10

~Seokmin~

Lorsqu'aucun élèves ne courait dans les longues allées qui bordaient les jardins, ne discutait entre deux salle de cours, n'etudiait dans la bibliothèque ou ne déjeunait dans la grande salle, Poudlard ressemblait plus que jamais à un château abandonné et hanté.
Hanté il l'était, chaque jour des fantômes croisaient notre chemin, ils nous saluaient, engageaient la conversation, ou faisaient mine d'être pressé alors que rien ne les attendait jamais nul part. J'avais grandi en les regardant voler entre les murs, j'avais grandi en les voyant se mêler aux élèves et professeurs de Poudlard, et surtout, j'avais grandi dans ces vastes couloirs poussiéreux. Moi aussi, parfois, j'avais l'impression d'être un fantôme de l'école, j'avais l'impression d'avoir toujours été là, d'être toujours là, même quand les autres élèves partaient.

Parce-que ma mère ne quittait presque jamais l'école et que moi, en bon fils, je restais avec elle.

Nous avions bien une maison, une grande et chaleureuse maison, placé dans le village à deux pas du château. Mais nous y allions si rarement que les quelques elfes qui entretenaient le mobilier semblaient les principaux résidants.
Cette demeure avait été légué par mes grand-parents maternelle, ma mère y avait toujours vécu avec eux, puis avec mon père. Elle affirmait qu'elle restait à Poudlard pour le travail, pour des copies à corriger, des examens à préparer, pour aider le vieux Dumbledore.

Mais je n'étais pas dupe, elle n'aimait pas rester là-bas car cette maison lui rappelait toute les personnes qu'elle avait perdu. Ses parents, mon père, ou même encore des amis qui venaient lui rendre visite et qui avaient perdu la vie durant la guerre qui précédait ma naissance.

Parfois je me disais que si je n'étais pas là, ma mère serait seule au monde.

Pour ma part, dans cette maison je n'avais aucun mauvais souvenir, aucun fantôme du passé qui pourrait me rendre malheureux. Bien au contraire, quand je m'y trouvais j'avais l'impression d'être plus proche de cette famille que je n'avais pas connu.
Mais ce n'est pas pour autant que j'y allais souvent. Même enfant j'insistais pour venir à Poudlard avec ma mère.

Parce-que je ne voulais pas qu'elle soit seule.

Parce-que je ne voulais pas être seul.

Au final, je n'étais jamais plus seul que quand les vacances venaient et que les élèves désertaient leurs dortoirs. Les vacances de Noël étaient pire que toute les autres, puisque c'était les seules où même les professeurs s'en allaient. Parfois un ou deux adultes restaient, ou alors un ou deux élèves qui ne pouvaient pas rentrer chez lui, mais ces choses là se faisaient rare.
Je me souviens que lors de ses premières années le célèbre Harry Potter restaient au château pendant les périodes d'hiver, n'ayant pas envie de rentrer chez son oncle et sa tante. J'étais bien plus jeune à l'époque, mais il représentait une petite compagnie. Mais ça n'avait pas duré toute sa scolarité, il avait fini par être invité chez la famille de Ron Weasley.

Cette année, Dumbledore, le professeur Rogue, ma mère et moi étions les seuls êtres humains présent dans l'école. Une semaine s'était écoulé où je n'avais croisé les trois qu'aux repas, tous occupé à je ne sais quoi.
Enfin si, je savais. Ils préparaient la guerre, et considéraient évidemment que je ne devais pas assister à leurs conversations.

C'est donc dans la solitude que je passais mes journées. Je me baladais, je lisais, j'allais construire des bonhommes de neige, je discutais avec les fantômes, et je m'occupais des chatons de Miss-Teigne. J'écrivais à mes amis, de longues pages pour rien dire, parce-qu'il ne se passait absolument rien. Et eux me racontaient leurs superbes vacances avec leurs familles, leurs parents, leurs grands-parents...

- Dis, ils sont passé où tout les autres ? Me demanda Jungkook.

Je soupirais, à la fois amusé et dépité. Le fantôme de mon camarade se trouvait allongé sur le bureau de ma mère, la tête penché dans le vide, le regard perdu sur les murs sans intérêt. Durant mes longues journée d'ennui il avait été ma seule compagnie, je le voyais apparaître et disparaitre n'importe où, n'importe quand.
Et, à chaque fois, il me posait cette question. Sa mémoire de fantômes lui faisait cruellement défaut.

