Chapitre 8

PDV Lyra

Bordel. Je crois que jamais dans ma vie je n'ai acceptée qu'on me traite différemment des autres. J'ai toujours voulu qu'on me considère comme si rien n'avait changé en moi, comme si je n'avais aucun putain de handicap.

Mais pour une fois, j'aurai aimé une exception. Juste cette fois, j'aurai aimé que ma condition me permette de passer au travers du filet. Il a fallut que je tombe sur une personne qui a décidé de me traiter comme tout le monde, alors que je recherche une personne ainsi depuis des années.

Travailler avec un ou une inconnue ne m'enchantait déjà pas. Mais tomber sur une personne qui a une telle attitude, c'est trop pour moi.

Je n'ai jamais été du genre à aller vers les autres. Dans ma vie, bien avant de perdre l'ouïe, j'avais peu d'amis. Et aucun véritable. Seulement des simulacres, des personnes qui n'ont jamais cherché à avoir des nouvelles quand je suis partie. Cela ne m'a pas blessée, je le savais. J'ai grandi dans un monde où la concurrence est la règle de vie. Il n'est pas possible de nouer de vraies relations dans ce genre de cadre, seulement des illusions pour que notre vie est l'air parfaite. Je m'en fichais. J'avais ma musique, et ma sœur, et c'était bien suffisant pour moi.

Mais aujourd'hui je n'ai plus rien, et pour la première fois, j'ai eu l'occasion de rencontrer une personne. Mais surtout, je n'ai rien fais pour. Je ne sais pas comment aller vers les autres. Alors travailler avec n'importe qui dans cette salle aurait été une épreuve pour moi, dans le sens où il aurait fallu que je noue une relation avec elle. Ne serait-ce que cordiale. Et là, je me retrouve dans une situation où l'épreuve est insurmontable, car la personne que j'ai en face de moi n'a aucune considération pour ma personne.

Lester, ou Monsieur Cliché -ça lui va mieux- n'en a rien à faire de moi. Cela ne me dérange pas plus que ça, mais parler avec lui aurait déjà été difficile il y a des années, alors n'en parlons pas maintenant. Et alors que je fais l'effort de passer au-dessus de mon incompétence dans le domaine, je n'ai le droit à rien. Pas même un regard, ou une réponse sincère.

Il n'a pas l'intention de faire ce devoir, j'en suis persuadée. Dans un sens, cela pourrait m'arranger. Travailler seule, bien que le sujet n'évoque rien pour moi, m'aurait évité de devoir créer une relation avec une autre personne. Mais d'un autre coté, c'est plus que problématique, quand on voit ce qu'à pu préciser le professeur sur sa feuille. C'est d'ailleurs l'élément qui m'a décidé à lui adresser la parole.

Je suppose que lui ne l'a pas lu, ou bien qu'il n'en a strictement rien à faire. Je dois dire que je n'ai pas envie de passer une nouvelle année dans cet établissement parce que ce gars a décidé de se la couler douce. Reste plus qu'à faire en sorte que le professeur ne remarque pas qu'il n'a rien fait.

Difficile, mais faisable.

Je n'arrive pas à cesser de me demander pourquoi. Pourquoi a-t-il agit de cette façon avec moi ? Est-ce parce que je suis différente, qu'il se refuse à ne serait-ce que me répondre correctement ? J'ai l'impression qu'il n'aime pas forcément les autres. Il refuse systématiquement de dialoguer avec les filles qui le suivent partout, et du peu que j'ai vu cette semaine, il est sans cesse seul. Mais je dois me tromper. Ce type est l'archétype même du bad boy des films, qui les fait toutes tomber, les enchaîne, et se la joue mystérieux pour s'en faire un peu plus.

Il n'est sûrement pas le genre de personne que j'apprécierais de fréquenter. De toutes façons, je n'ai envie de fréquenter personne, Talia me suffit comme seule connaissance. Je peux très bien m'en sortir sans être entourée de mille personnes. La solitude est dans tout les cas une de mes grandes amies.

Alors si le soucis ne vient pas de lui, il vient forcément de moi. Et je ne peux que me dire qu'il refuse de s'afficher avec la nouvelle, qui plus est la sourde. J'ai l'habitude, mais ce n'est jamais agréable.

