Partie 2
2
Peu à peu, leurs respirations reprirent leur rythme habituel. Un rythme presque trop monotone quand on savait quelle intensité et quelle cadence elles pouvaient atteindre lorsque la fièvre les étreignait. Bien que la lave incandescente eût jailli, le désir des deux hommes, lui, était encore bien présent. Ils avaient beau s'aimer chaque nuit, ce n'était jamais assez. Ils avaient l'impression d'être en proie à une soif inextinguible, un délicieux supplice qui leur arrachait un sourire complice après la jouissance.
Pourtant, cette fois-ci, Siegfried – désormais roi depuis le sacre qui avait eu lieu des semaines auparavant –, les yeux rivés au plafond, semblait avoir oublié son partenaire. Échevelé, ce dernier attendait le baiser que le monarque ne manquait pas de déposer près de son nombril après l'acte, en vain. Peu enclin à subir l'indifférence de sa royale moitié, l'amant négligé fit glisser son pied sur celui de sa Majesté. Celle-ci ne cilla pas. Pire, elle remonta les draps sur son corps nu. Si le froid l'assaillait, pourquoi ne venait-elle pas se coller à lui ?
Ainsi sont les grands hommes, songea Engel, dépité.
Mais un expert de la luxure ne baissait pas les armes aussi aisément. Il possédait tant de flèches à son arc qu'il lui suffirait d'à peine de cinq secondes pour atteindre sa cible.
— Siegfried, susurra-t-il à son oreille, de sa voix la plus luxurieuse.
Catin depuis toujours, le pouvoir tentateur lui venait si naturellement. Mais l'objet de son désir demeura impassible, retenu par ses pensées. Contrarié, Engel persista. Il s'étira, miaula et se fit cajoleur. Pourtant les efforts du félin restèrent sans suite. Il opta alors pour une approche bien plus vicieuse.
Ses doigts longèrent le front de Siegfried en direction de l'arête du nez, glissèrent vers le creux de la lèvre pour redessiner le menton avant de se porter sur son torse qu'il descendit avec assurance jusqu'au nombril sous lequel apparaissait les fibrines. Il s'arrêta là. Si près de ces bijoux que le drap, en dernier rempart, à l'image d'un gardien déterminé, préservait de son avidité. Les posséder une fois de plus, se sentir conquérant et surtout vainqueur. Mais avant cela, Engel désirait connaître les raisons du désintéressement de son stupide amant. Car oui, Siegfried l'était pour songer à d'autres que lui. Les nuits leur appartenaient, alors pourquoi y associer la lourdeur de ses pensées infestées des soucis de la journée ? En ces lieux, lui, Engel, devait être sa priorité, son unique obsession et tourment. Il s'en agaça.
À genoux, Engel découvrit le monarque, qui semblait à peine offusqué par le fait que son amant ait cessé sa tortueuse exploration, et s'en entoura de pied en cape. Siegfried le dévisagea, dubitatif.
— Tristesse et désarroi ont en ce jour maudit rejoint ma couche, se lamenta l'artiste. Fallait-il que l'aimé me blessât pour que ces deux bandits me prissent pour idole ?
Amusé, Siegfried se cala contre le seul oreiller qui durant leurs ébats avait conservé son emplacement à la tête du lit. Il se demanda quel rôle son amant fantaisiste lui jouait cette fois-ci. Mais surtout qu'avait-il fait, lui, pour être ainsi porté au pilori ?
— Dois-je m'attendre à être occis sur la place publique pour un crime dont je n'ai nul souvenir ?
— Quelle entourloupe ! Qu'il est aisé pour les grands seigneurs d'invoquer, de bonne foi, la Sainte Amnésie ! Les souvenirs sont le fardeau des justes et des opprimés.
— Oh, brûle-moi sur l'autel de ta trahison, dit-il en avançant vers Engel. Toi, dont certaines réminiscences sont enfouies sous une chapelle de non-dits.
