Chapitre 25



Le temps était comme suspendu, le viking n'était plus qu'à quelques centimètres de ses lèvres. Le crépitement agréable du feu lui indiquait qu'ils n'étaient pas seuls. Il le savait et pourtant il se risqua un baiser sur sa joue, traçant la ligne de sa mâchoire de son index dont la peau abîmée lui envoya des frissons.

Sa bouche glissa jusqu'à la commissure de ses lèvres...là où il planta un baiser furtif mais qui suffit à lui faire battre le cœur.

- Tu es dangereuse Hava, chuchota-t-il d'une voix rauque.

Hava se recula en s'aidant de sa main appuyé sur son torse.

- Non c'est toi qui es dangereux, rétorqua Hava en lui souriant faiblement.

Un sourire énigmatique passa furtivement sur ses lèvres. Il brisa leur étreinte dangereuse en se levant sans un mot. Lorsqu'il s'éloigna d'un pas autoritaire Hava ne sut mettre un mot sur ce qu'elle ressentait.

Gunard se glissa entre les deux chênes pour calmer le flux de désirs qui le submergeait.

À travers les épais reflets des flammes il l'observa au milieux des autres femmes. Elle était différente. Son regard se perdait dans la contemplation des femmes afin d'apprendre à faire comme elles. Ses yeux suivaient constamment les mouvements brusques des hommes comme si elle était à l'affût du moindre danger.

- J'espère que tu es conscient de la chance qui t'est offerte ?

Gunard reprit son visage impassible pour faire face à l'un de ses hommes. Il ne devait rien montré sur l'attraction que faisait naître Hava. Mais visiblement c'était trop tard.

- Quelle chance ? Demanda-t-il en sortant son couteaux pour découper les miches de pain.

- Hava, l'ancienne esclave, expliqua Fior en esquissant un sourire amusé ; Elle n'a d'yeux que pour toi.

- Non elle est simplement un peu perdu et se raccroche à moi.

Fior fit claquer sa langue entre ses dents tout en secouant négativement de la tête.

- Je te connais depuis que tu es enfant Gunard, je sais que cette femme te rend fou.

Cherchant vainement à dissimuler la vérité, Gunard le décrocha un regard mystérieux.

- Je la protège simplement, répondit-il vaguement.

- Tu as une curieuse façon de protéger cette femme Gunard, pourquoi te caches-tu ? De quoi as-tu peur ?

Gunard serra convulsivement ses mâchoires chaque fois que quelqu'un parvenait à lire en lui. Il passa un regard furtif sur la jeune femme assise près de leur couche, laissant apparaître sa peau diaphane sous les lueurs des flammes rougeoyantes du feu.

- Je n'ai pas peur, s'agaça Gunard en confrontant Fior le menton levé.

- Si, tu as peur parce que tu es un viking dont le passé n'est pas très glorieux, rétorqua Fior en croisant les bras ; Tu crains que cette jeune femme ne soit qu'une illusion...

- Veux-tu mourir Fior ? Parce que je ne suis pas d'humeur ce soir, murmura-t-il sombrement.

Fior était l'un de ses hommes les plus robustes. Ce dernier haussa des épaules pour le défier. Gunard était tellement fermé qu'il ne parvenait pas à accepter la vérité. Une vérité que Fior prenait plaisir à lui dire.

- Tu n'as pas à te cacher Gunard, tu as le droit d'éprouver du désir pour une femme, la seule femme que tu as connue a fait de toi un homme faible nous le savons tous.

Gunard le prit à la gorge pour le plaquer contre le chêne.

- Ai-je l'air d'être faible ! Siffla-t-il entre ses dents.

- Je ne parlais pas de cette force, répondit Fior en peinant à respirer ; Je parlais de celle qui habite ton esprit.

Gunard sentit son sang bouillir. Il pressa la gorge de Fior, les dents serrées.

- À présent, je peux sentir cette faiblesse devenir une force, reprit Fior en prenant un air sérieux ; Comptes-tu la laisser s'enfuir par peur qu'elle décèle en toi le monstre qui habite chacun d'entre nous ?

La tête tremblante de rage, Gunard desserra sa prise en songeant à la froideur de ses paroles.

- Gunard ?

À cette voix innocente et douce, il sentit sa rage disparaître pour laisser place à la crainte. Il tourna sa tête vers elle, rivant ses yeux aux siens. Elle venait placer ses mains près de sa poitrine comme si elle priait silencieusement.

- Gunard que se passe-t-il ? S'enquit-elle d'une voix effrayée.

Gunard relâcha la gorge de Fior en s'écartant brusquement.

- Une petite querelle entre amis, expliqua Fior en rajustant sa tunique tout en massant sa gorge ; Rien de grave femme...

