Chapitre 28

PDV Lyra

Mes yeux repassent sur les quelques lignes contenues dans cette fameuse lettre. C'est au moins la troisième fois que je la lis, depuis que je l'ai trouvée dans mon casier, il y a quelques minutes.

« 1. Je déteste la salade. C'est fade et sans goût.

2. Mon groupe préféré, c'est le nôtre. Parce que nos musiques expriment exactement ce que je veux dire et ressentir.

3. Je préfère le sucré au salé, mais je déteste qu'on mélange les deux.

4. Le matin, je suis de mauvaise humeur. Et tout le reste de la journée, en général, sauf au moment où j'ai une guitare entre les mains.

5. Je suis fils unique. Carter me suffit, de toute façon, je n'en supporterais pas plus.

6. J'aime la moto, car la vitesse me fait du bien.

7. Mon anniversaire est le 24 décembre. Carter a l'habitude de dire que je suis un mauvais cadeau, mais un bon copain.

8. Mes cheveux sont naturellement bouclés. Je ne m'amuse pas à faire des permanentes, contrairement à ce que Sam aime raconter.

9. Les rumeurs sont fausses.

Voilà ce que tu peux savoir sur moi. Alors, ami ?

Oh, et Ovni, ce n'est pas pour te dénigrer. Le premier jour où je t'ai aperçu, tu avais juste cet air si perdu qu'on aurait dit que tu venais d'ailleurs. »

Il n'y a rien écrit d'autre, même pas de signature, mais ce n'est pas comme si j'en avais besoin. Je n'arrive pas à m'empêcher de sourire, en comprenant ce qu'il cherchait à faire. Ce qu'il a réussit d'ailleurs. Me rassurer, déjà, sur cette histoire de surnom. Et me faire comprendre que cette histoire de non-ami ne tient plus. Le pense-t-il vraiment ? J'ai l'impression que oui. Je ne veux pas forcément savoir pourquoi. Ni comprendre pourquoi j'apprécie cette décision. Peut-être qu'au final, le mystère qui l'entoure m'attire sans que je ne puisse l'expliquer. Surtout maintenant qu'il m'a donné ce point numéro 9. Fausses. Jusqu'à quel point ? Y a-t-il tout de même une part de vérité, ou sont-elles montées de toutes pièces ? Je veux le savoir. Et si je n'oserais sûrement pas poser la question pour l'instant, il m'en laisse au moins la possibilité avec cette lettre.

Muée d'une envie soudaine de le voir sans vraiment le comprendre, je me dirige vers l'endroit où je sais le trouver. Note se dirige vers Talia et je le laisse faire, alors qu'elle m'interroge du regard. Mais je ne lui réponds pas. Je ne veux pas qu'elle réagisse à l'endroit où je me rends. Je veux y aller seule, sans que personne n'y trouve rien à redire ou à commenter.

Il ne me regarde pas entrer dans la pièce, continuant de jouer. Mais je sais qu'il m'a entendu. Je n'arrive pas à m'arrêter de sourire. Je repense à ses mots. « Je n'aime pas la salade ». Cette information n'a pas vraiment de valeur. Pourtant, elle me plaît, elle me fait rire. Et j'ai l'impression d'en savoir un peu plus sur lui que le premier venu. Je m'assois en face de lui, à peut-être 2 mètres, et regarde ses doigts jouer. Mon cœur se sert en les voyant bouger sur les cordes.

J'y arrive. J'arrive à imaginer les notes qu'il joue. J'ai envie d'éclater en sanglots, ou bien de sauter de joie. Je n'ai plus réussi à le faire depuis ce jour. Perdre cette faculté en perdant le violon m'a détruite encore un peu plus. Pourtant, alors que ses doigts grattent les cordes, les notes s'imposent à mon esprit, vivaces et magnifiques, d'une justesse incroyable. Et j'ai l'impression qu'il le remarque. Il ne dit rien pourtant. Il arrête seulement de jouer quand je lui offre la réponse qu'il attendait. Moi aussi, je lui donne un des point à savoir sur moi. Lui donnerais-je un jour les autres ? Je ne parierais pas sur la réponse pour l'instant.

