Chapitre 33



Dans la grande salle chargée de lumières, Gunard observait ses hommes festoyaient avec humeur. Les musiciens n'avaient de cesse de jouer de la harpe pendant que les femmes fêtaient leur retour. Gunard avait le regard fixé sur Hava reclus dans un recoin de la salle cherchant maladroitement à se fondre dans les festivités. Cette image lui brisa le cœur. Personne ne cherchait réellement à la connaître, elle était comme une rivale à abattre. Heureusement il pouvait compter sur les bienveillances des femmes plus âgées et qui veillaient sur elle.

Tendu sur son trône il prit une lampée de bière sans la quitter des yeux. Un puissant désir irradiait ses muscles et ravageait ses sens.

Son regard perçant se tourna vers Ena et il prit conscience que les tortures de la jeune femme ne s'effaceraient pas tant qu'il n'aurait pas détruit la saxonne vieillissante dont les méthodes de séduction restaient intactes. En effet, Willar le plus sensible de tous et qui avait perdu sa femme en couche au printemps dernier apaisait son chagrin et cette perte immense dans un flot de bière jusqu'à en perdre la tête. Ena savait comment le manipuler et Willar semblait y prendre goût.

- Tu sembles soucieux Gunard, lança Haakon en le rejoignant.

- En effet, je suis songeur, admit-il en cherchant Hava des yeux.

Il la trouva assise sur un banc en train déguster des morceaux de viande dans un bol qu'elle tenait d'une main fébrile.

- C'est à propos de Hava ? Questionna Haakon en l'obligeant à détourner la tête dans sa direction.

- Je lui ai dit la vérité, lâcha-t-il avec humeur.

Haakon le regarda avec étonnement.

- Elle t'en veut ?

- Non, elle m'a pardonné comme si de rien était et je ne peux le supporter.

Haakon soupira.

- Arrête de te punir Gunard, accepte le pardon que l'on t'offre et fais en grâce.

Un rire amer s'échappa de sa gorge.

- Je l'ai voulue et abandonnée comme si c'était un vulgaire sac de bétail.

- Cesse d'être trop dur avec toi-même, conclut-il en lui donnant un tape amicale sur l'épaule.

Gunard inspira profondément en gardant les paroles censées de son ami dans un coin de sa tête. Mais pour l'heure un souci de taille l'attendait.

- Sais-tu quand Ivar revient de son voyage ?

- Je l'ignore peut-être dans quelques jours, il voulait profiter du beau temps pour présenter son fils au jarl voisin.

Gunard grogna doucement, déçu de ne pas avoir pu lui parler avant son départ.

- Pourquoi ? Tu avais une requête à lui soumettre ?

- Plusieurs en effet, révéla Gunard en se passant le pouce sur les lèvres.

Il sentit le sourire de son ami sans même avoir besoin de le regarder.

- Aurais-tu des projets de mariage mon ami ? Hasarda Haakon d'une voix basse.

Gunard ne répondit pas, continuant à se passer le pouce sur ses lèvres sèches.

- Chaque chose sera révélé en son temps mon ami, déclara-t-il en refermant ses mains sur les accoudoirs de son fauteuil alors que sa belle Hava venait de passer les portes de la grande salle tristement...comme si le fait de pas l'approcher était trop difficile.

Haakon se mit alors à rire doucement sous les échos des harpes. Gunard se leva sans attendre et se fondit dans la foule pour rejoindre Hava, croisant le regard de Berta qui lui indiquait d'un signe de tête que tout était prêt.

Au début, Hava s'était dit que ce petit festin serait un bon moyen d'oublier qu'elle ne pouvait pas vivre comme elle le voulait mais après maintes efforts pour se fondre dans l'ambiance Hava eut mal au cœur de voir Gunard si loin d'elle sans pouvoir l'approcher. Lorsqu'elle était seule Hava avait l'horrible sensation d'être vulnérable. En présence du viking Hava se sentait protégée et plus forte. Ce terrible contraste lui fit réaliser qu'elle craignait ne pas tenir plus longtemps dans ce secret qui pesait sur ses épaules.

Essayant un larme solitaire sur sa joue elle pressa le pas dans les étages pour rejoindre sa chambre lorsqu'un craquement venant de derrière la fit sursauter. Hava se retourna vivement et ne vit personne.

- Il y a quelqu'un ? S'enquit-elle en revenant sur ses pas.

Un autre pas cette fois-ci plus lourd provenait de couloir adjacent. Terrifiée elle s'empara d'une torche enflammée pour se défendre lorsque la haute et diabolique ombre projetée sur le mur en pierre lui apparut.

- Hava ! S'écria Gunard en lui jetant un regard inquiet.

- Mon dieu ! Tu m'as fait terriblement peur ! S'écria-t-elle en portant sa main libre à son cœur.

