Chapitre 9



Hava fixa le viking avec grande peine car elle ignorait ce que pouvait signifier ses mots. Peut-être essayait-il de la tester ? Songea-t-elle en inspirant péniblement.

- Alors ? Auriez-vous perdu vôtre langue Hava ?

- Seulement l'esprit, répondit-elle en baissant les yeux.

Un rire gutturale quitta ses lèvres puis il pivota les talons la laissant seule à ses réflexions. Hava releva la tête, faisant face à ce corps massif qui se mouvait entre les rameurs. Elle ignorait ce qu'il espérait d'elle mais Hava était sûre d'une chose.

Chaque geste, chaque proximité, seraient rapporté à Ena. Alors il valait mieux pour elle de se concentrer sur les devoirs qui lui seraient destinés une fois le drakkar amarré.

- Est-ce que tout va bien ? S'informa Mena en posant une main sur son épaule.

Oh non elle n'allait pas bien...

- Tout va bien, assura-t-elle en lui souriant.

Mena l'enjoignit à se rassoir et s'installa à côté d'elle.

- Gunard te cause du tort ? Demanda la femme viking.

- N..non il me faisait juste la conversation.

Perplexe et songeuse elle jeta un coup d'œil en direction de l'intéressé.

- Je le trouve très proche de toi ces dernière temps, ce genre de comportement ne lui ressemble guère, confia-t-elle en faisant mine d'être occupé avec son couteaux.

- Pourquoi ? Comment est-il d'habitude ? Demanda Hava très curieuse de comprendre pourquoi tant de personnes se souciaient des changements étranges de leur chef.

Mena émit un rire sans joie.

- Gunard ne parle jamais aux femmes, ce sont les femmes qui viennent à lui.

Hava réprima des rougeurs persistantes et glissa des mèches derrière ses oreilles.

- Je ne sais pas ce que tu lui as fait depuis la bataille qui nous opposait aux saxons mais...

Mena s'interrompit et lui tendit son couteaux.

- Je te le donne, garde le avec toi, on ne sait jamais...

Mena se leva pour rejoindre son banc, la laissant aussi perdue qu'elle l'était avant son intervention. Néanmoins, Hava glissa le couteaux dans l'étui contre sa hanche pour le cacher la respiration subitement lourde. Si Mena avait cherché à la rendre mal à l'aide...voici chose faite. Gunard était le genre d'homme à laisser les femmes venir à lui et c'est pour cela que son comportement envers elle suscitait les interrogations du peuple. Mais que pouvait-elle y faire ? Le gifler ?

Hava secoua imperceptible de la tête alors que la peur vidait son esprit.

Subitement elle se mit à penser à sa mère. Son destin tragique devrait pourtant lui servir de leçon. N'avait-elle pas péri à cause d'une situation semblable à la sienne ?

Une larme s'échoua sur sa joue et elle s'empressa de l'essuyer.

Elle se tourna vers la mer et fut inquiète quand elle vit les pâleurs du ciel. La nuit menaçait de tomber alors qu'ils n'avaient toujours pas atteint leur destination. Un filet de sueur perla alors sur son front en craignant de devoir passer la nuit sur le drakkar. Et ses craintes furent confirmées lorsque le chef lui-même annonça à ses hommes de cesser de ramer afin de se restaurer.

Inquiète, Hava resta en retrait sur le banc tandis que tous dégustaient des rations alimentaires pour se donner des forces.

- Tenez, lança Gunard surgi de nulle part en lui tendant un bol.

Hava le prit timidement en effleurant ses doigts. Ce contact la fit frissonner.

- Merci...

Il la quitta sans un mot ni même un regard. Ce brusque changement d'humeur l'affecta plus qu'elle ne l'aurait crû...mais il revint vers elle à sa plus grande surprise pour l'envelopper d'une laine chaude.

- Nous allons devoirs passer la nuit en mer je le crains, déclara-t-il en la couvrant.

- Vous en êtes certain ?

- Oui, répondit le viking en attachant la laine ; N'ayez pas peur Hava, la nuit sera douce, aucun risque qu'il y ait une tempête.

Hava acquiesça difficilement et se décala sur le banc quand il prit place à ses côtés. Elle se concentra sur son bol de nourriture et se restaura à ses côtés non sans frémir de le savoir si proche.

- Vous comptez vous en servir ? Lança-t-il subitement.

Hava plissa son front et détourna la tête de son côté. Il était voûté comme un arc, dévorant son bol de nourriture, faisant claquer silencieusement ses mâchoires acérées.

- De quoi parlez-vous ?

- Du poignard que Mena vous a discrètement donné.

Hava se sentit pâlir.

- Je...je n'ai pas l'intention de m'en servir contre vous Gunard, balbutia Hava.

Il sourit dans l'ombre de sa barbe et ce sourire avait l'air moqueur. Évidemment ! Songea-t-elle en le foudroyant du regard, la savoir avec ce poignard ne l'inquiétait guère. Quelle chance même infime avait-elle de le blesser.

