XX - Retour à l'hôpital
⚠ TW : CANCER
Des bips réguliers viennent me réveiller. J'ouvre les yeux, mais je suis immédiatement ébloui par la lumière du jour alors je décide de les refermer en grognant de mécontentement.
– Nathanaël ? T'es réveillé ?
Je reconnais la voix de ma grande sœur. Je rouvre les yeux et je la trouve assise sur une chaise, juste à côté de mon lit. Un sourire naît sur ses lèvres et elle se penche vers moi pour m'embrasser délicatement sur la joue.
– Je vais aller chercher Oscar, me dit-elle en souriant.
J'allais lui poser une question, mais elle est déjà sortie. Elle revient dans la chambre une ou deux minutes après, accompagnée d'Oscar. Ce dernier court jusqu'à moi et me serre de toutes ses forces contre lui.
– J'ai eu tellement peur... murmure-t-il.
Je lui lance des dizaines d'excuses, mais il m'arrête en m'embrassant.
– Je vous gène...? intervient Elisa. Je peux vous laisser si vous voulez.
– Non, attends. Tu peux m'expliquer ce qu'il s'est passé ? Je m'en souviens plus vraiment...
– Eh bien, t'as fait une crise d'épilepsie. Les pompiers sont venus peu de temps après et ils t'ont directement emmené ici. Les médecins veulent te garder encore quelques jours ici.
Elle s'arrête un instant et j'ai l'impression qu'elle veut ajouter quelque chose, mais elle ne dit rien d'autre.
– Je vais vous laisser, dit-elle avant de sortir de la chambre.
Je lâche un soupir. Oscar se racle timidement la gorge et je rapporte mon attention sur lui. Il revient vers moi et je prends doucement son visage entre mes mains alors qu'il se met à pleurer silencieusement.
– Pleure pas...
– Je pleure pas.
– Ah oui ? C'est les vagues de tes yeux qui viennent s'échouer sur tes joues ?
– Je pensais plutôt à la pluie.
– Il pleut des larmes sur ton visage.
– Quand est-ce que tu arrêteras d'être aussi poétique ?
– Quand je serais mort, peut-être.
Un voile vient assombrir les yeux d'Oscar et je regrette immédiatement ce que j'ai dit.
– Je suis désolé...
– Tu m'as fait tellement peur... Je t'aime, tu sais.
– Je t'aime aussi.
Il se rapproche de moi et je le serre de toutes mes forces contre moi en laissant échapper quelques larmes.
– Je te l'avais dit, Oscar... Je t'avais dit que je pourrais très bien retourner à l'hôpital et que ça pourrait mal finir...
– Mais c'est pas fini, t'es encore là.
– Pour l'instant, oui.
– Arrête, s'il te plaît... Dis pas des trucs comme ça, je suis sûr que tu vas vite sortir d'ici. Et puis c'était juste une crise d'épilepsie, ça va aller mieux non ?
Je ne trouve pas le courage de lui dire que la dernière fois que j'ai fait une crise d'épilepsie c'était juste avant que j'apprenne que j'ai un cancer.
Je me contente de lui sourire timidement alors qu'il attrape mon visage entre ses mains. Je tends ma main vers sa joue rosie et je la caresse doucement du bout de mes doigts. Ses yeux bleus viennent s'ancrer dans les miens et glissent quelques fois sur mes lèvres, comme si l'envie de les embrasser est plus forte que lui.
– Je peux ? me demande-t-il timidement.
En guise de réponse, je lui souris. Il rapproche son visage du mien et vient poser ses lèvres sur les miennes. Ma main, qui était toujours posée sur sa joue, remonte vers ses cheveux bruns et les caresse doucement.
– Je peux me mettre sur le lit ? me demande timidement Oscar en éloignant mes lèvres.
Je hoche la tête affirmativement et il vient finalement s'asseoir sur le bas de mon ventre, en faisant attention à ne pas me faire mal. Il approche son visage du mien et nos lèvres reviennent se rejoindre. Ses mains caressent mon visage doucement avant de descendre et de parcourir le reste de mon corps. Je me remets à caresser ses cheveux alors que sa langue demande l'accès pour pouvoir rejoindre la mienne.
Mais d'un coup la porte de la chambre s'ouvre. Oscar s'éloigne brusquement de moi et nous tournons tous les deux la tête vers la porte pour voir qui est entré. C'est mon père.
