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À New-York les rues étaient animées. Le son des fiacres sur les routes pavées et la foule de gens allant travailler remplissaient la ville d'un bazar sans nom. Au dessus de tout cela, un petit corbeau noir comme l'ébène et aux plumes luisantes survolait la ville, fendant le ciel bleu découvert du début de l'hiver avec agilité, puis vint se poser sur le rebord abîmé d'une petite fenêtre, contre la façade d'un grand et imposant immeuble.
Loin de l'agitation, Tina Goldstein était assise à l'un des innombrables bureaux de l'étage, en train de remplir des dossiers, l'air ailleurs. Les locaux où elle bossait étaient ennuyeux au plus haut point et elle ferait n'importe quoi pour retrouver son ancien poste. Mais elle savait que pour l'instant elle devait s'en contenter, car si Norbert n'avait pas convaincue la présidente du MACUSA, Séraphina Picquery, (elle se demandait d'ailleurs souvent comment il avait bien pu le faire) de la ré-embaucher elle serait sûrement sur la paille.
Norbert...
Elle soupira bruyamment, passant sa main sur son visage tout en fermant les yeux. Quand il avait quitté New-York elle avait commencé à se noyer. Personne ne pouvait l'aider, même pas sa sœur, Queenie, car celle ci se noyait aussi de chagrin après avoir perdu Jacob, un non-maj qu'ils avaient rencontrés au cours de leurs dangereuses escapades à travers la ville quelques temps plus tôt. Puis, avec le temps sûrement, elles avaient refait surface. Enfin Queenie oui, car elle pouvait voir le gentil Jacob tous les jours bien, qu'il ne sache plus rien d'elle, mais Tina elle...elle n'y arrivait pas.
Ça avait été si douloureux pour elle. Bien qu'elle ne l'explique pas, ce départ fut l'une des épreuves les plus difficiles qu'elle vécut, après la perte de leur parents morts de la Dragoncelle il y a tant d'années. Il lui avait fait la promesse de revenir quand il aurait terminé son livre. Le problème, et elle en était totalement consciente, c'était qu'un livre aussi important demandait du travail, beaucoup de travail et aussi du Temps, et après tout ces jours à vivre dans l'amertume de la séparation, elle commençait à douter qu'il revienne un jour.
Cela faisait maintenant huit mois qu'il avait quitté le continent. Huit longs mois. Sans aucunes nouvelles.
Enfin, elle aurait voulut pouvoir le blâmer de ne rien dire, de ne rien envoyer depuis tout ce temps, hélas elle n'était pas mieux non plus, elle avait dans sa chambre, bien caché, tout un tas de lettres, colis et petites notes manuscrites qui lui étaient destinés mais quelle n'avait jamais eu le courage d'envoyer.
Pourquoi ? elle se le demandait encore parfois en les relisant.
Sortant de sa rêverie, elle tourna la tête vers la minuscule et unique fenêtre de son étage. Comme chaque jour depuis déjà quelques semaines, un étrange corbeau l'observait fixement. Étrange car jusqu'à lors elle n'avait jamais vu de corbeau aux yeux émeraudes. En fait elle n'était pas vraiment sûre que cela soit possible... mais d'une certaine manière cette présence la rassurait, elle avait l'impression de ne plus être seule. Et puis les animaux étranges lui rappelaient Norbert et ceux qu'il avait dans sa valise.
Norbert.
Elle sourit légèrement, l'air mélancolique.
Après un bref instant elle baissa les yeux sur la montagne de documents tachés d'encres multiples posés devant elle. En trois heures elle n'en avait même pas remplie la moitié, son esprit étant trop occupé par les douloureux mais néanmoins heureux souvenirs de Norbert qui flottaient dans sa tête.
Son regard s'égara à nouveau dans le paysage, puis dans les locaux sombres autour d'elle, pour à nouveau finir sur les permis baguette étrangers à remplir. Elle décida qu'elle n'arriverait à rien comme ça, se connaissant par cœur, car elle savait que dès que les souvenirs refleurissaient dans sa mémoire elle ne parvenait plus à réagir.
Elle se leva, faisant claquer le ressort de la chaise qui roula derrière elle sur quelques centimètres, remballa ses affaires dans son petit sac de cuir et de toile, et laissa un message sur son bureau disant qu'elle terminerait de remplir tout ces papiers le lendemain, avant d'attraper sa baguette posée à côté d'elle et de sortir du local en direction des ascenseurs.
Après qu'elle fut finalement sortie du grand bâtiment du MACUSA, elle se dirigea d'un pas rapide vers une ruelle sombre et vide juste en face et s'assurant qu'il n'y avait aucun non-maj susceptible de la voir, transplana, ne laissant derrière elle qu'un éclair lumineux et un nuage de poussière.
