Luna


La nuit tombe sur la ville, laissant les immeubles illuminer les rues. Ces grandes tours toutes habitées dans ce quartier résidentiel offrent un éclairage optimum pour une demoiselle comme moi. Aujourd'hui, comme tous les autres, je traverse les dortoirs pour atteindre la tour des plaisirs. Celle où se réunissent tous les Oméga chaque nuit que porte ce monde. Ils doivent s'amuser ceux qui résident sur l'ancienne Finlande, surtout au Nord. Six mois de nuit complète sans un rayon de soleil. Je ne pourrais pas supporter de vivre là-bas.

Il me faut dix minutes pour parcourir la distance entre mon petit appartement, un modeste duplex meublé avec modernité, et cette tour. Je n'ai pas besoin de me présenter au garde pour qu'il me laisse entrer. Je viens ici tous les jours depuis maintenant quatre ans. Tous les gardes me connaissent, mais aucun n'a accepté de passer une nuit en ma compagnie. Les Bêta ne savent pas s'amuser. J'aimerais pouvoir les faire se lâcher un peu, mais c'est impossible, les lois leur interdisent de céder à leur désir. Ce sont de parfaits petits robots.

J'arrive dans le hall face à l'hôtesse d'accueil, elle me fait un grand sourire. Il s'agit de Tiffanie, une très belle Oméga de trente ans, ayant une peau parfaite et de courts cheveux blonds coupés en carré droit. Elle a déjà eu six enfant, ce qui leur value le poste qu'elle occupe aujourd'hui. Dans onze ans, elle aura la charge d'un dortoir, surement masculin.

« Bonjour Tiffanie ! » Je m'exclame avec entrain. Elle me répond avec un grand sourire, prenant le temps de me parler des nouvelles concernant mes collègues. Peu de filles attendent des enfants parmi les nouvelles générations. Il faut dire que d'après les résultats de cette année, aucun garçon n'est devenu Oméga. Ils sont soit devenu Bêta soit Alpha. Une rumeur cout aussi disant que l'un d'eux a été intégré au peuple. Le pauvre, c'est la pire chose qui pouvait lui arriver.

Je lui fais un salut de la main, montant dans l'ascenseur après lui avoir remis mon masque. Je n'aime pas ce masque, je le trouve moche, il ne me va pas, et quand je sors la journée, je ne peux même pas profiter du soleil, quand il daigne se montrer. Je monte au quinzième étage, là où se trouvent les Oméga de dix-huit à vingt-cinq ans. Pour être honnête, pour les quatre-vingt femmes présentes, seul dix hommes sont là. C'est trop peu. Seuls soixante enfants peuvent naître de nos unions. C'est pourquoi certaines d'entre nous comptent sur les Alpha.

Les générations se renouvellent dans cette classe. Ils ont beaucoup d'hommes et peu de femmes. Ils deviennent alors notre espoir de renouveler plus aisément la population. Les dirigeants ont toujours été clairs, il faut réduire la population, mais pas trop vite, sinon notre espèce s'effondrait. Je soupire voyant qu'une fois de plus j'allais rester seule. Tous les hommes étaient entourés par plusieurs femmes. Au final, ils n'en choisiront qu'une seule, surement parmi les nouvelles venues. Elles sont plus jeunes et inexpérimentées, assez pour se laisser totalement dominer.

Je croise le regard de l'un d'eux, un ami de longue date. Mon seul amant à vrai dire. Je vois alors une chance de ne pas finir la soirée seule. Je lui fais un sourire un peu charmeur, mordant ma lèvre en lui faisant signe de venir. Il me sourit en retour amusé, je perçois un mouvement de sa part, quand une de ses prétendantes l'embrasse avec fougue. Je soupire et m'assois à une table ronde seule. Une de ces uniques tables qu'ils nous offrent, toutes identiques et permettant de discuter plus aisément. Je pose mes bras croisés sur la surface polie et laisse ma tête se reposer dessus.