– Excusez-moi, les enfants. Je ne savais pas que...
– Je suis désolé, monsieur, bafouille Oscar alors qu'il est complètement rouge de honte.
Il quitte mon lit et va s'asseoir sur la chaise, sur laquelle Elisa était assise auparavant, et se met à regarder le sol en tordant nerveusement ses doigts. Le pauvre, il est complètement gêné.
Mon père s'approche de moi, vient s'asseoir à côté de moi sur mon lit et m'embrasse sur mon front en souriant.
– Tu te sens comment ? s'inquiète-t-il.
– Ça va. Et toi, qu'est-ce que tu fais là ? je lui demande en sachant très bien qu'il ne s'occupe pas du service pédiatrique.
– Je suis juste venu te voir, répond-il en souriant. Oscar, tu pourrais nous laisser seuls quelques minutes, s'il te plaît ? demande gentiment mon père à l'adresse de mon copain.
– Oui, bien sûr. Et désolé pour quand vous êtes venus... Je...
– Ne t'excuse pas, l'arrête mon père. Vous avez bien le droit de vous aimer.
Il sourit à Oscar et ce dernier sort de la chambre, en refermant la porte derrière lui, pour me laisser seul avec mon père.
– Tu voulais me dire quelque chose ? je l'interroge.
Son sourire s'efface automatiquement et son visage devient grave. Je sais déjà qu'il va m'annoncer quelque chose de grave. Il fait toujours cette tête là avant de nous annoncer une mauvaise nouvelle.
– Les médecins t'ont fait des radios quand tu es venu ici, par rapport à ta tumeur. Ils t'ont fait une IRM.
Je fronce les sourcils en ne voyant pas quel est le rapport.
– Pourquoi ?
– Je te signale que tu as fait une crise d'épilepsie, quand même. Tu ne t'es pas réveillé après la première crise et tu en as fait une seconde. Le lycée a appelé les pompiers, qui t'ont emmené ici, et ils m'ont prévenu.
Il marque un petit temps de silence. Je sens mon cœur qui bat à tout rompre tellement j'ai peur de savoir ce qu'il va me dire. C'est quelque chose de grave, j'en suis certain.
– Ils t'ont diagnostiqué un cancer métastatique.
– C'est-à-dire ? je lui demande en ne sachant pas ce que c'est.
– C'est-à-dire que ton cancer est arrivé en grade 4 et les cellules cancéreuses, les métastases, se sont développées et ont contaminé d'autres tissus.
Les mots me manquent, mais les larmes, elles, ne manquent pas. Elles inondent mes yeux et ravagent mes joues. Mon père attrape ma main et la serre contre la sienne.
– Ça se guérit ?
– Les médecins vont t'opérer dans cinq jours. Si ça ne fait rien, tu vas devoir refaire de la chimio.
Le contact de sa main ne me suffit plus. Je viens me blottir dans ses bras et sanglote bruyamment. Il me serre fort contre lui et reste silencieux, on entend seulement mes sanglots.
– J'en ai marre. Je veux juste aller bien et en finir avec ce foutu cancer.
– Ça va bien se passer, mon grand.
Je secoue négativement la tête en continuant de sangloter.
– Tu vas t'en débarrasser, d'accord ? Je te promets que tu vas t'en débarrasser.
Il relâche doucement notre étreinte et m'embrasse sur le crâne. Il attrape mon visage entre ses mains et essuie vainement mes larmes.
– Pourquoi tu nous as rien dit ? me demande doucement mon père.
– J'allais bien, papa.
– Non, tu savais bien que ça n'allait pas. Oscar nous a dit que tu étais tout le temps fatigué, que tu ne mangeais quasiment pas. Il nous a dit que tu as vomi avant de faire ta crise d'épilepsie et je t'ai entendu vomir l'autre soir en rentrant de votre soirée. T'as beau avoir bu un peu et ne pas tenir l'alcool, tu savais très bien que ce n'était pas à cause de ça que tu vomissais.
– Je suis vraiment désolé, je lui dis en sentant ma voix qui tremble.
– Mon grand, je ne disais pas ça pour t'engueuler. C'est juste qu'il faut que tu nous le dises quand ça ne va pas. Même si tu as l'impression que ce n'est pas grave ou important.
J'essuie mes larmes alors que mon père me relâche et me sourit tristement. Je me déteste intérieurement de le rendre mal comme ça.
– On s'inquiète pour toi.
