Chapitre 31

PDV Lester

Mon esprit tourne à mille à l'heure. Elle est là. Elle est venue, alors même qu'elle ne risque pas de pouvoir écouter notre musique. Et surtout, elle me regarde. Est-ce qu'elle les imagine encore, les notes ? J'ai l'impression que oui. Je ne vois pas bien en détail à quoi elle ressemble d'ici, mais j'aperçois le maquillage plus prononcé que d'habitude. Je ne me demande pas si je la trouve jolie, pour l'instant, bien que la réponse semble toute trouvée. Je préfère me concentrer sur mon jeu pour qu'elle puisse au maximum entendre la musique dans sa tête.

Je détourne le regard d'elle quand je prends ma deuxième guitare, pour la dernière chanson de ce concert. Mais quand les premières notes résonnent et que je cherche à replonger mon regard dans le sien, je ne rencontre que du vide. Mes sourcils se froncent, et je sais que Sam, le seul à mon niveau, le remarque. Il m'interroge des yeux, mais je ne peux pas lui répondre pour l'instant. Où est-elle ? A-t-elle choisi de partir ?

Je ne devrais pas en avoir quelque chose à faire, mais j'ai cette intuition étrange qui monte en moi. Comme si je sentais qu'il allait se passer un événement peu appréciable. Et mon inquiétude, car il faut le dire, je suis inquiet, augmente quand je capte le regard de l'Arc-en-ciel, qui paraît défaite. Et angoissée.

Je n'ai qu'une envie, que cette chanson se termine. Je voudrais même poser ma guitare maintenant, pour avancer vers cette fille et lui demander où est son amie. Il n'y a aucune raison qu'elle soit partie seule. Je suis prêt à parier qu'elle ne connaît pas cette partie de la ville. Elle ne fume pas, alors que ferait-elle bien à l'extérieur. Peut-être que je cherche trop loin, et qu'elle est juste aux toilettes, ou bien qu'elle prend l'air. Mais cette voix au fond de moi me hurle que ce n'est pas le cas. Et que j'ai raison de vouloir la retrouver rapidement. Les dernières notes résonnent, et Carter remercie le public, alors que je retire vite mon instrument de mes épaules et plonge dans la foule. J'entends à peine les cris, je ne fais pas attention aux personnes qui se rapprochent de moi.

Ils arrêtent rapidement. Ils savent comment je suis, comment nous sommes. Pas inaccessibles, mais les bains de foule, très peu pour nous. Alors ils retournent à leurs vies, et me laissent de l'air. Je me plante devant Talia et je n'ai pas besoin de parler pour qu'elle comprenne ce que je viens faire en face d'elle. Et pour qu'elle ne soit pas prête à s'évanouir de bonheur quand les gars arrivent derrière moi, c'est que l'inquiétude qu'elle ressent est forte. Ce qui ne me rassure pas.

- Les' qu'est-ce qu'il se passe ?

Je ne réponds pas à mon meilleur ami, me contentant d'attendre que la jeune femme se décide à tout déballer. Parce que je m'impatiente.

- J'ai laissé Lyra le temps d'aller aux sanitaires... et quand je suis revenue, impossible de la trouver.

- C'est si inquiétant ? Elle était peut-être fatiguée et est rentrée ?

Elle secoue la tête en regardant Sam, qui vient d'intervenir.

- Je dois dormir chez elle. Elle ne peut pas être partie sans moi. Mais elle n'est pas dans le club, j'en suis sûre.

Cart' se tourne vers moi, et je le sens préoccupé. Sûrement moins que moi, mais c'est déjà pas mal. C'est lui qui prend les devants pour donner les ordres. Le voir sérieux est toujours aussi peu habituel, et il faut une minute à tout le monde pour réagir.

- Miss, toi et moi on va refaire un tour de la salle. Les gars, rangez les instruments et Les'...

Il n'a pas besoin de dire quoi que ce soit que je grommelle que je m'occupe de l'extérieur. Pour une raison inconnue, je suis persuadé qu'elle s'y trouve. Mais dans quel état ?

