Chapitre 29
~Soonyoung~
Est-ce que se regarder pendant cinq minutes dans une vitre humide, yeux ancré dans son reflet, murmurant des paroles qui ne font sens que pour un seul esprit, font de nous un être étrange ? Bon à éviter ? À enfermer ?
Soonyoung aimerait dire que non, mais s'il était un passant qui se surprendrait dans cette position alors sûrement aurait-il fait demi-tour en croyant être tombé sur un fou.
C'est en tout cas de cela qu'il avait l'air, d'un fou, alors qu'il tentait de donner une forme sérieuse à sa touffe de cheveux ébouriffés et se murmurait des mots courageux. Il avait été sorti du lit trop rapidement, sans avoir le temps de se coiffer, de se doucher, de s'assurer d'être bien habillé et de laisser à son visage le temps de dégonfler. Madame Lee lui avait ordonné de se rendre dans son bureau au plus vite, sans passer par l'étape réfectoire, sans lui laisser le sommeil supplémentaire que sa matinée dénué de cours lui promettait.
Soonyoung n'avait jamais été aussi effrayé de toute sa vie que devant le visage stricte de cette femme, et pourtant il avait connu la guerre et vu la mort se pencher sur lui.
Madame Lee était une personne terrifiantes. Et être convoqué de bon matin l'était plus encore.
Pourquoi lui ? Pourquoi pas Jihoon ou Seokmin ? Il ne voyait qu'une seule explication: elle n'était pas satisfaite de son travail, elle ne voyait pas en lui l'aura d'un bon professeur et le temps de crise mettait plus en avant son incompétence. Elle voulait le réprimander, ou pire le virer.
Soonyoung avait la gorge sèche et le corps en branle. C'est ce qu'il se disait tout les jours, qu'il n'était pas assez bien pour ce poste, qu'il ne faisait pas un bon adulte, qu'il n'était pas capable d'être un soutien, un exemple ou une forme d'autorité suffisante vis à vis des élèves.
Il faisait de son mieux pourtant, il donnait tout, il n'avait jamais fait autant d'effort que depuis qu'il enseignait à Poudlard.
Il soupira, son reflet ne lui renvoyait toujours pas une image satisfaisantes, mais il ne pouvait pas se permettre de perdre plus de temps. S'il était en retard à la convocation de Madame Lee il ne ferait qu'empirer son cas.
Son regard tomba sur l'entrée du bureau, à quelques pas, cette porte haute et imposante, en bois taillé toute en beauté. Du temps où Dumbledore régnait sur cette pièce s'y rendre n'était pas aussi effrayant, le défunt sorcier ne faisait pas peur avec son allure de vieux papi endormi, bien que personne n'ignorait la force qui habitait son être. Madame Lee était moins puissante qu'il l'avait été, mais son physique, sa voix, son regard... Tout chez elle imposait l'autorité et le respect.
Soonyoung était toujours surpris de voir à quel point leurs traits à Seokmin et elle pouvaient être similaire mais employé tellement différemment qu'on oubliait parfois qu'ils étaient mère et fils.
- Monsieur Kwon ?
Alors qu'il s'avançait vers le bureau deux garçons l'interpellèrent depuis l'autre bout du couloir. Le soleil n'était pas encore suffisamment levé pour éclairer cette partie du château, aussi du-t-il attendre de les voir approcher pour reconnaître Beomgyu et Taehyun.
Le premier était aussi frais que s'il était levé depuis des heures pour se préparer soigneusement, tandis que le second paraissait tout aussi sorti du lit que ne l'était Soonyoung.
- Qu'est-ce qu'il se passe ? Pourquoi on est convoqué chez la directrice ? Demanda le Serpentard.
- Il y a eu un problème ? Enchaîna le Serdaigle.
- Je... Je n'en sais rien. Madame Lee m'a juste demandé de venir.
Le poids qui résidait dans sa poitrine par la peur d'être viré s'évapora, remplacé par une nouvelle anxiété. Pourquoi était-il convoqué en même temps que deux des derniers sorciers ? Pourquoi lui ?
Sans perdre une seconde de plus il ouvrit la porte et laissa ses yeux brûler contre la lumière qui éclairait dans le bureau. Il sentit Beomgyu et Taehyun le suivre, tandis que Madame Lee poussait une petite exclamation en les voyant arriver:
- Vous voilà. Ferme la porte Soonyoung.
Il s'exécuta, et une fois que son regard fut habitué à la luminosité il constata que Yeonjun, Soobin et Kai se trouvaient également dans la pièce.
La directrice se tenait assise à son bureau et les trois garçons avaient prit place sur les fauteuils installé pour accueillir les invités. Soonyoung s'avança, curieux, mais surtout inquiet devant l'obscurité qui habitait les visages qui s'étaient tourné vers lui. Quelque-chose de lourd pesait ici, la gravité lui semblait comme accentué.
