Johnathan
« Est-il vraiment utile que nous assistions à ces résultats ? Ce ne sont que des examens, ils ont lieu tous les ans. » Je râle en regardant mon père ajuster sa cravate. Il mettait toujours un point d'honneur sur le fait d'avoir une apparence soignée. Personnellement, je n'en vois pas l'intérêt, je n'ai même pas envie d'apprendre son métier. A quoi bon vivre dans un tel monde ? Il est laid.
« Sache mon fils qu'il s'agit du dortoir de ton grand-père. Tu sais l'homme qui a eu six femmes avant que je ne naisse, lui faisant arrêter sa procréation. Six enfants en deux ans, c'est du jamais vu. » Rigole-t-il d'un air hautain. Voilà exactement le type d'homme qu'est mon père. Celui qui dénigre sa propre famille et chérit son peuple. Le meilleur président de notre siècle, ça personne ne dira le contraire. Il est aussi exigeant que bien veillant, c'est ce qui fait sa force. Je le hais.
« Je croyais que tu n'aimais pas grand-père. Pourquoi tiens-tu tant à assister aux résultats ? » J'insiste d'une voix dure. Je sais que mon père n'aime pas qu'on lui tienne tête. Je dois bien être le seul à oser défier l'autorité suprême de notre monde. La bonne blague, il gère le monde mais pas son propre fils. Je me heurte à son silence déconcertant, c'est la première fois qu'il ne répond pas à une de mes questions, même quand je le provoque. « Père ? »
Je relevais la tête de mon livre, croisant son regard perçant au travers du miroir. Il n'a pas apprécié ma remarque, mais je n'en ai que faire, il ne m'impressionne plus depuis mes dix-neuf ans. « Aelys Michel. Ces résultats au fil des années n'ont cessés de la classer chez les Alpha, mais il semblerait qu'elle ait compris comment obtenir la classe qu'elle souhaite. Depuis deux ans, elle est chez les Bêta. » M'annonce-t-il après un long silence. Je me disais aussi, lui penser à son propre père, c'est comme si je faisais partis du peuple. Je n'ai rien à voir avec ces déchets.
« Et qui a affirmé que personne ne pouvait changer de mentalité ? C'est inutile d'aller là-bas, c'est juste une fille parmi tant d'autre. » Je soupire, ne souhaitant que retrouver ma chambre, au moins, je n'aurais pas une vue sur cette immonde ville. Mon père se retourne pour me faire face, un sourire amusé en coin. Il a une idée derrière la tête et comme toujours, je vais la détester. « Qu'est-ce que tu veux de moi ? C'est cette question que tu espères que je pose, n'est-ce pas ? » J'affirme avec conviction, son sourire se fait plus franc. « Vas-y. je t'écoute. »
« Je veux que cette fille vienne ici. Peu importe le moyen que tu utiliseras, la raison que tu trouveras. Elle doit arriver dans ce bureau, sans que personne ne le sache. » Déclare-t-il avec autorité. Je ne sais pas ce qu'il veut faire d'elle. Peut-être lui a-t-elle tapé dans l'œil ? Malgré tout, je n'ai pas envie de le faire, pas tout de suite du moins. Je peux bien le faire patienter quelques instants. Un an ou deux ans, ça devrait être suffisant. « Si quelqu'un apprend qu'elle est venue ici. Je te marierais avec elle. Maintenant, on sort, il faut que tu voies à quoi elle ressemble. »
Je reste figé quelques instants suite à sa menace. Me marier avec elle ? Cette idée me répugne. Comment pourrais-je accepter l'idée même de me marier ? Seul le peuple a recourt à cette coutume inutile. Je refuse de me rabaisser à leur niveau. Peut-être que trois ans sera mieux. Je suis mon père jusqu'à l'ascenseur, n'ayant aucune envie de voir à quoi ressemble cette personne. Il semble pourtant que je n'ai pas le choix.
Quatorze heures sonne quand nous arrivons, sous les regards surpris et admiratifs des nouvelles diplômées. J'ai envie de leur crier de regarder ailleurs, ce n'est que le Président, il n'a rien de si spécial. Si seulement, elles savaient quel genre d'homme il est. Il paraîtrait tout de suite moins charmant.