- C'est les vacances de Noël, alors ils sont rentré chez eux, voir leurs familles, répondis-je, pour la vingtaine fois au moins.

- Oh, et pourquoi tu es là toi ? Demanda-t-il.

- Parce-que l'unique membre de la famille qu'il me reste est à Poudlard.

Il hocha la tête, puis observa avec attension une photo de ma mère et moi, affiché sur un coin du bureau. Il se murait dans le silence, et j'en profitais pour terminer de nourrir les chatons. Miss-Teigne n'était plus toute jeune, avec son corps maigre et faiblissant il lui était difficile d'apporter des repas suffisant à ses bébés. Avant de s'en allez Soonyoung m'avait personnellement montré comment prendre soin de ces quatre minuscules boules de poils, je m'y appliquait avec sérieux.
Trois des chatons grandissaient bien et se montraient en parfaite santé, ceux dont le pelage étaient aussi gris et rêche que celui de leur mère. Ils miaulaient fort, se déplaçaient avec de plus en plus de facilité, et avaient ouvert leurs paupières sur d'adorable petits yeux noirs. Mais le dernier membre de la porté, celui aux poils blanc et épais, commençait peu à peu à m'inquiéter. Ma mère m'assurait souvent qu'il n'était pas malade, mais il ne bougeait presque pas, n'ouvrait que rarement la bouche et maintenait ses yeux clos. Si son petit ventre ne se soulevait pas avec son souffle, on pourrait le croire mort.
Mais peut-être lui fallait-il simplement plus de temps qu'à ses frères et/ou soeurs, peut-être était-il juste un peu plus faible que les autres.

- Va à ton rythme, c'est pas grave d'être un peu en retard, murmurais-je, en lui caressant la tête.

Bientôt les quatres chatons eurent terminé leur repas, et je décida qu'il était temps pour moi de prendre le mien. Mon ventre grognait de plus en plus fort, et j'entendais Jungkook rire à chaque gargouillement. Il murmurait que le bruit ressemblait à un tremblement de terre et rentrait la main dans son estomac sans matière, en demandant ce que ça faisait d'avoir faim, ou de manger, ou d'être en vie.

Parfois, il me faisait de la peine.

Il flotta derrière moi quand je quitta le bureau, on discutait de tout et rien, surtout de rien, puisque les fantômes n'avaient pas beaucoup de sujet de conversation. Mais c'était agréable, de parler sans réfléchir, d'apprécier le calme en échangeant sur des banalités.

Voilà comment se déroulait mes vacances, calme, simple, sans grand intérêt.

Du moins, jusqu'à cet instant précis.

- C'était ici.

Je m'arrêtais, alors que Jungkook avait subitement coupé notre débat sur la couleur de cape qui allait le mieux à Dumbledore. Il s'était figé dans le couloir, posé au sol, le regard fixé sur un coin du mur.

- Ici quoi ? Demandais-je.

Il ne repondit pas et, comme s'il avait oublié être un fantôme capable de voler, marcha jusqu'à l'endroit qu'il regardait. Il s'accroupit, effleura la pierre de ses doigts sans matière.

Et ce fut comme si mon coeur tombait dans mon estomac quand je compris quel était cet endroit.

- Il y avait quatre personnes avec moi, murmura-t-il. Ils ont commencé à partir, j'ai dis quelque-chose, puis il y a eu un rayons noir et... Plus rien.

Je reculais d'un pas, sans pour autant savoir si je voulais prendre mes jambes à mon coup ou rester pour entendre la suite.

Si je voulais l'entendre se souvenir, ou préférer rester ignorant.

- On se disputait, moi et une des quatre personnes, on criait si fort l'un sur l'autre que...

Sa voix était haché, tremblante, et pourtant si claire qu'elle semblait résonner entre les vastes parois. Moi je ne pouvais pas bouger, je fixais le coin du mur où Jungkook était accroupie, la terreur battant dans ma poitrine.

C'est ici qu'il avait été retrouvé.

Son corps, sans vie, adossé contre le mur.

- On se disputait, puis Il a commencé à partir, j'ai crié quelque-chose et... Et il y a eu le rayon noir.