J'ai attendu dix à vingt minutes avant de sentir une présence à mes côtés. Je tourne la tête à droite et découvre mon ami qui a pris la même position que moi en souriant. Ses petits yeux bridés ne me quittent pas. Il s'appelle Seong Min, il est originaire du district d'Asie, situé sur ce qui était autrefois la Chine. Il est plutôt dragueur, mais semble resté fidèle aux mêmes personnes. A part moi, je ne l'ai vu qu'avec deux autres filles. Il a cette année vingt-cinq ans. Il me faudra attendre deux ans pour pouvoir le revoir.

« Je pensais que tu viendrais me voir. » Déclare-t-il faussement déçu. Je souris à son ton et me redresse, m'étirant avec grâce. Je me dois d'être parfaite, mon apparence et mon attitude devant être irréprochables.

« Tu étais avec Alice, je n'allais pas vous déranger. » Je réponds d'une voix plus aigüe et joueuse. Il se redresse à son tour et passe un bras autour de mes épaules, m'attirant à lui. Alice est ma concurrente directe, elle me pique toutes mes proies, Seong Min compris. C'est un jeu que ma cadette a décidé de jouer seule, prendre ce que l'autre veut. C'est ma très chère sœur, ma cadette de deux ans, qui aura surement un enfant avant moi.

« Elle s'amusera très bien avec Elliot, ça fait longtemps qu'on ne s'est pas retrouvés juste tous les deux. » Murmure-t-il juste contre mon oreille, me déclenchant un doux frisson, quand son souffle touche ma peau. Je sais déjà où il veut en venir. Il ne parle pas de discuter, de se balader. Il ne pense pas à se câliner en douceur sans aller plus loin. Non, c'est de ce « plus loin » auquel il fait allusion. Ce pourquoi nous sommes nés.

Au fond, nous sommes semblables aux animaux, les Oméga sont comme des animaux. Nous sommes là pour la survie de l'espèce, donner naissance aux futurs générations. J'aurais aimé être plus que ça. C'est pourquoi, je voudrais devenir la compagne du fils du président. Il saura m'élever à un plus au rang, je n'aurais pas à donner naissance six fois. Une seule sera nécessaire.

Je regarde Seong Min, lui proposant de se rendre aux étages inférieurs. Nous rejoignons une des chambres de la tour. L'ambiance est romantique, des bougies illuminent la pièce, les murs sont rouges et marrons, et un grand lit trône au centre de la pièce. J'entre la première, mais contrairement à ce que l'on m'a appris en arrivant ici, je ne me déshabille pas. Seong Min aimant le faire, il use de sa douceur sur moi, pour que tout cela soit agréable. Je le sens se coller à mon dos ses lèvres embrassant ma nuque.

Peu de temps après, alors qu'il dérive sur mon épaule, je sens le corset de ma robe bustier bleu nuit se desserrer, relâchant la pression exercée sur la poitrine. Ma robe glisse au sol me laissant, seulement vêtu d'une petite culotte. Les choses sérieuses commencent, et je sais qu'il sera doux, comme peu d'Oméga le sont.

***

Dans une salle immense, semblable à un hangar, perdue dans les sous-sols de la ville, un homme travaille sur un très grand engin à la mécanique complexe. Il est rejoint par son supérieur, un homme à l'allure sévère portant un costume noir et une cravate, de la même couleur, parfaitement nouée, qui ressort sur sa chemise blanche. Il avise un instant le travail de son ingénieur et fais remarquer sa présence à l'homme présent, un mécanicien, ayant la réputation d'être très doué, plus que ceux du centre de la ville. Un mécanicien du peuple, et non un Bêta, à qui il est coutume de faire appel. « Le chantier avance Monsieur, mais je risque d'avoir du retard. » Annonce-t-il craintif.

« Excellent, je te donne trois ans pour qu'elle soit parfaite. Il ne faut pas prendre aucun risque. » Le supérieur se retourne faisant demi-tour, un sourire satisfait étirant ses lèvres. Tout se déroulait exactement comme il l'avait prévu.

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