- Dans ce cas, vous pouvez le garder.

- Vraiment ? S'enquit-elle en haussant un sourcil presque défiant ; Vous n'avez pas peur que je m'en serve contre vous ?

Il se redressa lentement, avec un sourire énigmatique plaqué sur ses lèvres.

- Pourquoi ? Est-ce le cas Hava ?

- Je viens de vous dire que non.

- Alors pourquoi devrais-je m'en faire ? Demanda-t-il sans se départir de son sourire énigmatique.

Agacée par son air presque arrogant, Hava décida de se jouer un peu de la situation.

- Je pourrais changer d'avis pendant le voyage et songer subitement à vous tuer, laissa-t-elle tomber le plus sérieusement possible.

Le guerrier au regard dangereux la contempla impassible, embrassant sa silhouette du regard puis se pencha lentement vers elle.

Hava retint son souffle alors qu'il se trouvait à quelques centimètres de son visage.

- Alors j'ai hâte de vous voir à l'œuvre, murmura-t-il au creux de son oreille.

Frémissante, Hava déglutit difficilement quand leurs visages se frôlèrent.

Satisfait, il reprit son bol de nourritures tout en cherchant à dissimuler son sourire de satisfaction.

- Vous devriez vous méfier Gunard, les femmes sont parfois pleine de surprises auxquelles on ne s'y attend pas.

Cette fois-ci le viking releva la tête vivement en posant son poing contre sa bouche.

- Vous avez raison Hava, je devrais me méfier de vous, déclara-t-il en la couvrant d'un regard mystérieux.

Hava releva le menton pour se donner des forces mais en avait-elle suffisamment pour contrer se fier et mystérieux guerrier ?

Il se pencha à nouveau et cette fois-ci prit son menton de ses doigts musclés.

- Mais vous devriez vous méfier davantage de moi, ajouta-t-il avec un faible sourire en coin.

Hava serra son bol aussi fort qu'elle le put tout en baissant les yeux timidement. Il ôta ses doigts pour les poser sur sa main qui entourait son bol.

- Mangez, ordonna-t-il en se levant...laissant sur sa main et son menton l'empreinte de sa force implacable.

La nuit sera longue, pensa-t-elle en le suivant du regard et les jours qui suivrons seront probablement les plus dangereux. Alors elle exhala un soupir, résignée à combattre cette étrange sensation qui se figeait au creux de ses reins chaque fois qu'elle était en sa compagnie. Et quand la lune pâle recouvrit le ciel, Hava s'installa au fond du drakkar dans une petite cabine en fond et replia ses jambes contre son ventre, fixant l'entrée dangereuse qui menait à son abris.

Mais de quoi avait-elle peur ?

Qu'un homme surgisse pendant son sommeil ?

Gunard ?

Hava avait bien fait de se méfier car Gunard en personne pénétra dans la cabine le regard soucieux.

- N'ayez pas peur Hava, murmura-t-il en s'agenouillant en face d'elle ; Je veux seulement me reposer un peu.

- Vous reposez ? Répéta-t-elle les lèvres sèches.

Il désigna la couche d'un coup de menton.

- Vous êtes dans ma cabine.

Hava écarquilla les yeux, les joues en feu et s'empressa de se redresser.

- C'est inutile de vous affoler, s'empressa de dire le viking en levant la main en signe d'autorité ; Vous pouvez rester, votre compagnie m'est agréable.

Les muscles tétanisés Hava ne parvenait plus à bouger. Elle se contenta de le regarder s'allonger non loin d'elle, étendant ses jambes avec un soupir d'aise. Gunard gardait les yeux fixes sur le plafond de son refuge en sentant l'odeur de la jeune femme flottait dans l'air. Le bateau tanguait faiblement, signe que la nuit serait paisible, alors pourquoi il avait la sensation que cette nuit serait longue et dure en la sachant si près de lui. Il pouvait sentir son trouble...il entendait sa respiration s'accélérer. Craignait-elle qu'il l'attaque ? Combien de malheureuses histoires avait-elle entendu au sujet des vikings ?

- Vous ne voulez pas vous allonger ? Demanda Gunard en se redressant.

À la faible lueur de la torche il vit ses yeux de biche prendre une teinte absolument captivante. Sa gorge se serra...il ne parvenait pas à réduire les désirs qu'elle lui inspirait.

Et contre toute attente...elle lui répondit :

- J'aimerais oui...

- Alors venez, dit-il d'une voix qu'il eut peine à reconnaître.

Les yeux dans les yeux, ils restèrent sans bouger et Gunard lut de la méfiance dans les lueurs qui se reflétaient dans ses yeux.

- Je ne vous toucherai pas, articula-t-il non sans se sentit affecté qu'elle ait si peur de lui.

- Puis-je avoir votre parole ?

- Vous l'avez ma dame, affirma-t-il d'une voix qu'il espérait douce.

Mais dès qu'elle s'allongea gracieusement à l'autre extrémité de la couche, Gunard remit sa parole en doute, craignant céder à la tentation...

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