Je passe les portes rapidement, et m'arrête devant le vigile.

- Tu as vu une jeune fille rousse, environ cette taille là ? Je lui montre la hauteur de mon épaule. Pull vert.

Il hoche la tête pour me signifier qu'elle est sortie il y a un petit moment, et qu'elle n'avait pas l'air en forme. J'ai envie de lui en foutre une. Depuis quand on laisse partir une fille seule d'un bar en pleine nuit si elle n'a pas l'air en forme ? Bon dieu, tout est fait pour me rendre fou.

J'avance, essayant de couvrir le plus large champ avec mes yeux. Où est-ce qu'elle est bordel ? Elle n'a pas pu aller bien loin, quand même !

- Non !

Je sursaute et me retourne. Cette voix ! Putain, d'où est-ce qu'elle vient ? C'est la sienne, j'en suis persuadé, et la peur que j'y lis me fait bouillir. J'imagine mille et un scénarios alors que j'avance de plus en plus vite, en essayant de deviner de quel endroit elle provient.

Et puis je les vois. Cette troupe de mec, qui entoure son petit corps. Elle se débat, contre un type qui lui tient le bras. Je sens d'ici la peur qui pulse dans ses veines, et je n'ai pas besoin d'être devin pour savoir ce qu'ils ont en tête. Mon sang ne fait qu'un tour, je suis sur le point de péter un câble. J'arrive à toute vitesse vers eux, et passe mon bras autour de la taille de Lyra. Son dos vient se coller contre mon torse, forçant l'homme à la lâcher. Elle a un mouvement de surprise, mais se calme vite. Comme si elle sentait que c'était moi.

- Eh mec, on l'a vu avant !

Mon regard est si froid et dangereux que le type frissonne. Ma voix tonne, lui ordonnant de déguerpir. Je dois lui paraître suffisamment inquiétant car il détale, accompagné de ses larbins. Ou bien s'est-il dit que me tabasser ferait trop de bruit.

Toujours contre moi, je sens sa respiration saccadée, et j'entends les sanglots dans sa gorge. Bordel, j'ai presque envie de la lâcher pour aller détruire ces types, mais je suis bien incapable de la laisser seule maintenant. Elle s'éloigne de moi pour se tourner et je vois son visage un court instant avant qu'elle ne fonde sur mon torse. Je n'ai pas le temps de réfléchir que mes bras se referment sur elle, comme un cocon protecteur, et que je la serre aussi fort que je peux sans lui faire mal. Putain, je suis tellement en colère...

Je ne sais pas combien de minutes elle pleure de cette façon, contre moi. Je sens son petit corps trembler et je déteste la savoir dans cet état. A ce moment là, je sais qu'il est hors de question, autant pour elle que pour moi, que je la quitte des yeux ce soir. Je ne veux pas la laisser rentrer chez elle après ça. Quand je sens qu'elle se calme un peu, je la tire avec moi, contre mon flanc, et j'avance vers la salle. Je passe par notre entrée, et arrive directement dans les coulisses, où je récupère les clés de voiture d'Arthur. Pas question de la mettre sur une moto maintenant. Son visage toujours caché dans mon torse, alors qu'une de mes mains lui caresse distraitement le dos, j'envoie un rapide texto à Carter, pour le prévenir que je l'ai retrouvé et que je la ramène chez nous. En deux mots, « Mecs, embuscade », je lui explique ce qui vient de se produire. Le reste peut attendre.

J'ai du mal à la lâcher, quand nous arrivons à la voiture. Pourtant, il va falloir, parce que je ne peux pas la garder sur mes genoux pour conduire. Elle s'écarte d'elle-même de moi, et si ce n'était pas nécessaire pour l'instant, je crois que je la rattraperais pour la coller à nouveau contre moi.

Son visage... est fermé. Il ne laisse rien paraître de ce qui vient de se produire, alors qu'encore cinq minutes avant, elle pleurait toutes les larmes de son corps. Les a-t-elle épuisées ? Non. Est-elle entrain d'essayer de maintenir les apparences ? Clairement. Elle cherche à faire comme si de rien n'était, mais elle ne me trompe pas. Elle est profondément affectée parce qu'il vient de se passer. Et justement, que s'est-il produit exactement ? Mais je crois qu'au fond, ce qui me met le plus en colère, c'est d'imaginer ce qui aurait pu arriver, si je ne l'avais pas trouvé.