— Tu me désespères, Siegfried.
— Quoi donc ? s'exclama-t-il, faussement outré. Je te donnais le change. C'est de bonne guerre. Abandonne-moi à mes pensées, et je me ferai violence en gardant pour moi les questions concernant ta relation avec mon père. Cela te convient-il ?
Siegfried s'installa au bord de lit, tournant le dos à Engel. Les reproches pointaient sous la réplique.
— Mes souvenirs appartiennent au passé. À quoi bon les remuer ? Tes pensées, elles, appartiennent au présent. Allez, dis-moi ce qui te perturbe.
Engel s'approcha, lui caressa les épaules, fit glisser ses doigts jusque vers le bas de son dos, les passant devant, chercha à s'emparer de ce trésor qui, entre les cuisses musclées, se reposait.
D'emblée, Siegfried se releva, se souciant à peine de son corps dénudé.
Baissant les bras, Engel se rallongea. Quant au jeune roi, il semblait soudain plus disposé à rayer le parquet de la chambre en faisant les cent pas qu'à rejoindre son amant.
— Je trouve Sa Majesté fort agitée, lança Engel dans une ultime tentative de le voir se détendre. Elle devrait parler, ne serait-ce que pour le bien de ce parquet qui n'a rien demandé.
— Sa Majesté aimerait que sa moitié lui laissât un moment de réflexion, répliqua-t-il légèrement agacé.
— Je vois.
— Que vois-tu ? s'enquit-il en cessant ses va-et-vient à travers la pièce.
— Tes humeurs sont aussi changeantes que ceux d'une...
— Engel, prévint-il entre ses dents.
— ...femme.
Et sur cette pique cinglante, l'insolent éclata de rire devant la mine contrite de Siegfried.
— Que se passe-t-il au palais ? reprit-il posément.
— Rien de plus qu'à l'accoutumée.
— Et c'est ce « rien de plus » qui détourne ton attention de ma majestueuse personne ? Me voici sérieusement offensé, mon roi. Quel châtiment serait à la hauteur de l'outrage que tu as osé commettre ? Trois Pater et deux Avene suffiraient pas.
La référence religieuse mécontenta Siegfried qui partit à la recherche de ses vêtements. Même s'il savait qu'Engel désavouait ce Dieu que sa mère vénérait, il appréciait peu d'entendre ces mots latins de la bouche de celui avec qui il péchait.
— Lâche donc cette chemise et ces bottes, proposa Engel, et parlons. Mais hâtons-nous, le sommeil frappe à ma porte.
Hésitant, Siegfried considéra Engel. Ce dernier devina que le monarque était en proie à un déchirement intérieur. Finalement, le roi lâcha ce qu'il tenait. Il tira un siège vers la tête du lit et s'y installa à califourchon. Les bras croisés sur le dossier, il observa son amant.
— Que penses-tu de la fête à venir ?
— Du Bal des princesses ?
— Non, éluda-t-il en joignant le geste à la parole.
— S'agirait-il de la Saint-Valentin ?
— Oui.
— Stupidité que voilà ! Ces festivités ne servent à rien, si ce n'est à laisser penser aux pauvres âmes solitaires qu'elles trouveront leur moitié lors de ce jour béni. Mais crois-tu sincèrement qu'il suffise de prier un Saint le jour de sa fête et de courir à travers prés pour qu'un miracle ait lieu ? De grâce, je ne suis pas un romantique pour m'illusionner ainsi.
— Dis celui qui était à la recherche du bonheur, ironisa le roi.
— J'ose espérer qu'en ta qualité de souverain tu te refuseras à jouer cette mascarade ? l'avertit Engel en se relevant, impudique.
— « Stupidité », n'est-ce pas ainsi que tu as qualifié ...
L'œil menaçant, Engel se planta devant son souverain assis. Ce dernier leva les yeux afin de croiser son regard.