- Qu'est-ce qu'il se passe ? Demanda-t-il.
Sa voix était sorti aussi basse et timide que s'il était un élève peu serein, prêt à se faire punir pour une bêtise qu'il ignorait avoir commise.
- Il se passe que cette nuit Yeonjun à failli se faire égorger, répondit Soobin.
- égorger ? Répéta Taehyun.
Il posa un regard choqué sur le concerné et l'approcha, ses traits devenant livide lorsqu'il aperçu la marque de coupure sur le cou de Yeonjun. La blessure, bien que fermé, restait rouge et gonflé, on voyait quelques résidus de sang séché coincé sur sa pomme d'Adam.
Taehyun s'asseya à côté de lui, horrifié par ce qu'il voyait, et levant un doigt tremblant pour effleurer ce trait macabre qui décorait la gorge de son frère.
- Ça va, le couteau n'a fait que m'égratigner, le rassura Yeonjun
-Mais... Ça a l'air profond.
- C'est pas aussi impressionnant que ça en a l'air.
- Ça saignait quand même beaucoup, rétorqua Soobin.
- Qui t'as attaqué ? Intervient Beomgyu, qui s'avançait à son tour.
Le Gryffondor saisit la main de Taehyun pour qu'il cesse d'effleurer son cou, puis expliqua en haussant les épaules:
- Je sais pas, je voyais pas son visage. Ça ressemblait à un homme, il était grand, très grand, et il... Avait plus l'air d'une ombre que d'un humain à vrai dire.
"Personne ne l'a vu ?" Écrivit Kai.
- Quand les autres élèves sont arrivé il a disparu.
- Disparu où ? Demanda madame Lee.
- Nul part, juste disparu.
- Il a éclaté comme une bulle ? S'enquit Taehyun.
- Pas vraiment, il était face a moi et en un claquement de cil il n'y avait plus rien.
Comme les autres attaques, un danger apparaissait devant les derniers sociers et s'en allait tout aussi vite, sans que personne ne puisse constater quoi que ce soit. Soonyoung en avait parlé avec ses amis qui avaient manqué d'être témoin des attaques, dans la bibliothèque ou Soobin avait été agressé il n'y avait rien d'autre qu'une étagère renversé d'après Seungcheol, et sans le couloir où Kai s'était fait brûler le bras Minhyun et Wonwoo n'avaient rien constaté d'anormal.
Le pire, c'est qu'un enquêteur avait débarqué dans le château la veille, Joshua leur avait expliqué que cet homme pensait que les garçons mentaient à propos de leurs attaques. Il n'y avait jamais de preuve, encore une fois le cou abîmé de Yeonjun représentait le seul indice d'une agression.
Soonyoung en avait parlé avec Jihoon, tout deux craignaient que l'un des derniers sorciers finissent par se faire tuer. Ils ne pouvaient pas le permettre, c'était leur rôle de protéger les élèves.
Madame Lee se leva, après avoir poussé un long soupir elle contourna son bureau et vient se planter devant eux.
- Ça ne peut plus continuer comme ça, si on ne fait rien on va perdre le peu de contrôle qu'on possède que cette situation, et des évènements tragiques pourraient se produire.
Elle était sûrement la plus concerné par ce qu'il se passait, s'il arrivait quoi que ce soit aux adolescents dont elle avait la responsabilité elle prendre la faute sur ses épaules. De plus, Soonyoung craignait que le Ministère décide de retirer les garçons de Poudlard si le danger perdurait.
Ils n'avaient toujours pas réussi à confirmer qu'il y ai un lien entre eux et la salle secrète de la bibliothèque. Le temps filait entre leurs doigts sans même qu'ils ne s'en rendent compte.
- J'ai décidé qu'on allait retirer les garçons de leurs dortoirs, ils vont partager une chambre dans l'aile des professeurs, à votre étage Soonyoung. Ainsi il ne seront jamais isolé, et auront plusieurs adultes à proximité, annonça la directrice.
- D'accord. Je ferais préparer la chambre.
- Très bien. Mais je ne t'ai pas convoqué juste pour te dire cela Soonyoung, il y a autre-chose, quelque-chose de très important.
Elle prit place sur le second fauteuil, tandis que les cinq derniers sorciers s'étaient serré sur le premier. Soonyoung resta debout, figé, à observer sa supérieur hiérarchique.
- Dans chaque témoignage que les garçons ont fait sur leurs attaques il y a trois points communs: le fait que ça se produisait quand ils se retrouvaient isolé d'autres élèves où professeurs, le fait que l'assaillant disparaisse avant que quelqu'un d'autre ne puisse le voir, et le fait qu'à la fin de chaque attaques ils se rendaient compte que Ode se tenait dans les parages.
