Chapitre 96
Désolée du gros retard. J'ai énormément de travail à la fac en ce moment. Je ne peux pas vous dire si le prochain chapitre sortira bien dimanche prochain, cela dépendra de mon avancée. Allez courage, plus que 5 semaines avant les vacances de Noël !
PDV Lester
Je suis une loque. Un déchet, pour être plus précis.
Je ne sais pas comment réagir à ce que je ressens. Je ne sais pas ce que je ressens, en réalité. C'est un mélange d'une multitude de sentiments, qui ne permet pas de les décrire individuellement.
Parfois, je reste amorphe dans mon lit. Je ne fais rien d'autre que de garder mon regard fixement planté sur un coin de mur, pendant des heures. D'autres fois encore, je laisse exploser ma colère. Sur à peu près tout et n'importe quoi. Mes colocataires, pour commencer. Cela fait un moment qu'ils ont cessé d'oser entrer dans ma chambre.
Je suis exécrable, je le sais.
Je ne vais plus en cours. Je n'arrive même plus à jouer. J'ai honoré nos concerts de la semaine sans pour autant les apprécier. Je crois que c'est la première fois de ma vie que je vais sur scène à reculons. La musique ne me calme pas, pas plus que mes amis.
Je suis une boule de nerf, une boule de stress, une boule de tristesse, de douleur peut-être aussi. Et je ne saurais dire dans quel ordre exactement.
Je n'arrive pas à définir comment je me sens. C'est assez flou. Parfois, j'ai l'impression de le saisir et la seconde d'après, non. Je peux en revanche affirmer que je n'aime pas la situation.
Je passe mon temps à me repasser en boucle la scène de notre dispute. De notre rupture. Je n'arrive pas à m'y faire. Comme je n'arrive à supporter mon comportement depuis. Je m'agace, mais je ne parviens pas à agir autrement. J'ai l'impression d'être un enfant qui ne sait pas gérer sa frustration. Mais c'est bien plus que de la frustration. Je ne sais pas exactement ce que c'est, mais c'est douloureux.
La porte de ma chambre s'ouvre avec une douceur qui ne ressemble à aucun des trois hommes habitant ici. Carter passe sa tête dans l'entrebâillement, jugeant si il peut entrer sans risquer de se prendre une chaussure que je lui aurai lancé. C'est ce qui est arrivé à Sam, la dernière fois qu'il a tenté de me faire la leçon.
- Zone neutre ?
Je ne réponds rien, et le laisse ouvrir la porte un peu plus grand et s'avancer à l'intérieur. Je n'ai pas forcément envie de le voir, de l'écouter ou de discuter. J'attends encore de savoir ce qu'il va dire pour décider de renfiler mon costume de connard. Quoi que je ne suis pas sûr de l'avoir quitté, ces derniers temps.
- Tu veux manger ?
Je secoue seulement la tête. J'irais probablement piquer un truc dans le frigo quand ils seront couchés. Ça m'évite de les croiser. Je n'ai besoin ni de leurs sermons, ni de leurs regards mi-juges mi-compatissants en ce moment.
J'en ai eu assez quand ils sont sorti de la chambre après avoir entendu l'entièreté de la dispute, ce jour là. Ils n'ont pas manqué de me donner leurs avis, depuis.
- Je sais que tu ne veux pas en parler, mais tu ne penses pas y avoir été un peu fort ?
- Effectivement, je ne veux pas en parler.
Et je ne pense pas y être allé fort. Évidemment, j'aurais voulu éviter qu'on se retrouve dans cette situation. Mais je devais lui dire ce que j'avais sur le cœur, et elle devait l'entendre.
- Les', je ne dis pas que tu as tous les torts, je sais que tu pensais seulement à elle mais...
- Je ne veux pas ton avis sur la question, Carter. Tu me l'as déjà donné 10 fois sans que je ne le demande, je me passerai de la onzième.
Dans une autre situation, je m'en voudrais de lui parler ainsi. Mais j'ai besoin qu'il comprenne mon envie d'être seul. Et que mon couple, ou ce qu'il en reste, ne le concerne pas forcément. Je dois réfléchir, réussir à poser mes pensées sur tout ça. J'ai déjà bien du mal à y parvenir avec tout ce que je ressens, alors cela devient mission impossible, quand ils se relaient tous pour tenter de me donner leurs versions de la bonne chose à faire.
Il souffle, mais n'insiste pas, pour une fois. Tout du moins, sur ce point.
- On a essayé de contacter Lyra, mais elle ne répond pas...
