Chapitre 65

PDV Lester

Qu'est-ce que j'aime le plus ? Cette jolie robe, qui met sa peau pale en valeur ? Son maquillage, pas trop prononcé, mais qui ravive la couleur de ses yeux ? Ses yeux justement, qu'elle a décidée de ne pas cacher, pour une fois ? Peut-être a-t-elle fait ça parce qu'elle comprend que cette particularité, j'adore ça. Ou bien est-ce sa coiffure, qui dégage son cou sur lequel je voudrais déposer mes lèvres ?

Non. Non ce n'est pas ça. Ce que j'aime le plus, définitivement, ce sont ses joues qui rougissent sous la force de mon regard. Parce que c'est cet effet que j'aime avoir sur elle. Et je parie que malgré sa timidité, elle adore avoir l'effet qu'elle a sur moi à ce moment là. Si son père n'était pas juste à côté, j'aurais franchi les mètres qui nous sépare et laissé parler cette impulsivité qui ne s'éveille qu'avec elle. Mais il est là, et mon esprit ne me rappelle que trop bien que je ne peux pas l'enfermer dans mes bras et manquer cette soirée. Quoi que...

Elle baisse le regard en jouant avec ses doigts, et je me retiens de son sourire. Son géniteur en revanche laisse échapper un rire, avant de se pencher subtilement vers moi.

- Je te précise quand même que si on fait du mal à ma princesse, je deviens un dragon.

Je dois me retenir d'éclater de rire, tant cette phrase me surprend. C'est typiquement le genre de réplique que pourrait sortir Carter, mais qu'on imagine mal dans la bouche d'un homme de cet âge.

Je tourne les yeux vers lui un instant pour constater qu'il aborde un visage à la fois malicieux et sérieux. Comprenez qu'il est tout à fait conscient d'avoir utiliser des mots enfantins, mais que la menace à peine voilée est réelle. 

Je ne m'en inquiète pas trop. Je déteste voir l'Ovni aller mal. Et je hais encore plus en être à l'origine. J'ai déjà donné de ce côté là, et je n'ai pas l'attention de recommencer.

- Quelle bêtise tu viens de lui dire papa ?

Elle affiche une petite moue à la fois sérieuse et gênée, ce qui fait rire son père qui lève les mains en signe de reddition.

- Mais rien voyons ma puce.

Elle ne le croit pas, évidemment, et insiste pendant que je m'avance vers elle. Je fais un signe de tête à son père et dépose mes mains sur ses épaules, pour la faire pivoter et avancer vers la sortie.

Elle tourne la tête vers son père et se contorsionne pour l'apercevoir derrière mon dos.

- Qu'est-ce que tu lui as dit ?

- Que tu es très jolie.

Elle lève les yeux au ciel, mais déjà le mur de l'entrée l'empêche de continuer cette conversion. Tandis que j'attrape son manteau accroché contre le mur, elle plante son regard dans le mien.

- Qu'a-t-il dit ?

- Tu n'abandonnes jamais ?

- Lester !

Elle râle, mais elle a bien du mal à jouer la jeune fille énervée. Elle est juste un peu têtue, un caractère que j'apprécie, même si je préfère quand elle rougit.

- Que tu es jolie, et il n'a pas tort.

Et voilà que l'effet que j'attendais se produit, alors qu'elle marmonne que je suis idiot en enfilant sa veste. Au moins, elle ne cherche pas à en savoir plus.

Je me saisis du sac qui traîne dans l'entrée, contenant ses affaires pour la nuit. J'aurais très bien pu la ramener ici après la soirée, mais au fond, je n'en avais pas tellement envie. Je ne l'avouerais probablement pas à d'autres, mais l'avoir dans mes bras est devenu trop naturel pour que je dorme bien sans qu'elle ne soit là. Alors autant profiter de l'occasion.

Nous nous avançons vers la voiture que Sam m'a gentiment prêté, afin d'éviter de la faire monter sur une moto dans cette tenue. Je n'ai pas franchement envie que tous les connards du coin aient le loisir de voir ce que le vent révèle sous sa robe.

Elle s'assoit à côté de moi et nous voilà parti. Le début du trajet est silencieux. J'hésite encore à faire demi-tour pour nous diriger directement chez moi, et passer à la partie de la soirée qui me dit le plus : être seul avec elle.

Cette foutue envie de ne l'avoir que pour moi et de ne la partager avec personne est bien trop forte. C'est égoïste, mais plus fort que moi, je le ressens jusqu'au fond des tripes. L'Ovni m'a retourné comme jamais personne ne l'avait fait auparavant, et il faut croire que j'en garde des séquelles. Je voudrais dire que je déteste ressentir toutes ces choses que je ne comprends pas, mais c'est faux. Parce que tout a été engendré par elle, et que je n'ai aucune envie que cela cesse.