L'évocation du petit chat du château le surpris, il tenta néanmoins de ne pas laisser voir son désarroi et répondit:
- Ode ? Elle patrouille dans l'école, c'est normal qu'elle soit attiré par tout ce qui lui semble anormal.
- Effectivement, c'est un animal intelligent. Elle pourrait nous aider à savoir quand une menace est sur le point d'apparaître. Mais elle est différente de sa mère, Miss-Teigne, qui nous avertissait avant qu'un danger se présentait. Ode se contente d'aller voir ce qu'il se passe, sans prévenir personne. Plus que jamais nous avons besoin qu'elle fasse son rôle de surveillante, je compte sur toi Soonyoung pour lui apprendre cela.
Il sentit sa gorge s'assècher, au contraire de ses mains qui devenaient moite à force d'être tripoté dans son dos. La comparaison entre Ode et sa mère lui perça le coeur, d'abord parce-qu'il avait été très ami avec Miss-Teigne, sa mort le marquait encore terriblement, ensuite car il était vrai que Ode lui différait en tout point. Elle était fragile de nature, souvent fatigué et faiblarde, mais incroyablement intelligente et surtout très désobéissante.
Ode n'en faisait qu'à sa tête, elle vivait comme bon lui semblait et ne prêtait attention à aucun ordre qu'on essayait de lui implanter. Les humains semblaient la désintéressé, elle se pointait quand il se passait quelque-chose d'anormal mais ne réagissait pas, elle ne se laissait pas beaucoup approcher, encore moins caresser.
Soonyoung la nourrissait, mais leur relation s'arrêtait là. Et il en était le premier attristé. Il était très proche de tout les animaux qui vivaient autour de l'école, mais ne parvenait pas à créer de lien avec celle qui se trouvait être la fille d'une précieuse amie défunte.
- C'est que... J'ai déjà essayé de lui apprendre mais Ode est... Elle est spéciale, ses comportements sont aléatoires et difficile à gérer, expliqua-t-il.
- C'est votre travail pourtant de dresser des animaux, ça ne devrait pas être compliqué de pousser un simple chat à vous obéir, intervient Beomgyu.
Il sembla vouloir ajouter quelque-chose, mais se reçu un coup de coude ainsi qu'un regard sévère de la part de Soobin.
Soonyoung essaya de ne pas relever les paroles du garçon, conscient qu'il démontrait une nouvelle fois son incompétence. Il avait beau avoir été très proche de Miss-Teigne, les choses ne se déroulait pas comme il le faudrait avec Ode. Cette boule de poile blanche n'agissait pas comme un chat ordinaire, elle ne chassait pas, elle ne miaulait pas, et passait la plupart de ses journée à se poser dans un coin à observer ce qu'il se passait autour. Il avait beau la détailler, il ne la comprenait pas.
Elle était l'un des indices de ses faiblesses. En tant que garde forestier de l'école, il ne parvenait pas à l'harmonie avec tout les animaux, et il savait que les élèves regrettaient le défunt Hagrid.
Soonyoung n'était qu'un remplaçant dans tout leurs coeurs et leurs esprits. Même dans le sien, il avait l'impression de ne pas être à sa place, de ne pas se tenir à la bonne hauteur. Il observait Jihoon et Seokmin qui s'en sortaient si bien, il observait ses amis arrivé récemment qui faisaient déjà de meilleurs orateurs que lui.
À Poudlard, Soonyoung avait toujours l'impression d'être un mouton noir. Même quand il n'était plus un élève.
Il releva la tête, présenta un grand sourire, épaules redressées et tentant de dégager l'aura la plus confiante qui lui était permise.
- Je vais m'occuper de Ode et la pousser à nous prévenir lorsqu'elle repère un intru. Je ferais de mon mieux.
Et il se retourna, prit la porte à une telle vitesse que personne n'eu le temps de lui répondre quoi que ce soit. Il ne voulait pas que quiconque voit son sourire se briser, ni constater qu'il se retenait de pleurer.
Il ravala ses larmes, se trouvant pitoyable, et n'ayant aucune idée de ce qu'il devait faire maintenant.
Enquêter, éduquer Ode, apprendre à être un bon professeur, un bon adulte... Il était perdu, complément perdu.
- Monsieur Kwon ! Soonyoung !
Il se figea, surpris d'entendre un pas de course derrière lui. Une personne l'avait suivit, une personne courait pour le rattraper, une personne pour qui marcher était déjà suffisamment compliqué.
Il se retourna pour voir Beomgyu ralentir au milieu de sa course, essouflé mais surtout boiteux. Soucieux de voir la douleur sur son visage il se dirigea vers lui et le rattapa à moitié lorsqu'il se laissa tomber en soupirant. Épuisé par son maigre effort.
