Chapitre 39



Sous la faible lumière de l'aube, Hava ouvrit les yeux péniblement alors que sa tête reposait sur un oreiller sombre et couverte de plusieurs couvertures.

Elle sentit sa main fermée en poing s'ouvrir difficilement et son visage la faisait atrocement souffrir. Elle se souvenait de tout et la peur la paralysa soudain alors qu'elle balayait la chambre du regard à la recherche de Gunard.

Son regard, elle ne l'oublierait probablement jamais. Elle avait pris peur et craignait de ne pas pouvoir effacer cette image terrifiante de l'homme qu'elle aimait.

- Réveillée ? S'enquit une voix douce et chaleureuse.

À travers ses larmes Hava vit Nessa à son chevet, son fils dans les bras.

Une vague de panique la submergea car elle ne voyait pas Gunard. Il n'était pas dans la chambre, constata-t-elle d'un soupir tremblant alors que des larmes silencieuses roulaient sur ses joues.

- Est-il....est-il mort ? Parvint-elle à dire.

- Grand dieu non ! S'exclama Nessa en écarquillant les yeux ; Gunard est vivant Hava.

Un immense soulagement lui rendit le souffle.

- Alors où est-il ? Demanda Hava d'une voix tremblante.

Le regard de Nessa devint subitement peiné.

- Voilà deux jours que tu dors et il n'a pas bougé d'ici depuis la bataille, Ivar est parvenu à lui faire entendre raison et il est partit se laver dans la rivière.

Hava déglutit avec difficulté et posa sa main sur sa tête qui lui faisait terriblement mal.

- Est-ce qu'il est blessé ?

- Quelques blessures à l'épaule mais il va bien physiquement.

Après un court silence Hava compris qu'il allait mal.

- Et mentalement ?

- Il va mal, avoua-t-elle en baissant les yeux sur son fils ; Il se croit responsable de ce qu'il s'est passé.

Hava tenta de se redresser sur l'oreiller en essuyant ses larmes.

- Je refuse qu'il pense une telle chose, il n'est pas responsable des atrocités de Dagmar, déclara Hava en crispant son visage de douleur.

- Doucement Hava, tu n'es pas en état de te lever, intervint Nessa en posant son fils dans son petit couffin en osier ; Tu es blessée Hava, tu as plusieurs côtes abîmées.

- Est-ce qu'il y a des morts ? Demanda Hava en ignorant les directives de Nessa.

- Ena est morte, répondit-elle en l'obligeant à se rallonger ; Hormis sa mort, quelques hommes ont été blessés mais ils s'en remettront très vite n'aies aucune crainte.

Hava ferma les yeux en songeant à la mort qu'avait subi Ena. Hava ne devait pas se sentir coupable et pourtant elle avait l'impression qu'elle était morte par sa faute. Nessa remarqua très vite le sentiment de culpabilité qui se lisait dans son regard et s'empressa de déclarer ;

- Elle a essayé de tuer Hava, dit-elle d'une voix apaisante ; Elle voulait ta mort et si Dagmar ne l'avait pas tué tu serais morte Hava en prends-tu conscience ?

Nessa avait raison et elle s'empressa de hocher de la tête en guise de réponse.

- Y compris ton enfant, ajouta Nessa en plantant son regard dans le sien avec un sérieux qui la fit reculer sur l'oreiller.

- Com...ent tu...

- Je suis sage-femme Hava, coupa-t-elle en lui prenant la main avec prudence ; Je sais reconnaître les signes.

Hava cilla alors qu'une vague de peur déferlait en elle. Elle se mordit la lèvre en fixant le plafond fait de pierre.

- Je crois que je l'ai perdu Nessa, dit-elle d'un murmure à peine audible sans la regarder.

- Pourquoi dis-tu une chose pareille ?

Hava ravala un sanglot pour lui répondre mais aucun son parvenait à sortir. Elle se souvenait encore d'être dans sa chambre en train de s'habiller comme lui avait commandé Gunard et de cette longue trainée de sang qu'elle avait senti rouler le long de ses cuisses. Hava en avait rapidement déduit qu'elle faisait une fausse-couche avant même de savoir qu'elle était enceinte.

Et pourtant, après avoir essuyer ses larmes et refouler sa panique elle était partie dans la grande salle comme si de rien n'était.

Elle inspira profondément et expliqua à Nessa pour quelle raison elle disait l'avoir perdu.

C'est avec une confiance absolue qu'elle lui prit la main, les yeux emplis d'espoirs.

- Restons sur nos gardes Hava, il arrive très fréquemment que des femmes saignent cela ne veut pas forcément dire que le bébé est mort.

