Chapitre 12: Badump

Je rentre au manoir en prenant le bus. J'avais ramené ma bicyclette au mécanicien pour la réparer après ma dernière chute. J'ai profité pour réviser et lire les consignes du contrat.

J'ai constaté qu'il a rédigé les gestes et comportements d'Eulma dans les moindres détails. Il avait même marqué les dates. Ils ont été écrits il y a trois ans, dans la mémoire de sa sœur. Je doute fort qu'il envisageait les utiliser dans un tel contrat, d'ailleurs il ne s'agit que d'une copie incomplète. En tant que frère, il a une attitude totalement différente. Les seules fois où je l'ai vu sourire sont quand il évoquait sa sœur ou enseignait ou quand il se moquait de moi .

« Bonsoir ! » Il ne me prête aucune attention. Il était assis sur le canapé dans le vestibule devant un ordi. Il avait changé ses habilles de cet après-midi.

Je ne me plains pas et approche. J'estime qu'il ne m'a pas entendu .

« Bonsoir! » Je répète.

Il me regarde avec ce regard qui donne la trouille.

« Bonsoir. » Répond-t-il en fixant son écran de nouveau.

« Comment était votre journée? »

« Tu . »

« Quoi? »

« Tutoie-moi. »

Je n'objecte pas, normal de tutoyer son frère non. Hah frère... Je ne suis toujours pas habituée.

« Comment était ta journée? »

« Prends une douche d'abord, tu empeste. »

Ma bouche tombe d'étonnement. Il me tape sur les nerfs. Quel enfoiré.

« Entendu. »

Je le laisse et monte les escaliers vers ma chambre. Je me lave, enfile un short et un large pull noir. Je mets généreusement mon parfum pour lui brûler les narines. Je coiffe mes cheveux et les attaches avec un élastique. Je redescends en ayant toujours la haine.

« Tu as mangé? » Questionne-t-il en levant enfin la tête de son ordi. Il l'éteint et le plie .

« Non pas encore et toi? »

Il se lève. Il portait un sweater bleu clair et un jeans noir. Il est souvent habillé de manière formelle que le voir décontracté comme ça me parait un miracle impossible.Son doux parfum effleure mon nez quand il passe devant moi. Je m'écarte et pour un instant, de sa haute taille, j'ai eu l'impression qu'il me détaillait.

Badump... !

« Je vais nous faire quelque chose à manger dans ce cas. »

Je le suis littéralement en courant pour rattraper des pas. Il marche vite même à l'intérieur de la maison.

« Laisses-moi cuisiner. Restes assit. Tu dois avoir un travail à accomplir et puis c'est écrit qu'Eulma aimait vous nourrir. »

« Tu . »

« ....Te nourrir. »

« Tu sais cuisiner? »

« Pas vraiment. À quel point ça peut être difficile, il suffit de tout mélanger sur un feu ? Je peux le faire...Je crois. »

« Je ne veux pas crever de diarrhée. Reste là où tu es. »

« Je ne suis une bactérie , tu sais? »

Je souffle et m'assoie sur une chaise. Je pose mes deux coudes sur la table et mon visage entre mes mains. Le manoir est propre car l'agence de propreté m'a précédé. Il fait beau et cozy.

Je l'observais se déplacer dans tous les coins de la cuisine avec flexibilité. À chacun de ses mouvements, les vagues de son parfum me chatouillaient la narine. Je ne sais pas comment décrire l'odeur, c'est frais,mentholé,citronné et ça laisse un goût sucré à la bouche. Cet homme est créé parfait, il a tout pour faire tomber les femmes dans les paumes. Je ne suis pas une femme moi, rien en moi n'est féminin. Je suis à l'abri.

« Je m'ennuie, laisse-moi t'aider. »

« Tu peux éplucher les légumes? »

« Oui! »

Je quitte mon site et le rejoins, il me passe un couteau et deux pommes de terre. Il avait déjà fait le reste.

