Chapitre 2




Hava se réfugia dans les cuisines dans l'espoir de retrouver son souffle mais des pas lourds lui indiquèrent que le viking était loin d'en avoir fini avec elle. Il repoussa la porte massive pour se poster non loin d'elle et enfin...Hava trouva le courage de le regarder dans les yeux. Grave erreur ! S'admonesta Hava en sentant un frisson d'horreur la parcourir. Il fallait se montrer honnête avec elle-même...Gunard était un homme au profil inégalable.

- J'ai espéré vous voir à mon chevet, reprit-il d'une voix sombre ; Pourquoi ne vous ai-je pas vu ?

Étourdie par cette question, Hava sentit ses lèvres trembler alors que lui, demeurait impassible à l'autre bout de la pièce, le regard ancré dans le sien.

- Votre femme a exigé que personne ne vienne vous déranger, expliqua-t-elle en affrontant son épais regard ; Je me suis informé de votre situation en tendant une oreille indiscrète.

Silencieux, l'homme continuait de l'observer avec gravité. Hava baissa les yeux sur la farine de blé repartie sur la table.

- Je voulais vous remercier de m'avoir aidé à parvenir jusqu'au bateau.

Hava releva lentement la tête vers lui, osant à peine croire qu'il s'en souvenait. Après tout n'avait-il pas perdu connaissance à bord du vaisseau.

- Ce n'est rien, murmura-t-elle en faisant mine de battre la farine ; Je n'ai fait que mon devoir.

- Vous auriez pu partir, contrat-il à son plus grand désarroi ; Le village le plus proche était à une demie journée de marche.

Hava en resta sans voix. Que diable essayait-il de lui faire comprendre ? Qu'elle n'était pas la bienvenue ?

- Et où aurais-je pu aller ? Osa-t-elle demander.

Il croisa les bras, modifiant la forme épaisse de ses biceps. Devant une telle démonstration de force Hava sentit ses lèvres s'assécher.

- Vous n'êtes pas là par désir mais par contrainte, parce que votre frère désir rester ici.

- C'est faux, bafouilla-t-elle en sentant la situation lui échapper.

- Vous mentez très mal, répliqua le guerrier en s'approchant ; Pourquoi ne pas simplement l'avouer ? Vous compliquer les choses.

- Dois-je comprendre que vous voulez me voir partir ? Demanda-t-elle d'une voix troublée.

Son regard se porta sur ses lèvres puis ses yeux d'acier tombèrent sur son épaule.

- Je n'ai jamais dit une pareille chose, j'essaye simplement de comprendre les raisons qui vous pousse à rester parmi des barbares qui vous ont presque traîné de force sur un bateau dans lequel vous n'avez pas cessé de pleurer.

Hava perdit son souffle en se rappelant ce jour qui avait marqué sa vie à jamais.

- Vous avez probablement raison, admit-elle enfin ; Je suis ici pour mon frère.

Un silence embarrassant combla cet aveu. Elle exhala un soupir tremblant, cherchant à vaincre l'angoisse qui l'a submergé.

- C'est tout ce que je désirais entendre de vous.

Hava ferma les yeux en ramenant des mèches rebelles qui balayaient son front. À travers le voile qui recouvrait ses yeux elle vit son index se rapprocher de sa tresse. Elle sursauta, sans bouger...

- Je constate que vos cheveux repoussent, nota le viking d'une voix dénouée de chaleur.

- Ce n'est pas régulier, répondit-elle sèchement ; Votre femme ne m'a pas épargné lorsqu'elle me les a coupé.

Immédiatement il éloigna son index, faisant retomber lourdement sa main le long de sa hanche.

Elle refusait de relever la tête car elle devinait déjà la colère qui animait son visage. Sa présence obstruait son air. Il était si grand qu'elle avait l'impression d'être une chose minuscule qu'il pourrait briser d'une seule gifle.

Et alors qu'elle sentait la tension monter d'un cran Hava remercia le ciel quand elle vit Holga passait les portes de la cuisine, obligeant le viking à se reculer.

- Oh Gunard je te cherche partout, déclara celle-ci en les regardant tour à tour ; Ivar voudrait te voir.

