III - Cours de sport
– Elisa, marche moins vite s'il te plaît, je demande à ma grande sœur alors qu'elle avance à grandes enjambées.
– Excuse-moi.
Elle attend que j'arrive à son niveau et elle se remet en marche pour qu'on aille au lycée. Nous nous sommes réveillés un peu en retard car ni elle ni moi avons entendu sonner le réveil. C'est notre mère qui a été obligée de venir nous réveiller. Sauf qu'on est un peu en retard.
– Tu peux continuer tout seul ? me demande Elisa alors qu'elle s'arrête juste à côté de l'arrêt de bus, qui était sur notre chemin. Je vais prendre le bus ici pour aller à la fac, sinon je serais jamais là-bas à l'heure.
– Vas-y, je lui réponds en souriant.
- Passe une bonne journée, me souhaite-t-elle en me claquant un baiser sur ma joue.
– Passe une belle journée aussi, je lui lance en souriant.
Je continue de marcher jusqu'au lycée, en étant donc seul. Mais je ne reste pas seul longtemps. Je vois Oscar marcher sur le même trottoir que moi, quelques pas plus loin. J'accélère le pas pour le rejoindre et je l'interpelle pour qu'il se retourne vers moi.
– Salut, je lui dis timidement et un peu essoufflé.
Il me regarde bizarrement pendant un moment, sans que je ne sache pourquoi jusqu'à ce que je me rappelle que je n'ai pas mis mon bonnet en sortant tout à l'heure. Il faut dire qu'on s'est dépêchés pour sortir, alors je l'ai oublié.
– Salut, répond-il en souriant.
– Ça te dérange ? je m'inquiète en remarquant qu'il dévisage toujours. Je peux mettre ma capuche, si tu veux...
– Quoi ? Non, non, ça ne me dérange absolument pas. Tu vas bien ? s'inquiète-t-il.
– Ça va très bien, pourquoi ?
– T'es essoufflé comme si t'avais fait un marathon.
– Je sais, mais c'est à cause de mes poumons.
– Oh... Je suis vraiment désolé, je disais pas ça pour que tu le prennes mal.
– Je l'ai pas pris mal, t'inquiète pas, je le rassure en riant.
Nous nous remettons en marche pour aller au lycée et un silence s'installe entre nous deux. Sans doute parce qu'Oscar est gêné à cause de la petite gaffe qu'il a faite.
Nous continuons donc notre trajet jusqu'au lycée silencieusement. Heureusement que nous ne sommes plus très loin parce que ce silence commence à me gêner un peu. Mais je ne sais pas vraiment ce que je pourrais lui dire alors je préfère garder le silence.
Lorsque nous sommes arrivés au lycée, Oscar me demande si je veux bien qu'il reste avec moi - bien que notre prochain cours commence dans moins de cinq minutes -, mais j'accepte volontiers. Être avec lui ne me dérange absolument pas, et comme ça je ne suis pas seul, pour une fois.
– T'habites dans le coin, du coup ? je lui demande.
– Non, j'habite à trois heures d'ici et je me réveille tous les matins à quatre heures pour pouvoir arriver à l'heure.
Il se met à rire en voyant la tête étonnée que je fais et je comprends qu'il rigolait. Ce que je peux être idiot, parfois...
– Non j'habite pas très loin. À vingt minutes à pieds. D'habitude je prends le bus, mais ce matin j'avais envie de marcher. Et toi ?
– J'habite pas très loin non plus. Et d'habitude c'est ma grande sœur qui m'accompagne et après elle prend le bus pour aller à la fac, mais on était un peu en retard ce matin donc elle a pris un bus avant.
– Elle fait des études en quoi ?
– Des études dans l'histoire. Elle veut être professeure d'histoire géographie plus tard.
J'ai à peine terminé ma phrase que la sonnerie du lycée retentit.
– Oh, on a sport ! s'enthousiasme Oscar.
Je me mords la lèvre alors que nous nous rapprochons du gymnase, où nous retrouvons les autres élèves de notre classe. Le prof arrive et tous les élèves se dirigent vers les vestiaires. J'y fais une simple halte pour y déposer mon manteau et mon sac puis je me dirige vers les gradins pour m'y asseoir et je regarde notre professeur qui est sur son téléphone. Il se rend compte de ma présence et me sourit.