– Je suis vraiment désolé, je répète simplement.
– De nous inquiéter ? C'est normal qu'on le soit parce que tu es notre enfant et qu'on t'aime.
– C'est pas une raison pour que vous soyez dans cet état-là à cause de moi.
Il attrape une nouvelle fois ma main dans la sienne et la serre dans la sienne.
– C'est pour toi qu'on se bat. On ne te laissera jamais tout seul avec ton cancer, on sera toujours là pour toi. Je te le promets. Et même si ça nous inquiète ou si ça nous épuise.
Je viens me blottir dans ses bras. Il semble un peu surpris, mais il répond à mon étreinte. Je reste un long moment dans ses bras, parce que ça me fait du bien d'être avec lui.
– Est-ce que maman et Elisa le savent pour l'opération ? je lui demande quelques minutes plus tard, lorsque je me suis éloigné de lui.
– On l'a appris ensemble.
– Je vais devoir le dire à Oscar, alors...
– Ça va aller, me dit-il en tentant de me rassurer.
– D'ailleurs, en parlant de lui... C'est pas ce que tu croyais quand t'es venu... On était juste en train de s'embrasser...
– Nathanaël, arrête. Je ne crois rien du tout.
– Mais il était dans une position bizarre, je veux pas que tu t'imagines des trucs !
– Je ne m'imagine rien du tout. Et puis tu as encore le droit de faire ce que tu veux avec lui.
Je rougis de honte, ce qui fait rire mon père. Et ça me fait incroyablement bien de l'entendre rire. Il travaille énormément et par conséquent on ne passe pas beaucoup de temps ensemble. Le seul point positif de mon séjour à l'hôpital est que je vais pouvoir voir un peu plus mon père, puisqu'il travaille ici.
– Je suis content que ça aille bien entre vous deux.
– Ça te gène pas que je sorte avec un garçon ?
– Nathanaël, je t'ai déjà dit que non, ça ne me dérange pas. Tant que tu es heureux avec lui, c'est le principal.
– Et maman, ça la dérange ? je m'inquiète.
– C'est surtout que ça l'inquiète. Moi aussi, d'ailleurs. Mais on sait bien que s'il y avait un problème tu nous en parlerais.
– Oh, à ce propos...
J'hésite pendant un long moment à continuer ou non et je trouve finalement le courage de continuer.
– Tu sais, Oscar, c'est le seul dans la classe avec qui je m'entends. Enfin je veux dire...
Le visage de mon père s'attriste brusquement et je m'en veux d'avoir commencé à lui dire. Sauf que maintenant que j'ai commencé, je dois finir.
– Les autres se moquaient de moi. Et j'étais tout le temps seul avant qu'Oscar arrive.
– Pourquoi tu nous as rien dit ?
– Je voulais pas vous inquiéter encore plus. Je pensais pas que c'était important.
Mon père vient me prendre dans ses bras et me serre avec force contre lui.
– Bien sûr que si c'est important, mon grand. Tu aurais dû en parler avant...
– Désolé...
Il m'embrasse sur la tête et reste silencieux pendant un petit moment.
– Ils te faisaient quoi au juste ?
– Ils se moquaient juste de moi. C'est pas grave, papa.
– Nathanaël, tu te rends compte que c'était du harcèlement ?
– Papa, je t'assure que c'était pas grave.
– Bien sûr que si.
Je ne réponds rien alors qu'il m'embrasse sur la tête. Il me relâche et attrape simplement mon visage entre ses mains en souriant.
– Je suis vraiment désolé que tu aies dû attendre de rencontrer Oscar pour qu'on arrête de s'en prendre à toi.
– Ça a toujours été comme ça, tu le sais bien. Personne n'avait envie d'être ami avec moi.
– Et j'en suis vraiment désolé, Nathanaël.
Je reste silencieux alors qu'il me relâche en soupirant.
– Il va falloir que j'y retourne.
– Déjà ?
– J'essaierai de revenir tout à l'heure, me promet-il.
Il m'embrasse encore une fois sur mon front avant de me sourire.
– Je t'aime, mon grand.
– Moi aussi je t'aime, papa.
Il sourit encore une fois avant de sortir de ma chambre. Oscar en rerentre quelques instants après et s'approche directement de moi.
– Ça va ? s'inquiète mon petit ami.
Je me contente de hausser les épaules parce que j'avoue que je ne sais pas comment je me sens.
– Je peux te parler de quelque chose ?