— Ce n'est qu'un jeu, poursuivit Siegfried, agacé. Tu sais tout comme moi que les courtisans n'aiment rien mieux que les amusements.
— Oui, après tout ce n'est ni plus ni moins qu'une chasse... à l'homme. Un bien joli jeu pour celles qui désirent attraper un roi dans leurs filets, et de surcroît obtenir un baiser.
— Pourquoi cette jalousie ? Tu sais qu'aucune d'elles ne me charmera.
— Cours, cours, jeune jouvencelle. À la Saint Valentin, trêve de balivernes. Poursuis et débusque l'homme de tes rêves. Car derrière les bosquets, l'époux se terre.
— Fadaises de bonnes femmes. Comment toi qui honnis cette fête, peux-tu y croire ?
— Ne quitte pas ta chambre. Fais cela pour moi, Siegfried.
— Je ne peux pas. N'aie crainte, à minuit passé, je serai de retour à tes côtés. Oui, pourquoi se disputer alors que la Saint-Valentin...
— J'apprécierai de ne plus entendre parler de cette hérésie.
— Tu fais réellement partie de ceux qui...
— Aucunement ! coupa-t-il en se relevant. Cette fête ne rime à rien. Point. Je laisse aux aveugles le soin de croire qu'il suffit de chercher l'amour un jour donné pour tomber sur celui-ci comme par magie.
— Je veux croire en ce Saint, lâcha Siegfried évasif.
— Évidemment, puisque tu adhères à toutes ces superstitions stupides. L'amour n'a rien de féerique. C'est à force de persévérance que l'on obtient ce que l'on souhaite.
— Et pourtant, c'est en me rendant au Domaine que je suis tombé sur toi.
— Rien à voir, opposa-t-il aussitôt. Le destin. Ni plus ni moins.
— Le destin ne serait-il pas l'un des nombreux sortilèges de Valentin ?
— C'est ton point de vue, Sire. Si tu m'avais croisé au détour d'un couloir le jour de Saint Machin, serais-tu tombé amoureux de moi ? J'en doute. C'est ma persévérance qui t'a conduit à m'aimer.
— Te voilà bien arrogant.
— J'essaie de faire honneur à mon roi, railla-t-il en s'inclinant.
— Ton insolence mériterait quelques punitions.
— Nous verrons bien.
Et sur ces paroles, Engel éclata de rire. Au diable la Saint-Valentin ! Il n'avait pas besoin de cela pour garder son aimé auprès de lui.
***
— Sire, voilà l'heure ! déclara le vieil homme en écartant brusquement les rideaux des fenêtres de la chambre à coucher.
Tandis que les premières lueurs de l'aube traversaient les larges vitres, démontrant par là même que le roi disposait des plus beaux appartements au sein du palais, le premier valet s'approcha du lit et écarta les tentures. Vide. Avec un sourire aux lèvres, il leva les yeux au ciel.
À cet instant, la porte dérobée près de la tête du lit s'ouvrit sur le maître des lieux. Ce dernier, visiblement heureux, fit mine de remettre un semblant d'ordre dans sa mise.
L'insouciance de la jeunesse, se dit le domestique en songeant aux médecins et intimes qui patientaient dans le salon.
L'étiquette stricte de la cour s'accommodait peu des escapades impromptues des jeunes cœurs épris. Elle les craignait. Ne sont-ce pas la fougue des esprits et les élans passionnés qui mènent aux révolutions ?
— Me voici, Wilhelm ! s'exclama-t-il en se laissant tomber sur son lit.
— Vous faites bien de m'avertir, Votre Majesté, je vous pensais détenteur du don d'invisibilité.
— Vous avez l'art d'égayer mes matins, sourit Siegfried en se redressant sur un coude. Avons-nous du monde ?
— Ni plus ni moins qu'hier et les jours précédents. Sachez tout de même que les médecins méditent sur votre manque d'appétit de ces derniers soirs. La saignée vous pend au nez, Sire.