Je n'imagine pas l'état dans lequel elle doit être, et je me retiens de le faire. Si il est similaire au mien, je détesterais la savoir ainsi. Pourtant, je sais au fond qu'elle ne peut pas être en train de sauter de joie. Qu'elle doit être autant impactée que moi par la finalité de notre altercation.
Mais aucun d'entre nous ne parvient à faire un pas vers l'autre. Parce que je ne supporte pas de la voir se faire du mal. Et qu'elle ne supporte pas que je lui parle de musique. Nous sommes face à une voie sans issue, et je ne sais pas encore si nous allons trouver la sortie.
- Tu sais, ça commence à parler, sur les réseaux... les fans voient bien que tu ne vas pas bien. Elles s'inquiètent. Elles veulent que tu sois heureux.
- Et ? Tu crois que les fans sont mon problème pour l'instant ?
- Lester, vu les messages, elles te soutiendront, si tu parles de Lyra.
Je lâche un rire mauvais. Il y a quelques jours, j'aurais apprécié l'information. Elle m'aurait fait réfléchir. Mais pas maintenant. Elle me fait plus de mal que de bien.
- Tu veux que je révèle quoi exactement ? Que j'ai perdu ma copine ?
Le dire me fait mal au cœur. Oui, je l'ai perdu. Parce que je suis têtu, et incapable de la laisser se faire du mal sans rien dire. Parce que je ne suis pas capable de passer outre.
- Vous avez juste besoin de vous parler et...
Mais non, tout ne peut pas être réglé avec des paroles. Une bonne explication ? Nous ne sommes pas prêts l'un comme l'autre à l'avoir. C'est plus compliqué, et il n'est pas à notre place pour le savoir. Il y a des tenants et des aboutissants qui lui échappent.
Lyra doit se remettre à la musique, et je ne veux pas céder sur ce point. Je ne peux pas la regarder se détruire.
De mon côté, je m'en veux de la brusquer tant. Je m'en veux parce que je sais le traumatisme qu'elle a vécu. Les traces qu'elle en garde. Pourtant, je continue d'insister. Parce que chaque seconde où je la vois souffrir me fait un mal de chien. Même si elle ne se rend pas compte elle-même de sa douleur. Elle est là, juste en dessous de la surface, et un jour, elle va lui exploser à la gueule. Je veux l'éviter.
Sauf que mon empressement lui fait du mal, et qu'ainsi, nous n'arriverons jamais à avancer.
- Juste, tais-toi, s'il-te-plaît.
Pas d'animosité, dans ma voix. Seulement une fatigue immense, un ras-le-bol qui joue sur mon énergie et mon moral.
- Vous ne pouvez pas rester comme ça.
- Bordel Carter, c'est trop te demander de me foutre la paix ?
Je ne le laisse pas répondre. Je sens ma colère monter, comme ces derniers jours, sans prévenir. Elle arrive, dévastatrice, et repart aussi vite qu'elle est arrivée. Je ne veux pas d'une nouvelle dispute.
J'en ai assez.
J'ai besoin d'air.
Alors je me contente de sortir à toute vitesse de la pièce, de l'appartement, et d'enfourcher ma moto.
J'en ai assez.
J'ai besoin d'air.
Alors je roule à toute vitesse, pour décompresser. Je laisse ma colère s'échapper dans l'adrénaline de ma rapidité.
J'en ai assez.
J'ai besoin d'air.
Alors je file sans regarder où aller. Pourtant, je me dirige vers cet endroit sans le contrôler.
J'en ai assez.
J'ai besoin d'air.
Et je me retrouve devant cette porte, je frappe de grandes embardées.
Le regard de mon père croise le mien. J'y lis de la surprise, de la perplexité. Et puis il doit lui même comprendre ce qu'affichent mes traits, ce que moi-même je n'arrive pas à analyser. Il m'ouvre en grand et je ne tarde pas à entrer.
Je me laisse tomber dans un canapé, et il s'assoit à mes côtés.
Je pensais ne pas savoir quoi dire, ne pas pouvoir me confier, et pourtant, face à ce père que j'imaginais avoir perdu pendant tant d'années, ma langue se délit pour exposer toutes mes peines et pensées.
- On s'est disputé.
Il n'a pas besoin que je précise avec qui. Mon état parle pour moi, et je suis persuadé qu'il a remarqué depuis un moment qu'une seule personne peut avoir un tel effet.
- C'est un chose normale, dans un couple.