– Oui, bien sûr.
Oscar vient s'asseoir sur mon lit. Il me regarde et attend que je continue de parler.
– Eh bien, mon cancer est arrivé en stade 4 et les cellules cancéreuses se sont développées et m'ont contaminé ailleurs.
Oscar reste silencieux et je vois qu'il se mord la lèvre.
– Ils vont te guérir ?
– Je me fais opérer dans cinq jours. Et si ça marche pas... chimio.
Il se rapproche de moi et me serre fort contre lui. On se fait un câlin pendant quelques minutes, et ça me fait incroyablement du bien.
– Je te promets que je vais venir te voir. Même si y'a les cours, je viendrais après.
– Oscar, t'es pas obligé...
– Si, m'arrête-t-il. T'es mon petit ami, faut que je sois là pour toi. Quoiqu'il arrive.
– Non, Oscar, s'il te plaît... J'ai pas envie que tu me vois quand je serais drogué aux médicaments, quand j'aurais encore plus la peau sur les os que maintenant, que je serais aussi livide qu'un mort et que je finirais mort.
– Dis pas n'importe quoi.
– C'est la vérité ! T'as vu comme je suis déjà ? Je tenais même plus debout, j'arrive même pas à respirer par moi-même et...
– Et quoi ? J'en ai rien à faire, je t'aime comme tu es.
– Oscar, je suis sérieux ! Je vais être horrible à voir ! Regarde comment je suis déjà, avec ma perfusion dans le bras et ma canule dans le nez parce que j'arrive même pas à respirer tout seul !
Il prend mon visage entre ses mains, un peu brutalement, et m'oblige à le regarder dans les yeux.
– Je t'aimerai toujours, quoiqu'il arrive. Je te le promets.
– Tu comprends pas...
– C'est toi qui comprends pas ! Je m'en fiche de savoir à quoi tu vas ressembler, je t'aime. Tu seras toujours beau à mes yeux.
Je lâche un soupir et j'évite de croiser son regard.
– Je t'aime Nathanaël. Et même si ce que t'as dit arrive, eh bien c'est pas grave. Je savais bien que t'es malade et donc que ça serait pas toujours simple. Mais c'est pas grave.
– Si ça l'est ! J'ai juste pas envie que tu subisses ce que mes parents et ma sœur ont subi. Oscar, je suis sérieux...
– Et je le suis tout autant.
– Tu regretteras quand tu verras que...
Je lâche un soupir et évite son regard.
– Je ferais mieux de crever maintenant pour t'épargner ça.
– Arrête, me demande-t-il froidement.
– Non. Ça réglerait tout et tu serais plus heureux sans moi. Je suis juste un fardeau pour tout le monde.
– Merde, mais Nathanaël, il faut que je te le dise combien de fois ?! Je t'aime. Je t'aime vraiment, je veux pas te perdre. Je veux pas perdre la seule personne qui m'aime et qui me rend heureux.
Je croise enfin son regard et je vois qu'il a les larmes aux yeux.
– Je t'aime aussi, je lui dis doucement.
– Je me bats avec toi, d'accord ? Je te laisserai pas tout seul avec cette merde.
Il dépose un baiser sur mes lèvres, mais au même moment son téléphone se met à sonner. Il s'éloigne de moi en soupirant et attrape son téléphone, situé dans la poche arrière de son jean.
– C'est ma mère, me prévient-il.
Il se lève de mon lit, s'éloigne un peu de moi et décroche. Je ne prête pas tant attention à ce qu'il dit puis il revient vers moi au bout de quelques petites minutes.
– Je vais devoir rentrer, m'annonce-t-il. Je leur avais pas dit que j'étais venu là, donc ils s'inquiètent...
– Oh... J'avais envie que tu restes.
– J'aurais préféré rester aussi... Mais je te promets que je reviens demain, après les cours.
– Oscar, si t'as pas le temps avec les cours, c'est pas grave tu sais.
– Si, je vais venir. T'es mon petit ami, je peux bien faire ça pour toi.
– Mais si t'es fatigué et que t'as pas forcément envie de venir, te force pas.
– Tais-toi, si je fais ça c'est parce que je t'aime.
Il se penche vers moi et m'embrasse.
– Je t'aime, Nathanaël.
– Moi aussi je t'aime.
– Fais attention à toi, s'il te plaît, me demande-t-il doucement.
– Promis. Fais attention, toi aussi.