Rapidement il lui ôta l'imposante torche de la main pour la reposer dans son socle.

- Je suis désolé je ne voulais pas te faire peur, dit-il en l'attirant à lui.

Transie de froid et de peur mêlés elle ferma les yeux pour mieux savourer ce moment qu'elle avait attendu toute la soirée.

Gunard souleva son précieux fardeau dans ses bras pour l'amener dans ses quartiers. Roulant de droit à gauche sa tête reposait contre son torse, les yeux clos. Une fois qu'il atteignit la porte de ses quartiers Gunard la scella afin de ne pas être dérangé et déposa la jeune femme au centre de la pièce.

- Est-ce que tu vas bien ?

Elle acquiesça en glissant une main nerveuse dans sa tresse.

- J'ai été surprise, je ne pensais pas te revoir avant demain matin, bredouilla-t-elle timidement.

Cette timidité suffit à réveiller en lui un puissant désir incontrôlable.

Il s'empressa de capturer ses belles lèvres roses sans dissimuler ce grondement rauque et puissant qu'il gardait enfoui dans sa gorge depuis trop longtemps.

- J'ai crû mourir toute la soirée, lui confia-t-il en plongeant son visage dans son cou.

Hava se hissa sur la pointe des pieds avec un sourire heureux plaqué sur ses lèvres.

Il palpait à présent son visage comme s'il essayait de se convaincre qu'elle était bien réelle.

- Quelqu'un risquerait de se demander où tu es Gunard, lui fit-elle remarquer en se dégageant.

- Aucun risque, dit-il l'obligeant en se retourner pour la plaquer contre son torse.

Hava rit doucement en essayant de retirer sa main qui se glissait dangereusement sous les plis de sa robe.

- Je ne suis pas certaine que le grand chef soit ainsi vite oublié au beau milieu d'une fête, dit-elle le souffle coupé.

Sa bouche se posa sur sa nuque puis son épaule.

- Le seul endroit où je désire être c'est avec toi Hava, répondit-il en l'obligeant à lui faire face.

Il glissa ses mains sur ses joues pour incliner sa tête en arrière.

- Nous avons passé une journée maussade, j'aimerais pouvoir me retrouver seule avec sans que tu aies peur Hava, déclara-t-il tout près de ses lèvres ; Je suis le bras droit du jarl, c'est moi qui donne les ordres.

- Mais tu ne veux pas que...

- Je sais, la coupa-t-il doucement en caressant ses lèvres avec les siennes ; Mais les choses changerons dès que le jarl sera de retour.

Comme prévu, ses prunelles se remplirent d'un flot de questions.

- Quelles choses ?

- Chut...

Hava demeura dans l'ignorance la plus totale et sut qu'elle n'aurait pas les réponses à ses questions et de toute façon dès qu'il ôta sa tunique Hava sentit une furieuse chaleur remplir ses joues.

Le torse viril de son amant la fit fondre comme de l'orge au soleil. Avec une agilité déconcertante il lui se positionna derrière elle pour lui défaire sa tresse.

- Ils ont encore poussé, constata-t-il d'une voix rauque ; Je les aime détachés, ils ont la couleur du blé.

Une myriade de sensations exquises inonda son ventre.

- Je m'applique à les soigner du mieux que je peux...

Ce ne fut qu'à ce moment précis qu'elle aperçut la baignoire remplie d'eau fumante.

- Tu avais tout prévue !

Gunard plongea sa main sous le tissu de sa robe et la déchira après s'être acharné sur ses lacets sans succès.

Son petit hoquet de surprise le fit sourire...un sourire qui se mua en un souffle rauque lorsque sa peau nacrée lui apparut scintillant sous les reflets de la lune.

Avant que son désir de lui faire l'amour soit plus fort Gunard la souleva pour la plonger dans l'eau.

Ses cheveux blonds à demi mouillé se collèrent à sa peau et il put voir un sourire heureux et émue tendre ses lèvres roses.

C'est ce qu'il voulait...

Il voulait la choyer, la rendre heureuse.

Pour cela il s'appliqua à mouiller ses cheveux entièrement et prit une poignée de saponaire pour les frotter énergiquement dans ses mains afin qu'elle mousse. L'odeur parfumée emplissait déjà la pièce. C'était probablement la première fois de sa vie qu'il s'apprêtait à laver une femme dans sa baignoire personnelle. Gunard en savoura chaque instant.

Il massa ses cheveux avec douceur, entreprit de les laver avec mérite. Chaque parcelle de son corps méritait d'être traité comme une soie unique et rare.

Et c'est alors qu'elle se retourna, plongeant ses prunelles dans les siennes et déclara avec un soupçon d'audace ;

- Tu ne viens pas ?

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