Chapitre 33
PDV Lester
Je ne trouve pas le sommeil. Je me repasse la scène en boucle, en imaginant tout ce qui aurait pu se produire si je n'étais arrivé. Quelques minutes de plus auraient pu tout changer. Et si Carter ne l'avait pas remarqué dans la salle ? Je n'aurais jamais su qu'elle était là. Je ne l'aurais pas cherché.
Je revois leurs corps autour d'elle, et leurs regards fous. Pleines de promesses malsaines que je ne peux pas prononcer. J'ai envie de les retrouver. D'enfoncer mon poing dans la tronche de ces connards. Ils ne méritent pas mieux. Est-ce la première, qu'ils tentent d'attraper, d'utiliser ? Est-ce la dernière ? Je n'arrête pas de me dire qu'ils sont là, quelque part dans les rues. Qu'ils peuvent retomber sur elle à tout moment.
Ça ne me plaît pas. La savoir en danger m'est insupportable sans que je ne comprenne forcément pourquoi. Je n'ai pas envie d'avoir d'explication, de toute façon. Je veux seulement m'assurer qu'une telle situation ne se reproduira plus jamais. Putain. Je laisse tomber ma tête en arrière sur le canapé. Je n'arrive pas à croire que tout ça s'est vraiment passé. Pourtant, quand j'entends la porte grincer faiblement et que je vois son petit corps s'avancer dans la pénombre, je ne peux que me faire à l'évidence, tout est vrai. Quand je la vois comme ça, dans mes vêtements, une partie de mon esprit est rassurée. Elle est là, et tout est sous contrôle. Mais une autre me repasse encore la scène.
Elle reste plantée là, dans le couloir, à me regarder. Malgré l'obscurité, nos yeux s'accrochent et ne se quittent pas. Ses yeux que je sais si particuliers. Autant qu'elle l'est, elle. Elle ne s'en rend peut-être pas compte, ou plutôt, elle pense que c'est un point faible. C'est loin d'être le cas. N'a-t-elle pas vu tous les regards posés sur elle, ce soir ? Moi je les ai vu. Je ne les ai pas appréciés du tout, d'ailleurs.
Je sais qu'elle veut avancer. Je sais qu'elle n'est pas venue dans ce salon pour rien. Ça devrait me faire peur, me déranger, mais à la place, je lui fais signe d'avancer. Timidement, elle franchit les quelques pas qui nous séparent, et elle s'assoit à mes côtés. Je ne dis rien pendant un moment. Elle non plus. Je voudrais savoir, lui demander ce qu'elle faisait dehors. Pourquoi est-elle sorti, bon sang ? Elle ne serait pas tombée sur ces types. Mon esprit me souffle qu'ils auraient trouvé une autre cible. Et c'est mauvais, très mauvais de le penser, mais j'aurai préféré.
Je ne veux pas la forcer à me donner la raison. Nous avons trop souvent essayé de forcer l'autre à parler, et cela c'est rarement bien passé. Jamais, pour ainsi dire. Mais j'ai besoin de savoir, c'est plus qu'une envie. Je sais qu'à un moment ou un autre, je ne pourrais me retenir de lui demander. J'espère seulement qu'elle me parlera, ou que je saurai me contenter de son silence pour toute réponse. Deux points qui sont aussi peu sûrs l'un que l'autre.
- Tu n'arrives pas à dormir ?
Je connais la réponse. Mais je sais qu'elle a besoin de le dire.
- Non. J'ai... j'ai eu peur. Et j'ai peur de dormir. Qu'ils viennent essayer de me faire du mal jusque dans mes rêves.
Je déteste l'entendre. Parce que je déteste qu'elle puisse ressentir ce genre de chose. Je voudrais qu'elle puisse s'endormir et se réveiller avec un sourire aux lèvres. Elle est si mignonne quand elle sourit... Je pose mes yeux sur elle, et je vois qu'elle est encore anxieuse, mais moins, au fil des minutes. Est-ce ma présence ? Je ne voudrais rien affirmer. Mais j'ai l'impression de réussir à la calmer, sans forcément chercher à le faire. J'apprécie ça.
- Hé, Ovni. Ils ne sont plus là, d'accord ?