– Promis. À demain.
– À demain.
Et je le regarde quitter ma chambre, le cœur lourd.
Je lâche un long soupir. Ça me rappelle toutes les fois où je suis venu ici et où j'étais resté tout seul longtemps. Mon père essayait toujours de venir me voir, mais je sais bien qu'il ne peut pas passer son temps avec moi. Et c'est pareil pour ma mère et ma sœur, elles sont occupées elles aussi.
J'essaie de passer le temps comme je peux. Heureusement que ma mère (ou ma sœur, je ne sais pas trop laquelle des deux) m'a emmené plusieurs livres, mon carnet et mon carnet à dessin. Au bout d'un moment j'entends mon téléphone vibrer et je l'attrape, espérant voir un message de la part d'Oscar, mais il vient de mon père.
Papa ♡
Finalement je n'aurais pas le temps de venir te voir ce soir, je suis vraiment désolé mon grand.
Moi
C'est pas grave, t'inquiète pas. Bon courage.
Papa ♡
Je t'aime Nathanaël. Ne l'oublie jamais.
Moi
Je t'aime aussi papa.
Je repose mon téléphone contre moi et lâche un petit soupir. Je sais bien que ce n'est pas de sa faute s'il y a autant de travail à l'hôpital, mais j'aurais bien aimé qu'il vienne un peu me voir.
Je passe le reste de la soirée seul, sauf au moment du repas où une infirmière vient me servir mon dîner, auquel je n'ai presque rien mangé. Sinon je ne vois personne d'autre.
Aux alentours de 22 heures, j'essaie de m'endormir sauf que je n'y parviens pas. Je n'arrête pas de repenser aux paroles dites par mon père. Je vais me faire opérer dans quatre jours. J'ai peur, extrêmement peur. Parce que je sais que ça peut mal se passer. Ça peut aussi bien se passer.
J'entends la porte de ma chambre qui s'ouvre et des bruits de pas qui s'approchent de mon lit.
– Je croyais que tu pouvais pas venir, je dis en sachant que c'est mon père bien que je tourne le dos à la porte et que je sois dans le noir.
Il n'y a que lui pour venir aussi tard, de toute façon.
– Excuse-moi, je t'ai réveillé ? s'inquiète-t-il.
– J'arrivais pas à dormir.
Je me retourne vers lui et je distingue dans le noir mon père qui s'est assis sur mon lit, près de moi.
– Je voulais juste venir te voir avant de rentrer.
– Merci, ça me fait du bien que tu sois là.
Il attrape ma main et la serre contre la sienne.
– Papa ?
– Oui, mon grand ?
Je sens les larmes me venir aux yeux et les mots restent coincés pendant quelques secondes dans ma gorge.
– Je... J'ai peur, je finis par dire d'une voix tremblante.
Il me prend dans ses bras et me serre plus fort contre lui alors que je laisse échapper quelques larmes.
– Ça va bien se passer, je te le promets.
– Non... J'en ai marre, papa. J'en peux plus de ce foutu cancer qui me détruit la vie.
– On va s'en débarrasser. Je te promets qu'on va se débarrasser de ce foutu cancer, Nathanaël.
Je laisse échapper un sanglot bruyant et mon père me serre plus fort contre lui.
– Ça me fait vraiment peur. C'est super dangereux de m'opérer...
– Je sais bien. Mais les chirurgiens savent ce qu'ils font et dis toi qu'après tu iras mieux.
Je ne lui réponds pas et me contente de soupirer alors qu'il m'embrasse sur la tête.
– Merci d'être là. Toi, maman, Elisa.
– Arrête de nous remercier. C'est normal qu'on soit là.
– Les parents d'Oscar sont pas là pour lui...
– Mais nous, oui.
Je souris à mon père et il m'embrasse une nouvelle fois sur le front.
– Tu peux rentrer, si tu veux...
– Tu as besoin que je reste ?
– Non, ça devrait aller. Rentre te reposer.
– Je commence à onze heures trente demain matin, mais je vais essayer de venir te voir avant.
– Si t'as pas le temps de venir, c'est pas grave.
– Nathanaël, arrête. Je peux bien prendre du temps pour venir te voir.
– Merci.
– À demain, mon grand. Je t'aime.
– Moi aussi je t'aime.
Il m'embrasse sur le front et s'éloigne de moi.
– Papa ? je le rappelle.