- Je voulais... Je tenais à m'excuser, j'ai manqué de tact, et de respect, et... je suis désolé, je sais que j'agis comme un petit con parfois... Souvent même... Soobin arrête pas de me le dire et...ouais, je suis désolé.
Le garçons parlait entre deux respirations chaotiques, et une rougeur sur son visage qui ne semblait pas être le fruit de sa fatigue. Il était mal à l'aise de reconnaître ses tords, honteux d'avoir à s'excuser, gêné de se rendre compte qu'il avait mal agit.
Son effort réchauffa un peu le coeur de Soonyoung, qui tapota le haut de la tête de son élève.
- Ce n'est rien, ne t'en fais pas. Et puis tu as raison, c'est mon travail.
Beomgyu afficha une moue contrarié, avant de soupirer de nouveau.
- Vous le faites bien, ce travail, vraiment. Et on en est tous conscient. Tout le monde adore vos cours. Et puis... Vous n'êtes pas beaucoup plus vieux que moi, j'imagine que ça doit être compliqué... De jouer à être adulte.
"Tu ne peux pas savoir à quel point' Avait-il envie de répondre, mais il se retient. On lui avait dit, pendant sa formation, qu'il n'y avait rien de pire pour un professeur que d'admettre ses faiblesses et ses difficultés devant un élève.
Pourtant Soonyoung en aurait bien envie, d'affirmer haut et fort à quel point c'était difficile, à quel point il travaillait dur et à quel point rien ne semblait se dérouler comme il le voudrait. Il aimerait se plaindre, pouvoir souffler devant quelqu'un qui comprendrait.
Oui, c'est dur de jouer à être adulte, c'est fatiguant de devoir grandir, de ne plus être un enfant. Oui, il était épuisé, dépaysé, dépité, perdu.
- Au fond on est tous un peu paumé, hein ? Tout vos amis aussi, ils jouent les adultes, ça se voit. Mais au fond vous êtes tous aussi paumé que nous, affirma Beomgyu.
Il voudrait acquiesçer, confirmer qu'ils étaient tous sur le même bateau, tous aussi déboussolé. Se mettre à la hauteur de ce garçon, et lui dire qu'ils se ressemblaient tout les deux.
Ils avaient peur, et ils combattaient cette peur par la rage. Soonyoung comprenait Beomgyu mieux que quiconque, contrairement aux autres professeurs il ne le reprimendait jamais, il ne le blâmait jamais de la manière dont il agissait et parlait. Parce-qu'il s'était retrouvé à sa place, et qu'il savait que c'était difficile de se sentir dépassé par tout ce qui nous entoure.
- Malheureusement, quand on obtient certain statut on ne peut plus se permettre d'être paumé, ou d'avouer qu'on l'est. On est là pour vous aider, pour vous soutenir, et on le fera de notre mieux, répondit-il.
Il aperçu la lueur de déception dans les yeux de son élève, qui comprenait alors que Soonyoung ne pouvait pas se placer à sa hauteur, qu'il n'avait pas le droit de se montrer complice avec leurs problèmes mutuels.
Ils étaient un professeur et un élève. Un adulte et un adolescent.
- J'aime pas les adultes en général, justement parce-qu'ils se prennent trop au sérieux. Ne faites pas ça, je vous aime bien, alors ne devenez pas trop sérieux, répliqua Beomgyu, avec un petit sourire.
Puis il s'éloigna, retournant vers le bureau. Soonyoung le regarda boiter, il l'écouta retenir sa respiration erratique et fatigué, et sentit son coeur se serrer.
Peut-être devrait-il ajouter quelque-chose ? Jihoon et Seokmin auraient su quoi faire eux, ils auraient su quoi dire.
Il se détourna, prêt à rejoindre sa chambre, mais alors son regard croisa celui de Ode. La petite boule de poil se tenait assise au-dessus d'une statut, le fixant de toute sa hauteur, jugeant ses gestes, étudiant chacun de ses mouvements, évaluant le rythme de chacune de ses respiration.
Pour la première fois depuis qu'il la connaissait, il se sentit mal à l'aise en sa présence, et un long frisson crispa la peau de son dos.
"Qu'est-ce que tu fiches ? Pourquoi est-ce que tu te demandes ce que ferais les autres ?" Semblait lui demander Ode, avec un regard sévère.
Soonyoung fit alors demi-tours, accouru vers Beomgyu qui avait à peine traversé deux mètres, et souleva son bras sur ses épaules.
- T'as raison, c'est épuisant de jouer à être adulte, c'est épuisant d'essayer d'être sérieux, murmura-t-il.
Son élève ne répondit pas, mais tout deux échangèrent un même sourire amer. Ils étaient perdu et acculé.
Mais surtout, ils ne voyaient pas la profondeur du danger dans lequel ils ne faisaient que tomber.
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