Hava garda la tête baissée en feignant être occupée mais le poids du regard suspicieux de Holga devenait de plus en plus lourd.

- Que me veut-il ? Cela ne peut pas attendre ? Demanda-t-il l'air agacé.

- Apparemment c'est urgent.

D'un grognement, le viking quitta les cuisines laissant derrière lui une menace inquiétante.

Enfin, elle put inspirer profondément sous le regard curieux de Holga. Rougissante, elle se racla la gorge et reprit son activité.

- Aurais-je interrompu un moment délicieux ? S'informa-t-elle sur le ton de l'humour.

Manquant de renverser la cruche d'eau, Hava s'empressa de secouer de la tête en feignant une attitude indignée.

- Non ! Pas le moins du monde, répondit-elle en espérant que ses joues ne trahissent pas cette réponse ; Il est venu m'accuser de ne pas l'avoir remercié pour m'avoir sauvé la vie.

- Oh...

Holga effaça son sourire.

- Je suis navrée, tu sais Gunard est un peu bougon en ce moment, explique Holga en venant lui offrir un peu de réconfort ; Depuis sa blessure il est resté longuement seul dans ses appartements.

Hava fit mine d'être désintéressée mais son esprit s'amusa à la piéger aussitôt.

- Pour quelle raison serait-il en colère ? Pourquoi semble-t-il si...

Peinant à trouver ses mots, Holga esquissa une grimace.

- ...Menaçant ?

Hava s'empressa d'acquiescer.

- Je l'ignore, avoua Holga en soupirant ; Peut-être qu'il est préoccupé par Ena.

Ena...

Le simple fait de prononcer le nom de cette femme et Hava avait l'impression d'être prise de subites et violentes nausées. Cette saxonne était impitoyable et perfide. D'ailleurs elle se demandait comment Gunard avait-il pu tomber en amour pour elle.

- Ena a séduit beaucoup de vikings, expliqua Holga comme si elle avait lu dans son esprit ; Gunard a été le dernier à passer entre ses mains expertes, il a fini par la posséder et la prendre pour femme.

- Étais-ce une décision mûrement réfléchi ? Osa-t-elle demander en cherchant à réprimer sa soif de comprendre et d'en apprendre plus sur cet étrange viking.

- Gunard ne prend jamais une décision sur une coup de tête, répondit Holga très sérieuse dans son récit ; C'est le viking le plus réfléchi du peuple. Il n'agit jamais sur un coup de tête et c'est grâce à cette qualité qu'il a gagné bien des combats.

Hava se mordit la lèvre comme une petite fille désireuse d'en savoir plus.

- Vr...aiment ? Alors il l'aime, conclut-elle en posant la paume de sa main sur la pâte.

- Je ne suis pas dans la tête de Gunard mais une chose est sûre, il y a beaucoup de tensions entre eux depuis plusieurs jours.

Au risque de se montrer trop gourmande Hava préféra en rester là. Après tout la vie de cet homme ne la regardait pas.

- J'ai arrangé la tunique de Beth elle est prête pour le festin de ce soir, déclara-t-elle d'une voix plus assurée.

- Merci Hava tu es une grande couturière, tu fais des miracles !

Esquissant un faible sourire de remerciement, Hava se mordit l'intérieure de sa joue tout en battant la pâte.

- J'espère que tu te joindras à nous ?

- Non je ne pense pas, je me sens très épuisée aujourd'hui et...

- Tu ne sais pas mentir jeune fille ! Coupa Holga en la pointant du doigt ; Il est temps pour te de te familiariser avec le peuple qui t'a accueilli.

Hava aurait pu se battre pour obtenir la permission de se retirer mais elle n'était pas en position de force. Holga était la chef rebelle des femmes et menait d'une main de maître l'art de déceler les failles. Autrement dit Hava n'avait pas le choix.

- Très bien, je viendrais.

Satisfaite Holga lui sourit.

- Ce sera un grand festin, nous allons nous amuser, assura-t-elle avant de partir d'un pas assuré.

- Je n'en suis pas si sûre, murmura-t-elle quand la porte se referma sur elle.

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