Il ne me répond rien. Il ne fait pas mine de vouloir en savoir plus. Pourtant, il le veut, c'est certain. Mais je le remercie intérieurement de ne pas chercher à tout savoir d'un coup. Son regard sur moi me déstabilise. Comme d'habitude. Il est si puissant, si profond. Je sens mes joues rougir, et son petit sourire monte. Ce sourire me fait rougir d'autant plus. Pourquoi j'ai l'impression qu'il aime me voir changer de couleur ? Qu'il se donne un malin plaisir à me mettre dans cet état ?

Je décide de changer de sujet. Pas parce que j'ai peur qu'il m'interroge, mais bien parce que je ne veux pas m'enfoncer dans mes souvenirs pour l'instant. Sa lettre m'a mise de bonne humeur. Je ne veux pas perdre ce sentiment de bien-être que ses quelques mots m'ont apporté.

- C'est une nouvelle chanson ?

Il hoche la tête et repose ses yeux sur les cordes de son instrument. Je suis à la fois soulagée de ne plus avoir à soutenir son regard, et déçue de ne pas y avoir accès. Je décide de ne pas chercher à me comprendre pour l'instant.

- Je n'ai qu'une partie des notes.

Il se remet à jouer les mêmes notes qu'à mon arrivée et je les imagine encore. Je voudrais fermer les yeux et savourer, mais je perdrais cette sensation en ne pouvant plus les capter. Alors je garde mon regard fermement planté sur ses mains. Et j'entends dans mon esprit cette mélodie. Ma petite voix se fraye un chemin parmi les notes.

- Ça a l'air beau.

Il ne me regarde pas et sourit. J'aime ce sourire. Je rougis en remarquant ce que je viens de penser. Il finit par s'arrêter de jouer, ne trouvant visiblement pas la suite des notes. Mais moi, mon esprit continue de les laisser couler, et j'imagine sans mal ce qui pourrait suivre. Je n'ose rien dire. Ce n'est pas à moi de lui écrire cette chanson. Elle lui appartient, et je n'ai pas mon mot à dire la dessus. Il le prendrait sûrement mal, si je lui proposais des notes non ?

Son regard se plonge dans le mien et il semble me sonder. Et à ce moment là, je sais qu'il a comprit que je me retiens de parler. Que je n'ose pas lui parler.

- Dis-moi.

J'hésite et me mords la lèvre. Il reste fixé sur mon geste un instant, ce qui me fait rougir, mais ne dit rien. Devrais-je lui dire ? De toute façon, il a comprit que je lui cachais quelque chose. Je souffle un bon coup et farfouille dans mon sac jusqu'à en sortir une feuille et un crayon. Prenant mon courage à deux mains, je gribouille les quelques notes qui me sont venues avant de lui tendre timidement la feuille. Il l'attrape sans rien dire et reste silencieux en observant ce que je viens d'écrire. Gênée, je me mets à jouer avec mes doigts en appréhendant sa réaction.

Il baisse la tête vers la guitare et gratte les cordes, reprenant son morceau. Je suis presque surprise quand au lieu de s'arrêter, il joue les notes que je viens de lui donner. Je ne peux empêcher un petit sourire de monter, mais j'essaye de le cacher quand il relève les yeux vers moi. Il m'observe en silence avant de faire monter le coin de sa lèvre, dans un geste que je trouve affreusement attirant. Une pensée que je trouve très gênante.

- Pas mal. Et ensuite...

Il rajoute quelques notes à la suite des miennes. Mes lèvres sont toujours hautes, et à cet instant là, je me sens bien. Je joue la mélodie dans ma tête, parfois même, je la fredonne, ce qui semble l'amuser. Il s'arrête une nouvelle fois et me tend la feuille, quand il voit que je continue de fredonner alors que lui n'a pas de suite. Je dessine quelques nouvelles notes, il en ajoute et ainsi de suite. Je ne sais pas pendant combien de temps nous répétons l'opération, mais je sais que là, je me sens bien, à travailler avec lui là-dessus. Je me rapproche de lui sans m'en rendre compte, pour m'asseoir par terre à côté de ses jambes. La chaise à côté de lui me sert de table, tandis que je complète cette partition que nous écrivons à deux.