– Nathanaël ! Je suis content de te revoir, me dit-il.
Je grimace légèrement. Ça m'étonnerait qu'il soit content de me revoir puisque depuis l'année dernière je n'ai pas participé à un seul de ses cours. À cause de ma santé trop fragile. Je ne sais même pas pourquoi j'assiste quand même à ses cours puisque je n'y participe pas. Sans doute pour fuir ma solitude, une nouvelle fois.
Les autres élèves commencent à sortir des vestiaires. J'aperçois Oscar qui sort des vestiaires habillé d'un short et d'un maillot d'une équipe de foot. Il me remarque depuis les gradins et s'approche de moi en souriant.
– Tu peux pas faire de sport, c'est ça ?
– Ouais.
– Je suis désolé pour toi...
– J'ai l'habitude, tu sais. Et puis, ça me manque pas tant que ça,j'ajoute en riant.
– Les garçons ! nous interrompt notre professeur. Vous pouvez venir ?
Nous redescendons des gradins et rejoignons les autres élèves qui ont tous fini de se changer. Notre professeur explique le déroulement de la séance d'aujourd'hui. Ils vont faire des matchs. Et qui dit match dit arbitre. C'est encore moi qui vais devoir m'y coller. De toute façon c'est soit ça ou soit je reste assis dans les gradins pendant deux heures sans rien faire d'autre. Je préfère largement faire l'arbitre. Même si je ne suis vraiment pas le meilleur arbitre.
Les autres élèves commencent à courir autour du terrain en guise d'échauffement alors que j'aide notre professeur à aller chercher les maillots et les ballons. Les autres continuent de courir pendant un instant et je ne peux m'empêcher de regarder Oscar. Il court avec deux autres garçons de notre classe et semble discuter avec eux. Il remarque que je le regarde et m'adresse un petit sourire, ce qui me fait rougir.
– C'est bon, vous pouvez venir là, leur dit notre prof. Vous allez pouvoir composer vos équipes. Elyas, Maxime, Oscar et Yanis vois êtes chefs d'équipe.
– Toujours des garçons, se plaint Inès, une fille de ma classe que je n'apprécie pas vraiment parce qu'elle aime bien se faire remarquer.
– La prochaine fois, ça sera des filles, lui répond simplement notre prof.
– Vous aviez déjà dit ça la semaine dernière, râle Inès.
Le prof décide de l'ignorer et demande aux quatre garçons de former leurs équipes. Une fois les équipes prêtes, les matchs commencent. J'arbitre le match où s'affronte l'équipe de Maxime contre celle d'Oscar.
– Jouez ! je leur lance.
– Ça serait peut-être mieux si tu nous lançais le ballon, non ? me demande Inès, qui s'est retrouvée dans l'équipe d'Oscar.
– Oh, oui... Désolé.
– Il a perdu des neurones avec sa tumeur ou quoi, lui ? marmonne-t-elle assez fort pour que je l'entende.
J'essaie de faire comme si je n'avais pas entendu sa remarque, bien qu'elle me blesse, et attrape le ballon entre mes mains avant de le lancer. Je les regarde jouer et arbitre leur match.
Les deux heures de sport se déroulent plutôt bien. C'est l'équipe de Elyas qui a gagné tous les matchs, suivie de celle d'Oscar, celle de Maxime puis celle de Yanis. Nous nous dirigeons vers les vestiaires. Les autres garçons se changent alors que je décide d'attendre Oscar, sans vraiment savoir pourquoi. Mon regard glisse involontairement sur Oscar qui se change lentement en discutant avec un autre garçon.
– Eh, le cancéreux, lance Maxime, t'as fini de mater ?
Je deviens totalement rouge alors que plusieurs regards se tournent vers moi, dont celui d'Oscar.
– Et il bande, en plus ! ajoute Elyas.
Il s'approche de moi et me tire par le bras pour m'emmener au centre des vestiaires, histoire que tout le monde me voit bien. Je rougis de honte et place mes mains devant de mon entrejambe, en me haïssant intérieurement d'avoir mis un pantalon aussi moulant.