Je me place aux côtés de mon grand-père, le saluant avec respect. Lui aurait dû être le Président et non ma grand-mère. Je l'ai déjà vu à l'œuvre avec ses filles, quand j'étais encore mineur, il prend soin d'elles comme si elles étaient ses filles. S'il aurait pu m'élever, je suis sûr que la vie m'aurait parût moins chaotique, immonde. C'est le seul membre de ma famille qui mérite de vivre sur une planète saine.
« D'ici, quelques instants, chacune de vous sera affectée à une classe. Soyez honorée que le Président et son fils aient fait le déplacement jusqu'ici. » Commence un soldat d'un ton neutre. Je le trouve ennuyeux, comment quelqu'un d'aussi moi peut-être un Bêta ? Il est comme ce monde, sans vie. Une femme sort du bâtiment, une liste à la main. Le destin de ses nouvellement femme est maintenant scellé.
Le temps me parait long alors que les filles défilent sans que le nom d'Aelys ne soit prononcé. Je me suis presque demandé si elle n'avait pas déserté. Cependant, son nom est prononcé, elle est une Bêta, ce sera dur pour moi de l'approcher. C'est une fille étrange, différente des autres, elle est habillée simplement, un jean et une chemise, ses cheveux attachés en une queue de cheval pour le moins parfaite. Elle ne porte pas tous les artifices des autres, elle est plus simple pas un de ces pantins sans vie conditionnés par la société. J'esquisse un rapide sourire en coin. Trois ans pour en faire mon amie, ce sera plus intéressant.
Je lance un regard à mon père qui fait de même. D'un léger hochement de tête, je lui montre mon accord. La cérémonie dure encore vingt minutes, avant que les filles ne retournent aux dortoirs, accompagnés du soldat. Mon grand-père reste étrangement avec nous. Je pensais qu'il les suivrait, seulement, il les regarde juste sa tête restant droite. Son visage étrangement neutre me fait penser qu'il veut nous parler, avant de leur dire adieu.
« Que complotes-tu pour venir à cette cérémonie ? » Demande-t-il à mon père sans bouger. Je souris faiblement, il a tout pour être un Alpha, la culture et la perspicacité. Mon père soupire, le regardant durement. Je sais qu'ils s'entendent peu. Le président détestant qu'il s'immisce dans ses affaires. Malgré tout, il lui répond toujours la vérité, « par respect pour un aîné de la famille », dit-il pour se défendre.
« Aelys Michel. C'est le meilleur élément des enfants de cette année. Elle avait tout d'une Alpha. Pourquoi est-elle devenue une Bêta ? » Interroge mon père, d'un ton supérieur. Le regard que lui lance mon grand-père ne peut être plus qu'exaspéré, je sourie amusé, mais reste tout de même curieux. Ce n'est pas tous les jours que mon père s'intéresse à quelqu'un d'autre que lui-même. Qu'a-t-elle de si particulier ? Je ne vois pas en quoi le fait de comprendre la classe des réponses fait de nous quelqu'un d'à part.
« Tu sais pourquoi. Elle ne voulait pas être une Alpha mais une Bêta. Elle a mis toutes les chances de son côté pour le devenir. » Explique-t-il avec confiance. Je sens au regard de mon géniteur que ce n'est pas la réponse qu'il attendait, cette expression sur son visage amusé. C'est un mélange de frustration et d'impatience. Mon grand-père me regarde, un doux sourire prenant place sur son visage. « Et toi, mon garçon ? Quel dommage que tu doives suivre ton père jusqu'à des cérémonies aussi futiles. Que dirais-tu de raccompagner un vieil homme jusqu'au dortoir ? »
Je croise le regard du Président, qui me déconseille de le faire, mais je fais comme si je ne l'avais pas vu. Souriant en retour au chef de dortoir, je hoche la tête et le suis jusqu'aux dortoirs laissant mon père derrière. Je sais son regard se faire dur sur moi, mais je n'en ai que faire. Dans tous les cas, je suis surement le seul à pouvoir lui succéder, pourquoi me fatiguer à l'écouter ?
« Grand-père, elle est comment cette fille ? » Je l'interroge une fois loin du Président. Il soupire avant de me sourire. Il ne me le dira pas.
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