Je ne dis rien, n'essaye pas de la faire parler durant tout le trajet. Ça peut attendre. Elle ne parle pas non plus quand nous arrivons chez moi. Quand nous passons la porte. Quand je l'entraîne jusqu'à ma chambre. Je ferme la porte derrière nous, conscient que mes amis vont bientôt arriver. Et je la regarde.

Elle évite mes yeux, sûrement consciente que cela la fera craquer plus vite. Pourtant je sens qu'elle est au bord du gouffre, et qu'elle a besoin d'évacuer. Alors sans rien dire, j'avance doucement. Et avec la même lenteur, j'entoure mes bras autour d'elle, et l'attire contre mon torse.

A l'instant même où son visage se cache contre celui-ci, ses sanglots se répercutent dans toute la pièce. Ils me font autant de mal qu'à elle, je crois. C'est insupportable à entendre.

La porte s'ouvre et sans bouger, je jette un regard à Carter. Il croise le mien et ne dit rien, avant de la refermer pour nous laisser seul. J'entends la voix de Talia, inquiète, mais mon ami lui demande d'attendre un peu. Je suppose qu'à un moment ou un autre, je devrais la lâcher pour que son amie vienne la voir. Mais pour l'instant, je ne compte pas la laisser quitter mes bras. Je crois qu'elle ne veut pas que ce soit le cas, de toute façon. Elle s'accroche à mon t-shirt comme si il était la seule chose qui pouvait la maintenir debout. Ma main vient caresser ses cheveux, dans un geste que j'espère apaisant.

Plus jamais. Plus jamais je ne veux la voir dans cet état. Et pourtant, je n'en ai rien à faire normalement, de ce que ressentent les gens. Mais elle...

Je ne sais pas combien de temps nous restons ainsi, l'un contre l'autre, ni comment nous avons fini assis sur mon lit, elle sur mes genoux, la tête dans mon cou et mes bras solidement attachés autour d'elle. Je dois dire que je m'en fiche. Je sens qu'elle se calme, alors le reste n'a pas d'importance. Mais sa peine passe petit à petit, et cela me permet de penser un petit peu à autre chose. Comme à la tête qu'elle fera lorsqu'elle réalisera la position dans laquelle nous sommes.

Je sens son corps qui s'apaise alors que ses pleurs ont cessé depuis quelques minutes, maintenant. Je la sais fatiguée. Elle aurait sûrement besoin de dormir tout de suite, mais il a y a autre chose dont elle a besoin, c'est d'une amie. Alors je m'écarte suffisamment d'elle pour qu'elle comprenne mon intention et porte son regard sur mes lèvres.

- Talia est ici. Tu veux la voir ?

Elle me regarde sans rien dire pendant quelques instant, et je me dis que je déteste voir son visage dans cet état. Elle est bien plus jolie quand elle sourit...

Elle finit par hocher la tête, mais ne bouge pas, visiblement encore peu consciente de la situation.

- Il va falloir que tu descendes, si tu veux que j'aille la chercher.

Elle baisse le regard vers nos corps et semble comprendre. Le rouge vient colorer ses joues, me tirant mon premier sourire de la soirée. Je préfère la voir ainsi, et cette vision me fait presque du bien. Elle se déplace pour s'asseoir sur le lit et je me dirige vers la porte.

Avant de l'ouvrir, et d'appeler Arc-en-ciel, je me tourne vers elle.

- Je ne suis pas loin.

Je sais qu'elle avait besoin de l'entendre, et son visage me le confirme. Et puis moi, j'avais besoin de lui dire.

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Désolé pour ce petit retard, je n'avais pas vu qu'on était vendredi x)

Alors, est-ce qu'ils sont pas trop mignon tous les deux ? Bah c'est pas fini x)

Allez, on se retrouve vendredi ! 

Kiss :*

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