envie de me cacher dans un trou, des fois.
Eloïse lui tapota l'épaule, faute de pouvoir faire quoi que ce soit pour lui remonter le moral ou corriger la situation. Maintenant que ça se savait, personne n'allait oublier.
Ils se posèrent avec leurs plateaux sur une table de six au fond du réfectoire. L'ambiance du repas fut légère, ce qui plut à Eloïse, qui aimait échapper aux conversations sérieuses une fois de temps en temps. Après le repas, ils s'installèrent dans un couloir pour discuter tranquillement. Eloïse en profita pour aider Mila sur l'un de ses devoirs de mathématiques.
Quand il fut l'heure de retourner en cours, le groupe se scinda en deux. Lysandre et Mila montèrent au deuxième étage pour un cours de sciences économiques et sociales, pendant que Rory, Eloïse et Eugénie avaient deux heures de français au troisième.
Leur dernier cours de la journée fut encore celui de mathématiques, mais cette fois-ci, sans la conseillère d'orientation et dans une salle différente. Eloïse alla s'asseoir au fond et étala ses affaires sur sa table.
À la fin de l'heure, M. Manent l'interpella avant qu'elle ne s'en aille.
- Je peux te parler quelques minutes ? demanda-t-il.
Il devait avoir terminé sa lecture. Eugénie et Rory, intrigués, rejoignirent Eloïse.
- Je suppose qu'il a déjà corrigé ton devoir, dit l'adolescente aux cheveux roses. Ça devait être rapide, vu que tu fais jamais de fautes.
- On t'attend ? demanda Rory.
- Non non, allez-y, leur dit Eloïse. Je sais pas si ça va être long.
Ses amis la saluèrent, puis quittèrent la classe. Quand il ne resta plus qu'Eloïse, M. Manent partit fermer la porte, par précaution. Ensuite, il retourna à son bureau et sortit ce que la magicienne avait rédigé de son sac. C'était quelque peu laborieux pour un humain de tout intégrer, mais pas spécialement long à lire. Eloïse n'était trop rentrée dans les détails non plus.
Il feuilleta les pages comme pour se remémorer leur contenu.
- Tout ça, c'est... commença-t-il.
Le professeur ne trouva pas de terme approprié.
- J'ai demandé à M. Zepleski si c'était vrai, dit-il à la place. Il m'a dit que oui.
- C'est un peu difficile à croire, je sais, s'excusa Eloïse.
- Oui, mais je comprends mieux, maintenant.
Eloïse n'était pas sûre que ce soit vraiment le cas, puisqu'il n'avait accès qu'à un résumé du projet Alpha et qu'il ne vivait pas la situation de l'intérieur, mais garda ses remarques pour elle. Ce n'était pas pertinent de les formuler, surtout quand il avait demandé des informations pour mieux appréhender sa situation, et avec un peu de chance, aider comme il pouvait.
Le professeur, après avoir rangé les feuilles à leur place, les remit dans son sac, dont il tira la fermeture éclair.
- Je n'en parlerai pas et je garderai tout ça pour moi, dit-il. Merci de ta confiance.
Eloïse espérait qu'elle ne regretterait pas son excès d'honnêteté, même si elle en doutait. Les humains ne pouvaient pas faire grand chose de tout ça, et Michaël était là si besoin – un tout petit peu moins seul qu'avant.
◊
Eden ne savait pas trop quelle était la meilleure façon d'annoncer la chose à Synabella. Andromeda s'était défilée, alors c'était elle qui devait prendre la responsabilité de l'échec qu'avaient données les négociations avec Naya Albaardan, la sorcière ayant en sa possession la baguette convoitée par Synabella. Eden composa son numéro de téléphone en priant intérieurement pour qu'elle le prenne bien, et qu'elle ne décide pas de fomenter un plan qui mettrait Naya en danger. Eden ne voulait pas être mêlée à tout ça.
- J'espère que c'est pour me donner une bonne nouvelle, dit Synabella en décrochant.
- Alors, comment dire... grinça Eden.
- D'accord, donc tu as raté, pour la baguette. Explique-moi. Vite.
C'était davantage Andromeda qui avait raté, puisque c'était elle qui avait tenu les négociations – à son grand désespoir. Eden s'en était un peu mêlée, d'accord, mais n'avait pas voulu rendre ça trop bizarre non plus.
- Naya ne veut pas la revendre, expliqua-t-elle simplement. Elle a dit qu'il faudrait marcher sur son corps sans vie, si on la voulait.
- Ça peut s'envisager.
- Synabella !
- Oui, oui, déjà la méthode douce, ensuite la violence. Donc elle ne veut pas s'en débarrasser, peu importe la somme ?
- Oui, puis ni moi ni Andromeda ne sommes riches, alors elle ne voulait pas croire qu'on aurait suffisamment d'argent. Même en disant que c'était quelqu'un de notre connaissance qui payait.
Il y eut un silence. Eden se demanda si Synabella avait raccroché, mais elle devait être en train de réfléchir.
- Tu sais quoi ? Si elle ne la vend pas, c'est pas grave, je fais des économies.
- Tu laisses tomber ? s'étonna Eden.
- Non, je change de tactique. On veut la baguette pour s'en servir. Peu importe comment elle parvient à nous.
- Ça veut dire quoi, ça ?
- Naya est libre demain après ses cours ?
Eden se pinça les lèvres.
- Tu veux la trainer dans nos affaires ? C'est pas un peu risqué ?
- On peut ramener Vénérios au cas où. Il lui effacera la mémoire si ça devient une nécessité.
C'était actuellement le père d'Eden qui logeait Vénérios, alors elle pouvait facilement lui demander de l'amener jusqu'à eux, même si l'idée lui plaisait moyennement. Vénérios avait été accepté dans l'Ombre, mais était toujours maintenu à l'écart au possible.
- C'est une gosse de riche qui veut tout avoir, non ? résuma Synabella. Dis-lui qu'on a besoin de sa baguette pour retirer la magie du ciel et qu'on ne peut pas le faire sans elle. Elle dira oui. Ça lui fera même très plaisir.
Oh, Naya ne serait pas contre prendre tout le prestige, du peu qu'Eden avait vu d'elle. Elle risquait effectivement de se laisser tenter.
- Bon... soupira Eden. Je vais voir avec Andromeda. Je te tiens au courant.
- Demain en fin d'après-midi, conclut Synabella.
La magicienne raccrocha. Eden reposa son téléphone sur sa table de nuit et se laissa retomber sur son lit en faisant la grimace. Normalement, elle aurait dû passer sa soirée à réviser son cours de physique avec Heather, en vue de leur examen qui approchait.
Synabella en avait décidé autrement.
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