Rien, absolument rien suffit à la rassurer.

- Je suis certaine qu'il est mort Nessa, comment un bébé peut-il survivre à ça ?

Nessa se tourna vers son bébé comme seule réponse à sa question.

- Il faut toujours garder espoir Hava, conclut-elle en lui souriant ; En attendant il faut te reposer et faire attention à toi en priorité. Je vais informer Gunard de ton réveil.

Alors qu'elle s'apprêtait à partir Hava la retint par le poignet, le regard déjà suppliant.

- Promets-moi de ne rien dire à Gunard pour le bébé ! Je ne veux pas qu'il ait de faux espoirs.

Nessa inclina sa tête en avant.

- Je ne dirais rien, je t'en fais la promesse.

Rassurée elle la laissa partir avec son fils puis ferma les yeux. Hantée par les souvenirs de la veille elle préféra rouvrir les yeux en observant le soleil se filtrer dans la chambre. Instinctivement elle couvrit son ventre de sa main et de nouvelles larmes tombèrent sur ses joues.

Des pas lourds et presque meurtris se firent entendre. Hava n'eut pas le temps de reprendre son souffle que déjà, Gunard lui apparut trempé de la tête aux pieds, seulement vêtu de ses braies et de ses bottes noirs...

Son regard se posa immédiatement sur le sien. Son cœur se serra violemment lorsqu'elle put lire dans ses yeux une myriade d'émotions contradictoires. D'abord le soulagement puis la peine ainsi que du regret et de la colère. C'est à peine s'il osait avancer jusqu'à elle. Ses pas semblaient indécis. La honte devenait peu à peu visible jusqu'à la contraction convulsive de ses mâchoires.

- Hava, murmura-t-il d'une voix brisée.

- Si tu essayes de cacher le monstre que j'ai vu sache que j'ai autant besoin de lui que j'ai besoin de l'homme qui se tient devant moi, déclara-t-elle d'une voix affaiblie par ses larmes.

Ses mots sincères suffirent à le faire avancer jusqu'au lit mais ce n'était pas suffisant pour effacer le regret qui l'habitait.

- Je suis si désolé, murmura-t-il en prenant sa main pour la porter à ses lèvres.

Hava ferma les yeux en savourant la sensation de sa bouche contre sa peau. Elle l'avait crû mort, elle avait songé à mourir pour le rejoindre...

- Tu n'as pas à être désolé Gunard, dit-elle en ouvrant les yeux pour sonder son regard au sien.

Gunard serra les dents. La voir ainsi affaiblie et blessée lui entaillé le cœur. Sa pommette était bleutée, sa lèvre fendue, son cou violacé.

Il leva la main pour effleurer son visage mais la recula par peur de lui faire du mal.

- J'aurais dû te protéger et je ne l'ai pas fait, déclara Gunard en caressant ses doigts.

- Tu as fait exactement ce que tu devais faire pour me protéger ainsi que les tiens, contrat-elle en tordant son visage causé par une fugace douleur.

Gunard la dévisagea longuement en continuant de caresser ses doigts fins.

- Dagmar était là pour un but précis, reprit-elle en plongeant ses prunelles dans les siennes ; Il voulait se venger et tu le savais Gunard.

- Une partie de moi devait agir de manière monstrueuse, c'est ce que je suis Hava, je ne voulais pas te faire peur.

Hava lui sourit tristement.

- J'ai eu peur c'est vrai, avoua-t-elle en fermant brièvement les yeux ; Mais je t'accepte tel que tu es Gunard.

Gunard s'installa sur le lit pour se pencher au-dessus de son visage.

- Hava...comment peux-tu...

- Tu es un homme des mers, tu es un viking et si tu n'avais pas fait ressurgir cette sombre partie de toi je ne serais probablement pas ici et tu le sais.

Elle avait raison...

Dagmar serait probablement parvenu à la prendre et lui faire subir le même sort que celles qu'il avait vu jadis autrefois torturées par ce monstre.

À cette simple pensée il perdit son souffle et plaqua son front contre le sien.

- Tout est fini à présent, murmura-t-il contre son front ; Plus personne ne te fera du mal.

Ses doigts fins se posèrent sur sa joue.

- Je le sais Gunard, murmura-t-elle d'une voix empreinte de douceur.

Hava sentit ses bras forts se resserrer contre son corps blessé. Ce contact la bouleversa et elle aurait voulu rester ainsi pour l'éternité.

- Mon amour, lui chuchota le viking d'une voix à peine audible.

Hava se mit à pleurer silencieusement contre son épaule terrifiée à l'idée d'avoir perdu l'enfant qu'il désirait tant avoir.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top