Mieux vaut ne pas y penser. Seule dans ma chambre depuis que je suis rentrée, je me mets à réfléchir un peu plus à ce fameux exposé, plutôt qu'à mon binôme. L'amour. C'est vague pour moi. Si déjà les relations amicales ne sont pas mon fort, que dire des relations amoureuses. Toutes les problématiques qui me viennent à l'esprit sont simples et vagues. Et je suis persuadée qu'elles ne susciteront aucun intérêt chez mon professeur.

Un exposé doit commencer par une définition du sujet étudié. Mais comment définir ce que l'on ne connaît pas ? Le dictionnaire contient une solution, mais l'on m'a toujours dit que l'amour était toujours une définition personnelle. Hors, tant que ce sentiment n'a pas atteint le cœur de la personne, comment son esprit pourrait-il former une définition acceptable ?

Pour moi, l'amour c'est le néant. Je n'ai rien à dire sur lui, à part ce que j'en vois venant des autres. Mais cela ne reste que des interprétations, pas des faits qui pourraient me servir concrètement. On ne construit rien sur des hypothèses. Mais je n'ai rien d'autre.

Je souffle un bon coup et me laisse tomber en arrière sur mon lit. Note en profite pour sauter et se blottir à côté de moi, et je laisse ses poils caresser ma peau.

C'est réconfortant. Les animaux sont un soutient que beaucoup n'évaluent pas à se juste valeur. Sans Note, je crois que je ne me serais pas relevée après ce jour, il y a 5 ans. J'aurai sombré. Cette grosse boule de poil a été ma lumière, sa joie de vivre et son soutient m'ont maintenu à la surface. J'ai hâte de pouvoir l'emmener avec moi au lycée, car la journée, sa présence me manque énormément.

Quand j'arrive au lycée le lendemain, je trouve une nouvelle fois Talia devant l'établissement, qui m'attends. Rapidement, elle se met à parler, comme toujours, et nous avançons dans les couloirs sans qu'elle ne s'arrête une seconde. Je me demande comment elle fait pour ne jamais être à court de salive, mais c'est une information que je ne compte pas lui demander. Je ne voudrais pas la vexer. Elle est la seule personne qui m'adresse la parole ici, je n'ai pas envie de perdre cela.

Alors qu'elle me parle de Arnaud, son voisin qui élève des oies dans un appartement, elle se met à ouvrir les yeux ronds comme des ballons. La scène est comique, car elle porte par dessus cela des lunettes en forme d'étoiles roses, qui renforce son look exubérant. Je finis par me retourner pour voir ce qui la met dans cet état quand je vois Lester nous regarder. Mais en plus de cela, il s'avance vers nous, et les questions fusent alors dans ma tête.

Pourquoi s'approche-t-il de nous ? Il s'arrête à une distance raisonnable et me fixe, avant de se mettre à parler.

- Pour l'exposé, on peut aller chez toi ?

Je reste muette un instant face à cette entrée en matière. Passons le fait que les bonnes manières ne sont visiblement pas son fort, je reste plutôt scotché à l'idée qu'il veuille travailler. Il compte vraiment faire cet exposé ? Est-ce une mauvaise blague pour ridiculiser la nouvelle ? Il continu de me fixer pendant que je ne dis rien, et je comprends alors qu'il est sérieux. Il compte vraiment travailler, et je suppose que c'est parce qu'il a prit connaissance de la feuille de consigne.

Et en plus de travailler, il veut le faire chez moi. Cette nouvelle n'est pas rien. Je ne sais pas trop comment vont réagir mes parents en voyant débarquer un type comme lui à la maison, ni si j'ai vraiment envie qu'il rentre ainsi dans mon intimité. Pour mes parents, je suppose que qui que ce soit, ils seront heureux de me voir avoir des contacts humains. Mais pour le reste... pourquoi pas chez lui ? J'ai envie de lui demander mais maintenant qu'il a décidé de bosser, je n'ai pas vraiment envie de le braquer.

Alors que finis pas bégayer la réponse, parce que je suis encore chamboulée qu'il me parle, et qu'il me dise cela.