J'y comprends rien, mais j'aime ça. J'aime tout ce qui a un rapport avec elle, et c'est comme ça.

Penser à elle et à ce qu'elle fait naître en moi parvient presque à me faire oublier où nous allons. Pourtant, j'ai tout de même cette espèce de bile qui me monte dans la gorge. Je ne crains pas d'y aller. Je ne crains pas grand-chose dans ma vie à vrai dire. Mais j'ai malgré tout une certaine forme de peur qui se développe en moi. Parce que je n'ai aucune idée de ce qu'il va s'y passer. Au fond, ce qui m'angoisse -un peu, je n'avouerais pas plus- c'est d'avoir cru aux paroles de l'Ovni et de me rendre compte qu'elle s'est trompée. Et si j'avais raison, au final ? 

Je n'ai pas envie de m'en rendre compte. Je n'ai pas envie qu'elle le voit. Mais en même temps, je n'ai pas envie non plus de comprendre que j'ai tout faux depuis des années. De me rendre compte que je passe à côté de personnes qui ont une place importante pour moi.

Je ne sais pas ce qui est le mieux, au final.

- J'aurai dû amener un cadeau, tu penses ?

Je tourne le visage vers elle quelques secondes avant de me concentrer sur la route. Elle est vraiment sérieuse. Ses sourcils se froncent, dans un signe évident de réflexion. Je parie qu'elle est entrain de se monter la tête, afin de savoir si on va lui en vouloir, ou mal la considérer car elle n'a pas apporté la fameuse bouteille de vin, celle qu'on offre tous quand on se rend chez quelqu'un. Une tradition inutile, mais qui trouve un certain intérêt chez les conservateurs et friands de tradition. Ce n'est pas vraiment le cas de mon père, et il a suffisamment de bouteille dans sa cave pour s'en passer d'une supplémentaire.

- Je n'en ai même pas fait.

Mon visage est suffisamment incliné pour qu'elle puisse avoir accès à mes lèvres, sans pour autant que je ne détourne mon attention de la conduite. Je capte ses yeux qui s'ouvrent en grand, dans une véritable surprise.

- Si comme tu l'as dit, il veut me voir, ce sera son cadeau.

Je l'entends glousser, et j'ai l'impression de déjà savoir ce qu'elle va répondre. C'est presque si je n'entends pas sa voix résonner dans mon esprit.

- Tu te considères comme un cadeau ? Quel ego.

J'affiche un sourire en coin alors que je m'engage dans la longue allée qui même à la maison -bien trop grande- où j'ai grandi.

- Je suis un poids dans ce cas ? Je ne voudrais pas peser trop lourd sur tes épaules.

J'arrête la voiture et tourne complètement mon visage vers elle, me délectant du sourire qu'elle affiche, et de ses yeux qui brillent, trahissant son amusement.

- Idiot.

- Je vais commencer à penser que tu as oublié mon prénom, à force de m'appeler ainsi.

- Cela te convient mieux.

Si j'étais Carter, j'aurai porté la main sur mon cœur, pris une expression de fausse douleur et sorti une phrase toute faite dans le genre « tu me blesses profondément ». Mais je ne suis pas mon meilleur ami, alors à la place, j'avance mon visage, nos nez venant buter l'un contre l'autre.

Ses joues ne mettent pas longtemps à rougir, mais elle ne se recule pas pour autant.

- Répète-ça.

J'accroche mon regard au sien, et je sens que je vais devoir me faire violence pour me détourner d'elle afin de sortir de cette voiture. Un moment que je n'ai pas envie de voir arriver, alors je le retarde tant que je le peux.

- I-....

Elle ne termine pas sa phrase, bégayant à moitié, ce qui fait monter un sourire sur mes lèvres. Ai-je dit que j'adorais avoir cet effet sur elle ? Je pense que oui, au moins un million de fois. Et pourtant, je ne m'en lasse pas.

Je sens son petit poing serré venir me frapper la poitrine, sans force aucune, dans une volonté de montrer son mécontentement.

- Ne te moque pas de moi.

Pour toute réponse, je souris un peu plus, et avance mon visage vers le sien, pour déposer mes lèvres sur sa bouche. C'est comme une drogue. Quand je n'y ai pas accès, je suis en manque, et quand j'y touche, je ne parviens pas à m'arrêter. Je laisse ma bouche danser avec la sienne, ma main solidement accrochée à sa nuque. Son parfum me monte aux narines, et m'enivre, si ce baiser n'avait pas déjà eu le même effet.