Je l'entends faire demi-tour et il attrape de nouveau ma main dans la sienne en attendant que je lui réponde.
– Est-ce que je suis un fardeau pour maman et toi ?
– Nathanaël... Pourquoi tu dis ça ?
– Parce que je vous inflige pleins de choses et... Je me sens mal à chaque fois. Je suis tellement désolé.
– Ce n'est pas de ta faute, mon grand.
– Je sais, mais regarde dans quel état ça vous met...
– C'est juste parce qu'on fait attention à toi, ce qui est normal puisque tu es notre fils.
Je lâche un soupir, ne sachant que répondre.
– On t'a voulu, ta mère et moi. Alors pourquoi tu serais un fardeau pour nous ? On est là pour prendre soin de toi et pour t'aider quand il le faut. Je t'aime depuis que j'ai su que ta mère était enceinte de toi, parce que tu es mon fils et que je t'aimerai toujours.
Je me blottis contre lui et il me serre doucement contre lui. L'entendre me dire ça me fait du bien.
– Je t'aimerai toujours, répète-t-il. Je suis désolé de ne pas te le dire assez.
– Je t'aime aussi, papa.
– Tu veux que je reste avec toi ?
– Non, non. Rentre te reposer.
– Nathanaël, si tu veux que je reste avec toi, je peux. Ça ne me dérange pas.
– T'es sûr ?
– Je ne te l'aurais pas proposer sinon.
– Mais tu vas dormir où ? je m'étonne.
– Nathanaël, ne t'inquiète pas, dit-il en riant doucement.
Sauf que je ne trouve pas ça drôle. Je n'ai pas envie qu'il soit obligé de dormir sur une chaise, sauf qu'à l'instant présent, il n'y a que ça.
– Rentre à la maison, sinon ?
– Je peux bien dormir là une nuit.
– Je suis désolé...
– Arrête de t'excuser. Tu ferais mieux de dormir.
Je lâche un soupir, mais n'insiste pas plus.
Mon père me prend dans ses bras et me serre un long moment contre lui. J'embrasse sa joue puis m'éloigne de lui.
– Bonne nuit, je lui dis simplement.
– À demain, mon grand. Je t'aime.
Il m'embrasse sur le front et je m'allonge sur mon lit en mettant ma couverture sur moi et en laissant ma main pendre de mon lit pour chercher le contact de celle de mon père. Lorsque je la trouve enfin, je la serre contre la mienne.
– Je ne pense pas que tu t'en souviennes, commence mon père en chuchotant au bout d'un long moment silencieux.
Il lâche un petit rire, sans que je ne sache pourquoi, et j'attends qu'il continue.
– Quand tu étais petit, tu voulais toujours que ça soit moi qui m'occupe de toi. Tu voulais que je te donne à manger, que je te lise un livre avant de t'endormir, que je t'aide à faire absolument tout. Ça ne me gênait absolument pas, au contraire j'avais la possibilité de le faire. De toute façon, tu te mettais à pleurer si c'était ta mère qui s'occupait de toi.
J'éclate de rire. Je ne me souviens plus du tout de ça.
Il reste un moment silencieux et ses doigts dessinent des ronds sur ma main.
– Je sais que je ne suis plus beaucoup là pour toi, ces derniers temps et j'en suis vraiment désolé. C'est un peu compliqué, mais j'essaie de faire de mon mieux pour être là pour toi.
– Je sais que tu fais de ton mieux, ça me suffit largement.
Il arrête de faire bouger ses doigts sur ma main et vient y déposer un baiser.
– Je t'aime. Je te l'ai beaucoup dit aujourd'hui, mais ça compense un peu des autres fois où je ne te l'ai pas pas assez dit.
– Je t'aime aussi.
– J'espère que je me suis bien occupé de toi, quand tu étais petit.
– Pourquoi tu l'aurais mal fait ?
– Parce que c'était ta mère qui s'était occupée de ta sœur et que je n'ai pas beaucoup été là pour l'aider, donc je ne savais absolument pas comment faire.
Nous restons tous les deux silencieux pendant un moment.
– Je pense que je n'ai trop pas raté quand je vois le fils incroyable que j'ai.
Il se met à serrer ma main contre la sienne, me faisant sourire.
– J'arrête de t'embêter. Dors bien, mon grand. Je t'aime, ne l'oublie jamais.
Je garde ma main serrée contre la sienne et sens que Morphée m'emporte rapidement dans ses bras.
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