Elle parvient à afficher un léger sourire et hocher la tête. Je m'en contente pour l'instant. J'espère bien réussir à lui tirer un sourire avant que le jour ne se lève. Un vrai sourire. Mais pour l'instant, je sais que c'est autre chose qui va s'afficher sur son visage, mais je suis incapable de me retenir plus longtemps. Alors je craque.
- Pourquoi étais-tu dehors ?
Elle baisse la tête un moment, et je me retiens de la lui relever pour qu'elle me réponde. J'attends. J'attends en espérant qu'elle me répondra. Et quand elle relève la tête vers moi et que je vois ses yeux brillant de douleur, je comprends qu'elle va me le dire. Mais je déteste voir cette expression sur son visage. Je pourrais presque lui dire de ne pas m'en parler, finalement, juste pour qu'elle ne l'aborde plus. Cependant, j'ai besoin de savoir. Pour tenter d'arrêter d'y penser sans fin.
Je la laisse prendre son temps, et j'écoute ce qu'elle me dit. Et à ce moment là, malgré la tristesse qui perce dans sa voix, je n'arrive qu'à faire un seul constat. Elle n'est pas mignonne. Elle est belle.
- J'ai une sœur. Une grande sœur. C'était une musicienne, elle aussi. Comme moi elle ne l'est plus.
J'ai envie de la couper tout de suite pour lui dire qu'elle a tout faux. Elle est toujours une musicienne. On arrête jamais de l'être. Elle ne joue peut-être plus, et d'ailleurs, j'aimerais en connaître la raison, mais je vais garder ça pour plus tard, cela ne veut pas dire qu'elle n'a plus ce rapport particulier à la musique. Mais je ne l'arrête pas pour lui dire. Je me contente d'écouter, tout en me posant un tas de questions dont j'espère avoir la réponse. Où est sa sœur ? Pourquoi ne joue-t-elle plus, elle aussi ?
- Aria... elle jouait de la guitare, comme toi. Elle était dans un groupe aussi. Une prodige de la musique, pour beaucoup. Son public était énorme. Ils l'acclamaient tous comme ils t'acclament toi. Elle faisait danser et chanter les foules avec elle. C'était incroyable. C'était exactement comme ce soir.
Je commence à comprendre d'où vient le problème, et j'ai peur d'avoir raison.
- Mais Aria n'est plus là, et je n'avais plus jamais vu jouer de cette façon, plus ressenti toutes les émotions qui me traversaient quand j'étais dans l'un de ses concerts. Jusqu'à aujourd'hui.
Elle n'a pas besoin de mettre les mots exacts pour que je comprenne. Aria est partie. Pas de la ville. Pas du pays. Mais du monde. Elle est décédée. Et j'imagine la douleur de Lyra, autant que je la lis sur ses traits. Et soudain, tout me revient en mémoire, et devient plus clair. La semaine passée, quand je l'ai récupérée en miette. Sa mère m'a dit que c'était un mauvais jour. Je suis prêt à parier qu'il avait un rapport avec sa sœur. Comme je suis prêt à parier qu'elle ne joue plus pas seulement à cause de son ouïe perdue, mais aussi à cause de la disparition d'Aria. Sauf que tout ça, je le garde pour moi. Parce que ce n'est pas le moment d'en parler, de poser des questions.
- C'était trop d'émotions d'un coup, de souvenirs. J'ai voulu prendre l'air. Je n'aurai pas dû aller si loin de la salle, il aurait fallut que je reste près du vigile, mais j'avais besoin de solitude.
Je ne peux pas l'accabler de reproches. Je comprends ce besoin, même si je ne peux pas en ressortir toute l'intensité. Et maintenant, je comprends qu'elle a besoin de passer à autre chose.
- Qu'as-tu pensé du concert ?
Je me soucie vraiment de la réponse, pour une raison que j'ignore. Je crois que je serais déçu si elle me répondait qu'elle n'a pas apprécié. Ce serait normal, pourtant, vu la soirée qu'elle a passé. Mais ce n'est pas ce qu'elle dit. Au contraire, elle m'affiche un grand sourire, et semble se replonger dans les souvenirs de ce moment, avant que tout ne dérape. C'est exactement ce genre de sourire, que je voulais voir.
- Vous êtes incroyables ! L'engouement de la foule, l'ambiance, vos musiques... enfin, pas que je les entende, mais je les ai imaginées.
- Tu as réussi à voir toutes nos parties en même temps ?
Ses joues commencent à rougir, et j'aime ça.
- Non... juste les tiennes...