Il leva les yeux vers moi, comme s'il attendait que je lui explique les éclats de souvenirs qui lui avaient traversé l'esprit. Il attendait que je lui dise la vérité, une vérité que je n'avais pas.

Et que, en y repensant, je n'avais pas envie de connaître.

Mon doigt se pressa contre mes lèvres, ma tête rempli du visage de Joshua, mes sens rempli du souvenirs de lui et moi en train de nous embrasser. Ma mémoire envahi par l'image de ce garçon, un livre de magie noire à la main, qui jetait un sort au corps inconscient de Seungcheol.

Quatre personnes ? C'est ce que Jungkook venait de dire, il y avait quatre personnes avec lui au moment de sa mort.
Joshua en faisait-il partit ? Avait-il été témoin ?

Avait-il... été à l'origine de ce fameux rayon noir, qui ne pouvait n'être que le sort de mort qui avait fusé dans ce couloir ?

- Qui était cette personne avec qui tu te disputais ? Demandais-je, si bas que j'entendais à peine ma propre voix.

- Je crois que je tenais à lui, répondit le fantôme. Que je tenais très fort à lui... Mais je ne sais pas de qui il s'agit.

Il se leva, observa une dernière fois l'espace qui avait recueilli son dernier souffle, puis tourna lentement la tête vers le bout du couloir. Son index pointé dans le vide lointain, il continua:

- "Si tu n'arrêtes pas tes conneries je te denoncerais, je vous denoncerais tous", c'est ce que je lui ai dit. Si seulement... Si seulement je me souvenais de son visage... De leurs visages à tout les quatre.

Puis, sans me laisser le temps de reprendre mes esprits et tenter de lui répondre, de poser une question, d'éclairer sa mémoire vacillante, il rentra dans le mur et disparu. J'attendis quelques secondes, immobile, seul, persuadé qu'il reviendrait avec de nouvelles brèches de souvenirs.
Mais il était bel et bien partie, emportant avec lui les réponses qui demeuraient cachées dans le trou noir de sa tête. Derrière lui ne restait que ses paroles, qui résonnaient entre les murs comme des échos.

Quatre personnes, une disputes, un rayon noir...

"Je vous denoncerais".

Jungkook avait-il supris un groupe de quatre Mangemort au sein de l'école ? Sa menace était-elle la cause de sa mort ? Certainement, seulement j'avais du mal à imaginer que quatre personnes avaient été témoin de sa mort.
Quatre personnes qui vivaient parmi nous en toute tranquilité, comme si rien ne s'était produit, qui avaient assisté à l'enterrement et la veillé que nous avions organisé pour notre camarade tragiquement parti.

Regrettaient-ils ? Culpabilisaient-ils ? J'avais envie de croire que oui, j'avais envie de croire qu'ils n'avaient pas eut le choix. Mais ma mère disait souvent que la majorité des Mangemorts étaient des êtres sans pitié, sans honneur, sans peine pour les vies qu'ils prenaient. Pour eux tuer revenait à écraser un insecte sur leur chemin, tout ceux qui s'opposaient à eux devenaient des êtres inférieurs, tuer revenait à une fierté. Ils étaient cruel, manipulateurs, violent, et n'agissaient que pour le désir de puissance de leur maître.

Je repensais à Joshua, à la guérison "miraculeuse" de Seungcheol, à notre baiser.

"Tu n'as pas besoin d'être plus que toi".

Il devait y avoir une explication, il ne pouvait pas juste être un mage noir. Peut-être avais-je tiré des conclusions hâtive, peut-être avais-je mal interprété.

Ou alors, peut-être se moquait-il de nous tous depuis le début.

Peut-être se moquait-il de moi.

- Tu es stupide, Seokmin, murmurais-je, pour moi-même.

Je fis demi-tour, l'appétit coupé et mal à l'aise dans ce couloir qui empestait la mort.

- Il t'a embrassé et ne t'a plus parlé depuis, c'est la preuve qu'il en a rien à foutre de toi.

Voilà que je parlais tout seul, que je m'insultais tout seul. Ça faisait mal, ça faisait du bien, de me cracher au visage tout ce que je ne voulais pas admettre.

- Tu croyais vraiment que tu comptais pour lui ? Que ce baiser avait une quelconque signification ?