Gunard sentit ses lèvres trembler d'un rictus amer alors que Fior partait en direction du camp tout en fredonnant l'air d'un chant de guerre.

La jeune femme s'approcha pour poser sa main sur son avant-bras.

Un monstre...

Fior avait raison. Gunard dissimulait ce monstre qu'il était et qu'il sera toujours.

- Gunard ? Est-ce de ma faute ? Je te cause des ennuis ?

Ses yeux de biche brillaient de craintes.

- Je suis la seule cause de mes ennuis Hava, répondit-il en agrippant ses bras pour la plaquer contre le chêne.

- Je peux voir dans ton regard de la peur Gunard...de quoi as-tu peur ? De ce que tu es ?

Il se figea...ayant compris qu'elle avait tout entendu de leur conversation.

- Tu as écouté notre conversation ? Demanda Gunard en posant son regard sur ses lèvres dans l'intention de la punir d'un baiser.

- Suffisamment pour entendre l'essentiel, dit-elle d'un souffle tremblant.

Gunard contracta ses mâchoires tout en survolant son visage d'un caresse.

- As-tu peur Hava ?

- Oui, avoua-t-elle d'une voix à peine audible.

Gunard caressa ses lèvres pleines de son pouce...des lèvres qu'elle avait pincée un instant plus tôt.

- La peur n'est pas une mauvaise chose n'est-ce pas ?

- Cela dépend Hava, murmura-t-il en abaissant son visage à sa hauteur ; Elle peut rendre faible ou fort.

Il pouvait entendre son souffle s'accélérer.

- La mienne me rend plus forte, répondit-elle en plaquant son avant-bras sur son torse comme pour l'empêcher d'avancer.

- La mienne me rend faible, articula-t-il d'une voix terne.

- Je ne peux y croire, répliqua la jeune femme, une lueur d'espoir dans les yeux.

- J'avais peur de ne jamais trouver une femme qui veuille de moi pour ce que je suis et Ena m'a convaincue que c'était le cas.

Hava ferma ses poings si fort qu'elle sentait ses ongles s'enfoncer dans ses paumes. C'était un tout autre visage que lui montrait Gunard et elle peinait à le regarder dans les yeux. Il était persuadé que si Ena l'avait épousé c'était pour les privilèges et non pour sa personne. Un si bel homme...malgré les traits sévères de son visage et de cette force sauvage qui émanait de lui.

- Ena n'est pas toutes les femmes Gunard, dit-elle en se pinçant les lèvres.

Il secoua de la tête, les sourcils légèrement froncés.

- Je regrette que tu ais écouté cette conversation Hava, murmura le viking en se massant le cou à la base de son terrifiant tatouage.

Hava profita du faible espace qu'il lui offrit pour reprendre son souffle.

- Moi je ne regrette pas...

Ses yeux sombres se braquèrent à nouveau dans les siens. Un regain de peur lui oppressait la poitrine.

- Hava tu devrais faire attention, je ne suis...

- Je commence à avoir froid Gunard, coupa-t-elle en s'entourant de ses bras.

C'était à moitié vrai, en réalité elle ne voulait pas l'entendre s'insulter de monstre. D'un mouvement vif il entoura sa cape autour de son corps et la pressa contre lui. Au contact de son torse, Hava ferma les yeux alors qu'il la cachait dans l'épais vêtement noir.

Hava aurait pu rester ainsi des heures. Ses premiers instant chez ces vikings sanguinaires lui paraissaient si loin...

Toutes les atroces souffrances qu'elle avait subie semblaient effacées par cette paire de bras puissants qui l'enlaçaient étroitement pour la réchauffer.

- Ça va mieux ? Demanda-t-il d'un murmura chaud et rassurant.

- Oui, bien mieux à présent.

Elle releva la tête de façon à atteindre son regard. Elle n'avait plus de visibilité, son champ de vision était rétréci par la cape...elle était littéralement cachée mais pouvait entendre les rires incessants des hommes et les femmes discutaient entre elles.

Derrière la pénombre, une flamme jaillissant du feu éclaira furtivement le visage du viking et elle put y lire une détermination sans faille.

Son index et son pouce se pressèrent sur son menton et il le redressa lentement. Hava entrouvrit ses lèvres, acceptant le baiser qu'il s'apprêtait à lui donner.

Alors il se pencha de tout son corps pour presser ses lèvres exigeantes sur les siens...

Il s'écarta doucement pour mieux les capturer.

- Vous n'avez pas tenu longtemps Danois, murmura-t-elle les paupières fermées.

Elle l'entendait émettre un faible et inaudible rire.

- Méfiez-vous Hava, je pourrais me tenir à distance suffisamment longtemps pour vous rendre folle, chuchota-t-il à son oreille avant de disparaître sous son regard consterné.

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