Il se penche sur moi attrapant mon crayon entre mes doigts. Son corps se rapproche du mien, et si il ne semble pas y penser, sentir son odeur parvenir jusqu'à moi, et ses cheveux chatouiller ma joue me rend toute bizarre. Je commence à avoir chaud et mes joues rougissent une nouvelle fois. Il efface une des notes que j'ai écrite et la remplace par une autre.

- Avec ça plutôt ?

Cela sonne à la fois comme une question et comme une affirmation, alors je ne suis pas sûre qu'il attende une réponse. Je comprends que si quand son visage se tourne totalement vers moi et que ses yeux se plongent dans les miens. Il est proche. Bien trop proche pour que je ne parvienne à formuler une seule pensée cohérente. D'un coup, il se met à froncer les sourcils et se recule, ce qui m'intrigue. Une pensée semble lui avoir traverser l'esprit et le travailler. Il me regarde, sans rien dire, et je sais qu'elle a un rapport avec moi. J'hésite avant de l'interroger. Et si je n'avais pas envie d'y répondre ? Nous venons à peine de passer outre la dernière dispute. Je n'ai pas envie que cela recommence encore, alors j'ai peur de ce qu'il va dire. Et de comment je vais réagir.

Mais il va bien falloir y passer, alors avec appréhension tout de même, je me lance.

- Qu'y a-t-il ?

Il met un instant avant de me répondre, pendant lequel le stress monte en moi.

- Je viens de penser à une problématique.

Je mets un petit moment pour resituer le contexte. L'exposé. Nous avons un exposé à faire, ensemble. Trouver une problématique est un élément important, alors qu'est-ce qui pourrait expliquer cette réaction de sa part ? Il a l'air d'hésiter à m'en parler, et cela ne m'intrigue qu'encore plus. A quoi a-t-il pu bien penser ?

- Qu'est-ce que c'est ?

- Et bien... je n'ai pas envie que tu le prennes mal.

Cette fois, ce sont mes sourcils qui se froncent. Le prendre mal ? Une problématique d'un exposé ? Je me mets à douter, sans pour autant refuser d'avoir la réponse. Je veux savoir ce qu'il a en tête, alors je le laisse continuer.

- C'est juste que tu as dis un truc la dernière fois sur toi et l'amour...

Pour la première fois, je vois Lester peu sûr de lui. Et ça m'amuse. Mais si j'aimerais en profiter pour le charrier comme il le fait parfois avec moi, je suis bien trop curieuse à propos de cette idée pour le faire. Moi et l'amour. Je me souviens bien de cette discussion. La première vraie conversation que nous avons eu. En y réfléchissant, j'ai aussi appris des choses sur lui, à ce moment là. Et lui sur moi. Je lui avais dit ne pas en croire en l'amour, ou plutôt, ne pas penser que ce soit un sentiment pour moi. Qu'on ne pouvait pas m'aimer, moi, la sourde.

- Dis-moi.

Je veux savoir. Il ne quitte pas mes yeux, comme pour capter chaque sentiment qui va y passer quand il prononcera la fameuse phrase. Et celle-ci ne tarde pas à arriver.

- Peut-on aimer sans un bruit ?

Je reste surprise un instant. C'est le bon mot. Surprise, mais pas vexée, touchée mais pas blessée. Du personnel. C'est ce que voulais le professeur non ? On est en plein dedans. Sans m'en rendre compte, ma voix s'élève pour compléter la sienne.

- Comme... un amour sourd ?

Il hoche la tête et attend ma réaction. Je ne sais pas comment travailler ce sujet. Mais je ne déteste pas cette idée, bien au contraire. Alors je lui souris.

Et quand il me le rend, comprenant ce que j'en pense, devant la vision qu'il m'offre, je ne peux m'empêcher de rougir encore une fois.

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Un petit moment sympa entre Lyra et Lester. Plus de disputes entre eux pendant un moment, je vous promets x) On entre dans une première phase de rapprochement ;)

A vendredi pour la suite, 

Kiss :*


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