- Tu n'as regardé que moi alors ?
Cette fois-ci, elle finit cramoisie, mais ne démentit pas. Et encore une fois, sans que je ne le comprenne, j'apprécie de penser qu'elle n'a fait attention qu'à moi. C'est presque malsain, d'aimer à ce point avoir son attention, de vouloir la faire rougir, rire, sourire, la protéger... et que personne d'autre ne le fasse. J'ai envie de la voir comme ça encore un peu, alors je cherche à la taquiner.
- Tu étais jolie aujourd'hui.
Et je le pense. Je ne le dis pas uniquement pour la faire rougir. Quoi que, j'aurai peut-être dû utiliser un autre mot, bien plus fort.
L'effet escompté est bien au rendez-vous, en revanche, je ne m'attendais pas à ce que le jeu se retourne contre moi. Mais je dois avouer que j'aime, quand elle me répond.
- Je ne suis pas jolie, les autres jours ?
Bien joué. Très bien joué. Je pourrais arrêter là. Mais je veux être honnête, cette fois. Parce que je sais que malgré la taquinerie, c'est une question qu'elle se pose vraiment. Et si en général je l'ai en horreur, à elle, je veux lui offrir la réponse.
- Si.
Un petit mot, mais pour un sourire, qui en vaut mille. Bordel, je crois que je ne l'ai jamais vu sourire autant, et avec ses joues rouges, elle en ressort absolument magnifique.
Nous discutons encore un peu, alternant entre silences et taquineries, avant que je ne sente son corps partir sur le côté. Sa tête vient se poser sur mon épaule, et je n'ai pas besoin de la voir pour savoir qu'elle s'est endormie. Elle devait être épuisée, après cette journée, et il est presque 5 heures du matin. La nuit va être courte.
Doucement, je passe mes mains autour d'elle pour la faire basculer. J'allonge du mieux que je peux ses jambes sur le canapé, les cachant d'un plaid, et dépose sa tête sur mes cuisses. Ma main vient replacer une des mèches de cheveux qui barre son visage, avec une douceur que je ne me connais pas. Qui ne s'affiche qu'avec elle, de plus en plus. Je laisse tomber ma tête en arrière, et moi aussi, je laisse le sommeil m'emporter.
Quand j'ouvre les yeux, je mets quelques instants à me rappeler où je suis, et pourquoi. Puis mes yeux se posent bien vite sur elle, encore endormie. Oui. Elle est définitivement belle.
Un corps apparaît dans ma vision périphérique et je reconnais Talia, rapidement suivi de Carter et Sam. Ils s'arrêtent tous dans l'entrée du salon, nous avisant. Je suppose qu'ils ne s'attendaient pas à ça, en se réveillant. J'aurai préféré éviter, d'ailleurs. Je place mon index sur ma bouche pour leur faire signe de la fermer. Elle a à peine dormi, et je n'ai pas envie que ces idiots la réveille.
Mon meilleur ami et l'Arc-en-ciel se regardent, avant de commencer une espèce de danse étrange, en tentant de couvrir leurs éclats de rire. Quel bande d'idiot. Évidemment, il ne faut pas longtemps pour que je sente Lyra bouger et se réveiller. Ils arrêtent de gesticuler sans cesser de sourire devant mon regard noir. Ils font chier, bordel !
Elle ouvre difficilement ses petits yeux et met un bon moment avant de comprendre pourquoi elle a ma tête au dessus d'elle, et trois imbéciles qui la regardent en souriant. Quand elle saisit sa position, elle se relève en rougissant, les yeux rivés sur nos amis qui la fixent encore.
- Le coussin était confortable, belle-sœur ?
Quand Carter lance sa réflexion, elle se met à rougir de plus belle. Elle est affreusement mignonne. Mais je n'apprécie pas que Carter la fasse rougir.
Et j'apprécie encore moins que d'autres hommes puissent la voir dans cet état.
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Est-ce qu'ils ne sont pas trop mignons ? Vous fondez là ?
Bon... la suite... mardi ! Et oui, pour celles et ceux qui ne me suivent pas sur instragram, ou qui n'ont pas instagram, SURPRISE ! Le rythme change, et maintenant, c'est 2 chapitres par semaine. Un le mardi, et un le vendredi ;) De quoi réjouir les plus impatients x)
Alors je vous dis à mardi,
Kiss ! :*
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