Ashley, toujours sous forme d'oiseau, reprit forme humaine, s'agrippant à la gouttière du bâtiment pour ne pas tomber, et d'un coup agile de baguette fit coulisser le verrou de la fenêtre qui s'ouvrit. Elle s'engouffra dans le local sombre et se dirigea rapidement vers le bureau de bois de Tina, ouvrit tous les tiroirs et jeta un coup d'œil rapide à une feuille que la jeune Auror avait prit soin de planquer.
Un gribouillis ressemblant étonnement à Norbert. Elle soupira.
Elle aurait dû s'en douter.
Voyant qu'elle n'avait aucune raison de s'inquiéter d'avantage, elle reposa la feuille dans son tiroir, le referma d'un mouvement de baguette puis regagna la fenêtre où elle se retransforma en corbeau pour s'envoler et parcourir les rues. Elle usa de ses capacités d'oiseau comme sa vitesse et sa vue perçante, ainsi que de sa magie, pour trouver Tina, qui, elle le savait, n'avait pu aller bien loin. Puis lorsqu'elle l'eut trouvée, elle se posa sur un toit au hasard, et à une vitesse inhumaine reprit sa forme de jeune fille, transplanant aussi, atterrissant dans une ruelle quelques mètres plus loin.
Elle se trouvait dans une grande allée piétonne étrangement vide pour une heure pareille, pas loin d'un immense parc. Tina marchait à vitesse modérée. Elle s'arrêta à côté d'une grande et mince femme aux cheveux platines, emmitouflée dans une veste Rose pâle devant la vitrine de la boulangerie "Chez Kowalski".
Ashley quitta sa ruelle et se rapprocha pour entendre leur conversation, mais, étant facilement reconnaissable, elle se métamorphosa en corbeau et se posa sur une barrière de fer humide non loin des deux jeunes femmes.
_ Queenie...tenta Tina.
_ Je sais Tina...mais sais-tu à quel point il me manque...?
_ oui je le sais et je te comprends...mais regarde il va bien....
_ j'aurais tellement aimé que nous n'ayons pas eut besoin d'oublietter Jacob...
Tina serra la jeune femme, qui n'était autre que sa soeur, dans ses bras. La douleur était partagée. Dans le petit commerce, Jacob Kowalski, un homme petit et rondouillard, disposait des pâtisseries toutes plus étranges les unes que les autres sur les étagères, un sourire flottant sur ses lèvres et le regard concentré. Il semblait heureux, et bien loin de toute cette douleur qui l'entourait sans qu'il ne s'en rende compte.
Ashley reprit forme humaine pour la énième fois, silencieusement. Elle voulait s'approcher et voir ça de plus près, sa curiosité prenant le dessus sur sa raison. Cependant Tina tourna la tête vers elle au même moment, ayant entendu les bruits de pas. Elle l'observa en haussant les sourcils.
Une adolescente aux cheveux d'or et au regard d'émeraude, vêtue d'un grand chaperon noir de soie d'une longue écharpe en laine bleu et grise. On ne voyait pas ça tous les jours. Puis quelque chose la percuta, un détail qui lui sauta aux yeux tout à coup.
Cette écharpe.
Elle n'avait pas étudié à Poudlard mais maintenant qu'elle était renseignée sur cette école, elle savait à quoi ressemblaient leurs uniformes scolaires. Elle reconnut sans grand mal l'écharpe et le blason de la maison de Serdaigle. Elle fit un pas dans sa direction, les sourcils froncés, voulant savoir ce que cette jeune fille pouvait bien faire là, et Ashley paniqua.
Il ne fallait pas qu'elle sache.
Jetant un rapide coup d'œil autour d'elle pour s'assurer que personne ne la verrait (heureusement pour elle la rue était déserte) elle transplana et déboula en catastrophe dans une petite pièce vide, le transplanage entre l'Amérique et l'Angleterre ayant duré au moins dix bonnes minutes.
Elle se redressa difficilement en s'appuyant contre le mur et toussa grassement, crachant quelques gouttes vermeilles sur le sol poussiéreux. Elle toussota une dernière fois et s'essuya la bouche du revers de sa manche.
Il ne fallait pas qu'elle fasse ça mais c'était plus fort qu'elle.
Elle connaissait les dangers du transplanage intercontinental, elle savait aussi que c'était interdit sans autorisation spéciale mais n'en avait que faire. Elle ouvrit la valise de cuir qui trônait sur le plancher, unique objet présent dans la pièce, et descendit à l'intérieur par l'échelle de bois. Elle soupira en la refermant d'un mouvement.
Encore une fois, elle l'avait échappée belle.
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