Joshua était l'une des quatre personnes témoin de la mort de Jungkook, même si j'essayais de me dire le contraire ça ne pouvait pas être plus évident. Tout concordait, le livre de magie noire, le sort puissant jeté à Seungcheol, même le fait qu'il ait proposé de m'aider dans la mission confié par ma mère et Dumbledore...

Il avait juste fais ça pour qu'on observe nos camarades ensemble, et que je ne pense pas à le soupçonner, lui.

Parce-qu'il était un Mangemort, parce-qu'il était un ennemi.

Parce-qu'il se moquait de moi depuis le début.

Quand il avait pressé ma blessure faite par le Troll, quand il avait pleuré dans mes bras, quand il m'avait invité au bal, quand il m'avait embrassé... Rien n'était sincère ?

Il avait soigné Seungcheol. Pourquoi l'avait-il soigné ? L'avait-il vraiment soigné ?

Je m'embrouillais tout seul, entre ce que je croyais comprendre et ce que j'ignorais encore. Je sentais les larmes dévaler mes joues, mes lèvres trembler, mon cerveau jouer et rejouer encore la scène du baiser.

Est-ce qu'il agit ainsi avec moi car je suis la faiblesse de ma mère ?

À cet instant, cet instant précis, je devrais courir vers le réfectoire, trouver les trois derniers adultes présent dans le château et tout leur révéler. Je devrais leur dire que j'avais vu Joshua utiliser un puissant sort de magie noir, je devrais leur dire qu'il était louche, qu'il fallait enquêter sur lui.

Je devrais le dénoncer.

Obéir à ma mère, honorer la mémoire de mon père, et le dénoncer.

Mais, alors que mes pieds foulaient l'entrée de la bibliothèque sans l'avoir vraiment décidé, je me rendis compte que j'en étais incapable.

Parce-que j'étais un idiot.

Parce-que je voulais croire qu'il m'avait embrassé sans arrière pensée.

Parce-que je voulais croire qu'il n'était pas un ennemi.

Et, surtout, parce-que je l'aimais.

J'entrais dans la pièce secrète, bien décidé à me cacher ici tout le reste de la journée. Car si je croisais ma mère, Dumbledore, ou même le professeur Rogue, je serais incapable de rester impassible.
Je me mettrais à pleurer et à tout leur raconter.

Dans cet endroit au moins je pouvais être seul, entouré des treize objets qui décoraient les lieux, installé sur les confortables fauteuils. Si je fermais les yeux je pourrais presque croire que tout mes amis étaient présent, je pouvais presque imaginer Jihoon en train de jouer du piano, nos voix qui s'accordaient à la mélodie dans une mauvaise mais amusante harmonie. Je nous voyais parler, rire, nous confier, jouer, tricher, nous disputer.

Je pouvais essayer d'oublier Joshua, tout en l'imaginant comme partie intégrante du groupe.

Je pouvais presque oublier qu'il était un potentiel ennemi.

Un bruit me fit rouvrir les yeux, et je découvris que l'un des objets était tombé par terre. Une bague, une toute petite blague, de laquelle je m'approchais doucement.
Ce n'était qu'un anneaux en argent, sans grand intérêt à première vu. Simple, discret, oubliable.

Je l'enfila à mon doigt, et une vive lumière fusa dans l'espace. Elle fut si brève qu'on aurait presque dit le flash d'un appareil photo, quand je retrouva une vision nette je me rendis compte qu'elle n'était autre qu'un éclat de magie.

La bague entourait toujours mon doigt, mais sur sa couleur argenté s'était gravé une suite de nombre, de un à treize.

Et sur le sol, douze autre anneaux similaire étaient apparu.

Sans être capable de contrôler quoi que ce soit, de prendre le temps de réfléchir ou de prendre conscience qu'il se passait quelque-chose d'étrange, les larmes dévalèrent de nouveau mon visage tordu. Je me laissais tomber contre une étagère et pleurais, encore et encore, sans savoir quelle émotion provoquait cette folie de sanglot.

Tout ce dont j'étais persuadé à cet instant, c'est que l'une de ces bagues était pour Joshua.

Est-ce que cette pensée me rendait heureux ? Triste ? Aucune idée, je pleurais seulement.

Parce-que je n'avais aucune idée de ce que je pouvais faire d'autre.

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