Je n'ai même pas fini ma phrase qu'il s'en va, me laissant planter là avec une tonne de question. Je lui parle une dernière fois, et il me répond d'un signe de main, que j'interprète comme un « plus tard ».

Alors qu'il part définitivement, je remarque le regard d'une foule de personne sur moi. Je ne comprends pas vraiment pourquoi, et je me mets à imaginer que c'est parce qu'ils m'ont vu parler avec Monsieur Cliché. Mais Talia m'explique alors que j'ai légèrement criée lors de ma dernière tirade, attirant leur attention. Cela a pour effet de faire rougir mes joues, et j'ai envie de me terrer dans mon casier. Moi qui déteste me faire remarquer.

Mais ma gêne, Talia n'en a rien à faire. Ce qui l'intéresse, elle, c'est ce type qui vient de m'aborder.

- J'arrive pas à croire que tu vas travailler avec LE Lester.

Même si je ne l'attends pas, je vois bien qu'elle a insisté sur le « LE ». Chose que je ne comprends pas forcément.

- Pourquoi ? Qui est ce type en fait ?

J'ai besoin d'en savoir plus sur lui, même si j'ai déjà ma petite idée. Ce bahut ressemble à une série pour adolescent, à tout point de vue. Il n'est donc pas difficile de trouver qui est qui.

- Lester est un musicien. C'est le guitariste des Madness.

- Madness ?

- Tu ne connais pas ? C'est genre le groupe du moment. Enfin, ici. Ils sont hyper connus dans cette ville, et dans les environs.

Ok. Donc on a bien un guitariste, mystérieux, plutôt canon, d'un groupe connu. Si ça ce n'est pas cliché. Manquerait plus qu'il fume et qu'il est une moto tiens.

- Autre chose à dire sur lui ?

Elle se met à réfléchir, comme si elle n'avait pas mille et une chose à raconter à son sujet. Il m'a fallu largement moins d'une semaine pour comprendre que Talia est ce qu'on appelle une commère.

- Bien, c'est pas forcément un type fréquentable tu vois...

Tu m'en vois ravie. Dire qu'il va venir chez moi.

- Pourquoi ?

Elle se rapproche de moi, comme si elle voulait chuchoter. Sauf que pour moi, cela ne fait aucune différence. Elle pourrait faire du playback que je ne m'en rendrais pas compte.

- Il paraît qu'il... tu vois quoi ?

- Non ?

- Bin, les filles...

Je commence à voir où elle veut en venir, puisque que cela ne m'étonnerait pas trop.

- Il paraît qu'il a pas mal de conquête à son actif.

- Ce sont seulement des rumeurs ?

- Vu son physique, je dirais que ce sont des rumeurs plus que fondées.

Je n'ai jamais été trop du genre à me fier aux rumeurs, mais dans le cas présent, mon idée sur ce garçon ne date pas d'hier. Ce serait bien la première fois qu'une rock-star ne touche a aucune des femmes qui l'approchent. Pour moi, jusqu'à preuve du contraire, il porte merveilleusement bien le surnom que je lui ai trouvé.

- Pourquoi il n'est pas toujours avec des filles ici ?

Elle hausse les épaules.

- Il paraît qu'il les préfère plus âgées.

Je préfère oublier cette phrase pour éviter à mes pensées de dériver et lui pose la dernière question qui me vient sur ce garçon.

- Et ses amis ?

- Ils ne sont pas ici. Carter, le chanteur de son groupe, est dans un lycée privé, tandis que les deux autres membres, Sam et Arthur, ont fini leurs études.

Je hoche la tête et arrête un peu de l'écouter, pour me concentrer sur mes pensées. Plus les minutes passent, plus je commence à regretter d'avoir accepté ce type chez moi. Je ne le connais pas, il va venir chez moi, et tout laisse à penser qu'il n'est pas une personne que je devrais fréquenter. Il passe sa vie dans des pubs, sur la scène, habillé en blouson de cuir, à ramener une fille différente chaque nuit.

Ai-je vraiment envie de laisser un type dans son genre entrer dans ma vie ? Rien n'est moins sûr.  

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Ah les rumeurs... dire qu'elles sont fausses x) Mais quand Lyra va-t-elle s'en rendre compte ? Vont-ils réussir à s'entendre ? 

A vendredi pour la suite, 

Kiss :*

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