« Tu vas préparer quoi? »

Je glisse ma tête de façon à voir ce qu'il mélangeait sur la poêle.

« Spaghettis à la bolognaise. C'est rapide et pratique. »

Je lève les épaules, j'ignore toute la procédure. Une idée me parvint. Et si j'apprenais en le regardant ?

« Pouvez-vous m'expliquer? Je vais apprendre et vous le faire la prochaine fois ».

Il fait une enjambée et passe de l'autre côté. Je le suis, dos courbé et mains occupées par l'épluchage . Il retourne à sa place initiale, moi aussi.

« Mets-toi à gauche , j'utilise ma main droite , tu ne verras rien . »

J'obéis. je ne me suis pas rendue compte de notre proximité que lorsque j'ai entendu sa voix tout près de moi . J'avais l'impression qu'elle était un peu plus enrouée. Calme, douce . Fatigué ?

Badump.. !

« Tu commences par verser l'huile.... »

Il m'explique la procédure avec patience et sérénité. Je ne cessais de voir en lui le professeur qu'il était et la maturité qui animait son être. Je souris en me rendant encore compte de la folie de ce qui m'est arrivée. Je ne l'aurai jamais imaginé, manger un dîner tout chaud et fait maison. Et avec qui ? Lui d'entre tout le monde.

« Pourquoi tu souris ? T'as l'air stupide. » Me tire-t-il de mes pensées.

Il était à quelques centimètres de moi. Je pouvais discerner parfaitement ses longs cils, les reliefs de son beau visage, ses cheveux noirs un peu malmenés par une douche. Mon cœur s'emballe, je sens mes joues chauffer. Que m'arrive-t-il?

Badump Badump .... !

« Je ne suis pas stupide. »

« Écarte-toi, tu gêne. » Je le fuis pour me calmer. Nous dinons ensuite sans dire le moindre mot. Je lui jetais de temps en temps des coups d'œil rapides. Je cherchais ce que je dois faire ce soir de ce qui figurait dans la liste des consignes.

« J'ai fini avec le département de la maladie polyvalente. Mon prochain service sera en unité de chirurgie cardiovasculaire. »

Il mâche gracieusement et essuie sa bouche avec une serviette.

« Je sais . »

« Vous ..pardon ..Tu le savais? »

« C'est ce que j'ai dit. »

« Comment? »

« J'ai reçu la liste de stagiaires de la part de la faculté. »

Je tourne l'information dans la tête avant de comprendre. Il se lève et fait la vaisselle.

« Attends! Tu veux dire que c'est vous...euh toi qui va nous encadrer? »

Il acquiesce de la tête, ses cheveux soyeux flottent. Ce geste un peu enfantin le rendait mignon? Je n'arrive pas à croire que je le trouve mignon? Au passage où est l'aura noire qui l'entoure?

« Vous .. euh tu as accepté? »

« Narie, ne parlons pas du travail ni de la faculté ici. J'aime me reposer quand je suis chez moi. »

Je me fige à l'entente de mon nom, même si dit avec agacement, il avait une façon différente de le prononcer .

« Pardon. Je suis Eulma ». Dis-je en débarrassant la table. Je nettoie les plats.

« Oui .. Eulma . » Je sens qu'il est aussi mal à l'aise avec ce jeu de role, ce fait me rend encore plus nerveuse .

Il se caresse légèrement la tempe. Il avait l'air exténué. Dieu combien des heures est-il resté debout à opérer?

« Tu as des céphalées? »

Il me regarde en grimaçant de douleur .

« Oui. »

« Tu as pris un antalgique ? »

« Ça ne m'aide vraiment pas. »

« William... » Articulai-je faiblement.

« Oui ? »

« Tu es fatigué. »

« ... »

« Attends-moi au canapé, je reviens. Je sais comment te soulager ».

Il ne me questionne pas à ma grande surprise et fait ce que je lui ai demandé. Je monte les escaliers vers ma chambre. J'avais prévu ça mais je ne pensais pas que je le ferai si tôt.

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