Je n'ai jamais dit à mon père ce que nous étions, mais je ne suis pas surpris qu'il l'ait compris. Je n'ai pas vraiment tenté de le cacher, avec lui.
- Nous n'en sommes plus un.
Ses sourcils se froncent, je le vois du coin de l'œil. Et quand il me demande la raison d'une telle finalité, je détourne complètement le regard, incapable de faire face à ce qu'il va en penser.
Je débite les évènements à une vitesse qui me surprend, avec une précision folle. Comme si mon esprit tenait à ce qu'il ait tous les détails. Me suis-je déjà confié ainsi, à n'importe qui, auparavant ? Non. Même pas à Carter. Je mets des mots sur ce que je ressens, face à tout ça, je le laisse avoir un aperçu de ce qu'il y a au fond de moi.
Je ne parle pas seulement de cette dispute. Je parle de tout ce qu'il peut y avoir entre nous. Toutes les prises de têtes, les doutes, sur le fait de montrer notre relation, sur les erreurs que nous avons pu faire l'un et l'autre.
M'exposer ainsi ne me ressemble pas. Mais je ne peux nier devenir un nouveau moi quand il s'agit de cette femme là.
- Tu sais Lester, l'amour n'est pas un chemin tranquille. Je crois que tu ne peux pas imaginer le nombre de fois où Hélène et moi avons été dans votre situation.
Je reste étonné de l'information, mais je ne dis rien de plus, le laissant continuer.
- A de nombreuses reprises, nous avons dit ces mots, à voix haute ou dans notre esprit. « On n'a rien à faire ensemble ». Toujours après une dispute, à ce moment où nos émotions étaient si fortes qu'elles balayaient toute raison, tous souvenirs heureux de notre relation. Et pourtant nous sommes encore là. Tu sais pourquoi ? Parce qu'il y a avait toujours une bonne raison, à nos disputes. C'était l'intérêt de l'autre. Évidemment, je te parle de vraies prises de tête, pas de chicanes sur le lave-vaisselle ou la couleur des rideaux.
J'aimerais lui rendre son petit sourire, qu'il glisse pour tenter de me détendre, mais je n'en suis pas capable, pour l'instant.
- A partir du moment où vos disputes portent sur des points qui vous semblent être dans l'intérêt de l'autre, elles sont absolument nécessaires à votre relation.
- A quoi bon, si elles brisent la dite relation ?
- Mon fils, si il y a bien une chose que je sais, c'est qu'il est impossible de mettre un terme à un lien si fort juste pour une altercation. Les mots ont peut-être été prononcés, mais ils n'ont aucune réelle portée. Ce sont vos cœurs, qui peuvent décider de vous séparer. Tant qu'ils battront l'un pour l'autre vous ne serez pas vraiment séparés.
- La raison n'a-t-elle aucun impact ?
Les sentiments ne sont pas toujours en accord avec elle. Pourtant, c'est parfois elle, que l'ont doit écouter. Quand les sentiments blessent, il faut savoir y renoncer.
- Ta raison imagine-t-elle un avenir sans elle ?
Je ne réponds rien, mais tout mon être me hurle la réponse. Non, évidemment que non. Je crois qu'il m'entend quand bien même je ne le formule pas.
- Mais on se fait du mal. Je ne supporte pas de la voir refuser ce qui est bon pour elle. Cela me blesse, et mon insistance à ce sujet lui cause de la douleur, autant qu'elle s'en fait elle-même. Un putain de cercle vicieux.
- C'est avec de l'amour, que tu la feras changer d'avis. Et de la patience.
Deux mots que je ne suis pas certain de comprendre.
L'amour. Est-ce que je l'aime ? Je ne peux le nier, ou l'affirmer. Comme je ne comprends toujours pas ce que cela peut signifier. Peut-être que si, et que je ne suis tout simplement pas prêt à l'entendre. Ou peut-être que non. Je suis tout autant perdu qu'au premier jour sur ce mot.
La patience. Ce n'est pas vraiment mon fort. Cela me paraît insurmontable, de passer plus de temps à la voir nier l'évidence. Mais pour elle, ne serais-je pas capable d'attendre ?
Je n'en sais rien. Je suis paumé.
- Je n'ai jamais dit que cela allait être facile. Mais tu sais quel premier pas tu devrais faire ? Assumer. Assumer votre relation aux yeux de tous, malgré tes craintes. Ne pas faire ce pas... c'est prendre le risque de la perdre.
Mais n'est-ce pas trop tard, en réalité ? Malgré tous ses mots qui se veulent rassurants, ne l'ai-je pas déjà perdue ?
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