– Alors ? Qui est-ce qui te fait bander comme ça ? me demande Elyas en riant.
Je sens les larmes me monter aux yeux alors que tous les garçons rient.
– Et si je fais ça, tu bandes aussi ? continue Elyas en venant poser sa main sur mes fesses.
– Lâche-moi, je lui demande.
Sauf qu'évidemment il ne m'écoute absolument pas et continue. Il éloigne sa main de mes fesses pour venir me donner une claque dessus, faisant redoubler le rire des autres.
– T'es sourd ou quoi ? intervient Oscar. Lâche-le !
Elyas me lâche et je me dépêche d'aller retourner auprès de mes affaires pour aller m'asseoir sur le banc, en serrant mon sac contre moi et en retenant mes larmes du mieux que je peux.
– Pourquoi vous êtes comme ça avec lui, sérieusement ? demande Oscar en mettant le bouton de son pantalon.
– Eh, j'ai juste dit ça pour ton bien, mec, dit Maxime en levant les mains comme s'il voulait se défendre.
– Pour mon bien de quoi ? Il a le droit de mater quelqu'un, s'il veut. Je vois pas en quoi c'est votre problème. Par contre, ça vous concernerait s'il avait décidé de vous mater.
– Donc t'es en train de le défendre ? s'étonne Maxime. Eh, oh ! Il était en train de te mater et de bander !
– Si t'es jaloux parce qu'il me mate, dis-le. Je peux te mater, si tu veux.
D'autres garçons rient alors que Maxime commence à s'énerver. Oscar, quant à lui, enfile son tee-shirt en souriant.
– Hors de question ! dit Maxime en nous lançant un regard noir.
– Donc quand c'est une fille qui le fait, ça te dérange pas. Par contre quand c'est un garçon, ça te gène ? lui demande Oscar. Qu'est-ce que vous êtes stupides.
Il ne lui laisse même pas le temps de lui répondre qu'il prend son sac ainsi que sa veste d'une main et qu'il m'empoigne par le bras de l'autre et me tire pour que nous sortions des vestiaires. Nous nous asseyons tous les deux sur un banc.
– Merci, je lui dis timidement au bout de quelques minutes de silence.
– Merci de quoi ? De leur avoir fait comprendre qu'ils étaient idiots à faire ça ?
– C'est vrai que maintenant que tu le dis...
Il m'adresse un grand sourire, me faisant rougir.
– Ça va ? s'inquiète-t-il quand même.
Je hausse les épaules et fixe le sol parce que je n'arrive pas à croiser le regard d'Oscar.
– Je suis désolé, Nathanaël... Ils ont pas le droit de t'humilier comme ça...
– Je suis habitué.
– Tu devrais pas.
Je finis par relever la tête et croiser son regard.
– Mais t'étais vraiment en train de me mater...? me demande-t-il.
Je rougis totalement alors qu'un petit rire sort des lèvres d'Oscar.
– Enfin, c'est pas grave si tu l'as vraiment fait, tu sais. Je ne disais pas ça pour me moquer... Je m'en fiche. Et puis ça...
Il ne continue pas sa phrase et ses joues deviennent légèrement roses.
– Ça...? je tente.
– Rien. Oublie.
Je le regarde bizarrement, mais n'insiste pas plus.
– Demain après-midi, après les cours, on va au parc avec les autres, dit-il pour changer de sujet. Enfin les gens de la classe. Ça te dirait de venir avec nous ?
– Je suis pas très apprécié dans la classe, au cas où t'aurais pas remarqué...
– Je t'apprécie, moi.
– On se connaît à peine, je lui dis en riant nerveusement.
– Et alors ? J'aime bien faire de nouvelles connaissances, répond-il en restant sérieux.
– Je suis pas doué pour faire connaissance avec les gens...
– C'est pas grave. T'es pas idiot, t'y arriveras bien. On a déjà sympathisé un peu en plus.
Un petit silence s'installe entre nous deux, mais Oscar l'interrompt en me demandant :
– Alors, pour demain ?
– Je verrais avec mes parents, et je te redis.
– C'est vrai ? Attends, je te passe mon numéro de téléphone pour que tu m'envoies un message !