Mon pouce, sans que je ne le contrôle, caresse sa peau douce, tandis que sa main vient serrer la chemise que j'ai fait l'effort de porter. Ou plutôt que Carter m'a faite enfiler de force.

Mes dents viennent doucement tirer sa lèvre inférieur, alors que nos regards s'accrochent encore. A contre-cœur, je m'éloigne d'elle, passant mon pouce sur ses lèvres.

- Si je m'écoutais, nous ne sortirions pas de cette voiture.

Elle rougit, encore, et cette vision d'elle entre mes doigts, avec les lèvres gonflées de notre baiser me renverse la tête. J'ai définitivement et viscéralement envie de la retenir ici, afin que personne d'autre ne puisse poser les yeux sur elle.

- Idiot.

Je ne retiens pas un rire en déposant mon front sur le sien. Décidément, je crois que c'est le mot que j'ai le plus entendu de sa part depuis que nous nous connaissons.

- C'est parti.

Je ne sais pas vraiment si c'est une affirmation ou une question, mais je ne le dis pas forcément de gaieté de cœur. Pourtant, malgré l'espèce d'angoisse qui gonfle au fond de moi, la phrase de l'Ovni est encore trop présente pour que je fasse demi-tour. « Tu devrais profiter de ta famille. Je suis bien placée pour te dire qu'elle peut disparaître du jour au lendemain ».

Et je n'ai pas envie que la dernière vision que j'ai de leurs visages soit celle du jour où j'ai définitivement fermé la porte de cette maison.

Alors je sors de cette voiture, je la contourne, et je l'aide à descendre. Elle regarde la bâtisse avant d'écarquiller les yeux. N'avait-elle pas remarqué ?

- Tu m'avais caché être un prince vivant dans un château.

Je pourrais dire qu'elle exagère, mais il est vrai que cette maison est exagérément grande. Je la vois déglutir, avant de se tourner vers moi. Elle stresse. Je suppose que c'est une réaction normale, quand sa première rencontre avec ma famille se passe dans un tel cadre.

- Tu ne veux pas devenir une princesse ?

Elle lève les yeux au ciel mais je capte tout de même un petit sourire. Elle le fait disparaître bien vite, laissant cette angoisse revenir prendre place sur son visage.

- Est-ce que je suis suffisamment bien habillée ?

Cette fois, c'est mon tour de lever les yeux vers le ciel. Elle va sans nul doute être la plus belle femme de toute la soirée, alors si quelqu'un devrait s'inquiéter, c'est plutôt moi.

- Je dirais que tu es même trop belle. On devrait partir, ou les femmes présentes seront jalouses.

Elle comprend ce que je cherche à faire, et me sourit sans pour autant parvenir à cacher la rougeur sur ses joues.

- Laisse moi deviner, « idiot » ?

Cette fois, elle rit, et je me demande si il ne serait pas possible d'enregistrer ce son merveilleux. J'aime la voir ainsi. Heureuse, détendue. Et c'est pour cela que je deviens une autre personne avec elle. Une personne capable de dire des choses qu'il ne dirait jamais à d'autre, comme cette phrase que je viens de lui sortir. Et pourtant je les pense toutes. Je les pense et je veux continuer de les dire afin de la voir encore dans cet état. Peut-être qu'au final, je ne deviens pas quelqu'un d'autre. Je suis seulement tel que je dois être avec elle.

D'un regard, je lui demande si elle est prête, et au fond, je me pose plutôt la question à moi-même. Elle finit par hocher la tête, et je me décide à utiliser la sonnette. Nous attendons quelques instants, suffisamment pour que j'envisage de rebrousser chemin. Combien de temps mettrions-nous à courir jusqu'à la voiture et démarrer ?

Mais je n'ai pas le temps de compter que déjà, l'immense porte en bas s'ouvre sur un visage que je connais bien, malgré les années sans l'apercevoir.

Mon père me regarde, avant de dévier le visage vers l'Ovni. Et d'afficher un air étonné. Je me tourne vers cette dernière, pour la voir avec la même mimique.

Bon. Qu'est-ce qu'il se passe ?

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Me revoilà ! Allez, on reprend enfin le cours de cette histoire, avec cette fois-ci un chapitre par semaine, tous les samedis. 

Notre petit couple vous a-t-il manqué ? 

Pourquoi Lyra et le père de Lester ont-ils cette réaction ? Je suppose que pas mal d'entre vous l'ont déjà compris x)

Que leurs réserve cette soirée ? Du bon ou du mauvais ? 

Pour le savoir, il va falloir attendre samedi prochain !

 A bientôt, 

Kiss :*

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