Le monarque éclata de rire face à ce trait d'humour. Que ces savants de la santé poursuivent leurs vaines interrogations ! Pourquoi dîner devant un parterre de courtisans – et surtout perdre son temps à faire durer ce repas – alors que son aimé, entouré de délicieuses pâtisseries, l'attendait chaque nuit ? Un corps nu offert sans fausse pudeur, des baisers au goût de macaron, et des doigts experts dont les caresses vous ôtaient toute pudibonderie et clairvoyance, vous arrachant des râles de plaisir. Les images de ces dernières heures entre les bras de son amant lui revinrent aussitôt en mémoire. Et sans surprise, sa virilité se rappela à lui. Pour faire taire la soif qu'il avait d'Engel, il aurait fallu que celui-ci demeurât jour et nuit à ses côtés.
L'esprit torturé par son désir et ses devoirs, Siegfried se débarrassa de ses effets de la veille – aidé par Wilhelm – puis revêtit à la hâte sa chemise de nuit. Et alors qu'il se parait de son bonnet, le valet de garde-robe, accompagné de deux garçons de chambre pénétra dans la pièce à huit heures précises. Wilhelm sortit. Peu après, les proches, conseillers d'État et membres de l'église défilèrent. L'intimité du monarque offert au vu et au su de tous. Obligé de paraître sur une scène où il tenait le rôle principal. À chaque acte de la vie courante, de nouveaux intervenants. Passant des mains d'un expert de la toilette à un expert en habillement, tout ceci ponctué des échanges des ministres, du grand aumônier et des gens de qualité, véritable cacophonie que nul pourtant ne percevait ainsi, tant chacun était soucieux d'être entendu par le roi. Ce théâtre grotesque irritait ce dernier. Sa patience était mise à mal, mais l'étiquette le demandait : il fallait poursuivre ces cérémonials, et taire toute envie d'exhorter la foule à quitter ses appartements.
Une heure plus tard, la cinquantaine de personnes prit congé, laissant le souverain agenouillé sur son prie-Dieu.
— Monsieur le frère du roi !
Maximilian ôta son couvre-chef qu'il tendit au Chambellan avant de refermer brusquement la porte au nez de ce dernier.
— Deux Pater et un Ave ne suffiront pas.
Siegfried se signa puis se releva en jetant un regard noir à son cadet.
— Sais-tu que mes gens respectent mon intimité ?
— Oh ! Pour la respecter, ils la respectent. À l'heure actuelle, le petit peuple doit se targuer de connaître le nombre exact de grains de beauté que le roi possède sur son royal fessier.
— Maximilian !
— Tu remarqueras que, contrairement à la populace, j'ai la décence de patienter. Mais il est vrai que tes ablutions et autres rituels me passionnent peu. Je dirai que de toi, j'en ai trop vu, enfant.
Appréciant peu la boutade, Siegfried s'approcha de son lit.
— J'ai un conseil à tenir, l'informa-t-il. Je te prie donc de dévoiler la raison – sérieuse, je l'espère – de ta venue chez moi.
— Pourquoi tant d'inimitié ? Tu acceptes la visite quotidienne de ta cour, et moi, ton frère de sang, tu refuses mes entrevues impromptues.
Sans un mot, Siegfried saisit l'épée que Wilhelm avait déposée avant de quitter la pièce. D'un air menaçant, il la pointa vers l'imprudent jeune homme.
— J'écoute, Monsieur mon frère. De quel événement vouliez-vous m'instruire qui ne puisse attendre mon retour du Conseil ?
— Je vois, lança Maximilian en tirant à son tour son arme. Tu tiens à me défier comme lorsque nous étions adolescents. Penses-tu que le moment soit opportun ? Que diraient tes gens s'ils venaient à surprendre ta lame en travers de mon corps ?