Je n'ai même pas le temps de réagir qu'il sort un papier de sa poche et écrit rapidement quelque chose dessus avant de me le tendre. J'attrape le papier en le remerciant et le range dans ma poche.
Oscar me regarde pendant un petit moment, en restant silencieux. Ses yeux bleus insistants finissent par faire prendre une couleur rose à mes joues.
– Quoi ? je finis par lui demander.
Il ne répond rien et continue de me regarder. Un sourire naît au coin de ses lèvres et mes yeux restent bloquer dessus pendant un instant.
– T'as un joli visage, finit-il par dire.
Je deviens encore plus rouge que je ne l'étais avant, ce qui le fait rire. Et je me surprends à trouver son rire agréable.
– T'es pas habitué aux compliments ?
– Non. Il n'y a pas grand-chose à complimenter chez moi.
– Il y en a, la preuve je t'en ai fait un.
Je hausse simplement les épaules.
– Je devrais t'en faire plus souvent, alors. Comme ça tu seras habitué.
– Y'a rien à complimenter chez moi.
– Je suis sûr et certain que si. T'as l'air d'être un garçon génial.
Je fais craquer nerveusement les doigts de mes mains, à défaut de ne savoir quoi répondre.
– Je suis sérieux, ajoute-t-il.
– Je te crois.
– On dirait pas.
Je soupire en levant les yeux au ciel et la sonnerie vient me sauver.
◇◇◇
– Je peux ? dit une voix devant moi.
Je sursaute et lève la tête pour voir Oscar qui me sourit, son plateau dans les mains. Je me suis installé tout seul à une table, à la cantine. Parce que je reste toujours tout seul et que personne ne vient avec moi, habituellement.
– Oui, vas-y.
Il s'installe en face de moi et me sourit une nouvelle fois.
– T'étais tout seul ? s'étonne-t-il en commençant à manger.
– Personne n'a envie de manger avec moi.
– Si, moi.
– T'es bien le seul.
Il hausse simplement les épaules et se remet à manger. Je me remets à manger aussi et nous restons silencieux un long moment.
– Pourquoi tu restes tout le temps seul ? me demande Oscar en rompant le silence.
– Parce que personne n'a envie de rester avec le garçon qui a un cancer ?
– Ils sont idiots, Nathanaël. C'est juste un cancer, ça va pas leur faire de mal.
Je hausse les épaules et me mets à fixer mon assiette en faisant bouger distraitement mes pâtes avec ma fourchette.
– Et toi ? Pourquoi tu restes avec moi ? j'interroge Oscar en levant la tête vers lui. T'as l'air d'être bien intégré avec les autres.
– Je sais pas, j'avais envie d'être avec toi.
– Pourquoi ?
– Ils sont sympas, mais j'avais envie d'être avec toi. Ils veulent un peu être au centre de l'attention, alors que toi t'es calme et je préfère ça.
– Oh, je dis simplement en rougissant légèrement.
Il rit doucement et se remet à manger.
– Et pourquoi tu vas pas vers les filles ? Elles sont calmes, non ?
– Tu plaisantes ? Elles font tout le temps des problèmes.
Il se met à rire bruyamment, attirant quelques regards vers nous.
– Elles sont grave chiantes, les filles.
– T'es mal parti pour les draguer si tu dis ça.
– J'ai jamais dit que je voulais les draguer.
– Me dis pas que t'as pas envie de draguer une fille ? je m'étonne.
– Je suis pas ici pour draguer des filles.
– C'est ce qu'ils disent tous.
– Je m'en fous des filles.
Je lève les mains en signe de capitulation pour lui montrer que je n'insiste pas plus.
– Et toi ? Elles t'intéressent, les filles ? me demande-t-il avec un petit sourire.
– Ça doit plutôt moi qui ne les intéresse pas. T'as vu comment je suis ?
– T'es superbe comme t'es.
Je ne réponds rien et repose ma fourchette sur mon plateau en évitant le regard d'Oscar.
– T'as fini ? s'étonne-t-il.
Je hoche la tête affirmativement, mais suis surpris lorsque je vois qu'il a déjà terminé son plateau. Nous quittons la cantine puis partons en direction de la cours où nous discutons tranquillement, en continuant à faire un peu connaissance.
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