— Que, pour le bien du Royaume, j'ai occis un énergumène qui menaçait ma tranquillité d'esprit.
Ils se toisèrent du regard, leurs lames s'effleurant.
— Parle, ordonna l'aîné. Je suis tout ouïe.
— La marquise de Stirling et sa belle-fille sont arrivées à la cour dans la nuit.
— Le chancelier m'en a touché un mot ce matin. Le Surintendant aurait invité quelques familles, ajouta-t-il, agacé par cette décision prise une fois de plus sans qu'il ait eu à donner son accord.
— Je l'ai croisée à l'aube. Malgré le manque de sommeil et le voyage, elle était de toute beauté, comme si la fatigue n'avait pas de prise sur elle. Ses yeux couleur d'ébène, ses lèvres pleines sont un appel à l'amour et sa gorge... Oh, je suis épris d'elle ! Ne pourrais-tu l'inviter dans tes appartements, et... ?
D'un geste prompt, Siegfried contourna la défense de son cadet. Sa lame se figea entre les yeux de ce dernier.
— Je te préviens Maximilian, je n'interviendrais pas en ta faveur si sa chasteté devait être compromise.
— Qui te le demande ? rétorqua-t-il, nullement perturbé. Nous saurons tous deux qu'il ne s'agit là que d'une aventure sans lendemain.
— Si tu intentes à son hymen...
Perplexe, Maximilian écarta la lame de sa joue.
— De quel hymen parles-tu ?
— C'est bien la belle-fille que tu convoi... (Voyant le visage amusé de son frère, Siegfried s'écria :) Non, Maximilian ! Tu ne vas tout de même pas mettre la marquise dans ton lit ! N'as-tu donc aucune décence ? Son époux est passé de vie à trépas il y a à peine deux mois de cela !
— Il est vrai qu'un mari vivant aurait été préférable, mais les choses étant ce qu'elles sont... En saint homme, je promets de lui faire oublier son veuvage ! Pour cela, j'ai besoin de ton aide.
Désespéré, Siegfried passa une main sur le visage. Si leur mère apprenait les intentions de son fils cadet, elle finirait par le vouer irrémédiablement au diable. Il fallait dissuader son frère de poursuivre cette stupide entreprise. Il ne pouvait se permettre un scandale alors qu'il commençait à peine son règne. Pour l'instant, le peuple semblait satisfait de lui. Il désirait que cela perdure. Peut-être parviendrait-il ainsi à reprendre les rênes du pouvoir que le Surintendant et le Chancelier accaparaient pour le moment.
— Oublie-la, ordonna l'aîné en rangeant son épée au fourreau.
— Est-ce une manière de parler à l'homme qui t'apporte son aide à chaque fête des Lupercales ?
— Saint-Valentin.
— L'église et ses réappropriations, balaya Maximilian d'un geste de la main. Les Lupercales correspondent bien mieux à ma définition de l'amour.
— Non.
— Est-ce là ton dernier mot ?
— La porte se trouve derrière toi.
— Ainsi, tu me refuses l'une des plus belles femmes que Éros ait daigné mettre sur mon chemin ?
— Sors avant que je ne me décide à t'emprisonner pour les prochains jours, menaça Siegfried.
— Très bien. Sache que tu perds un allié précieux pour demain. Toi, seul contre de jeunes filles énamourées et aveuglées par les promesses de la Saint-Valentin. Et ne parlons même pas de ce fameux baiser, digne des histoires les plus romanesques, que tu devras à l'élue.
— Je m'entretiendrai avec cette femme.
— Merci mon frère !
— Ne me remercie pas ! fulmina-t-il. En aucun cas, je ne t'aiderai à la débaucher !
— J'en doute fort. Tes lèvres ou la marquise ? À toi de choisir, ô sage roi.
— Va-t'en !
Maximilian éclata de rire puis sortit. Au même moment, le Chancelier vint le trouver.
— Sire, le Conseil vous attend.
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